La multimodalité au coeur de la classe de français: la compréhension de multitextes chez les élèves du 3e cycle du primaire


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La multimodalité au coeur de la classe de français: la compréhension de multitextes chez les élèves du 3e cycle du primaire. Revue de recherches en littératie médiatique multimodale, .

Nathalie Lemieux, Doctorante en éducation, Université du Québec à Montréal
Isabelle Beaudoin, Professeure, Université du Québec à Rimouski, campus de Lévis

Résumé
Les difficultés en lecture représentent un facteur de risque important de décrochage scolaire, problématique affectant davantage les garçons. L’étude présentée dans le cadre de cet article s’est attardée au développement de deux stratégies de compréhension en lecture, soit l’inférence et le rappel de récit, à l’aide d’une approche s’appuyant sur la bande dessinée. L’objectif était de mesurer l’impact de cette intervention sur la motivation en lecture ainsi que le degré d’acquisition des deux stratégies étudiées auprès de 30 garçons de 5e année du primaire éprouvant des difficultés d’apprentissage. Les résultats suggèrent que l’intervention aurait eu un certain impact sur la motivation des élèves du groupe expérimental en ayant possiblement atténué, chez ces derniers, la baisse de motivation qui s’est produite chez les élèves ayant reçu un enseignement régulier. De plus, il est également possible d’observer une tendance statistique très près d’être jugée statistiquement significative au sein du groupe témoin, où l’habileté à utiliser les indices pour produire une inférence semble diminuer entre les deux passations, tendance non observée chez les élèves ayant participé à l’intervention. Enfin, les résultats montrent une augmentation presque significative au sein du groupe expérimental sur le plan de l’habileté à produire un rappel de texte de bande dessinée, ce qui n’a pas été constaté au sein du groupe témoin.

Abstract
Reading difficulty represent an important factor of risk of dropping out of school, issue who is more present to the boys. The study presented in this article focused on the development of two reading comprehension strategies, inference and text recall, using an approach based on comic book. The aim of this study was to measure the impact of this intervention on the reading motivation and the degree of acquisition of the two strategies studied on 30 fifth grade boys experiencing learning difficulties. The results suggest that the intervention would have had some impact on the motivation of students in the experimental group which possibly attenuated, among them, the lack of motivation that occurred among students who received regular teaching. In addition, it is also possible to observe a statistical trend that is very close to being considered statistically significant in the control group where the ability to use clues to produce an inference seems to decrease between the two test periods, unobserved trend among students who participated in the intervention. Finally, the results show an increase which is close to being considered significant in the experimental group in terms of the ability to produce a text recall of comic book, which was not observed in the control group


Mots-clés : stratégies de compréhension en lecture, enseignement explicite, bande dessinée, enseignement primaire
Keywords: reading comprehension strategies; explicit instruction; comic book; primary education

  1. Problématique de recherche

1.1. Problème de recherche

Le décrochage scolaire est un problème social très préoccupant au Québec. Le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) (2013) estime à 25,7%, pour l’année 2010-2011, le nombre de jeunes qui n’ont toujours pas obtenu un diplôme ou une qualification d’études secondaires à l’âge de 20 ans. De plus, le rendement scolaire des garçons est plus faible que celui de leurs homologues féminines (Conseil supérieur de l’éducation [CSE], 1999). Or, un faible rendement scolaire est généralement lié à des difficultés d’apprentissage (Saint-Laurent, 2008). Les difficultés d’apprentissage représentent, selon Kotering, Haring et Klockars (1992), le plus puissant prédicteur du décrochage scolaire.

Parmi l’éventail des difficultés d’apprentissage, les difficultés en lecture demeurent les plus fréquentes chez les élèves en difficultés (Ministère de l’Éducation [MEQ], 2005). D’ailleurs, selon Vaughn, Bos et Schumm (2007), 80% à 90% des élèves ayant des difficultés d’apprentissage éprouvent des problèmes en lecture. L’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (2008) affirme qu’environ 30% des élèves canadiens de 3e et de 6e année ne possèdent pas les aptitudes en littératie attendues à leur niveau scolaire. En ce qui concerne le groupe d’âge visé par cette étude, le Ministère de l’Éducation nationale (2007) affirme que 13,7% des élèves en fin de 5e année ne possèdent pas les habiletés de base en français. Ce constat est alarmant si l’on considère que la lecture est le fondement de l’apprentissage dans toutes les disciplines (MEQ, 2005) puisqu’elle permet l’accès aux acquisitions nouvelles qui, à leur tour, retentissent sur les facultés de base (Van Hout et Estienne-Dejong, 1994). Ainsi, il appert que des difficultés d’apprentissage en lecture entraînent de graves conséquences pour l’ensemble de la scolarité d’un élève (Goupil, 1997) et peuvent même conduire à l’abandon scolaire (Giasson, 2011). Les recherches démontrent que, chez les lecteurs de la fin du primaire, les difficultés en lecture touchent principalement la compréhension. Parmi les raisons susceptibles d’expliquer les difficultés de compréhension en lecture, certains auteurs soulignent le manque de stratégies de compréhension chez les élèves en difficultés (MEQ, 2003; Saint-Laurent, 2008). D’ailleurs selon le North Central Regional

Educational Lab (2002), la majorité des élèves âgés de 12 ans n’ont pas développé suffisamment les stratégies pour améliorer leur compréhension.

La stratégie d’inférence est une stratégie qui pose des problèmes aux élèves éprouvant des difficultés en compréhension en lecture. D’ailleurs à ce sujet, plusieurs études ont permis de démontrer que les mauvais compreneurs ont de la difficulté à répondre aux questions nécessitant la formulation d’une inférence (Cain et Oakhill, 1999; Cain, Oakhill, Barnes et Bryant, 2001; Oakhill, 1984). Quant à elle, la stratégie de rappel de récit est peu employée par les enseignants en salle de classe, et ce, malgré les bienfaits associés à l’emploi de cette dernière. Allinder, Dunse, Brunken et Obermiller-Krolikowski (2001) et Fountas et Pinnell (2001) affirment d’ailleurs à ce sujet que le rappel est un important indicateur de la compréhension en lecture. Le manque de stratégies de compréhension est davantage présent chez les garçons. En effet, comme le précisent Kolic-Vehovec et Bajsanski (2006), les garçons semblent éprouver davantage de difficultés que les filles au plan de l’apprentissage des stratégies de compréhension en lecture.

Selon Block et Lacina (2008), l’enseignement des stratégies de compréhension permet aux élèves de devenir des lecteurs qui sont actifs et en contrôle de leur propre compréhension en lecture. Plusieurs auteurs sont d’ailleurs d’avis que pour progresser en lecture, les élèves faibles ont besoin d’un enseignement dans lequel les stratégies sont expliquées clairement et dont l’application est démontrée par l’enseignant (Block et Pressley, 2007; Nettles, 2006; Saint- Laurent, 2008), ce qu’offre l’enseignement explicite. De plus, diverses études (Brand-Gruwel, Aarnoutse et Van Den Bos, 1998; McGee et Johnson, 2003; Van Keer, 2004) ont démontré les bienfaits associés à une telle intervention sur la compréhension en lecture d’élèves de niveau primaire. L’étude de McGee et Johnson (2003) a également permis de révéler que l’entraînement explicite à la stratégie d’inférence est davantage efficace qu’un enseignement standard (exercices de compréhension), puisqu’il augmente les aptitudes en compréhension des mauvais compreneurs, mais également des bons compreneurs. En ce qui concerne la stratégie de rappel de récit, certaines études ont démontré qu’un entraînement portant sur cette stratégie permet de bonifier le rappel effectué par les élèves, et ce, autant chez les lecteurs compétents

que chez les lecteurs moins compétents (Gambrell, Kapinus et Koskinen, 1991; Gambrell, Pfeiffer et Wilson, 1985; Morrow, 1985; Rose, Cundick et Higbee, 1983). Or, ce type d’enseignement semble peu utilisé en classe (De Corte, Verschaffel et De Ven, 2001; Van Grunderbeeck, Théorêt, Chouinard et Cartier, 2003).

L’acquisition de stratégies par l’élève ne signifie pas qu’il utilisera ces dernières lors d’une situation de lecture (Lau et Chan, 2003). En effet, ce dernier utilisera les stratégies acquises seulement lorsqu’il sera motivé à le faire (Lau et Chan, 2003). L’utilisation d’un matériel littéraire constituant un puissant levier de motivation chez les élèves lors de périodes d’enseignement des stratégies de compréhension en lecture s’avère donc souhaitable. Or, tel que le précisent Bearne et Wolstencroft (2007), les textes multimodaux ont un haut niveau de popularité auprès des élèves. Une étude réalisée par Leblanc (2005) a d’ailleurs permis de démontrer que la bande dessinée constitue le 1er ou 2e choix de livre de 75% des garçons de niveau primaire. Il a également été démontré dans le cadre d’une étude réalisée par Schwertner (2008) que l’utilisation de bandes dessinées augmente le degré de motivation et d’intérêt en lecture d’élèves de 5e année du primaire. Au regard de ces constats, le choix de la bande dessinée nous apparaît alors justifié comme outil d’apprentissage visant le développement de stratégies de compréhension en lecture. En plus d’augmenter la motivation à lire des élèves, la bande dessinée permet le développement de la littératie chez ces derniers, notamment auprès de ceux éprouvant des difficultés (Boutin, 2010). Moeller (2011) affirme que les textes multimodaux, dans lesquels le mode visuel est au premier rang de la séquence discursive, comme c’est le cas pour la bande dessinée, sont plus stimulants, rigoureux et significatifs pour les élèves en termes d’activité cognitive que les textes sans image. Quelques études (Gambrell et Jawitz, 1993; Holmes, 1987; O’Keefe et Solman, 1987) ont d’ailleurs démontré l’influence qu’ont les images (mode visuel) sur la compréhension d’histoires auprès d’élèves de niveau primaire. Malgré ces constats, la recherche montre que ce type de matériel n’est exploité occasionnellement que par 30% des enseignants du primaire (MEQ, 1994).

