Virginie Martel et Jean-François Boutin
Université du Québec à Rimouski (Campus Lévis)
Résumé
La mobilisation de la bande dessinée historique comme matrice de savoirs en histoire permet d’incarner concrètement la rencontre de l’enseignement/apprentissage du décodage et de la compréhension multimodale, de la lecture pour apprendre et de la littératie critique. Qui plus est, elle est susceptible de contribuer au développement d’habiletés encore peu maîtrisées chez les élèves du primaire, dont les habiletés liées à la littératie multimodale et critique dans la perspective de l’apprentissage de l’histoire. Cet article présente les observations nées de la mise à l’essai au primaire (étude de cas) d’un dispositif didactique favorisant l’apprentissage par la lecture (Cartier, 2007) en histoire par le recours à la bande dessinée historique. Les premiers résultats obtenus permettent de consolider la viabilité et l’efficacité de ce dispositif sur la compétence en littératie médiatique multimodale (Lebrun et Lacelle, 2011), sur la compétence en littératie critique et sur l’acquisition de savoirs disciplinaires.
Lecture multimodale, lecture critique, bande dessinée, univers social, histoire
Après avoir abordé, dans une première étude, la problématique de la lecture en classe d’histoire (Martel et Cartier, sous presse; Martel, Cartier et Butler, 2014) sans toutefois s’attarder à sa composante multimodale, les auteurs de la recherche dont il est question dans le présent article comblent cette lacune en portant un regard spécifique sur la nécessité d’intégrer, en classe d’histoire, une approche résolument contemporaine de la lecture. Incontournables, considérant la réalité actuelle en matière de communication numérique, les dimensions multimodale et critique de la lecture devraient désormais être l’objet d’un enseignement/apprentissage systématique. Les lignes qui suivent éclaireront et, surtout, justifieront un tel postulat didactique.
À chaque jour, il est demandé aux élèves du primaire et du secondaire de lire afin d’acquérir des connaissances dans des domaines variés. Ce contexte spécifique de lecture réfère à l’apprentissage en lisant (APL) (Cartier, 2007). En classe d’histoire, cette lecture fonctionnelle est fondamentale, puisque la reconstitution du passé (et les connaissances qui en découlent) s’appuie très largement sur l’étude des traces écrites. Comme le souligne Moniot (1993), étudier l’histoire, c’est avant tout côtoyer des textes.
À l’école, les textes informatifs, que l’on retrouve dans des manuels scolaires eux-mêmes (sur) utilisés en classe d’histoire (Harniss, Dickson, Kinder & Hollenbeck, 2001; Spallanzani, Biron, Larose, Lebrun, Lenoir, Masselter, & Roy, 2001), constituent le principal support de lecture pour apprendre en lisant (Cartier, 2007). Malheureusement, ces sources écrites d’information, et tout particulièrement les textes didactiques à visée historique, présentent des caractéristiques qui rendent complexes leur compréhension et leur traitement par les élèves (Harniss et al., 2001; Laparra, 1991). Cela peut être attribué, du moins en partie, au fait qu’ils présentent de nombreux obstacles à lacompréhension : contenus abstraits, lexique spécialisé, structures organisationnelles diverses, phrases complexes, présence de nombreux connecteurs, etc. (Cartier, 2007; Ciardiello, 2002; Moniot, 1993).
Pour palier ces obstacles en lecture, il s’avère fondamental d’outiller les élèves afin, dans un premier temps, qu’ils les identifient, puis, par la suite, qu’ils se donnent des moyens concrets pour les franchir. Plusieurs pistes d’interventions pédagogiques sont suggérées à cet égard par nombre d’auteurs, dont certains ont récemment publié des chapitres ou des ouvrages portant sur la lecture en histoire (Martel, 2009; Nokes, 2013; Ogle, Klemp et McBride, 2007; Seixas et Morton, 2013; Wineburg, Martin et Monte-Sano, 2013) ou plus largement sur l’apprentissage en lisant (Cartier, 2007; Zwiers, 2008). Malgré cela, la recherche illustre le fait que les enseignants guident très peu les élèves dans les tâches de lecture qu’ils proposent (Macceca et Brummer, 2010; Spor et Scheinder, 1999).
Au Québec, Blaser (2007) a mis en lumière que les enseignants, notamment ceux du domaine de l’univers social (géographie ou histoire), se sentent très peu concernés, à vrai dire, par le savoir- lire. Aux yeux de plusieurs, il ne leur revient pas de soutenir les élèves en lecture. Au primaire, le constat est semblable, puisqu’un grand nombred’enseignants des deuxième et troisième cycles ne se préoccupent pas ou peu des stratégies nécessaires à la lecture pour apprendre (Martel et Lévesque, 2010). Ce constat, loin d’être banal, est préoccupant car « la lecture de textesd’histoire est si aventureuse qu’il faut réellement entraîner les élèves à les lire» (Moniot, 1993, p. 192).
La réalisation récente d’une étude préliminaire auprès de neuf classes de 6e année primaire nous a permis d’illustrer les apports réels de la mise en œuvre en histoire de pratiques pédagogiques favorables à l’apprentissage en lisant (Martel, Cartier et Butler, 2014; Martel et Cartier, sous presse). Ces pratiques se caractérisent par la planification de situations complexes d’APL et par leur soutien explicite au moyen, entre autres, de la modélisation de stratégies (Cartier, 2007). Pour les besoins de cette première étude, certaines classes ont été invitées à vivre une situation d’apprentissage par la lecture d’un manuel scolaire avec ou sans soutien à l’APL. D’autres classes ont vécu la même situation d’apprentissage (avec ou sans soutien), mais pour ces classes, la lecture du manuel a été remplacée par la lecture d’un corpus d’œuvres documentaires et littéraires : récits illustrés (albums), romans et bandes dessinées(BD). Tel que le soutiennent
McGowan, Érikson et Neufeld (1996), il a été ainsi été possible d’observer les apports mais aussi les limites de l’utilisation de la littérature de jeunesse en classe d’histoire.
Les résultats obtenus lors de cette première investigation (basée sur une étude de cas multiples intégrée dans un design pré-post), sont révélateurs. Ils illustrent que la mise en place de situations d’APL pertinentes et complexes, de même que le soutien à l’APL en histoire permettent aux élèves d’augmenter leur sentiment de compétence en lecture et leur motivation à lire pour apprendre en histoire (Martel, Cartier et Butler, 2014; Martel et Cartier, sous presse). Cettehausse est particulièrement sensible dans les classes où les élèves ont été soutenus dans la lecture du manuel proposé (Martel, Cartier et Butler, 2014). Bien que présente, cette amélioration de la compétence et de la motivation en lecture est toutefois moins importante dans les classes ayant travaillé le corpus d’œuvres littéraires et documentaires, notamment parce que la lecture de ce corpus a suscité de nouveaux obstacles à l’apprentissage en lisant.
