Julie Gallego
Maître de conférences en langue et linguistique latines, Université de Pau et des Pays de l’Adour
Résumé
Cet article présente une étude, de type qualitative et descriptive, fondée sur une expérience menée dans le cadre d’une séquence sur l’art épistolaire, avec des élèves de 4e en France. Dans un premier temps, cette séquence, qui s’appuie sur la lecture comparée des Lettres à sa fille de Calamity Jane (1997 et 2007) et de l’album Calamity Jane de Morris et Goscinny (1967), est présentée et, certaines des observations et des productions réalisées à l’égard de sa mise en œuvre en classe sont détaillées. Par la suite, des pistes de bonification théorique pour l’étude du recueil de lettres sont exposées. Ces pistes complémentaires visant l’enrichissement de la séquence initiale s’appuient essentiellement autour des variations énonciatives, des récits de vie entre fiction et vérité et, de l’intégration narrative et graphique de photographies réelles du personnage historique. Cette démarche enrichie est rendue possible par la réédition des Lettres en 2007, mettant en doute l’authenticité du manuscrit, et la sortie depuis 2004 de plusieurs romans graphiques reposant sur la première édition ou la suivante, tels Calamity de Fontaine (2004) et, Martha Jane Cannary de Blanchin et Perrissin (2007, 2009, 2012). Ces œuvres permettent d’étudier avec des élèves la réception du mythe moderne de Calamity Jane dans les pays francophones.
Abstract
This article is a qualitative and descriptive study, based on teaching students, aged 13-14, about epistolary art in France. First of all, the section based on a comparative reading of Calamity Jane’s Lettres à sa fille (1997 and 2007) and the comic book Calamity Jane (1967) by Morris & Goscinny is presented and some observations about presenting them in the classroom are detailed. Secondly, the article makes further suggestions to enrich these letters’ study, mainly by means of enunciative variations, life-narratives dealing with fiction and truth, but also the narrative and graphical integration of actual photographs pertaining to the historical character. What makes these improvements possible is the new augmented edition’ of the letters in 2007, in which the question of an apocryphal manuscript is revealed to French readers, and also several graphic novels’ publication, since 2004, based on the first or the new edition such as Fontaine’s Calamity and Blanchin & Perrissin’s Martha Jane Cannary. These comic books allow us to study with students Calamity Jane’s modern myth reception’ in Francophone countries in Francophone countries.
Mots-clés : récits de vie, art épistolaire, Calamity Jane, intermédialité, bande dessinée
Keywords: life-narrative; epistolary art; Calamity Jane; intermediality; comic books
Lorsque Goscinny et Morris mettent en scène Calamity Jane en 19671, le personnage historique de l’Ouest américain est encore peu connu du grand public. Il est alors assimilé, dans l’imaginaire francophone, à ce double fictionnel qui se lie d’amitié au célèbre Lucky Luke dans ce classique de la bande dessinée (BD) franco-belge de l’âge d’or de Spirou. L’album Calamity Jane, paru chez Dupuis (Morris et Goscinny, 1967), est l’occasion pour le scénariste et le dessinateur, amateurs de westerns, de revenir plus longuement sur l’une des grands figures du Far-West, comme Jesse James, Billy the Kid ou les Dalton, pour dépasser l’apparition fugitive et erronée de quelques albums précédents qui en faisaient une hors-la-loi. Le personnage a une telle présence dans cette aventure qu’il reviendra dans une aventure ultérieure, toujours dessinée par Morris mais avec un autre scénariste. Durant plusieurs décennies, pour l’essentiel du public francophone, Calamity Jane est donc l’héroïne qui chevauche aux côtés de Lucky Luke dans cet album, et elle n’est connue ni pour sa véritable vie 2 ni pour ses apparitions dans quelques westerns.