1.2. Question et objectifs de recherche

L’étude présentée dans le cadre de cet article avait pour but de répondre à la question suivante : quels sont les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la motivation en lecture ainsi que le degré d’acquisition des stratégies d’inférence et de rappel de récit en bande dessinée de garçons de 3e cycle du primaire en difficulté d’apprentissage? Afin de répondre à cette question, l’étude a tenté d’atteindre les objectifs suivants : mesurer l’effet de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur 1) la motivation en lecture de garçons du 3e cycle du primaire; 2) leur degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée; 3) leur degré d’acquisition de la stratégie de rappel de récit de bande dessinée.

  1. Cadre théorique

2.1. La littératie multimodale

L’OCDE (2000) affirme que la littératie est l’« aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses connaissances et ses capacités » (p. x). Cette définition de la littératie est davantage considérée comme étant une définition de la littératie dite « classique » ou « traditionnelle ». Le terme « littératie » connaît depuis quelques années déjà une grande évolution. En effet, vers la fin des années 1990 sont apparus en Grande-Bretagne et aux États- Unis les termes « littératies multiples » et « multilittératies » à la suite des travaux effectués par le New London Group (NLG) (1996); ces termes faisaient référence à la multiplication des canaux médiatiques de communication. Suivra le terme « multimodalité » qui a, entre autres, été défini par Kress (1997, 2003, 2010) et Jewitt (2009). Selon ces auteurs, la multimodalité repose sur le constat empirique qu’en communication contemporaine, l’on utilise de plus en plus fréquemment plus d’un mode pour concrétiser une idée. Kress et Van Leeuwen (2001) abondent dans le même sens et affirment que la multimodalité représente l’usage de plus d’un mode sémiotique afin de concevoir un objet ou un événement sémiotique. Un mode est une ressource sémiotique façonnée par la société pour produire du sens (Kress, 2010). Il existe

plusieurs modes sémiotiques dont le mode textuel (mots, phrases, etc.) et le mode visuel (images) (comprenant les modes cinétique [gestes, mouvements non verbaux, etc.]) et sonore (paroles, onomatopées, etc.). Les modes « exercent [chacun] différentes fonctions, […] fonctionnent de différentes façons et […] opèrent souvent en combinaison pour créer du sens » (Bazalgette et Buckingham, 2012, p. 9). Le texte monomodal (texte traditionnel au point de vue scolaire) comprend un seul mode, soit le mode textuel. En revanche, le texte multimodal (ou multitextei) est un message comprenant au moins deux modes sémiotiques parmi les suivants : le mode textuel, le mode visuel, le mode cinétique et le mode sonore (Boutin, 2012; Kress, 1997). Bearne et Wolstencroft (2007) ajoutent, quant à eux, que la multimodalité articule alors le croisement des mots, des images, du mouvement et du son.

Les développements théoriques des dernières années ont contribué à élargir la compréhension de la littératie comme pratique englobant divers modes d’expression. Il y a eu, entre autres, une récupération de ces avancées théoriques par le ministère de l’Éducation de l’Ontario (MEO) (2004), qui définit la littératie comme étant « la capacité d’utiliser le langage et les images, de formes riches et variées, pour lire, écrire, écouter, parler, voir, représenter et penser de façon critique » (p.5). Cette définition s’inspire des travaux effectués par Hobbs et Frost (2003), Kress (2010) et Livingstone (2004), pour ne nommer que ceux-ci.

2.2. Modèle de compréhension en lecture multimodale

L’un des objectifs principaux qui doit être atteint par l’élève afin de devenir compétent en littératie, objectif lié tant aux textes monomodaux qu’aux textes multimodaux, est le décryptage et la compréhension du sens (Gunning, 2009) des textes qui lui sont proposés.

La compréhension d’un texte multimodal dépend de plusieurs composantes. Ces composantes ont fait l’objet de nombreuses recherches qui ont conduit à l’élaboration de modèles de compréhension. Parmi ceux-ci, on retrouve le modèle de Downes et Zammit (2001), qui tient compte des variables qui entrent en jeu dans la compréhension de textes multimodaux. Ces derniers ont élaboré un modèle construit à l’aide d’une approche holistique, soit le « New Learning Environment curriculum Framework », qui regroupe quatre cercles qui s’imbriquent

les uns dans les autres comme le montre la figure 1. Le cercle du milieu se nomme
«compréhension en développement et en démonstration ». Cela signifie que «l’apprentissage de la littératie est contextualisé et utilisé afin de développer et de démontrer la compréhension qu’ont les élèves des concepts » (Zammit, 2011, p. 12). Le cercle suivant mise sur les processus d’enseignement et d’apprentissage; c’est pourquoi on y retrouve les termes suivants : « repérer, comprendre et utiliser », « critiquer » et « créer ». Le cercle qui suit présente l’éventail des modes avec lesquels les élèves doivent être mis en contact dans les textes qu’ils utilisent en classe. On y retrouve donc les éléments suivants : mode oral, mode visuel, textes écrits (mode textuel) et textes multimodaux (combinaison de deux modes ou plus). Enfin, le dernier cercle comprend les supports, c’est-à-dire le réseau de communication, à travers lesquels les textes proposés aux élèves peuvent être présentés. On retrouve donc les supports tels que « en direct » (discours, performance théâtrale, etc.), «papier» et « électronique ».

Figure 1 – New learning environment curriculum framework (Downes et Zammit, 2001)

Ce modèle est le seul qui, à notre connaissance, tient compte du plus grand nombre de variables qui entrent en jeu lors de la lecture d’un texte multimodal. Il s’agit du modèle le plus complet que nous avons recensé puisqu’il inclut à la fois les structures et les processus mobilisés par les élèves, les divers modes qui peuvent être présents dans un texte multimodal ainsi qu’une énumération de quelques supports sur lesquels ce type de texte peut être présenté.

2.3. Les processus et les stratégies en lecture

Pour faire face à une activité de compréhension du sens, l’élève devra mettre en œuvre des processus (Gunning, 2006; Snow, 2002). Les processus renvoient aux habiletés mises en jeu par les élèves durant la lecture d’un texte (Giasson, 2011) ou d’un multitexte. La classification d’Irwin (1986) fait état de cinq grandes catégories de processus cognitifs en lecture soit les microprocessus, les processus d’intégration, les macroprocessus, les processus d’élaboration ainsi que les processus métacognitifs. Chacun de ces processus comporte des habiletés particulières (Giasson, 2007). Les habiletés sont définies comme étant des actions automatiques qui ont généralement lieu sans que l’on ait conscience des composantes ou de la maîtrise en jeu (Afflerbach, Pearson et Paris, 2008). Elles sont consolidées par des exercices répétés qui auront lieu jusqu’à ce que cela devienne un automatisme (Massé, 1995).

Les microprocessus permettent de comprendre les informations contenues dans une phrase (comprendre les éléments de la phrase) (Giasson, 2011; Irwin, 1986). Ils comprennent les mécanismes de reconnaissance des mots, la lecture par groupes de mots et la microsélection (identification de l’information importante de la phrase). Les processus d’intégration renvoient, quant à eux, aux processus permettant d’effectuer des liens entre les propositions ou les phrases, c’est-à-dire de comprendre les indices explicites qui révèlent une relation entre les mots et entre les phrases (compréhension et utilisation des mots de substitution et des référents, des connecteurs) et d’inférer les relations implicites entre les mots et entre les phrases (Giasson, 2011; Irwin, 1986). Les macroprocessus sont orientés vers la compréhension globale du texte, soit vers la compréhension de la cohérence entre les phrases. Cette catégorie de processus regroupe la reconnaissance des idées principales du texte, l’élaboration de résumés et de rappels, et finalement l’utilisation de la structure du texte (Giasson, 2011; Irwin, 1986). Les processus d’élaboration renvoient, pour leur part, aux processus permettant au lecteur de dépasser le texte, d’aller plus loin que les attentes de l’auteur en effectuant des inférences non prévues par ce dernier (formulation de prédictions, etc.) (Giasson, 2011; Irwin, 1986). Finalement, les processus métacognitifs regroupent les processus servant à gérer la compréhension et permettant au lecteur de s’ajuster au texte et à la situation proposée (gestion et ajustement de la démarche, etc.) (Giasson, 2011; Irwin, 1986). Il est à noter que ces

processus sont imbriqués entre eux, n’agissent pas en parallèle et ne sont pas linéaires, mais agissent plutôt en interaction.