En fait, en plus de peiner à trouver les informations recherchées dans les différentes œuvres littéraires et documentaires proposées, les élèves ont eu de la difficulté des élèves à utiliser l’apport informationnel – fondamental – des éléments visuels (illustrations, photographies, figures, etc.). De manière générale, les élèves, mais aussi les enseignants, semblent donc consacrer leur énergie à décoder et à comprendre le seul et unique texte. Conséquemment, ils délaissent le traitement des images, même lorsque celles-ci sont dominantes (par exemple dans un album littéraire).Tout se passe comme s’ils ne saisissaient pas la complémentarité informative des images (Martel et Cartier, sous presse). D’autres recherches ont illustré cette situation, notamment à l’occasion de la lecture de bandes dessinées, où l’image peine encore à prendre sa place comme support d’apprentissage. Mak (2006, p.175), à cet égard, souligne que, « la plus grande difficulté (…) à utiliser la BD (…) réside dans le fait même qu’elle est en apparence un support bien connu des élèves qui n’en maîtrisent les codes qu’en partie seulement».
Toujours dans cette même première étude, nous avons observé que l’apport des œuvres de fiction (les romans, les BD et les albums) à la compréhension d’un thème d’histoire et à l’acquisition de connaissances semble peu reconnu et/ou mal évalué (Martel, Cartier et Butler, 2014; Martel et Cartier, sous presse). Certains élèves, voire certainsenseignants, semblent considérer ainsi la
lecture de ces œuvres (notamment la lecture des BD) comme une pure perte de temps ou, du moins, un temps de divertissement qui éloigne de l’objectif d’apprentissage. Comme l’expriment certains de nos sujets, il semble plus facile et efficace « d’aller sur Internet ». À propos de l’utilisation plus spécifique de la BD, Mak (2006, p. 175) fait une observation analogue en soulignant que la puissante familiarité de cette dernière « incite les jeunes à n’y voir de prime abord qu’une forme de récréation ».
De plus, la très grande majorité des élèves qui ont été invités à apprendre par la lecture d’un corpus d’œuvres littéraires et documentaires n’ont pas semblé saisir que la lecture d’œuvres de fiction, bien qu’elle puisse être utile à la compréhension et à l’acquisition de connaissances, nécessite une posture critique particulière. En effet, lire une œuvre de fiction historique interpelle directement les notions de vraisemblance et de fiction (Bordage, 2008) qui permettent de départager le vrai du faux. À notre étonnement, les élèves et même les enseignants nous sont apparus bien peu sensibles à cet aspect (Martel et Cartier, sous presse). Comme en témoigne un élève lors d’une des entrevues réalisées: « si c’est dans un livre, c’est que c’est vrai ». Conséquemment, ce qui relève, en histoire, de la littératie critique (Lévesque, 2011), notamment ce qui permet de juger la crédibilité des sources consultées, n’a été considéré ici que de façon minimale par les sujets.
À la lumière des constats précédents, force fut d’admettre qu’une seconde investigation s’imposait. Cette dernière devrait avoir pour objectif explicite de mettre à l’essai en classe d’histoire (toujours au primaire) un nouveau dispositif didactique (Harvey et Loiselle, 2009; Loiselle 2001) favorisant en simultanée l’apprentissage par la lecture (Cartier, 2007) et la littératie multimodale et critique (Buckingham, 2003; Comber, 2001; Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012; Lee, 2005; McLaughlin et Devood, 2004).
Pour ce faire, nous avons choisi de mobiliser, au cœur du dispositif, la BD, considérant 1) son caractère intrinsèquement multimodal (Boutin, 2012b); 2) la variété de son corpus d’œuvres de fiction historique (Ratier, 2014); 3) son adéquation aux principes de la littératie critique (Bordage, 2008; Guay et Charrette, 2009; Martel, 2011;2012). Le but visé par cette seconde
étude consistait donc à mettre en lumière les possibilités d’apprentissage sous-tendues par le déploiement d’un tel dispositif en classe d’histoire à l’égard des compétences multimodales et critiques des élèves. De même, nous espérions explorer davantage le rapport des élèves à la complémentarité texte-image.
La tradition scolaire considère depuis longtemps, déjà, la lecture sous son seul visage textuel, posture que l’on peut d’ailleurs qualifier de regard monomodal (Boutin, 2012b). Ainsi y domine l’écrit comme seul mode d’appréhension crédible du sens. Toutefois, la multiplication sans frein des supports de communication, elle-même tributaire del’éclatement des modes sémiotiques dû à la révolution numérique, « a changé les modes de recherche documentaire » (Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012, p. 9) et, surtout, nous oblige aujourd’hui à reconsidérer en profondeur l’acte de lire. Les « lettrés » de demain ne seront sans doute pas ceux d’hier, car communiquer aujourd’hui, c’est comprendre et produire des messages constitués de plusieurs modes (celui de l’écrit, certes, mais aussi ceux de l’image, du son et de la cinétique) présentés sur des supports de moins en moins imprimés – traditionnels – et de plus en plus numériques (Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012).
Les messages contemporains sont tels qu’un lecteur, pour parvenir à bien les décoder, les comprendre et les intégrer, doit désormais prolonger son horizon de sens au-delà du seul texte, convoquant ainsi les autres modes sémiotiques,dont les images (Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012; Nokes, 2013). Ce ne sont plus seulement les stratégies de lecture conventionnelles qui lui sont alors nécessaires, mais bel et bien celles lui permettant d’accéder à tous les modes et surtout à leur indissociable combinatoire sémantique, la multimodalité. Entre autres, le lecteur d’aujourd’hui doit être capable :
[…] de décoder, comprendre et d’évaluer une multiplicité d’objets médiatiques. Les grilles de lecture et d’interprétation sont bien entendu multiples. Elles peuvent porter sur ce dont ces objets traitent, sur les systèmes de représentation qu’ils utilisent, sur leur forme (lecture informationnelle), sur la technique sous-tendant leurproduction (lecture technique), sur leur
contexte de production institutionnel, sur les intentions de leurs auteurs, sur leurs effets (lecture sociale), etc.
Fastrez et De Smedt, 2012, p.52
Bien que la littératie contemporaine peine à investir l’école, elle est graduellement prise en compte dans certaines disciplines, dont celles de l’histoire et l’éducation à la citoyenneté (Arfeuillère, 2010; Martin et Wineburg, 2008; Nokes, 2013). Il est vrai que l’usage de la multimodalité n’est surtout pas inédit en classe d’histoire; son caractère demeure par contre fondamentalement implicite et conséquemment, les stratégies qu’il importe de déployer pour s’ouvrir à la portée de sens de cette multimodalité restent bien souvent dans l’ombre.