Cette situation perdure en France jusqu’à la publication en 1997 des Lettres à sa fille, dans une petite collection de poche chez l’éditeur Payot, alors que cette correspondance n’avait bénéficié avant cela que d’une diffusion confidentielle dans les années soixante-dix, principalement par les mouvements féministes3. La première édition Payot reçoit un accueil très favorable, notamment auprès des enseignants du secondaire, et plus précisément de collège (soit des élèves de 11 à 15 ans) et la deuxième édition, en 2007, revue par Gregory Monro4, accroît encore la diffusion des Lettres, qui depuis font l’objet d’adaptations théâtrales par plusieurs compagnies et sont même entrées dans certains manuels scolaires. Le texte, dans sa traduction de Marie Sully, n’est pas compliqué à lire puisqu’il est court et qu’il repose sur la syntaxe simple d’une femme qui n’a pas fait d’études. Même s’il comporte quelques mots spécifiques au Far-West, l’ensemble est accessible à de jeunes lecteurs et peut leur donner l’impression d’être plongés dans le quotidien des cow-boys du XIXe siècle. Dans ces lettres adressées à sa fille Janey, qu’elle a donnée à l’adoption au couple O’Neil, pour lui offrir une vie meilleure que celle qu’elle aurait eue à ses
côtés, elle raconte sa vie quotidienne de femme originale dans un univers d’hommes fait de boue, de sang et d’alcool. Mais elle évoque aussi sa douleur et sa tristesse d’avoir été séparée de son enfant, sa fierté de ce que Janey devient durant toutes ses années, sa déchéance physique lorsque la vieillesse et la maladie la rattrapent.
La bande dessinée « moderne », celle des années 2000, fortement influencée par les graphic novels en noir et blanc, aux dessins jetés, et racontant ce qui touche à la sphère de l’intime (à la suite du Maus de Spiegelman [1987-1992, pour l’édition française]), se saisit du mythe moderne de Calamity Jane, en lui insufflant une nouvelle vie, celle de la femme amoureuse et de la mère, en dépassant l’image réductrice, caricaturale et purement comique de la cow-girl téméraire et peu raffinée (figure 1). Sort ainsi un premier album one shot, le Calamity de Sylvie Fontaine, paru chez BFB en 2004 qui s’appuie sur la première édition Payot, ne mettant pas en doute la légitimité de l’attribution des Lettres au personnage historique réel de Calamity Jane. Puis les trois tomes de Martha Jane Cannary de Matthieu Blanchin et Christian Perrissin, parus chez Futuropolis entre 2007 et 2012, qui bénéficient donc de la réédition Payot de 2007 et de la remise en cause de cette attribution, dès la quatrième de couverture.
Figure 1 – Les trois facettes de Calamity Jane
Quelle image pour Calamity Jane : cow-girl solitaire, écrivain ou mère ? Lucky Luke de Morris et R. Goscinny (© Lucky Comics, 2015) ; Calamity de S. Fontaine (© BFB éditions, 2004) ;
Martha Jane Cannary de M. Blanchin et Chr. Perrissin (© Futuropolis, 2007, 2009, 2012).
Devant la richesse de ce corpus, il apparaît tout à fait possible, voire souhaitable, d’exploiter spécifiquement ce dernier en classe, d’autant qu’aucune proposition en ce sens n’a été diffusée.
La question de la supercherie littéraire (ou, au contraire, du témoignage authentique) serait fort intéressante à traiter mais telle n’est pas la visée du travail que nous proposons ici de faire avec des élèves du secondaire, même si elle importe pour le degré d’empathie que les élèves peuvent manifester pour le personnage ; nous avons d’ailleurs déjà eu l’occasion de traiter cette question dans notre précédent article (Gallego, 2014) consacré à Calamity Jane, où nous évoquions les révélations de Jean McCormick, « fille » (supposée ou imaginaire) de Calamity Jane5. L’axe retenu est plutôt celui de la lecture de l’image contribuant à l’enrichissement d’un mythe moderne dans le cadre d’un apprentissage de l’art épistolaire et des récits de vie.