La mise en œuvre de telles habiletés s’appuie sur l’utilisation de stratégies (Fayol et Monteil, 1994; Foulin et Mouchon, 1999). Les stratégies font référence aux techniques que les élèves utilisent pour améliorer leur maîtrise de l’apprentissage d’une compétence (Minskoff, 2005). Il s’agit alors de façons de faire que les élèves appliquent et adaptent à une variété de textes/multitextes. Massé (1995) affirme que les stratégies représentent « la façon d’employer les habiletés afin d’arriver à un but » (p. 22). Elles réfèrent donc à l’application des habiletés acquises, à l’utilisation de ces habiletés pour parvenir à résoudre un problème donné et à accomplir la tâche demandée. Elles sont utilisées lorsque quelque chose entrave le processus automatique des habiletés (Giasson, 2011). Les stratégies ne peuvent devenir des automatismes puisqu’elles doivent être adaptées à chaque tâche (Massé, 1995). Elles sont employées « lorsque [l’élève] décide consciemment d’utiliser un moyen ou une combinaison de moyens pour comprendre un texte[/multitexte] » (Giasson, 2011, p. 260). Les stratégies sont donc
«délibérées, dirigées dans le but de contrôler et de modifier les efforts entrepris par [l’élève] » pour construire le sens d’un texte[/multitexte] (Afflerbach et al., 2008, p. 368). Il est possible d’observer chez le lecteur compétent un équilibre entre les habiletés et les stratégies puisqu’il parvient à passer « de l’application automatique d’habiletés à l’emploi intentionnel de stratégies, et ce, d’une façon flexible et appropriée aux circonstances » (Giasson, 2011, p. 261).

Il existe un nombre considérable de stratégies intervenant dans le processus de compréhension en lecture. Toutefois, dans le cadre de cette étude, seules les stratégies d’inférence et de rappel de récit ont été exploitées. Nettles (2006) définit l’inférence comme étant un processus servant à dégager l’information implicite d’un texte. Afin de trouver cette information, le lecteur doit établir un lien entre les informations extraites du texte et de l’environnement textuel (repérage et utilisation des indices textuel et visuel) ainsi que ses propres connaissances pour créer une information nouvelle (Foulin et Mouchon, 1999; Giasson, 2003).

Il existe plusieurs classifications permettant de représenter la diversité des inférences (Baker et Stein, 1981; Cain et Oakhill, 1999; Giasson, 2011). Nous présentons ici l’une des trois catégories d’inférences de la classification telle que proposée par Giasson (2011), soit les inférences logiques et les inférences pragmatiques. Les inférences logiques sont fondées sur le texte/multitexte et sont nécessairement contenues de façon implicite dans ce dernier (voir tableau 1). On peut alors affirmer que les inférences logiques sont implicites et textuelles. Les inférences produites ne sont pas probables, mais vraies. D’ailleurs, une seule réponse est possible. Afin de produire une inférence logique, il faut d’abord connaître le champ sémantique utilisé et mettre ensuite en relation les informations données.

Tableau 1 – Exemple d’une inférence logique

« J’avais deux poissons dans mon aquarium, Castor et Pollux. Castor est mort ce matin. »
Question : Quel est le nom du poisson qui est toujours vivant?
Réponse : « Pollux »
Source : Giasson (2011)

Afin de répondre à cette question, l’élève doit formuler une inférence logique puisque la réponse découle nécessairement du texte/multitexte. Une inférence logique est jugée correcte lorsque « le raisonnement est adéquat, [c’est-à-dire que] le résultat n’est pas simplement probable, mais certain » (Giasson, 2011, p. 246).

Les inférences pragmatiques, quant à elles, se rapportent aux informations qui sont sous- entendues dans le texte/multitexte, mais pas nécessairement vraies (voir tableau 2). Elles sont donc formulées à partir des informations qui ne sont pas incluses dans le texte/multitexte (inférences implicites) (Giasson, 2003), et doivent ainsi être générées à partir des connaissances sur le monde que possède le lecteur (Giasson, 2011). Contrairement au résultat découlant d’une inférence logique, celui émergeant d’une inférence pragmatique est probable, mais pas nécessairement vrai (Giasson, 2011). Ce type d’inférences est alors fondé sur les schémas du lecteur, c’est-à-dire sur ses connaissances , sa culture et son expérience (inférences fondées sur les connaissances antérieures du lecteur). Ce processus cognitif utilise les connaissances du lecteur pour enrichir, compléter ou transformer les informations contenues dans un

texte/multitexte. Les élèves doivent alors reconstruire les informations implicites tirées du texte/multitexte à l’aide de leurs propres connaissances.

Tableau 2 – Exemple d’une inférence pragmatique

« Sophie se rendit chez son amie. »
Question : Quel moyen de déplacement Sophie a-t-elle
utilisé?
Réponse : « Sophie s’est rendue chez son amie à pied. »
Source : Giasson (2011)

Afin de répondre à cette question, l’élève doit formuler une inférence pragmatique puisque la réponse est générée à partir de ses connaissances sur le monde et n’est pas nécessairement vraie. En effet, dans cet exemple, il est probable que Sophie se soit rendue chez son amie à pied toutefois elle pourrait également avoir utilisé sa bicyclette pour s’y rendre.

Faire le rappel d’un récit signifie mentionner les informations dont nous nous souvenons de notre lecture (Morrow, 1996). La stratégie de rappel de récit consiste donc à demander à un élève de lire un texte et de le redire dans ses propres mots (Giasson, 2007) en prenant bien soin d’y inclure chacun des éléments présents dans un schéma narratif, soit la situation de départ (aussi appelée situation initiale), l’élément déclencheur, les péripéties, le dénouement et la situation finale (Giasson, 2003, 2007).

2.4. La bande dessinée

La bande dessinée possède un caractère hybride où le mode textuel (texte) et le mode visuel (images, mouvement, son) sont liés entre eux et dont le sens naît de leur interaction (Morgan, 2003; Mouchart, 2004; Peeters, 1993, 1998). Les éléments visuels tels que la couleur (O’Neil, 2011), les signes non verbaux (McCloud, 1994), le mouvement (Lewis, 2001), etc. offrent des indices qui permettent au lecteur de formuler des hypothèses (inférences) (McCloud, 1994). L’interaction « texte/images » offre aux élèves la possibilité de bonifier ou de valider leur compréhension du récit en se référant aux images puisqu’ils peuvent, en cas d’incompréhension, recourir aux indices contenus dans les images lorsque la lecture du texte à elle seule ne leur permet pas de bien comprendre le récit. De plus, les cases d’une bande

dessinée permettent la segmentation des actions du récit (Peeters, 1998). Cette segmentation des actions offre aux élèves une vue d’ensemble du récit et a pour effet de rendre plus explicites les idées principales de celui-ci, ce qui, en retour, permet une meilleure compréhension du récit et contribue ainsi à l’élaboration d’un meilleur rappel de récit.

2.5. Le modèle d’enseignement explicite

Le modèle d’intervention qui a été employé dans le cadre de cette étude est le modèle d’enseignement explicite. Ce modèle s’inscrit dans un processus de construction graduelle de connaissances (Tardif, 1997) partant de la prise en charge de la responsabilité par l’enseignant et conduisant à l’autonomie de l’élève (Giasson, 2007; Tardif, 1997). Ce modèle s’appuie sur les quatre éléments suivants : Quoi?, Pourquoi?, Comment? et Quand? (Boyer, 1993; Giasson, 2007). Lors de la première étape de ce modèle (étape du « Quoi? »), l’enseignant nomme, présente une brève définition ainsi qu’un exemple de la stratégie à l’étude (connaissances déclaratives). Lors de l’étape du « Pourquoi? », l’enseignant explique aux élèves la raison pour laquelle l’apprentissage de cette stratégie leur sera utile (connaissances pragmatiques). Lors de l’étape du « Comment? », l’enseignant montre d’abord aux élèves comment exercer la stratégie à l’étude en rendant explicite son raisonnement (1ère phase : modelage). Ceci a pour but d’offrir aux élèves les outils nécessaires afin qu’ils puissent exercer eux-mêmes la stratégie (connaissances procédurales). Ensuite, l’enseignant implique graduellement les élèves et les guide dans l’application de la stratégie à l’étude en intervenant lorsqu’il juge que ces derniers éprouvent des difficultés (2e phase : pratique guidée). Puis, l’enseignant favorise l’autonomie dans l’utilisation de cette stratégie. Il place les élèves en situation leur permettant d’accomplir la tâche de la façon la plus autonome possible (Boyer, 1993). L’enseignant doit donc fournir aux élèves des activités dans lesquelles ils pourront utiliser la stratégie à l’étude en équipe (3e phase : pratique coopérative) et seuls (4e phase : pratique autonome). Enfin, lors de l’étape du
«Quand? », l’enseignant précise les conditions d’application de la stratégie à l’étude, c’est-à- dire le moment où cette stratégie doit être appliquée (connaissances pragmatiques).

  1. Méthodologie

3.1. Sujets

Afin de réaliser cette étude, nous avons utilisé une approche quantitative de type quasi expérimental ainsi qu’un devis avant-après avec groupe témoin. L’expérimentation s’est déroulée sur une période de cinq mois au cours de laquelle deux groupes de sujets, soit 30 garçons de 5e année du primaire, ont été comparés (un groupe expérimental de 15 participants qui a été soumis à l’intervention et un groupe témoin, également de 15 participants, qui n’a reçu aucune intervention). Les participants qui ont été recrutés proviennent de quatre écoles de la Commission scolaire de la Côte-du-Sud dont le niveau de défavorisation varie entre sept et dix selon la classification du MELS (2009-2010). Ils ont été sélectionnés en fonction des critères suivants : être en 5e année du primaire, être de sexe masculin, rencontrer des difficultés d’apprentissage (plus précisément des difficultés en lecture), fréquenter une classe régulière, avoir accepté volontairement de participer à l’étude et finalement avoir reçu l’autorisation de leurs parents.

Afin de procéder au choix des participants, nous avons identifié, avec l’aide de l’enseignante, les cinq garçons éprouvant le plus de difficultés en lecture dans leur classe (pour les classes comprenant uniquement des élèves de 5e année) ou les trois garçons éprouvant le plus de difficultés en lecture (pour les classes comprenant des élèves de 5e-6e année). Puisque nous n’avons pas été en mesure d’obtenir le consentement des parents pour l’ensemble des élèves ciblés, nous avons alors dû identifier des élèves supplémentaires dans une classe du groupe témoin, classe qui comportait un nombre plus élevé d’élèves éprouvant des difficultés en lecture. Le groupe expérimental est composé de trois classes de cinq élèves tandis que le groupe témoin est composé d’une classe de sept élèves, d’une classe de cinq élèves, d’une classe de deux élèves et finalement d’une classe de un élève.