Nombre de documents dits « documents-sources », mobilisés depuis toujours par les enseignants d’histoire, sont d’essence multimodale. C’est-à-dire qu’ils sont constitués d’au moins deux modes sémiotiques. Les deux modesdominants en histoire sont le mode textuel et le mode visuel. Dans la discipline historique, le mode visuel convoque entre autres ce que l’on présente comme étant des documents iconographiques (illustrations, cartes, affiches, etc.).(MÉLS, 2001). Très régulièrement, notamment dans les manuels d’histoire, ces deux modes sont sollicités afin de permettre aux élèves de comprendre le passé.
Le concept de littératie critique trouve son origine dans la foulée des travaux de recherche effectués à partir des années 1990 par les spécialistes anglo-saxons de l’éducation aux médias. Inspirée notamment par les postulats de la pédagogie critique de Paulo Freire, la littératie critique nécessite, de la part du récepteur, qu’il adopte une perspective foncièrement critique à l’égard de l’information qu’on lui transmet (Hagood, 2002). Il doit analyser cette dernière afin d’y déceler, au-delà de l’explicite linguistique, un plausible implicite dont la nature peut varier en fonction des viséesréelles de l’émetteur (Buckingham, 2003). L’adoption, par ce récepteur, d’une
constante posture critique en situation d’interprétation des différents messages constitue ainsi la principale prémisse de la littératie critique (Hagood, 2002).
Dans le cas spécifique de la discipline historique, la littératie critique réfère à un mode de lecture et de compréhension du passé intimement lié à ce qu’on appelle la pensée historique. Cette pensée historique se traduit par une attitude (curiosité, questionnements multiples et ouverture d’esprit), une méthode (qui s’apparente à une démarche d’enquête) et un langage lié de près à la littératie critique et à la critique des sources (Lévesque, 2011).
Intrinsèquement, la BD s’articule toujours à partir de deux modes sémiotiques (Kress, 2010) spécifiques: le texte et l’image (Boutin, 2012a et 2012b). En BD, le texte et l’illustration constituent un tout indissociable, d’où son caractère foncièrement multimodal. Récit tout aussi foncièrement séquentiel – et donc elliptique – (Boutin, 2012b), la BD propose une trame complémentaire dans laquelle le discours et sa gestuelle mais aussi l’action et sa description écrite sont donnés à voir simultanément (Amiel, 1993). « Par rapport à une illustration unique, la bande dessinée présente l’intérêt de livrer tout un scénario, de raconter une histoire à travers une suite d’images » (Thiébaut, 2002, p. 55).
Pour les élèves d’aujourd’hui, dont l’engagement réel dans l’univers de la multimodalité est sans cesse croissant (Buckingham, 2003; Kress, 2010; Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012; Stafford, 2011), la possibilité pour la BD historique de « faire voir » l’histoire est un atout majeur (Thiébaut, 2002). À cet atout s’ajoute également le caractère vivant du récit. « Les élèves comprennent que la période dont on parle a eu un présent. Cette relation du passé au présent est déterminante pour qui veut éveiller la conscience historique de l’enfant » (Thiébaut, 2002, p. 55).
La BD dite historique propose un discours ou, à tout le moins, une représentation de l’Histoire. Le terme spécifique de BD historique évoque, selon les auteurs, plusieurs réalités. Dans certaines BD, l’Histoire peut en effet se présentercomme un accessoire narratif alors que dans d’autres cas, elle est vraiment constitutive de la narration (Ory, 1993). Poussée à son plus haut degré, la BD historique présente des préoccupations presque scientifiques et elle devient, de fait, quasi historienne (Ory, 1993). La BD historique convoque conséquemment plusieurs catégories; chacune présente en regard de la vraisemblance historique des degrés variables.
En tant que multitexte (Boutin, 2012b), la BD historique, qui cherche à reconstituer une époque donnée par une certaine fiction, peut être considérée comme un véhicule de savoirs disciplinaires (Christensen, 2006; Mak, 2006; Martineau, 2010; Mitterrand, 1993). Devant l’ampleur de la production de BD qui traitent de sujets d’histoire (Ratier, 2014), les didacticiens et les enseignants sont de plus en plus préoccupés par son utilisation. On s’intéresse notamment aux apports de ce médium dans la construction des connaissances historiques et dans le développement du nécessaire regard critique qui doit y être associé (Bordage, 2008; Guay et Charrette, 2009, Martineau, 2010).
En effet, une des limites de l’utilisation de la BD en classe d’histoire tient à la part, plus ou moins grande, de la fiction et conséquemment, au rapport qu’elle entretient avec les notions de vraisemblance et de vérité historique. Cette limite est par contre aussi un atout puisqu’elle offre un terrain très riche pour le développement de la littératie critique.Comme le soulignent plusieurs auteurs, la lecture d’une BD en classe d’histoire convoque invariablement la lecture critique et la confrontation à d’autres sources documentaires (Bordage, 2008; Charette et Guay, 2010; Martineau, 2010; Pierre, 1993).
Pour Charette et Guay (2009), la lecture d’une BD en histoire doit s’organiser en quatre temps :
1) retracer les principaux référents nécessaires à sa construction; 2) juger de la pertinence des propos dans une perspective historique; 3) apprécier la qualité de la représentation de l’objet historique; 4) mettre en évidence leséléments tirés de la fiction. Pour Bordage (2008), il convient également que les élèves mettent en relation les vignettes de la bande dessinée et les différentes sources, qu’elles soient premières et secondes, iconographiques ou textuelles.Cette posture de
lecture, peu importe les tâches de réflexion qui y sont associées, convoque conséquemment l’effort de distanciation (Thiébaut, 2002) propre à littératie critique en histoire (Lévesque, 2011).
La réalisation de la présente étude a reposé sur le déploiement, dans une classe du primaire, d’un dispositif didactique (Harvey et Loiselle, 2009; Loiselle 2001) favorisant l’apprentissage par la lecture (Cartier, 2007) et la littératie multimodale et critique à partir d’un corpus de BD historiques. Dans les lignes qui suivent sont présentés respectivement le dispositif didactique élaboré et expérimenté, les participants, le déroulement de l’expérimentation, les outils de recherche ainsi que les méthodes d’analyse.
Afin d’assurer le passage de la théorie à la pratique, un dispositif didactique a été élaboré dans le cadre de cette étude; huit ateliers (ou séances de travail) composent ce dispositif. Quatre ateliers concernent spécifiquement l’enseignement-apprentissage de certaines des compétences nécessaires à la lecture multimodale de BD. Les quatre autres ateliers visent l’apprentissage en lisant et la littératie critique en contexte d’acquisition de savoirs historiques par le recours à la BD. L’enseignement des différentes stratégies ciblées repose sur les différentes étapes de l’enseignement explicite (présentation de la stratégie, modélisation, pratique guidée, pratique autonome et transfert) dont l’efficacité a été maintes fois démontrée (Gauthier, Bissonnette, Richard et Castonguay, 2013).