Pour atteindre les objectifs poursuivis, nous relaterons dans un premier temps une expérience de classe (récit de pratique), réalisée il y a maintenant plus de dix ans, en nous inspirant d’une méthodologie de type qualitative et descriptive (Paillé et Mucchielli, 2015). Cette expérience pédagogique, que nous avons personnellement menée, a été réalisée dans le collège de Cestas, dans le département de la Gironde (France), auprès d’élèves d’une classe de quatrième (soit des élèves de 13-14 ans), la seule classe dont nous avions la pleine responsabilité en tant que stagiaire. Si le choix des Lettres à sa fille était issu d’une suggestion de notre formatrice, de l’Institut Universitaire de Formation des Maîtres (IUFM) de l’époque, en raison de la présence au programme de l’épistolaire, l’idée des exposés et l’instauration d’un lien étroit avec la bande dessinée étaient de notre fait, à la fois par goût pour ce médium et par conviction qu’il pouvait permettre aux élèves un autre type d’apprentissage, formateur, enrichissant et enthousiasmant.
Ces élèves étaient au nombre d’une trentaine, dans un établissement sans problème de la banlieue de Bordeaux ; la classe présentait une hétérogénéité normale, était d’un niveau socio- culturel moyen, sans difficultés majeures de comportement et d’apprentissage, et sans cas sociaux extrêmes dans l’ensemble.
Dans la dernière partie de cet article, nous évoquerons aussi la séance que l’une de nos jeunes stagiaires, Laure Cabé, a consacrée à l’étude de deux planches du dernier tome de Martha Jane Cannary (Blanchin et Perrissin, 2012), dans le cadre d’une séquence sur l’art épistolaire, auprès de sa propre classe de quatrième en 2014-2015, dans le collège de Morcenx, dans les Landes (un département situé dans la même académie que notre ancien établissement). Il s’agissait cette fois d’une classe assez hétérogène, peu autonome, comportant vingt-cinq élèves, dont trois présentaient une dyslexie. L’étude de plusieurs planches en lien avec des extraits des Lettres à sa fille était prévue par la stagiaire, mais le manque de temps en fin de séquence l’a amenée à n’en retenir que deux. Nous nous appuierons donc sur une sous-partie de son mémoire de stage, de Master 2 Métiers de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Formation, consacré à « [l]a lettre, un écrit complexe : entre fiction, miroir de l’âme et témoignage » (Cabé, 2015), pour rendre compte de son expérience de néo-titulaire.
Cette perspective descriptive et pratique étant réalisée, nous ouvrirons par la suite notre réflexion aux bonifications possibles de la séquence initialement proposée.
(Calamity Jane, 2007, p. 25-30) et une double planche extraite du dernier tome de Martha Jane Cannary sorti en 2012. Dans la troisième section, en nous inspirant des constats qui émergent de cette première expérience pratique que nous avions nous-même menée, nous présentons des pistes de bonification théorique de la séquence pédagogique initialement proposée. Ces pistes théoriques s’appuient en grande partie sur le traitement envisagé des publications récentes touchant au thème à l’étude, soit la deuxième édition Payot et les romans graphiques parus depuis 2004. Une première série de pistes avait été rapidement évoquée dans notre article de mai 2014 ; elle a ainsi pu servir de base de réflexion à notre stagiaire pour établir une partie de sa séquence sur la lettre, qui s’est déroulée en janvier-février 2015.
3.1. Approche pratique : première mise à l’essai, sur l’album
Calamity Jane et la première édition des Lettres
Lors de notre première année d’enseignement en collège, en 2003, nous avions mis en place avec des élèves de quatrième (13-14 ans) un projet autour du personnage de Calamity Jane, qui recoupait deux domaines du programme officiel, soit celui de la lettre et celui de l’étude de l’image.
3.1.1. Présentation du dispositif
La séquence élaborée était centrée sur le livre Lettres à sa fille de Calamity Jane (1997), qu’une formatrice nous avait suggéré à l’IUFM parce qu’elle avait constaté qu’il avait plu à ses élèves et qu’elle avait pu construire un travail intéressant autour de l’ouvrage dans le cadre d’une étude de l’épistolaire. Nous avions alors choisi de ne pas limiter notre démarche de formation des élèves à la lecture de l’œuvre intégrale en classe, mais d’organiser un projet plus ambitieux, mêlant bande dessinée et lettres, oral et écrit, fiction et réalité, en organisant une grande exposition sur le personnage. Ce fut le cas d’abord au sein de l’établissement, pour que les élèves des autres classes et le personnel enseignant et administratif puissent la voir, puis dans les locaux de la bibliothèque de la ville, pour qu’à leur tour les parents puissent comprendre ce qui avait occupé leurs enfants durant quelques semaines.