3.2. Instruments de mesure

Puisque le niveau de compréhension en lecture des élèves avant l’intervention est lié à deux des trois variables dépendantes mesurées dans le cadre de cette étude, soit la capacité à faire des inférences en bande dessinée et l’habileté à faire le rappel d’un texte de bande dessinée, nous avons mesuré cette variable a priori afin de nous assurer que les deux groupes étaient équivalents sur le plan de la compréhension en lecture avant l’expérimentation (covariable). Deux instruments ont permis de mesurer la covariable, soit le niveau de compréhension en lecture des élèves, avant l’expérimentation : 1) un test de compréhension en lecture de texte narratif constitué de six questions; 2) une épreuve de rappel oral de texte narratif. Les questions de la première épreuve ont permis d’évaluer les microprocessus, c’est-à-dire l’information formulée de façon explicite et contenue dans une phrase, ainsi que les processus d’intégration, soit les liens entre les phrases du texte (anaphore), les liens implicites entre des parties du texte ou entre une partie du texte et les connaissances antérieures du lecteur (inférence). Dans le cadre de l’épreuve de rappel d’un texte narratif, les participants ont été rencontrés individuellement par l’expérimentatrice et invités par celle-ci à lire silencieusement le texte et à en effectuer ensuite le rappel oral. Le rappel permet d’évaluer les macroprocessus, c’est-à-dire la compréhension de la cohérence entre les phrases. Deux types d’analyse ont été utilisés dans le cadre de cette étude concernant l’évaluation du rappel de récit. Une analyse quantitative a d’abord été effectuée suivie d’une analyse qualitative. L’analyse quantitative visait à comparer le rappel de l’histoire avec le texte lu afin de déterminer la quantité de texte rapportée par le lecteur (Giasson, 2003; 2007), tandis que l’analyse qualitative a permis de tenir compte des éléments que l’élève a ajoutés dans son rappel, tels que ses interprétations et les inférences qu’il a effectuées (Giasson, 2007). La combinaison de ces deux types d’analyse contribue à rehausser le niveau d’analyse du rappel.

Les résultats des tests-t n’ont démontré aucune différence statistiquement significative entre les groupes avant l’intervention, et ce, tant pour les scores au test de compréhension de texte narratif (t [1,28] = 0,31, p > ,05) que pour les résultats au rappel de récit (t [1,28] = 0,87, p >
,05), ce qui nous permet de conclure que les deux groupes étaient équivalents sur le plan des habiletés de compréhension en lecture.

Afin d’évaluer les effets de l’intervention proposée sur les variables dépendantes retenues, soit les attitudes et la motivation face à la lecture, le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée et l’habileté à produire le rappel oral d’un extrait de bande dessinée, les épreuves suivantes ont été administrées aux élèves des deux groupes avant et après l’intervention.

  • Questionnaire évaluant les attitudes et le degré de motivation des participants à l’égard de la lecture : cette épreuve a été construite à partir de trois questionnaires validés (Leblanc, 2005; McKenna et Kear, 1990; Tunnell, Calder et Phaup, 1991). Ce questionnaire comporte 22 énoncés (voir annexe 1). Les énoncés 1 à 21 du questionnaire ont été construits sous la forme d’une échelle de type Likert à cinq niveaux variant de « Pas du tout d’accord » à « Tout à fait d’accord ». L’énoncé 22 ne nécessite pas l’emploi d’une échelle de type Likert, mais propose plutôt un choix de réponses parmi cinq réponses.
  • Épreuves évaluant le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée : puisqu’aucun questionnaire portant sur l’évaluation de la stratégie d’inférence en bande dessinée n’a été répertorié, deux épreuves (l’une pour le prétest et l’autre pour le post-test) ont dû être élaborées par l’expérimentatrice pour les besoins de cette étude. Ces épreuves comportent chacune cinq questions visant à évaluer les inférences tant logiques que pragmatiques réalisées lors de la lecture d’un texte de bande dessinée (« Messire Guillaume : Les contrées lointaines » [p. 3 à 10] de Bonhomme et Bonneval [2005], publié chez Dupuis pour le prétest, et « Le Trio Bonaventure : Le pays tout en haut » [p. 3 à 10] de Corcal et Édith [2004], publié chez Delcourt pour le post-test). Une sixième question invitait les élèves à formuler une inférence sous forme de prédiction. Les questions ont toutes été formulées sous la forme de questions ouvertes (voir annexe 2). Afin de répondre à ces questions, les sujets devaient s’appuyer tant sur les indices textuels que sur les indices visuels. Afin de nous permettre de vérifier si les répondants parvenaient à utiliser autant les indices textuels que visuels, nous avons ajouté une sous-question à chacune d’elles amenant les participants à préciser les indices sur lesquels ils s’étaient appuyés pour répondre. Ce questionnaire a alors

permis d’évaluer : 1) l’habileté des élèves à formuler des inférences; 2) leurs performances quant à l’identification des indices textuels et visuels; 3) le degré d’utilisation des indices tant textuels que visuels en bande dessinée. Nous avons obtenu, pour chacune des deux épreuves, quatre scores soit un score moyen aux cinqii questions d’inférence (sur 2), un score moyen aux cinq questions d’indices textuels (sur 3), un score moyen aux quatreiii questions d’indices visuels dans le cas du prétest ou un score moyen aux cinq questions d’indices visuels dans le cas du post-test (sur 3), et un score moyen aux cinq scores d’utilisation des indices textuels/visuels (sur 3). Il est à noter que nous avons ramené sur 100 ces divers scores afin de faciliter l’interprétation et la comparaison des résultats.

  • Épreuve évaluant l’habileté à produire le rappel oral d’un texte de bande dessinée : pour cette épreuve, deux courts extraits de bande dessinée ont été sélectionnés, soit un extrait de l’album intitulé « Le Voyage d’Esteban : Traqués! » de Bonhomme (2006), publié chez Milan (pages 7 à 16 et 20 à 22), pour le prétest et un extrait de l’album intitulé « Popotka : Le Wendigo » de Chauvel et Simon (2002), publié chez Delcourt (pages 14 à 30), pour le post-test. Afin de nous assurer de la conformité entre le degré de difficulté des textes et des images présents dans les extraits de bande dessinée proposés, nous avons soumis ceux-ci à l’évaluation d’un professeur en didactique du français expert dans le domaine. Après analyse, le niveau de difficulté des textes et des illustrations lui est apparu comparable dans les deux extraits de bandes dessinées retenus. Afin d’effectuer le rappel de récit de ces extraits de bande dessinée, nous avons procédé de la même façon que pour l’évaluation du rappel d’un texte narratif. Puis, à l’instar de l’analyse des rappels de textes narratifs présentée antérieurement, les rappels de textes de bandes dessinées ont été évalués de façon quantitative et qualitative.

3.3. Déroulement de l’expérimentation

Les participants ont, dans un premier temps, complété les deux épreuves du questionnaire visant à mesurer la covariable, soit le niveau de compréhension de textes narratifs. Par la suite, ceux-ci ont été soumis au prétest. Les élèves du groupe expérimental ont ensuite participé à huit

ateliers d’une durée de 54 minutes chacun, à raison d’un atelier par semaine pendant une période de deux mois, tandis que le groupe témoin n’a bénéficié d’aucune intervention.

Les ateliers se sont déroulés dans les classes respectives des élèves, lors de périodes de français, et ont tous été animés par la responsable de cette étude. Ces différents ateliers portaient sur l’enseignement explicite des stratégies d’inférence et de rappel de récit à l’aide de la bande dessinée. Les notions suivantes ont été exploitées avec les élèves : l’identification d’indices tant textuels que visuels, l’inférence, la prédiction et le rappel de récit. Chacun des ateliers a été construit en s’appuyant sur les quatre éléments du modèle d’enseignement explicite : quoi?, pourquoi?, comment? et quand? (Boyer, 1993; Giasson, 2007). La première partie de chaque séance d’enseignement visait à présenter une brève définition ainsi que quelques exemples de la stratégie à l’étude (étape du « Quoi? ») et à expliquer aux élèves la raison pour laquelle l’apprentissage de cette stratégie leur serait utile (étape du « Pourquoi? »). L’expérimentatrice montrait ensuite aux élèves comment exercer la stratégie à l’étude en rendant explicite son raisonnement (étape du « Comment? »; modelage) et proposait aux élèves de mettre en pratique les diverses notions apprises (étape du « Comment? »; pratique guidée, pratique coopérative et pratique autonome). Pour ce faire, les élèves devaient, lors de chacune des rencontres, procéder à la lecture d’un court extrait de l’album intitulé « Messire Guillaume : Les contrées lointaines » de Bonhomme et Bonneval (2005). Les diverses activités proposées aux élèves au cours de l’étape du « Comment? » étaient construites en s’appuyant sur l’extrait lu et nécessitaient de la part de ces derniers qu’ils identifient et interprètent soit les indices textuels, soit les indices visuels ou les indices à la fois textuels et visuels ayant servi à bonifier leur compréhension de l’histoire. Enfin, l’expérimentatrice précisait les conditions d’application de la stratégie à l’étude, c’est-à-dire le moment où cette stratégie devait être appliquée (étape du « Quand? »). Une fois l’expérimentation en classe des huit ateliers complétée, les participants ont été soumis au post-test.