Ces ateliers ont été élaborés dans le respect des programmes de formation qui prévalent actuellement dans les écoles québécoises. Conséquemment, plusieurs des stratégies de lecture qui y sont travaillées portant sur la lecture multimodale sont inscrites au programme d’enseignement de la langue; elles ont par contre été abordées dans la perspective de la multimodalité. De même, le travail réflexif proposé en histoire touche à des sociétés inscrites au programme du domaine de l’univers social au primaire et respecte les différentes étapes que convoquent lerecours à la
démarche de recherche et de traitement de l’information en géographie et en histoire (MELS, 2001).
Bien qu’il soit impossible de présenter en détails tout le dispositif et les différents ateliers qui le composent, le tableau1 en propose les grandes lignes. Ce dernier identifie également le corpus de BD qui a été utilisé dans le cadre de cetteétude. Chacune des BD a été sélectionnée au regard des critères suivants : contenu textuel et visuel adapté aux élèves ciblés; qualité du contenu historique; adéquation avec les objectifs poursuivis (par ex. illustrer le mode sonore en BD, illustrer la complémentarité texte-image, illustrer la présence d’anachronismes et leur rôle dans les BD historiques à caractère humoristique, etc.).
Étapes | Descriptif pédagogique | Bandes dessinées exploitées | |
Rencontre initiale | Présentation du projetPassation du questionnaire permettant de dresser le portrait initial des élèvesPrésentation du corpus de BD rendu disponible pour la lecture libre (prêts à la maison autorisés) et la lecture accompagnée lors de la réalisation des ateliers | Voir Bibliographie du corpus de BD | |
La lecture multimodale | |||
Atelier 1Les codes et langage de la BD | Acquisition du langage propre à la BD (planche, bande, case, bulle, récitatif, etc.).Reconnaissance et identification des modes sémantiques suivants : textuel,visuel, gestuel et sonore | Extraits puisés dans tout le corpus en fonction des objectifs ciblés | |
Atelier 2La complémentarité texte-image en BD | Réinvestissement des notions travaillées à l’atelier 1Utilisation conjointe (fusion) des codes textuels et visuels dans l’élaboration du sens | Modélisation et pratique guidée Extraits puisés dans tout le corpus en fonction des objectifsciblés | |
Atelier 3La prédiction et l’inférence en BD | Prédiction à partir de la page couverturePrédiction planche par plancheInférence à partir d’indices visuels Inférence à partir d’indices textuelsInférence à partir d’indices visuels et | Modélisation et pratique guidée · Extraits puisés danstout le corpus en | |
textuels | fonction des objectifsciblés | |
Atelier 4L’idée principale et le résumé | Distinction des idées principales des éléments de sens tertiaires· Mobilisation de l’image et du texte pour résumer l’essentiel | Modélisation et pratique guidée Extraits puisés dans tout le corpus en fonction des objectifsciblés |
L’apprentissage en lisant en histoire et la lecture critique de BD | ||
Atelier 5 L’apprentissage en lisant par la BD | Travail initial sur l’intention de lecture (deux textes, deux intentions)Présentation des stratégies utiles à l’APL(par exemple : utiliser le tableau SVA, résumer, etc. | Modélisation et apprentissage guidée· Radisson (tome 1)Laflèche (tomes 1 et 2) |
Discussion quant à l’apport de l’imagedans le contexte de l’APLPrésentation de la fiche d’enquête : arrêt sur les connaissances antérieures du thème historique à l’étude· Première lecture / premières observations : tâche à réaliser lors despériodes de lecture (fiche d’enquête, section I) | Apprentissage autonomeLe corpus d’extraits retenus pour l’étude de la société québécoise vers 1905 | |
Atelier 6La lecture critique : l’apprentissage du doute | · Présentation de la méthode historique (utilisation du site Allo Prof)Modélisation d’une situation de littératie critique (en utilisant des œuvres documentaires de jeunesse présentant del’information erronées ou stéréotypées)Discussion et présentation des types de BD historiques disponibles et de leur variabilité quant à leur « qualités informatives » | Modélisation et apprentissage guidée· Radisson (tome 1)Laflèche (tomes 1 et 2) Apprentissage autonomeLe corpus d’extraits retenus pour l’étude de la société québécoise vers 1905 |
Exercices de jugement critique (parhypothèses) à partir de la page couverture de Radisson etLaflèche (étude conjointe du texte et de l’image) / Modélisation quant à la capacité à établir le vrai et le faux dans une BD. Identification des doutes | ||
Activité de transfert à partir du corpusQuébec 1905 : étude des pages couvertures, identification des hypothèses de départ, analyses approfondies des planches ciblées, identification du vrai, du faux et des doutes. Réalisation dessections ciblées dans la fiche d’enquête lors de la prochaine période d’univers social) |
Atelier 7La lecture critique : la confrontation à d’autres sources | Reprise de la modélisation à partir de Radissonet Laflèche.Rappel des hypothèses posées quant à valeur de la BD, au vrai et au faux; retour sur les doutes. | Modélisation et apprentissage guidée· Radisson (tome 1)Laflèche (tomes 1 et 2) |
Confrontation des doutes par larecherche dans des sources complémentaires. Un document informatif traitant des points abordés dans les BD a été créé pour les besoins de l’étude. Ce document contient des extraits de manuels, des extrais de sites Internet, des photographies ou illustrations, etc. Le document a été créé de manière à ce que la lecture multimodale soit convoquée. | Apprentissage autonomeLe corpus d’extraits retenus pour l’étude de la société québécoise vers 1905 | |
Modélisation par l’enseignant desétapes permettant de réaliser une recherche dans des sources complémentaires grâce à une lecture critique et multimodale. | ||
Confirmation ou infirmation deshypothèses posées. | ||
Activité de transfert à partir du corpus Québec 1905. Réalisation des sections ciblées dans la fiche d’enquête lors de la prochaine période d’univers social) | ||
Atelier 8 | Retour sur l’ensemble de la démarche | Modélisation et apprentissage guidée· Radisson (tome 1)Laflèche (tomes 1 et 2) Apprentissage autonomeLe corpus d’extraits retenus pour l’étude de la société québécoise vers 1905 |
La lecture critique : | nécessaire à une lecture multimodale et critique | |
le jugement final | en histoire | |
Modélisation du jugement final par lebiais de l’étude de Radisson et | ||
Laflèche. Retour sur les hypothèses de | ||
départ. Évaluation de la qualité | ||
documentaire de chacune des BD. | ||
Activité de transfert à partir du corpusQuébec 1905 | ||
Partage des conclusions en grandgroupe | ||
Retour sur les connaissancesantérieures quant au thème à l’étude et réflexion quant aux connaissances | ||
acquises | ||
Rencontre finale | Passation du questionnaire-bilanRéalisation de l’entrevue de groupe |
La sélection des 13 sujets (12 élèves/1 enseignante) a été réalisée par le biais de la méthode de choix raisonnés (Beaud, 1984). Étant donné le caractère exploratoire de cette étude et notre volonté d’ouvrir cette dernière à la réalitéparfois complexe des classes d’aujourd’hui, nous avons sélectionné une enseignante dans un milieu éducatif jugé difficile. L’enseignante retenue (Èva1) travaille dans une école en milieu rural fortement défavorisé (indice 10); elle a la responsabilité d’une classe multi âge où se côtoient des élèves de quatrième, cinquième et sixième année. Pour lesbesoin de l’étude, elle a accepté de nous offrir du temps de classe. Cinq ateliers de travail d’au moins une heure ont été dirigés par les chercheurs; les trois autres ont été animés par l’enseignante. Parallèlement, l’enseignante a aussi accepté de s’engager de manière plus personnelle dans l’étude en prenant la responsabilité de soutenir en classe la lecture de BD et de consigner ses observations à l’égard des thèmes de l’étude dans un journal de recherche.