Chaque groupe d’élèves devait lire les Lettres à sa fille (Calamity Jane, 1997) et la bande dessinée Calamity Jane de Morris et Goscinny (1967) (et d’autres Lucky Luke supplémentaires, s’ils le voulaient) ; puis, en s’appuyant sur une analyse thématique, réaliser un ou deux panneaux, avec textes et illustrations (tirés d’ouvrages documentaires, des BD ou prises sur Internet, encore peu répandu dans les familles à l’époque). Une petite partie du travail était réalisée en classe, la plus grande partie s’étant faite au Centre de Documentation et d’Information (CDI), ou à la maison hors des heures de cours.
Dans le cadre de cette séquence sur l’épistolaire, nous avions commencé par un travail sur la lettre officielle et, après avoir appris à rédiger ce type de lettre (notamment en vue des demandes de stage de l’année de 3e), les élèves avaient écrit à Mme la Principale du collège, pour l’inviter à assurer l’ouverture officielle de l’exposition. Les élèves travaillaient donc sur tous les postes du projet, y compris la scénographie des panneaux dans la salle qui pouvait accueillir l’exposition. Ils devaient, en outre, présenter de manière synthétique et vivante le travail du groupe devant toute l’assemblée des visiteurs, le premier jour de l’exposition. Il leur fallait donc non seulement améliorer leur capacité de rédaction à l’écrit, leur esprit de synthèse et d’analyse, leur efficacité dans un travail collectif, l’organisation esthétique de leurs panneaux, mais aussi apprendre à contenir leur stress et maîtriser leur niveau de langue pour s’exprimer officiellement devant un public important et nombreux, afin de présenter un travail qui les avait enthousiasmés.
3.1.2. Réception de la séquence pédagogique proposée
Cette première expérience autour de Calamity Jane dans les Lettres et en BD s’est révélée intéressante, et cette séquence a été celle de l’année que les élèves ont préférée, celle dans laquelle ils se sont le plus investis, aussi bien en cours que dans le travail personnel. Pourtant, nous ne disposions à l’époque que de quelques livres documentaires très généraux, tous les élèves n’avaient pas Internet pour faire des recherches et, le scénario et les dialogues du Lucky Luke ne reposaient pas du tout sur les Lettres à sa fille, donc les élèves étaient surtout sensibles aux différences entre la BD et les lettres, et à l’image caricaturale – donc volontairement déformée – du personnage. À une très large majorité, ils se sont passionnés pour le personnage et la lecture des Lettres comme celle de la BD n’a posé aucun problème. Ne mettant pas en doute,
pas plus que nous-même à l’époque, la véridicité des lettres, ils ont développé une forte empathie pour le personnage, ce qui explique en partie leur motivation et l’appropriation forte qui s’est manifestée dans le cadre des exposés, car « l’empathie est la sympathie intellectuelle par laquelle nous sommes capables de comprendre le vécu de quelqu’un d’autre sans l’éprouver pour autant de façon réelle dans notre propre affectivité » (Paillé et Mucchielli, 2012, p. 153-154).