  1. Résultats de recherche

Cette partie de l’article présente les résultats qui ont été obtenus à la suite des analyses effectuées en vue de répondre aux questions de recherche.

4.1. Résultats obtenus concernant le degré de motivation en lecture

Nous avons dans un premier temps vérifié l’effet de l’intervention proposée sur la motivation en lecture des participants afin de répondre à la première question de recherche : quels sont les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la motivation en lecture de garçons de troisième cycle du primaire en difficulté d’apprentissage ?

Le tableau 3 présente les résultats des analyses de covariance entre les moyennes ajustées des scores de motivation obtenus au post-test pour les deux groupes de sujets, en utilisant les résultats obtenus au prétest comme covariable. Les résultats de l’analyse de covariance effectuée entre les moyennes ajustées des scores de motivation au post-test des groupes expérimental (M ajustée = 2,94, Erreur-Type = 0,13) et témoin (M ajustée = 2,91, Erreur-Type
= 0,12) indiquent qu’il n’y a pas de différence significative entre les scores au post-test lorsque l’on utilise les résultats obtenus au prétest comme covariable (F [1,26] = ,034, p = ,855).

Tableau 3 – Résultats des analyses de covariance entre les moyennes ajustées des scores de motivation obtenus au post-test pour les deux groupes de sujets en utilisant les scores de motivation obtenus au prétest comme covariable

Groupe
n M ajustée au post-test (/4)
Erreur-
type
Min
Max
F
p
Expérimental 14 2,94 0,13 2,68 3,20
0,034 0,855
Témoin 15 2,91 0,12 2,66 3,16

En ce qui concerne la progression des scores de chacun des groupes entre le prétest et le post- test, les résultats des tests-t pairés, tel que démontrés dans le tableau 4, n’ont rapporté aucune différence statistiquement significative entre les scores du prétest et du post-test obtenus par les

élèves du groupe expérimental (t [1,13] = ,481, p = ,638) et du groupe témoin (t [1,14] = 2,057, p = ,059), ce qui indique que les scores des deux groupes n’ont pas changé de façon significative entre les deux passations. Cependant, si l’on observe attentivement ces résultats, on remarque la présence d’une baisse presque significative des scores de motivation des élèves du groupe témoin (p = ,059), baisse non observée au sein du groupe expérimental (p = ,638).

Tableau 4 – Moyennes et écarts-types des scores obtenus par les deux groupes de participants aux épreuves de motivation et résultats des tests-t pairés entre les moyennes des scores obtenus au prétest et au post-test

        Prétest         Post-test           

Variable Groupe n M
(sur 4) É.T. M
(sur 4) É.T. t p

Motivation en lecture
Expérimental
14
2,93
0,51
2,85
0,64
0,481
0,638
Témoin 15 3,14 0,48 2,99 0,59 2,057 0,059 o
Note : otendance statistique : bien que ce résultat soit >,05 et ne puisse être jugé statistiquement significatif, il se rapproche du seuil habituel de signification.

Cette tendance est confirmée par les résultats des tests Z de Wilcoxoniv, rapportés au tableau 5, révélant, au sein du groupe témoin, la présence d’une différence statistiquement significative entre les rangs de la distribution des scores du prétest et ceux des scores du post-test (Z = – 2,019, p = ,044), différence n’apparaissant pas au sein du groupe expérimental (Z = -0,628, p =
,530).

Tableau 5 – Résultats des tests Z de Wilcoxon réalisés, au sein de chacun des groupes, à partir des scores de motivation obtenus au prétest et au post-test

Variable Groupe Z p
Motivation en lecture Expérimental – 0,628 0,530
Témoin – 2,019 0,044*
*p < .05

Ceci suggère que l’intervention aurait eu un certain impact sur la motivation des élèves du groupe expérimental en ayant possiblement atténué, chez ces derniers, la baisse de motivation qui s’est produite chez les élèves ayant reçu un enseignement régulier. Toutefois, l’absence de différence statistiquement significative entre les baisses observées au sein des deux groupes suggère la prudence dans l’interprétation des résultats et la nécessité d’effectuer des études auprès d’un nombre plus important de sujets.

4.2. Résultats obtenus concernant le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée

Nous avons ensuite vérifié l’effet de l’intervention proposée aux élèves du groupe expérimental sur l’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée afin de répondre à la troisième question de recherche soit : quels sont les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la stratégie d’inférence en bande dessinée de garçons de troisième cycle du primaire en difficulté d’apprentissage ?

Le tableau 6 présente les résultats des analyses de covariance entre les moyennes ajustées des scores d’inférence en bande dessinée obtenus au post-test pour les deux groupes de sujets lorsque les résultats obtenus au prétest étaient considérés comme covariable. Les résultats de l’ensemble des analyses de covariance effectuées ne révèlent aucune différence statistiquement significative entre les scores obtenus au post-test, lorsque les résultats du prétest sont utilisés comme covariables (F [1,27 ou 1,24] variant de 0,101 à 0,305, p < ,05).

Tableau 6 – Résultats des analyses de covariance entre les moyennes ajustées des scores d’inférence, d’indices textuels, d’indices visuels et d’utilisation des indices obtenus au post-test pour les deux groupes de sujets en utilisant les scores obtenus pour ces mêmes variables au prétest comme covariable

Variable
Groupe
n M ajustée au post- test (/100)
Erreur- type
Min
Max
F
p
Inférence Expérimental 15 49,38 4 41,17 57,58
0,101 0,753
Témoin 15 51,18 4 42,98 59,38

Indices textuels
Expérimental
12
25,69
5,29
14,71
36,66
— —1
Témoin 13 22,83 5,08 12,29 33,37

Indices visuels
Expérimental
14
43,72
4,88
33,64
53,80
1,039 0,318
Témoin 13 36,38 5,08 25,90 46,85

Utilisation des indices
Expérimental
15
36,03
2,30
31,31
40,76
0,305 0,585
Témoin 15 34,19 2,30 29,47 38,92

Note 1 : il est à noter que l’analyse de covariance n’a pas pu être effectuée à partir des scores relatifs aux indices textuels, car le postulat d’homogénéité des pentes n’était pas respecté pour cette variable. Par conséquent, deux tests-t ont été calculés à partir des scores obtenus pour cette variable au prétest et au post-test. En ce qui concerne le prétest, les résultats du test-t indiquent que les moyennes des deux groupes sont équivalentes (t [1, 24] = 0,005, p = ,996), laissant supposer que, pour cette variable, les scores du prétest ont peu d’impact sur les scores du post-test. Ceci a permis d’effectuer un test-t sur les scores du post-test afin de comparer les moyennes des deux groupes au terme de l’intervention. Les résultats de ce test-t ne révèlent aucune différence statistiquement significative entre les moyennes des groupes expérimental et témoin (t [1, 24] = 0,010, p = ,992).

Lorsque l’on s’intéresse, sur un plan purement descriptif, à la progression des scores entre le prétest et le post-test, telle qu’illustrée par la figure 2, on peut remarquer au sein des deux

groupes une certaine baisse entre la moyenne des scores du prétest et celle des scores du post- test en ce qui concerne l’habileté à faire des inférences (groupe expérimental [prétest : M = 51,11, Écart-type = 16,02; et post-test : M = 48,89, Écart-type = 14,73]; groupe témoin [prétest : M = 57,22, Écart-type = 23,33; et post-test : M = 51,67, Écart-type = 16,12]).

Figure 2 – Figure des pentes présentant les moyennes des scores d’inférence en bande dessinée obtenus au prétest et au post-test pour les sujets de chacun des deux groupes ayant réalisé les deux passations de l’épreuve

Afin de vérifier si les baisses observées entre les scores du prétest et ceux du post-test pour chacune des quatre variables d’inférence se révélaient statistiquement significatives, des tests-t pairés ont été réalisés séparément au sein de chacun des deux groupes (voir tableau 7). Les résultats de ces tests-t pairés, confirmés par les résultats des tests non paramétriques Z de Wilcoxonv (voir tableau 8), n’ont rapporté aucune différence statistiquement significative entre les scores du prétest et ceux du post-test obtenus par les élèves de chacun des deux groupes en ce qui a trait aux scores des quatre variables retenues. Toutefois, il est possible de remarquer la présence d’une tendance qui s’avère près d’être jugée statistiquement significative au sein du groupe témoin en ce qui concerne l’utilisation des indices dont l’habileté semblerait diminuer

de façon presque significative entre les deux passations (t [1,14] = 2,010, p = ,064), alors que ça n’est pas le cas pour celle du groupe expérimental (t [1,14] = 0,186, p = ,855). Cette tendance à la baisse de l’habileté des élèves du groupe témoin à utiliser les indices pour élaborer des inférences est confirmée par le résultat du test Z de Wilcoxon (Z = -1,823, p =
,068).

Tableau 7 – Moyennes et écarts-types des scores obtenus par les deux groupes de participants aux épreuves d’inférence en bande dessinée et résultats des tests-t pairés entre les moyennes des scores obtenus au prétest et au post-test

        Prétest         Post-test           

Variable Groupe n M
(sur 100) É.T. M
(sur 100) É.T. t p

Inférence
Expérimental
15
51,11
16,02
48,89
14,73
0,414
0,685

Témoin
15
57,22
23,33
51,67
16,12
0,884
0,391

Indices textuels
Expérimental
12
25,28
17,49
25,69
17,34
0,109
0,915
Témoin 13 25,13 21,46 22,82 18,65 0,256 0,802

Indices visuels
Expérimental
14
42,86
24,40
44,29
18,93
0, 202
0,843
Témoin 13 30,13 16,51 35,77 16,02 0,809 0,434

Utilisation des indices
Expérimental
15
35,56
8,97
35,11
9,25
0,186
0,855
Témoin 15 41,78 11,40 35,11 8,90 2,010 0,0640

Note : o Tendance statistique : bien que ce résultat soit > ,05 et ne puisse être jugé statistiquement significatif, il se rapproche du seuil de signification.