Une description des sujets de la recherche est présentée dans le tableau 2. Notons que les élèves d’Éva présentent desdifficultés scolaires nombreuses mais que le ratio enseignant-élèves favorise un soutien plus personnalisé.
Enseignante | Élèves | ||||||
Nom | Expérience | Nombre | Genres | Age moyen(ans) | Niveau scolaire | Nombre d’élèvestouchés par des difficultés en lecture | |
Garçons | Filles | ||||||
Éva | 8 ans | 12 | 9 | 3 | 11 | 4 | 5 |
Habitudes de lecture de BDL’enseignante est une lectrice occasionnelle de BD (une BD par mois)Deux élèves sont des lecteurs assidus (une BD par semaine); sept sont des lecteurs occasionnels;trois autres sont des lecteurs très occasionnels (une BD par année) |
1 Afin de conserver l’anonymat des participants, le nom est fictif
L’étude s’est déroulée entre février et avril 2013. Une première rencontre avec le groupe-classe a donné lieu à la passation d’un questionnaire initial. Par la suite, la réalisation des ateliers en classe (au nombre de huit) a permis l’expérimentation réelle du dispositif didactique. Après cette expérimentation, des rencontres focalisées ont été réalisées avec le groupe-classe et l’enseignante; ces rencontres portaient sur l’appréciation générale du projet et ses apports. Les élèves ont enfin été invités à compléter un questionnaire bilan individuel.
Avant le déploiement des ateliers et activités portant sur la lecture multimodale et critique en histoire par le biais de la BD, nous avons jugé essentiel de dresser le portrait initial des élèves. Pour ce faire, un questionnaire élaboré pour les besoins de cette étude a été utilisé. Ce questionnaire initial comporte quatre sections. Une première porte sur le rapport des élèves à l’école. Sur une échelle de Likert (Vallerand, Guay et Blanchard, 2000, p. 253) à cinq niveaux (j’aime : énormément; beaucoup; un peu; très peu; pas du tout), les élèves ont été invités à qualifier leur appréciation de l’école, de la lecture et de l’univers social2. Dans une deuxième section, les élèves ont été invités à qualifier leur rapport à la BD en ce qui a trait à son appréciation générale, aux habitudes de lecture qui y sont associées et à l’intérêt accordé au texte, aux images ou à la complémentarité texte-images dans ce type de lecture. La troisième section de ce questionnaire concerne le jugement critique et la littératie critique. Dans cette section, les élèves ont été invités à positionner différents supports d’information (par ex. la parole de l’enseignant, le témoin d’un événement, le manuel scolaire, un site Internet, un journal, un roman, une BD) en regard de leur fiabilité comme source d’apprentissage. Pour ce faire, ils devaient sur une cercle à trois niveaux (très près de la vérité- très fiable; assez près de la vérité- assez fiable; loin de la vérité- très peu fiable) positionner les supports mentionnés (Ducolomb, 2003). Enfin, la quatrième et dernière section porte sur l’état des connaissances historiques des élèves quant aux thèmes à l’étude. Dans cette section, les élèves devaient détailler, à l’aide de mots-clés ou de courtes phrases, l’état de leurs connaissances quant aux thèmes historiques retenus pour cette étude : la Nouvelle-France et la société québécoise vers 1905.
2 L’univers social est le vocable actuel pour désigner, au Québec, l’enseignement-apprentissage des disciplines suivantes : géographie, histoire et éducation à la citoyenneté.
Afin de documenter le plus possible l’expérimentation tel que réalisée et vécue (huit ateliers), différents outils de cueillette de données ont été retenus et utilisés au moment même de l’expérimentation du dispositif. Certains des ateliers ont été filmés et leur verbatim a été analysé, des notes d’observation ont été consignées à chacun des ateliers par un chercheur et un journal de recherche a été rédigé; ce journal propose un retour réflexif des deux chercheurs après chacune des séances de travail. De même, les différentes traces laissées par les activités écrites réalisées par les élèves ont été conservées. Enfin, l’enseignante a été invitée à consigner ses observations quant aux composantes du projet (BD, lecture multimodale et lecture critique en histoire) lors de la réalisation des ateliers dont elle avait la responsabilité ou hors atelier, c’est-à-dire dans le vécu habituel de classe.
Les rencontres focalisées réalisées auprès des élèves mais aussi de l’enseignante ont permis de mettre en lumière les composantes appréciées du dispositif proposé, ses apports à l’égard de la compétence en littératie multimodale et critique mais aussi les limites et obstacles rencontrés. Encore une fois, des verbatims de ces rencontres ont été produits.
En fin de projet, les élèves ont été invités à compléter un second questionnaire. Ce
« questionnaire bilan » porte sur l’appréciation individuelle du projet et de ses composantes, l’appréciation du corpus de BD, l’identification des obstacles rencontrés à l’égard entre autres de la lecture du texte des BD mais aussi des images et le sentiment de compétence en lecture. De même, il reprend intégralement les sections 3 et 4 du questionnaire ayant permis de dresser le portrait initial des élèves. Conséquemment, à la fin de l’étude, les élèves ontde nouveau évalué la fiabilité de différents supports d’informations (afin entre autres d’observer une évolution quant à leur jugement critique). De même, ils ont été invités à faire état de leurs connaissances historiques issues des thèmes étudiés.
Les nombreuses données collectées ont été analysées afin de documenter le plus précisément possible l’étude de cas et de mettre en lumière les premières observations susceptibles de nous guider pour la suite de nos recherches. Afin de documenter l’expérimentation du dispositif déployé en classe et son apport sur l’enseignement-apprentissage de la lecture multimodale et critique, les données tirées des traces (journaux de recherche des chercheurs et de l’enseignante, verbatims des ateliers enregistrés, verbatims des entretiens réalisés auprès des élèves et de l’enseignante, tâches écrites réalisées par les élèves et données de certaines sections des questionnaire initiaux et bilans créés pour les besoins de l’étude) ont été consignées et elles ont fait l’objet d’une analyse thématique de contenu (Miles et Huberman, 2003). De plus, certaines données issues des questionnaires ( données liées à des échelles d’appréciation), ont fait l’objet d’analyses statistiques simples. Pour ce faire, le logiciel SPSS a été utilisé.