Pour enrichir leurs panneaux (figure 2), certains avaient lu spontanément d’autres Lucky Luke et utilisé ainsi des images des Dalton ou de Billy the Kid pour parler des hors-la-loi de l’Ouest, ou des Amérindiens, pour les comparer avec ceux croisés par Calamity Jane dans la BD et dans les Lettres. Ce fut également pour nous l’occasion de mettre en œuvre, pour un élève, une pédagogie différenciée dans le cadre de l’évaluation de ces travaux, avec un support différent et inattendu. En effet, cet élève, en échec scolaire en français, n’aimant vraiment pas la lecture mais passionné par la cuisine et intrigué par les recettes données par Calamity Jane dans ses lettres à Janey, avait eu l’idée, avec mon accord, de « remplacer » son exposé papier par la réalisation d’un plat, dont il devait expliquer à l’assistance toutes les étapes avec un exposé oral aussi construit que ce qui était attendu de la part de ses camarades lors de la présentation des panneaux. Les recettes de Calamity Jane étant néanmoins moins précises qu’un livre de cuisine moderne, il avait renoncé à faire le « gâteau de vingt ans » (Calamity Jane, 2007, p. 85-86) au profit d’un chili con carne que tous les participants et visiteurs de l’exposition avaient pu goûter et apprécier le jour de l’inauguration. Et, cet élève, habitué aux mauvaises notes, était très fier d’avoir eu les félicitations de tous pour l’ensemble de sa prestation et d’avoir étonné élèves et professeurs par la qualité de son « support » original d’exposé !
Figure 2 – Extraits des exposés des élèves
Quelques éléments de l’exposition : le teaser quelques semaines avant, les affiches promotionnelles des jours précédents, des extraits des panneaux « du livre à la BD » et « Calamity Jane et les femmes », la liste des objets du Far-West.
Les ressemblances et les différences entre la Calamity Jane des Lettres et celle de la bande dessinée.
Figure 2 (suite)
Un exemple de thème retenu par un groupe : les talents culinaires de Calamity Jane (© Lucky Comics, 2015)
Depuis cette expérience d’enseignement, la notoriété des Lettres à sa fille s’est accrue et le recueil a même fait son entrée dans certains manuels scolaires. Citons ainsi Français 4e (Hars, Marchais, Pinon et Boilevin, 2011) pour la séquence « Lettres de femmes », comportant un extrait des lettres de l’édition de 2007. Si l’on ne peut que se réjouir de la présence d’un extrait des Lettres dans ce manuel, on regrettera néanmoins le choix fait pour les illustrations : on trouve une petite photographie de Calamity Jane, l’affiche et un photogramme du film de 1953 avec Doris Day, alors que des extraits des bandes dessinées auraient permis une meilleure formation de l’élève à la lecture de l’image et auraient pu orienter la classe vers une image moins stéréotypée du personnage. C’est pourquoi nous avons choisi au contraire, en tant que formatrice universitaire de futurs enseignants de Lettres, de présenter à nos étudiants la diversité et la richesse des ressources possibles pour un travail sur l’image autour de ce recueil épistolaire.
3.2. Approche pratique : mise à l’essai récente, sur des extraits de la série Martha Jane Cannary et la deuxième édition des Lettres
3.2.1. Présentation du dispositif
Nous intégrons ici, avec son accord, le projet de séquence de l’une de nos étudiantes de Master 2 Métiers de l’Enseignement, l’Éducation et de la Formation (MEEF), Laure Cabé, en stage au collège de Morcenx dans les Landes en 2014-2015, après sa réussite au Capes de Lettres Modernes l’année précédente. Dans le cadre de sa séquence de 4e sur « La lettre, un écrit complexe entre fiction, miroir de l’âme et témoignage » (Cabé, 2015), elle a élaboré plusieurs activités qui s’appuyaient sur l’utilisation des Lettres à sa fille et leur transposition en bande dessinée. Le descriptif de cette séquence (tableau 1) correspond à l’intégralité de ce qu’elle avait prévu de faire avec ses élèves avant de commencer la séquence ; mais nous verrons dans la section suivante que, par manque de temps, tout n’a pu être réalisé. Néanmoins, une séance complète sur la bande dessinée a bien été menée. Nous avons mis en gras dans le tableau 1 les activités et supports prévus autour de la bande dessinée.
Tableau 1 – Proposition de séquence sur la lettre
SEANCE DOMINANTE OBJECTIF SUPPORT
Séance 1 :
Qu’est-ce qu’une lettre ?
Recherche Découvrir l’historique de la lettre et les débuts de la correspondance. Sites internet donnés Questionnaire-guide
Séance 2 :
Lettre privée ou lettre officielle ?