Tableau 8 – Résultats des tests Z de Wilcoxon réalisés, au sein de chacun des groupes, à partir des scores d’inférence en bande dessinée obtenus au prétest et au post-test

Variables Groupes Z P
Inférence Expérimental – 0,315 0,753
Témoin – 0,754 0,451

Indices textuels
Expérimental

  • 0,180
    0,857
    Témoin – 0,197 0,844

Indices visuels
Expérimental

  • 0,502
    0,615
    Témoin – 0,630 0,529

Utilisation des indices
Expérimental

  • 0,216
    0,829
    Témoin – 1,823 0,068o
    Note : tendance statistique : bien que ce résultat soit > ,05 et ne puisse être jugé statistiquement significatif, il se rapproche du seuil de signification.

D’autre part, les données descriptives relatives aux épreuves mesurant l’habileté des participants à identifier les indices visuels semblent montrer que les indices visuels sont plus utilisés que les indices textuels (voir tableau 7). En effet, sur un plan descriptif, il est possible d’observer que la moyenne des scores obtenus par les élèves des deux groupes est davantage élevée pour le score d’indices visuels que pour le score d’indices textuels et cela, tant pour l’épreuve du prétest que pour celle du post-test. En raison du nombre restreint de sujets, des tests non paramétriques, équivalents aux tests-t pairés, ont été réalisés afin de vérifier si les différences observées révélaient des distributions statistiquement significatives. En ce qui concerne le groupe expérimental, le résultat du test non paramétrique de Wilcoxon montre la présence d’une différence statistiquement significative au plan de la distribution des scores du post-test relatifs aux indices textuels et à la distribution des scores du post-test relatifs aux indices visuels (Z = -2,298, p = ,022), ce qui laisse croire qu’au moment de compléter l’épreuve finale d’inférence, les élèves ayant participé aux ateliers pourraient avoir eu plus de facilité à identifier les indices visuels présents dans les extraits de bande dessinée

proposés que les indices textuels. Les résultats en lien avec ces mêmes variables ne sont pas significatifs pour le groupe témoin (Z = -1,403, p = ,161). Par ailleurs, on n’observe aucun résultat significatif, tant pour le groupe expérimental (Z= -1,687, p = ,092) que pour le groupe témoin (Z = -,723, p = ,470), entre les distributions des scores de ces deux variables mesurées à partir des réponses fournies aux épreuves d’inférence administrées au prétest.

4.3. Résultats obtenus concernant le degré d’acquisition de la stratégie de rappel de récit en bande dessinée

Nous avons finalement vérifié l’effet de l’intervention proposée aux élèves du groupe expérimental sur l’acquisition de la stratégie de rappel de récit en bande dessinée afin de répondre à la deuxième question, soit : quels sont les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la stratégie de rappel de récit en bande dessinée de garçons de troisième cycle du primaire en difficulté d’apprentissage ?

Les résultats des analyses de covariance, rapportés au tableau 9, indiquent qu’il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes en ce qui concerne les différents scores de rappels obtenus au post-test lorsque l’on utilise les résultats des épreuves de rappel administrées au prétest comme covariables (F [1, 27] variant de ,383 à 1,931, p > ,05).

Tableau 9 : Résultats des analyses de covariance entre les moyennes ajustées des scores de rappel de récit obtenus au post-test pour les deux groupes de sujets en utilisant les moyennes ajustées des scores de rappel de récit obtenus au prétest comme covariable

Variable
Groupe
n M ajustée au post- test (/100)
Erreur- type
Min
Max
F
p
Rappel de récit quantitatif
de BD Expérimental 15 34,29 3,34 27,44 41,15
0,383 0,541
Témoin 15 31,35 3,34 24,49 38,21

Rappel de récit qualitatif
de BD
Expérimental
15
60,55
3,89
52,57
68,54
1,931 0,176
Témoin 15 52,78 3,89 44,80 60,76

Rappel de récit global
Expérimental
15
47,25
2,77
41,56
52,94
1,629 0,213
Témoin 15 42,24 2,77 36,55 47,93

Afin de vérifier l’existence possible d’une progression statistiquement significative entre les scores du prétest et ceux du post-test pour chacune des trois variables de rappel, des tests-t pairés ont été réalisés séparément au sein de chacun des deux groupes. Les résultats de ces tests-t pairés, tels que présentés au tableau 10, ne démontrent aucun progrès statistiquement significatif entre les différents scores de rappel obtenus au prétest et ceux obtenus au post-test, et cela, tant pour le groupe expérimental (t [1,14] variant de 1,086 à 2,000, p > ,05) que pour le groupe témoin (t [1,14] variant de ,024 à, 770, p > ,05). Toutefois, en ce qui concerne la progression des scores de rappel au sein du groupe expérimental, les résultats montrent une augmentation qui s’avère très près d’être jugée significative pour le score global de rappel (t [1, 14] = 1,993, p = ,066), tendance statistique non observable au sein du groupe témoin.

Tableau 10 – Moyennes et écarts-types des scores obtenus par les deux groupes de participants aux épreuves de rappel de texte de bande dessinée et résultats des tests-t pairés entre les moyennes des scores obtenus au prétest et au post-test

        Prétest         Post-test           

Variable Groupe n M
(sur
100) É.T. M
(sur 100) É.T. t p
Rappel quantitatif de récit de BD
Expérimental
15
29,09
8,89
33,59
15,49
1,086
0,296
Témoin 15 32,12 11,71 32,05 11,23 0,024 0,981

Rappel qualitatif de récit de BD
Expérimental
15
54,07
9,26
61,48
14,47
2,000
0,065o
Témoin 15 48,15 13,72 51,85 15,53 0,770 0,454

Rappel global de récit de BD (score combinant les sous- scores quantitatif et
qualitatif)
Expérimental
15
41,58
7,79
47,54
11,10
1,993
0,066o

Témoin
15
40,13
12,44
41,95
11,51
0,546
0,594
Note : o Tendance statistique : bien que ce résultat soit > ,05 et ne puisse être jugé statistiquement significatif, il se rapproche du seuil de signification.

Les résultats du test non paramétrique Z de Wilcoxon, indiquant la présence d’une différence statistiquement significative entre la distribution des rangs des scores de rappel global obtenus au prétest par les élèves du groupe expérimental et celle des rangs des scores qu’ils ont obtenus au post-test (Z = -2,187, p = ,029), confirment cette tendance et laissent croire que l’intervention aurait pu avoir un effet positif sur l’habileté des élèves de ce groupe à produire un rappel de récit de bande dessinée (voir tableau 11). Il convient toutefois de demeurer prudent dans l’interprétation des résultats et de signaler la nécessité d’effectuer des études

auprès d’un nombre plus important de sujets afin d’augmenter la puissance des tests statistiques et, possiblement, de déceler des différences entre les groupes.

Tableau 11 – Résultats des tests Z de Wilcoxon réalisés, au sein de chacun des groupes, à partir des scores de rappel de texte de bande dessinée obtenus au prétest et au post-test (n= 15 au sein de chacun des groupes)

Variable Groupe Z p
Rappel de récit quantitatif de bande dessinée Expérimental – 0,937 0,349
Témoin – 0,057 0,955
Rappel de récit qualitatif de bande dessinée Expérimental – 1,486 0,137
Témoin – 0,892 0,372
Rappel de récit de bande dessinée (score global combinant les sous-scores quantitatif et qualitatif) Expérimental – 2,187 0,029*
Témoin – 1,193 0,233
*P < .05

  1. Discussion des résultats

5.1 L’effet de l’intervention sur le degré de motivation en lecture

Afin de formuler notre première question de recherche qui visait à évaluer les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la motivation en lecture de garçons de troisième cycle du primaire en difficulté d’apprentissage, nous nous sommes, entre autres, appuyées sur l’étude de Schwertner (2008) qui acceptait l’hypothèse selon laquelle l’utilisation de bandes dessinées augmenterait le degré de motivation et d’intérêt envers la lecture des élèves du 3e cycle du primaire. Comme mentionné précédemment, les résultats obtenus dans le cadre de la présente étude nous permettent de croire que la mise en place de l’intervention proposée dans les classes du groupe

expérimental pourrait avoir joué un certain rôle sur les scores obtenus aux épreuves de motivation pour ce groupe et possiblement atténué, chez ces derniers, la baisse de motivation qui s’est produite chez les élèves ayant reçu un enseignement régulier. L’effet de nouveauté créé par l’exploitation d’un matériel littéraire souvent non exploité en classe peut expliquer en partie ces résultats. Toutefois, puisque les analyses de covariance que nous avons effectuées en utilisant les scores du prétest comme covariables n’ont pas permis de déceler de différences statistiquement significative entre les scores de motivation obtenus au post-test par les deux groupes, nous pouvons donc en conclure que nos résultats ne confirment qu’en partie ceux de l’étude de Schwertner (2008) qui avait, pour sa part, observé que le recours à la bande dessinée avait un effet positif sur le degré de motivation des élèves et leur degré d’intérêt en lecture. Contrairement à notre étude, l’étude de Schwertner (2008) est une étude descriptive, menée auprès de six élèves de 5e année du primaire, qui avait pour but de vérifier si le fait d’inclure la bande dessinée lors de cercles de lecture et lors de périodes de lecture libres avait un effet positif sur le degré de motivation des lecteurs. Bien que ces deux études exploitent la bande dessinée, elles sont cependant très différentes, ce qui rend les comparaisons entre elles difficiles. Le type de méthodologie employée ainsi que le nombre de participants prenant part à l’étude sont des facteurs qui ont pu contribuer à l’obtention de résultats qui, sans être en contradiction, diffèrent sur certains plans.