Les résultats de cette étude demeurent exploratoires (de par la nature même de la recherche entreprise) et liés à l’étude de cas réalisée. Ils permettent tout de même de mettre en lumière certains constats. Ces derniers enrichissent notre connaissance, encore partielle, des défis mais aussi des apports de l’enseignement-apprentissage de la lecture multimodale et critique dans le contexte de la classe d’histoire.
L’appréciation par les élèves du dispositif didactique proposé est indéniable; 75% (9/12) de ces derniers l’ont énormément apprécié contre 25% (3/12) qui l’ont modérément apprécié. Aucun élève n’indique dans le questionnaire avoir peu ou pas du tout apprécié le dispositif.
Les élèves ayant modérément apprécié le dispositif précisent que le travail critique exigé pour la lecture des BD à caractère historique « est moins le fun » « et plus difficile » (extraits de la rencontre focalisée/ Sabrina et Luc). Au contraire, la lecture (multimodale) des BD, sans le souci de juger le contenu historique de ces dernières, estperçue comme une tâche « super »,
« motivante », « différente » et « vraiment intéressante » (extraits du questionnaire-bilan). De
manière générale, tous les élèves de la classe ont apprécié (à des degrés variables, par contre) le projet; cette appréciation par les élèves du dispositif, à l’avis de l’enseignante (rencontre focalisée), semble avoir augmenté leur motivation à s’engager dans les apprentissages et les tâches visés.
De toutes les composantes du dispositif, c’est le recours à la BD qui parait avoir suscité le plus l’intérêt et l’engagement. Conséquemment, c’est davantage le médium que les objets d’apprentissage (lecture multimodale et lecture critique en histoire) qui parait expliquer l’engagement. Comme le souligne l’enseignante : « Ce médium a favorisé leur intérêt et leur participation tout au long du projet » (extrait du journal de recherche); « Les élèves attendaient avec impatience les ateliers et ils ont essayé d’être à la hauteur; ils étaient vraiment motivés (extrait de la rencontre focalisée).
L’idée de recourir, en classe (d’histoire), à la BD induit, il est vrai, un caractère inédit qui semble inciter les élèves à un engagement plus grand (Martel et Boutin, 2014). Comme le souligne un élève : « c’est le fun parce que je peux travailler à l’école avec des livres que d’habitude je lis pour le plaisir. Par contre, là, c’est pour apprendre des choses» (rencontre focalisée/Joey). Plus motivés, l’enseignante remarque même que les élèves s’entraident davantage pour surmonter les obstacles de compréhension; ils essaient ensemble d’apprendre à bien lire une BD (journal de recherche). Particulièrement, la recherche d’indices (surtout les indices visuels) permettant de donner sens au récit stimule l’intérêt; tous les élèves sans exception y participent (observation de terrain). De même, le plaisir et la volonté de lire sont apparents, ce qui illustre l’intérêt pour le corpus proposé. À maintes reprises, il est ainsi nécessaire dans les ateliers de demander aux élèves d’attendre avant de lire la prochaine planche, le travail sur certaines stratégies (ex. l’anticipation) exigeant ce temps d’attente.
Au moment de leur prise en charge par les chercheurs, les élèves n’avaient reçu aucune formation spécifique sur la lecture multimodale ou la lecture critique nécessaire à la discipline historique. Par contre, comme la lecture est une composante fondamentale de la vie de classe de l’enseignante (rencontre focalisée), les élèves avaient réalisé plusieurs projets et activités en lien avec cette composante essentielle de l’éducation primaire. Le recours à la littérature dejeunesse
étant valorisé dans la classe, les élèves avaient, depuis le début de l’année scolaire, le loisir (ou l’obligation, selon le moment) de lire à la fois des albums narratifs ou documentaires, des romans et quelques BD. En tout temps, cesderniers pouvaient être soutenus dans leur tâche de lecture par l’enseignante qui accorde une grande importance à l’enseignement et l’utilisation explicite des stratégies de lecture. En quelques occasions, l’apport des illustrations pour la compréhension des œuvres de fiction ou documentaires a été souligné en cours d’année par l’enseignante mais, comme le précise cette dernière: « sans un réel souci d’en faire une stratégie fondamentale puisque ce n’est pas vraiment au programme » (rencontre focalisée).
L’expérience des élèves en ce qui a trait au médium BD est de même nature. Au moment de la prise en charge par les chercheurs, les élèves (sauf ceux de 6e année) n’avaient reçu aucune formation spécifique autour de la BD, de ses codes, de son langage et des stratégies de lecture qu’elle convoque. Conséquemment, tous les élèves (même les élèves de 6e année introduits rapidement aux composantes de la BD au cours de l’année scolaire précédente) méconnaissaient ce médium en tant qu’outil d’apprentissage. Pourtant, 75% (9/12) d’entre eux affirment dans le questionnaire initial qu’ils sont des lecteurs assidus ou du moins occasionnels de BD.
Suite à l’enseignement des stratégies de lecture ciblées pour cette étude (voir tableau 2) par le biais de la BD, le sentiment de compétence en lecture des élèves semble plus grand; 66% (8/12) de ces derniers se sentent en effet plus compétents en lecture en fin de projet, 16% (2/12) qualifient leur compétence en lecture de la même manière en début et en fin de projet et 16% (2/12) n’arrivent pas à se prononcer. Comme le soulignent bien les élèves : « j’ai l’impression que je sais maintenant mieux lire une BD et je crois que je pourrais mieux lire aussi d’autres livres avecdu texte et des images » (rencontre focalisée/Éric); « je sais maintenant mieux lire à la manière d’aujourd’hui » (rencontre focalisée/Dave); «c’est dur de faire des liens entre les images et le texte mais ça nous aide et maintenant je suis meilleure pour faire ça » (rencontre focalisée/Émilie).
Il en va de même pour les connaissances des élèves en ce qui a trait au langage et aux codes de la BD, qui s’apparentent au langage et aux codes nécessaires à la lecture multimodal. Formés à ceux-ci, les élèves parviennenttrès rapidement, dès le deuxième atelier (journal de recherche des
chercheurs), à utiliser la terminologie appropriée dès lors qu’ils prennent la parole en classe. Grâce au projet, les élèves « ont développé une connaissance du vocabulaire lié à la BD et ce vocabulaire leur sert à se repérer dans le texte à partir de données simples » (journal de recherche de l’enseignante).