Analyse Analyser la mise en page des lettres officielle et privée. Fiche tableau
Lettre officielle : manuel Français 4e (Bertagna et Carrier-Nayroles, 2011, p. 158)
Lettre privée : Mme de Sévigné. Fiche sur la mise en page d’une lettre
Séance 3 :
Le vocabulaire et les niveaux de langue dans les lettres privée et officielle. Langue
Conjugaison Analyser la langue utilisée dans une lettre privée et une lettre officielle, découvrir les niveaux de langue.
Séance 4 :
La situation
d’énonciation
Grammaire Comprendre ce qu’est une situation d’énonciation.
Séance 5: Entraînement sur la situation d’énonciation
Grammaire Savoir analyser une situation d’énonciation. Groupement de textes : Hugo, de Graffigny
Extraits de bandes dessinées : Hergé, L’Oreille cassée et Le Sceptre d’Ottokar, dans le
manuel Le Fil d’Ariane
(Ginter et al., 2011, p.107).
Séance 6 :
La rédaction d’une lettre officielle
Écriture Sujet : vous êtes en classe de troisième,
vous devez effectuer un stage dans l’entreprise que vous souhaitez. Vous écrivez une lettre adressée au directeur.
Séance 7 :
Devoir Devoir sur les leçons : historique, les codes de la lettre, lettre privée/officielle, vocabulaire.
Séance 8 :
La lettre fictive Lecture Découvrir une lettre fictive. Ovide, Héroïdes : lettre d’Ariane à Thésée
Séance 9 :
Les verbes du 3e groupe Orthographe grammaticale Les particularités des verbes du 3e groupe. Ovide, Héroïdes : lettre d’Ariane à Thésée
Séance 10 :
La lettre un véritable témoignage
Lecture La fonction de la lettre : un témoignage de l’époque. Mme de Sévigné, Lettres choisies
Séance 11 :
La lettre en image Lecture d’image Savoir analyser un tableau. Tableaux de Vermeer
Séance 12 :
Dictée négociée Dictée
Séance 13 : Lecture Comprendre ce qu’est une Hugo, Lettre ouverte aux habitants
La lettre ouverte lettre ouverte. de Guernesey
Séance 14 :
Devoir Devoir : grammaire (la situation d’énonciation)
Séance 15 :
À la frontière de la lettre : le carnet
Lecture comprendre l’organisation d’une lettre et ses objectifs. Calamity Jane, Lettres à sa fille
(juillet 1880)
Séance 16 :
À la frontière de la lettre : le carnet
Lecture comprendre l’organisation d’une lettre et ses objectifs. Calamity Jane, Lettres à sa fille
(septembre 1880)
Séance 17 :
Une légende en images
Lecture d’image La représentation de la lettre dans la bande dessinée. Extraits de bandes dessinées : Blanchin et Perrissin, Martha Jane Cannary : les dernières années 1877-1903 (p. 34-36, 109).
Séance 18 :
Qu’en est-il de la lettre aujourd’hui ? Créer un débat,
réfléchir sur l’attitude à adopter face à internet. Laurel, Strip (revue Spirou n° 3998) Extraits : Les Liaisons Dangereuses, Nous sommes cruels.
Séance 19 :
Lettre cursive : interview
Écrit et oral Créer une interview,
savoir s’exprimer avec aisance à l’oral.
Séance 20
Évaluation finale Bilan de la séquence
Projet de séquence sur la lettre, intégrant un travail avec des bandes dessinées (document élaboré par une stagiaire MEEF 2)
La stagiaire a donc choisi d’utiliser à trois reprises la bande dessinée dans sa séquence et en y consacrant spécifiquement la séance 17, pour travailler sur l’intégration graphique et narrative des lettres dans quatre planches du dernier tome du triptyque Martha Jane Cannary.