5.2 L’effet de l’intervention sur le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée

La présente étude visait également à vérifier les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la stratégie d’inférence en bande dessinée auprès de garçons de troisième cycle du primaire en difficulté d’apprentissage. Les études consultées nous ont permis de formuler l’hypothèse selon laquelle une intervention portant sur l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à l’aide de bandes dessinées permettrait d’augmenter le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée chez les élèves soumis à l’expérimentation. De façon générale, nos résultats semblent toutefois aller à l’encontre de ceux issus des recherches ayant précédemment mis en évidence les bienfaits associés à l’enseignement explicite des stratégies

de compréhension en lecture auprès d’élèves éprouvant des difficultés en lecture aux deuxième et troisième cycles du primaire (Brand-Gruwel et al., 1998; McGee et Johnson, 2003; Van Keer, 2004). En effet, les résultats des études précédentes ont permis de démontrer une augmentation des performances en compréhension en lecture chez les participants, ce que ne permet pas d’établir la présente étude. Les divergences entre nos résultats et ceux des études citées précédemment peuvent s’expliquer, entre autres, par la durée de l’intervention proposée aux élèves ayant participé à ces études et le nombre plus élevé d’ateliers réalisés auprès de ces derniers. Nous croyons que le nombre d’heures consacré aux divers ateliers a pu influer sur les résultats obtenus concernant l’utilisation de la stratégie d’inférence. Ce constat nous pousse à croire qu’il aurait été préférable d’offrir davantage d’ateliers portant sur cette stratégie, ce qui aurait permis d’obtenir des résultats plus concluants concernant l’utilisation des stratégies exploitées. Ces divergences peuvent également s’expliquer par le fait que les études consultées ont été réalisées auprès d’un plus grand nombre de participants que notre étude (environ six fois plus de participants, voir même 15 fois plus dans certaines études). La puissance des tests statistiques étant sensible à la taille de l’échantillon, il est légitime de croire que la taille plus restreinte de notre échantillon puisse avoir eu un certain impact sur nos résultats.

L’âge et le sexe des participants ciblés ainsi que le type de classe fréquenté par ceux-ci (classes régulières, classes spéciales, etc.) s’avèrent également des aspects susceptibles d’expliquer les différences entre les résultats. D’autre part, il importe également de considérer les divergences pouvant être relevées entre les interventions effectuées au sein des différentes études et le type de matériel de lecture utilisé dans le cadre de la présente étude. Certaines études n’ont pas été construites selon le modèle d’enseignement explicite ou n’ont pas exploité les quatre étapes du modèle de la même façon que nous, ce qui peut avoir eu un impact sur les résultats observés. Le type de matériel de lecture utilisé dans le cadre de cette étude, soit la bande dessinée, a fort probablement contribué aux divergences observées entre nos résultats de recherche et ceux des autres études. Les études recensées ont pour la plupart travaillé les stratégies de compréhension en lecture à l’aide de textes narratifs, comme cela est souvent le cas dans les classes de niveau primaire. Or, dans le cadre de la présente étude nous avons utilisé la bande dessinée, matériel littéraire comprenant deux types d’indices soit les indices textuels et les indices visuels. La

formulation d’une inférence en contexte de bande dessinée était alors différente de la formulation d’une inférence en lecture de textes narratifs, surtout pour la recherche d’indices. Au cours de la lecture d’un extrait de bande dessinée, les élèves de notre étude devaient identifier les indices textuels et visuels lui permettant d’effectuer des inférences alors que ceux des autres études se limitaient aux indices textuels.

Bien que les résultats obtenus dans le cadre de la présente étude infirment l’hypothèse issue de la littérature scientifique à l’effet que l’intervention aurait possiblement un impact positif sur le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence, un résultat intéressant a pu être observé en ce qui a trait à l’une des sous-variables d’inférence, soit celle relative à l’utilisation des indices menant à la formulation d’une inférence. On observe, au sein du groupe témoin, une tendance à la baisse des scores d’utilisation des indices entre le prétest et le post-test, ce qui n’est pas le cas pour les scores du groupe expérimental. Ces résultats suggèrent alors que l’intervention réalisée dans le cadre de cette étude aurait eu un certain impact sur l’habileté visant à utiliser les différents indices auprès des élèves du groupe expérimental en ayant possiblement atténué, chez ces derniers, la baisse observée concernant cette habileté chez les élèves n’ayant pas reçu l’enseignement explicite de la stratégie d’inférence. Toutefois, la baisse des performances des élèves du groupe témoin et l’absence de hausse de celles des élèves du groupe expérimental peut laisser croire que les élèves ont eu plus de difficultés à compléter le post-test. Il est possible que celui-ci ait été plus difficile que le prétest, ce qui pourrait également expliquer le fait que les scores d’inférence n’aient pas augmenté suite à l’intervention.

Une étude réalisée par Holmes (1987) a permis de démontrer que les images bonifient les performances des élèves de 3e cycle du primaire en ce qui concerne l’utilisation de la stratégie d’inférence. L’un des objectifs de l’étude de Holmes (1987) a été d’identifier les raisons qui peuvent expliquer l’obtention d’une mauvaise réponse à une question d’inférence chez les bons compreneurs et chez les mauvais compreneurs. Le type d’erreur le plus fréquemment commis a été l’utilisation d’un seul indice. Ce type d’erreur se traduit par des difficultés qu’éprouve l’élève à établir un lien entre deux idées (ou deux indices) ou plus dans l’extrait de texte proposé. En ce qui concerne notre étude, il nous est impossible d’identifier clairement les

raisons qui peuvent expliquer l’obtention d’une mauvaise réponse puisque cet aspect n’a pas été évalué. Il est tout de même possible de formuler l’hypothèse selon laquelle les participants de la présente étude ont éprouvé eux aussi de la difficulté à établir des liens entre les indices textuels et les indices visuels laissés par l’auteur dans les extraits de bande dessinée proposés. Une mauvaise utilisation des indices a alors eu pour effet de nuire à la formulation d’inférences. Les résultats obtenus dans le cadre de cette étude démontrent que les élèves sondés parviennent à identifier un certain nombre d’indices (textuels et visuels) laissés par l’auteur, mais éprouvent de la difficulté à utiliser ces derniers, ce qui explique le score plutôt faible pour la formulation d’inférences lors du prétest et du post-test.

5.3. L’effet de l’intervention sur le degré d’acquisition de la stratégie de rappel de récit en bande dessinée

Cette étude visait également à vérifier les effets de l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à partir de la bande dessinée sur la stratégie de rappel de récit en bande dessinée auprès de garçons de troisième cycle du primaire en difficulté d’apprentissage. Les études consultées nous ont permis de formuler l’hypothèse selon laquelle une intervention portant sur l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture à l’aide de bandes dessinées permettrait d’augmenter le degré d’acquisition de la stratégie de rappel de récit en bande dessinée. Même si aucune différence statistiquement significative n’a pu être observée entre les scores moyens de rappel obtenus au post-test par les deux groupes de sujets de la présente étude, l’analyse de la progression des scores de chacun des groupes entre la passation du prétest et celle du post-test a révélé une tendance positive au sein du groupe expérimental dont les scores semblent avoir subi une certaine hausse entre le début et la fin de l’intervention, ce qui n’a pas été observé au sein du groupe témoin. Comme mentionné précédemment, cette tendance suggère que l’intervention proposée dans le cadre de cette étude pourrait avoir contribué à bonifier les compétences des participants ayant pris part à l’intervention en ce qui concerne la stratégie de rappel de récit. Une telle conclusion va de pair avec celles des études s’étant intéressées au modèle d’enseignement explicite et ayant démontré les effets positifs de l’utilisation d’un tel modèle d’enseignement sur le développement de

certaines stratégies de compréhension en lecture (Brand-Gruwel et al., 1998; McGee et Johnson, 2003; Van Keer, 2004). Aucune des recherches recensées sur le sujet ne s’est cependant attardée à évaluer les effets d’une intervention portant sur l’enseignement explicite de la stratégie de rappel de récit. Une étude réalisée par Rose et al. (1983) a cependant utilisé une intervention faisant appel au modelage de la stratégie de rappel. Bien que la recherche en question n’ait pas évalué directement les effets de l’enseignement explicite sur les compétences liées à l’utilisation de la stratégie de rappel de récit chez les élèves, il est tout de même possible de conclure que les élèves ayant participé aux entraînements (entraînement comprenant le modelage de la stratégie par un lecteur-expert) ont obtenu de meilleures performances quant à l’utilisation de la stratégie de rappel que ceux n’ayant participé à aucun entraînement. Nous sommes également d’avis que le fait d’amener les élèves à porter attention aux indices, tant textuels que visuels, peut avoir un effet sur leur compréhension de l’histoire et, par le fait même, sur la quantité d’informations retenue par ceux-ci et rapportée dans leur rappel. Ainsi, nous partageons les propos de Gambrell et Jawitz (1993) et croyons qu’il s’avère pertinent d’enseigner aux élèves à identifier les indices visuels au même titre que les indices textuels afin de leur permettre de bonifier leur compréhension de l’histoire. Il est à noter que, dans le cadre de la présente étude, seulement deux ateliers sur un total de huit ont été consacrés à l’enseignement et à la mise en pratique du schéma de récit, et à l’identification des indices tant textuels que visuels servant à décrire chacun des éléments d’un tel schéma. Bien que nous n’ayons pas évalué cet aspect, nous sommes d’avis qu’il aurait été préférable d’offrir davantage d’ateliers traitant de la structure du récit aux élèves. En effet, nous croyons qu’un nombre plus élevé d’ateliers de ce type aurait peut-être permis de bonifier les performances des élèves concernant l’utilisation de la stratégie de rappel.