Bien qu’un travail constant ait été réalisé sur la complémentarité fondamentale du texte et de l’image en lecture multimodale d’une BD, sa prise en compte demeure difficile. Dans le cadre de cette expérimentation, nous avons davantage observé un travail spontané sur l’un des deux modes, au détriment de l’autre. Tout se passe comme si les élèves ne pouvaient traiter qu’un mode à la fois. De là à parler d’une posture de traitement de l’information monomodale, il n’y a qu’un pas…
Sans surprise en ce qui a trait à la lecture de BD, ce sont les illustrations qui intéressent plus spontanément les élèves et c’est à partir d’elles que, par exemple, ils réalisent des inférences (journal de recherche de l’enseignante). Dès le premier atelier (journal de recherche des chercheurs), ces derniers s’illustrent par leur habileté à distinguer rapidement les différents codes visuels. Accompagnés au départ par les chercheurs, ils parviennent à trouver dans les BD proposées de nombreux exemples où les composantes de l’illustration convoquent le mode visuel (ex. la nuit en Nouvelle-France représentée par une case noire), le mode sonore (ex. les notes de musique pendant une cérémonie animiste), le mode gestuel (ex. la rougeur du visage d’un Amérindien en colère) et le mode cinétique (ex. les lignes derrière une voiture en mouvement). Les extraits suivants du discours tenu par les élèves illustrent cette capacité à reconnaitre dans la BD la portée de l’illustration : « On voit des lignes au tour, des ronds, ça veut dire que ça tourne » (Joey); « Des fois, les chars quand ils roulent vite, ils mettent des lignes en arrière. C’est du mouvement »(Tommy); « Les cheveux aussi ils bougent, il y a des lignes (Marie-ève);
« Et puis là, ils écoutent de la musique, ça fait comme du son. Les notes, c’est du son » (Joanie).
Dans le cas plus spécifique de la lecture de BD à caractère historique, les élèves sont encore plus sensibles à la portéede l’image, du moins quand ils sont invités à lire librement la BD sans tâches écrites spécifiques. Comme le souligne avec justesse Thiébault (2002), le recours à la BD en histoire offre en effet aux élèves une évocation imagée etpartagée par tous du passé. Comme
leurs connaissances de ce dernier restent très minces, ces représentations par le biais de l’illustration permettent de mieux se représenter la vie des hommes et des femmes d’autrefois, ainsi que les lieux évoqués. Un élève, à cet égard, s’exprime ainsi au cours d’un atelier (verbatim d’atelier) : « Ici, l’image nous explique toute la maison longue, on voit tout : la maison, les lits, les outils utilisés, les peaux d’animaux… tout est là » (Anthony). L’enseignante observe également cet intérêt des élèves pour l’image dans les BD historiques en notant dans le journal de recherche : « Les élèves observent surtout l’image pour trouver des éléments historiques; ils analysent les vêtements et objetsdessinés, ils étudient le paysage et l’architecture représentés… ». L’impact de l’image parait tellement fort pour les élèves que la moitié de ces derniers indiquent dans le questionnaire initial qu’ils considèrent peu le texte dans une BD. « On peut comprendre la BD sans lire le texte » (Joey). En fin de projet, ces mêmes élèves se disent par contre davantage attentifs à la complémentarité texte/images.
Afin de confronter les élèves à l’égard de cette complémentarité texte/image, nous avons proposé, au cours de l’expérimentation, la lecture d’une planche où le texte dans les bulles a été caché. Voici un extrait de l’échange qui s’en est suivi :
L’intérêt pour l’image et cette prise en compte progressive de la complémentarité texte/image par les élèves diminue, par contre, dès lors que l’on propose un contexte plus formel d’apprentissage, avec, par exemple, des questions précises portant sur le contenu historique de la BD. C’est sans surprise le texte qui parait aux yeux des élèves porteur des réponses attendues et, spontanément, ces derniers cherchent dans les récitatifs ou les bulles textuelles des dates, des noms de personnages ou de lieux, la description d’événements, etc. (journal de recherche). Dans ce contexted’apparence plus « scolaire », les images semblent être perçues de fait comme utiles
« mais surtout plus décoratives » (Joanie) et le rapport au texte redevient dominant. Pour s’expliquer cette situation,l’enseignante de la classe souligne dans son journal de recherche :
« avec le continuum en lecture et le travail plus traditionnel sur la lecture, les élèves délaissent la lecture des images. Les ateliers leur permettent de revenir sur cette lecture de l’image et du texte (ensemble) et ils comprennent tranquillement l’intérêt de s’y attarder en tout temps. Mais ce n’est pas un apprentissage facile ». Dans les ateliers portant davantage sur la lecture critique en histoire, il a conséquemment été nécessaire de rappeler régulièrement aux élèves l’utilité des images qui, elles aussi, permettent de répondre à des questions de contenu.
Comme nous l’avons déjà souligné, au moment de leur prise en charge par les chercheurs, les élèves n’avaient reçu aucune formation spécifique sur la lecture critique nécessaire à la discipline historique. Ils connaissaient très grossièrement les étapes liées à la démarche de recherche et de traitement de l’information et cette dernière est à ce moment fortement associée à la lecture de textes (« je sais qu’il faut se poser une question et essayer d’y répondre en lisant des textes » (verbatims d’atelier/ Joey »; « Pour faire une recherche, il faut lire, par exemple le manuel d’universsocial » (verbatims d’atelier/Joanie). De même, les élèves ne sont pas initiés (du moins formellement) à la posture de doute qui doit prévaloir dans l’étude des thèmes historiques. Les différents principes qui guident la critique des sources (dont la prise en compte du contexte de production des documents et la nécessité de confronter les sourcesentre elles) leur sont inconnus.
Comme en fait foi le tableau 3, qui illustre la position initiale des élèves quant à leur perception de la validité et de la fiabilité de différents supports informatifs, la posture de doute est peu présente dans l’esprit des élèves au début du projet, surtout en ce qui a trait aux sources écrites de nature informative. Comme l’écrit Michael : « Si c’est écrit, c’est vrai, à moins que ce soit des histoires inventées comme dans les romans » (extrait du questionnaire initial). Autre observation intéressante : trois élèves soulignent dans le questionnaire initial que les images sont plus près du vraiparce qu’on ne peut pas les inventer (« une image à la télé, c’est sûr que c’est vrai. C’est
comme une photographie » (extrait de questionnaire / Joey). À cet égard, ils n’apparaissent donc pas sensibilisés au fait que l’image aussi puisse être « trafiquée ».