3.2.2. Réception de la séance pédagogique proposée
Le mémoire professionnel de fin d’année de notre stagiaire Laure Cabé portait sur sa séquence sur l’art épistolaire et fut l’occasion, pour elle, d’une réflexion a posteriori sur le déroulement de ces séances consacrées aux lettres de Calamity Jane. Nous nous appuyons donc sur son travail pour l’analyse de cette deuxième mise en pratique, plus récente que la nôtre, et plus particulièrement sur la partie III « La lettre : la diversité des formes et des fonctions » / 3. « La frontière entre lettre et journal », et la partie IV « La lettre en image » / 2. « Dans la bande dessinée ». L’enseignante avait élaboré pour les élèves un document de deux pages sur Calamity
Jane (une page pour l’essentiel de sa biographie et une page avec deux photographies, l’une où elle est habillée en homme et l’autre où elle est habillée en femme devant la tombe de Wild Bill). Elle a choisi d’évoquer à l’oral le mystère du manuscrit de Jean McCormick et la discussion a captivé les élèves. La séance sur la lettre de juillet 1880 a duré deux heures, essentiellement consacrées à la révision de la situation d’énonciation, à la question de l’organisation des idées dans un texte narratif et à un travail de recherche orale et collective du vocabulaire permettant de caractériser l’héroïne. Les élèves ont su être sensibles au portrait double de Calamity qui émerge de cette lecture, avec l’aventurière et la mère en souffrance.
Il s’agissait pour cette classe de la première séance de l’année consacrée spécifiquement à la bande dessinée, les autres lectures de l’image ayant le plus souvent porté sur des tableaux. L’enseignante souhaitait montrer aux élèves qu’une bande dessinée n’est pas forcément synonyme de divertissement léger et qu’il est des œuvres graphiques complexes qui reposent sur des lectures littéraires et documentaires précises. Était initialement prévue l’étude de trois planches mettant en scène en milieu d’album Calamity Jane écrivant des lettres (2012, p. 34, 35 et 36) et de l’avant-dernière (2012, p. 109), où l’on voyait Jim O’Neil, le père adoptif de Janey, qui sortait les fameuses lettres d’un coffre. Par manque de temps, l’étude de la mise en image de l’écriture des lettres s’est limitée aux pages 34 et 35, et l’avant-dernière planche n’a été évoquée que pour faire un lien avec les éléments biographiques vus précédemment par les élèves. Dans la double planche, les élèves ont bien repéré les changements de plan et les effets de zoom, permettant de lire ce qu’écrivait Martha, d’y voir même des fautes d’orthographe trahissant son faible degré d’instruction et favorisant une impression de proximité avec l’héroïne. Même si la stagiaire a regretté qu’ils ne pensent pas à se référer systématiquement au vocabulaire de la bande dessinée vu en cours pour leurs analyses d’image, elle a noté un réel intérêt de la classe durant la séance.
3.3. Réflexion théorique : regard sur les pistes de bonifications possibles
Dans le cadre d’une journée de formation en 2013 sur « La place de l’image dans l’enseignement » pour le Master Enseignement à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour,
nous avions eu l’occasion de présenter le dispositif établi et testé, il y a plus de dix ans, et de prolonger nos recherches, en fournissant aux étudiants se destinant à l’enseignement, dans les classes du secondaire, d’autres ressources intermédiatiques autour de Calamity Jane. Nous ne reprendrons pas ici la présentation générale de toutes ces ressources, notamment de ce qui concerne les films, les séries télévisées, les pièces de théâtre, les chansons et les romans jeunesse, puisque l’ensemble est évoqué dans notre article cité plus haut, publié en 2014 et disponible en ligne. Aussi renvoyons-nous le lecteur intéressé par ces données à la partie 3.2.
« Calamity Jane, source d’inspiration pour les arts et la littérature » (Gallego, 2014). Pour le domaine du roman jeunesse, nous ne faisions figurer dans cet article que le roman, accessible aux élèves à partir de 14 ans, Calamity Jane avait deux filles d’Alice de Poncheville, publié en 2007 à L’École des Loisirs, dans lequel le trentième Lucky Luke a une importance pour les personnages (notamment p. 130-132, 138-139 et 142-143). Nous ajouterons ici une autre ressource, découverte depuis : Calamity Jane, une légende du Far-West, sorti en 2011 au Verger des Hespérides, qui peut être lu à partir de 12 ans, un petit livre illustré par Audren Burati et écrit par Cécile Benoist, qui s’appuie sur des citations de l’édition Payot & Rivages de 2007. Dans cet ouvrage, chaque chapitre se termine par la phrase en gras : « Mensonge ou vérité ? Seule Calamity Jane pourrait trancher… », jusqu’au dernier « refrain », qui insiste sur le choix du lecteur : « Mensonge ou vérité ? Cette fois, c’est à toi de trancher… », permettant à l’enfant de comprendre qu’il faut faire la part entre la réalité et la fiction, même si tout n’est pas toujours aisément identifiable comme tel.