Au cours des huit ateliers proposés dans le cadre de cette étude, les élèves ont eu à identifier les indices visuels présents dans différents extraits qui leur étaient fournis. Bien qu’il soit difficile d’identifier le type d’indice prédominant sur lequel les élèves se sont appuyés pour effectuer leur rappel, nous pensons que le travail effectué sur la recherche des indices visuels peut avoir contribué à l’amélioration des performances des élèves en ce qui concerne la production de rappels. Cependant, nos résultats concernant le score d’utilisation des indices exploités pour

formuler des inférences nous permettent de croire que les participants ont éprouvé de la difficulté à transformer les informations contenues dans le texte et que bien que les images aient été le type d’indices le plus utilisé par les élèves, cela ne les a pas empêchés d’éprouver de la difficulté à lier ces types d’indices entre eux. Il est possible que les difficultés rencontrées lors de la formulation d’inférences aient eu une certaine incidence sur les scores de rappel de récit qui, rappelons-le, sont fortement liés à la compréhension du texte. En effet, puisque les participants semblent avoir éprouvé de la difficulté à formuler des inférences au cours de leur lecture, cela peut avoir entraîné des problèmes de compréhension qui ont alors eu pour conséquence de nuire à leur capacité d’effectuer le rappel du récit.

5.4. Limites de l’étude

Nous croyons que la taille de l’échantillon, la construction et la durée de certaines épreuves ainsi que la durée de l’intervention proposée peuvent être considérées comme étant des limites possibles de l’étude. Le nombre restreint de participants peut expliquer pourquoi les différences observées entre les scores de progression de certaines variables (motivation : diminution de la motivation au sein du groupe témoin, mais pas au sein du groupe expérimental; rappel : augmentation du score de rappel global au sein du groupe expérimental, mais pas au sein du groupe témoin), n’ont pas été décelées entre les groupes sur le plan statistique (les pentes n’ont pas été trouvées statistiquement différentes). Des études à plus grande échelle effectuées auprès d’un nombre plus important de sujets permettraient d’augmenter la puissance des tests statistiques et peut-être de déceler des différences entre les groupes. Nous croyons également que l’élaboration des questionnaires mesurant le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée a pu jouer un rôle déterminant dans la collecte des données et avoir, par le fait même, influencé certains des résultats obtenus. En effet, nous avons constaté lors de l’expérimentation que la charge cognitive que représentait la tâche d’écriture nécessaire pour répondre aux divers questionnaires portant sur la stratégie d’inférence a pu décourager certains élèves et ainsi diminuer leur niveau de motivation face à la tâche proposée, et jouer un rôle sur le degré d’implication déployé par les élèves pour compléter les questionnaires ou le temps employé pour compléter ces derniers. Enfin, nous sommes d’avis que la durée de l’intervention peut être considérée comme étant une limite possible de la recherche. Nous avons constaté, lors

de l’intervention, que l’identification des indices textuels ainsi que des indices visuels laissés par l’auteur dans une bande dessinée n’était pas chose facile pour les participants. Or, des difficultés dans l’identification des indices ont pour conséquence de nuire à la formulation d’inférences.

  1. Conclusion

À notre connaissance, aucune autre étude n’avait auparavant tenté de vérifier les effets d’une approche portant sur l’enseignement explicite de deux stratégies de compréhension en lecture, soit l’inférence et le rappel de récit, à l’aide de la bande dessinée sur la motivation en lecture et sur le degré d’acquisition des stratégies à l’étude auprès de garçons de 5e année du primaire. Les résultats obtenus dans le cadre de cette étude ont permis de contribuer à l’avancement des connaissances en apportant des données nouvelles au domaine de la lecture, notamment en ce qui a trait à l’identification des indices visuels présents dans une bande dessinée, l’utilisation de tels indices dans la formulation d’inférences ainsi que l’habileté visant à produire un rappel de récit de bande dessinée. Bien que cette étude n’ait pas permis de confirmer de façon claire l’effet de l’intervention novatrice proposée sur le degré de motivation en lecture ainsi que sur l’acquisition des stratégies d’inférence et de rappel en bande dessinée, elle a cependant mis en lumière des tendances dans les scores concernant la motivation en lecture et le degré d’acquisition du rappel de récit. De futures rcherches sur le sujet auraient avantage à réaliser ce type d’expérimentation à plus grande échelle afin de confirmer les résultats préliminaires issus de cette étude, à offrir davantage d’ateliers lors de l’expérimentation et finalement à modifier la procédure utilisée pour évaluer le degré d’acquisition des inférences.

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Van Keer, H. (2004). Fostering reading comprehension in fifth grade by explicit instruction in reading strategies and peer tutoring. British Journal of Educational Psychology, 74, 37-70.

Vaughn, S., Bos, C. S. et Schumm, J. S. (2007). Teaching students who are exceptional, diverse, and at risk in the general education classroom (4e éd.). Boston, MA: Pearson Allyn & Bacon.

Zammit, K. (2011). Charting a pathway : Embedding ICT and new literacies into the curriculum. Dans C. M. L. Ho, K. T. Anderson et A. P. Leong (dir.), Transforming literacies

and language : Multimodality and literacy in the New Media Age (p. 9-22). Londres, Royaume- Uni : Continuum International Publishing Group.

Annexe 1

Questionnaire mesurant les attitudes et la motivation face à la lecture

Pour chacun des énoncés qui suit, encercle la réponse qui convient le mieux à ton choix.
N’encercle qu’une seule réponse.

Pas du

tout d’accord Peu d’accord Assez d’accord Tout à
fait d’accord

  1. Lire est important pour moi 1 2 3 4
  2. Je lis souvent dans mes temps libres 1 2 3 4
  3. La lecture est ma matière préférée à l’école 1 2 3 4
  4. J’aime mieux lire un livre que dessiner 1 2 3 4
  5. J’aime acheter des livres et avoir une place où les
    ranger à la maison 1 2 3 4
  6. Lorsque je trouve un livre à mon goût, lire peut
    être amusant 1 2 3 4
  7. J’aime les périodes de lecture libre à l’école 1 2 3 4
  8. J’aime lire des livres de bibliothèque 1 2 3 4
  9. Lire les livres d’école est une perte de temps 1 2 3 4
  10. J’aimerais faire partie d’un club du livre 1 2 3 4
  11. Je me sens bien quand je lis 1 2 3 4
  12. Je déteste lire parce que, la plupart du temps, je
    suis obligé(e) de lire 1 2 3 4
  13. Lire est une façon amusante d’apprendre 1 2 3 4
  14. J’aime lire avant d’aller au lit 1 2 3 4
  15. Je trouve souvent des livres sur des sujets qui
    m’intéressent 1 2 3 4
  16. J’aime regarder les livres à la bibliothèque 1 2 3 4
  17. Lire est ennuyeux 1 2 3 4
  18. Je lis souvent plusieurs livres durant les
    vacances 1 2 3 4
  19. J’aime recevoir un livre en cadeau 1 2 3 4
  20. J’aime commencer la lecture d’un nouveau livre 1 2 3 4
  21. Je me sens à l’aise lorsque mon enseignant me
    pose des questions sur ce que je lis 1 2 3 4

Pour l’énoncé qui suit, encercle la réponse qui convient le mieux à ton choix.
N’encercle qu’une seule réponse.

  1. Habituellement, je lis …
    a) parce que c’est nécessaire à l’école
    b) pour me détendre, me relaxer, pour le plaisir, m’amuser ou rire
    c) pour avoir des frissons de peur
    d) pour m’informer, me renseigner sur un sujet, pour apprendre quelque chose
    e) pour trouver des réponses à mes interrogations personnelles

Annexe 2
Exemple de questions tirées du questionnaire mesurant le degré d’acquisition de la stratégie d’inférence en bande dessinée : test B (post-test)

  1. a) Regarde les cases ci-dessous. Selon toi, quelle est la réaction de Bénigne face à ce que raconte son frère?

N’oublie pas de te référer à ces cases qui se retrouvent à la page 7
de l’album de Corcal et Édith (2004)

b) Quels sont les indices qui t’ont aidé à répondre à la question 4.a?

i Le concept de multitexte est une évolution du concept de texte multimodal qui vient combler les problèmes épistémologiques associés à ce dernier terme (Boutin, 2012).
ii La question portant sur la stratégie de prédiction (question 5) a été enlevée du calcul.
iii La question 1.b a été enlevée du calcul puisque, pour y répondre, l’élève devait s’appuyer uniquement sur des indices textuels.
iv En raison du nombre restreint de sujets par groupe (n = 14 et n = 15) et du manquement au postulat de la loi normale au sein du groupe témoin, il s’est avéré justifié de recourir à un test non paramétrique équivalant au test-t, soit le test Z de Wilcoxon, qui compare la distribution des rangs des scores entre le prétest et le post-test, détectant ainsi les différences susceptibles d’apparaître dans les distributions des variables.
v En raison du nombre restreint de sujets que l’on retrouve par cellule lorsque les analyses sont réalisées de façon distincte au sein de chacun des deux groupes (n variant de 12 à 15) et du manquement au postulat de la loi normale pour certaines des variables étudiées, il convenait de recourir à des tests non paramétriques et de vérifier si les résultats de ceux-ci correspondent à ceux des tests-t paramétriques.

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