Loin de la véritéPEU FIABLE | Près de la véritéFIABLE | Très près de la véritéTRES FIABLE | |
La parole de l’enseignante | 2 | 10 | |
Le témoin d’un événement | 3 | 9 | |
Les manuels scolaires | 1 | 11 | |
Internet | 2 | 8 | 2 |
Les journaux | 1 | 11 | |
La télévision | 3 | 6 | 3 |
Le cinéma | 8 | 3 | 1 |
Les romans | 8 | 4 | 0 |
Les bandes dessinées | 9 | 2 | 1 |
Note : Le chiffre inscrit correspond au nombre d’élèves ayant sélectionné cette catégorie
À la fin du projet, les élèves conservent des perceptions très similaires quant à la validité des supports présentés autableau 4, ce qui nous laisse croire que le projet en lui-même (et le temps de l’expérimentation) n’agissent pas véritablement sur les perceptions. Les seules modifications sensibles concernent la BD, support au cœur du dispositif : 9 élèves la jugent, en fin de projet, fiable, aucun la considère très fiable et 3 l’estime peu fiable. Dans l’explication de leurs réponses, la moitié des élèves précisent que les BD humoristiques sont moins fiables que les autres. À cet égard, cet extrait est représentatif des justificatifs donnés par ces élèves : « pour les BD drôles, il faut faire attention; c’est plus pour faire rire que pour apprendre » (extrait du questionnaire-bilan/Brian). Cette précision, loin d’être sans importance, illustre le cheminement des élèves quant à la portée des BD comme source d’information. Ce cheminement est aussi perçu par l’enseignante : « Les élèves ont développé leur esprit critique en se questionnant sur la véracité des faits présentés dans les différentes BD » (extrait journal de recherche).
Bien que plus sensibles à l’importance de la posture critique en tâche de lecture (note d’observation), les élèves, tout au long du projet, peinent par contre à discerner le vrai du faux, notamment parce que leurs connaissances sur les thèmes à l’étude restent très parcellaires. Conséquemment, juger la fiabilité d’un support informatif demeure une tâche exigeante. De même, l’automatisation de la lecture critique et de tout ce qu’elle sous-tend reste un vœu pieux : les élèves parviennent à lire une BD de manière plus critique mais ils doivent pour ce faire être accompagnés par un expert-adulte. Laissée à eux-mêmes, ils considèrent rapidement le texte et les images comme éléments d’informations assurément fiables et ils n’arrivent pas à cibler les éléments qu’il serait bon d’interroger. Comme les apprentissages visés dans le dispositif sont nouveaux et inédits pour les élèves, cette observation s’explique bien. Elle met en lumière l’importance de positionner les apprentissages dans un temps plus long et surtout rythmé par la modélisation, la pratique guidée puis la pratique autonome attendue.
Bien guidés, les élèves sont par contre très motivés à répondre à leurs doutes et interrogations. Bien qu’ils peinent à trouver eux-mêmes les sources leur permettant de confronter leurs idées et leurs interrogations, ils participent activement aux discussions en classe nées notamment de la consultation (attendue) de sources complémentaires. La recherche dans Internet de sources assurément multimodales (dont des documents audio ou vidéo) suscite notamment un grand engouement et permet de réinvestir certaines des stratégies de lecture travaillées en lecture multimodale. Ainsi, au cours de l’expérimentation, les élèves ont tour à tour visionné une vidéo sur le modèle T d’Henry Ford afin d’en savoir plus sur l’utilisation de l’automobile (extrait de Magasin général); ils ont consulté le site Internet de la société des traversiers afin de connaitre l’histoire de la traverse Québec-Lévis (extrait Alphonse Desjardins); ils ont visité le site du Musée McCord afin de comparer une illustration du parlement (extrait Alphonse Desjardins) à une photographie; tout comme ils ont comparé deux BD entre elles (Lucky Luke et Magasin général) afin de définir le terme de « télégramme ».
Malgré les limites du dispositif didactique en ce qui a trait au développement de la compétence en lecture multimodale et critique, ce dernier permet malgré tout aux élèves d’acquérir, ou du moins de solidifier, certaines connaissances historiques. Comme le souligne l’enseignante à la rencontre focalisée : « Grâce à l’enquête historique, les élèves consolident leurs connaissances. Ils sont en mesure d’observer des éléments du territoire, des transports,des habitudes de vie
(vêtements, langage, loisirs, religion) reliés à une période historique en particulier ». Ils font aussi des liens avec leurs connaissances antérieures et ils veulent aller plus loin ». Pour cette raison, l’expérience est aux yeux de l’enseignante une réussite (rencontre focalisée).
Pour l’essentiel, les premiers résultats obtenus par la présente étude de cas exploratoire permettent d’étayer les possibilités d’apprentissage sous-tendues par le déploiement en classe d’un dispositif didactique favorisant ensimultanée l’apprentissage par la lecture (Cartier, 2007) et la littératie multimodale et critique, en recourant pour ce faire à la BD, œuvre multimodale des plus explicites (Boutin, 2012a).
Le dispositif dont il est question dans cette étude est inédit : il mobilise la BD historique comme matrice de savoirs en histoire (Martel et Boutin, 2014) afin d’incarner la rencontre de 1) l’enseignement/apprentissage du décodage et de la compréhension multimodale; 2) de la lecture pour apprendre; 3) de la littératie critique liée ici à la méthode historique par laquelle la qualité des sources est jugée.
Rappelons qu’il s’agissait ici d’une étude de cas exploratoire; on pourra regretter le caractère généraliste des résultats obtenus. D’où la nécessité dans un avenir rapproché de procéder à une enquête beaucoup plus approfondie afin de valider plusieurs des pistes retenues ici.
On commence, lentement mais sûrement, à mieux comprendre, du moins en sciences de l’éducation, le paradigme, toujours en émergence, de la littératie médiatique multimodale (Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012). La présente intégration expérimentale de la littératie multimodale (BD) à l’enseignement de l’histoire au primaire participe à cette démarche pionnière.
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Wineburg, S., Martin, D. & Monte-Sano, C. (2013). Reading like a historian. NY : Teachers College Press.
Bibliographie du corpus de BD
Bandes dessinées utilisées pour la modélisation
Bérubé, J-S. (2009). Radisson. 1-Fils d’Iroquois. Québec: Glénat Québec.
Landry, M. et Levasseur, M. (2009). La flèche. 1. Fort nécessité. Terrebone: Boomerang éditeur jeunesse. Landry,M., Levasseur, M.(2010). La flèche. 2. Coberqui. , Terrebone: Boomerang éditeur jeunesse.
Bandes dessinées permettant l’étude de la société québécoise vers 1905 (pratique autonome)
Grigon, C.-H. et Chartier, A. (2010). Séraphin : un homme et son péché. Montréal : Éditions 400 coups. Loisel et Tripp. (2012.)Magasin général 8. Les femmes. Montréal. Paris : Casterman.
Loisel et Tripp. (2009.) Magasin général 5 Montréal. Montréal. Paris : Casterman.
Carin, Rivière et Borile. (2005). Victor Sackville. La nonne de Québec. Bruxelles: Le Lombard.
Prouche. (1990). La grande aventure d’Alphonse Desjardins. Lévis : la confédération des caisses populaires et d’économie Desjardins du Québec.
Multimodalité(s) se veut un lieu de rassemblement des voix de toutes les disciplines qui s’intéressent à la littératie contemporaine.
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