Nous nous attarderons ici sur les activités que l’on peut faire spécifiquement autour des bandes dessinées consacrées à Calamity Jane, que nous n’évoquions que succinctement dans notre article de 2014. Nous nous intéresserons plus particulièrement, à deux romans graphiques, soit Calamity de Fontaine (un volume de 82 pages d’un format moyen) et Martha Jane Cannary de Blanchin et Perrissin (un triptyque de 358 pages en grand format6), contre un peu moins de 50 pages pour chaque Lucky Luke, autant d’ouvrages qui permettent de nombreuses activités avec les élèves. En revanche, nous ne retenons pas dans notre corpus l’album Calamity Jane t. 1 – La vie comme un western spaghetti de Jeanne Gaullier et Sophie de Villenoisy (2014), qui n’a
de Calamity Jane que le titre et la mention de la chanson d’Anne Sylvestre (« La ballade de Calamity Jane »), à la page 15.
Essentiellement, nous proposons ici quelques activités reposant sur certains albums, sans prétendre à l’exhaustivité, modifiables suivant les niveaux et les objectifs retenus. Elles s’intègreraient aisément aux programmes de français (par exemple la lettre en 4e, l’autobiographie en 3e) et d’histoire des arts (à la partie « arts du visuel », avec la bande dessinée et la photographie). Notez qu’il est possible de travailler sur un seul album ou une seule série. Nous faisons ici le choix de proposer plutôt des activités reposant sur l’utilisation de plusieurs albums, par le biais de montages, autour du thème « (Se) raconter en bande dessinée, par la photo et par les mots ». Pour ce faire, nous proposons de commencer par les hypothèses de lecture qui peuvent naître de la confrontation des couvertures dans leur ensemble (premières et quatrièmes de couverture), et plus particulièrement des titres. Dans un deuxième temps, nous croyons pertinent de nous intéresser à l’intégration graphique et à la transposition narrative des lettres dans les albums.
3.3.1. Titres, couvertures, sources et démarches
Alamichel consacre logiquement le premier chapitre de son ouvrage Albums, mode d’emploi à l’importance de la première de couverture, « chargée à la fois d’informations et de promesses » (2010, p. 17), pour entrer et faire entrer l’enfant dans l’histoire. Dans la fiche pédagogique située en fin de chapitre et consacrée au « titre d’un album de fiction », il rappelle ainsi la nécessité pour l’enseignant de « faire réfléchir [l’enfant] sur le choix des auteurs concernant les noms de héros » (p. 31). Dans le cas de Calamity Jane, personnage réel, la manière de la dénommer révèle tout de même l’approche que l’auteur souhaite privilégier, le « filtre » initial à travers lequel il nous la donne à voir.
Aussi proposerions-nous à des élèves de commencer par examiner le titre retenu pour annoncer le personnage (figure 3). Ce n’est pas la même chose d’utiliser d’une part « Calamity » ou
« Calamity Jane », et d’autre part « Martha Jane Cannary » pour parler de l’héroïne, surtout lorsque, dans ce dernier cas, le titre est complété par un sous-titre et par un découpage
chronologique. La présence du seul surnom (tout ou partie) renvoie à la sphère publique du personnage et annonce la légende du Far-West conforme aux attentes (même si le reste de l’album, dans le cas de Calamity, peut se révéler plus nuancé). En revanche, la mention de son véritable nom comme titre, avec le surnom seulement dans le sous-titre (La vie aventureuse de celle que l’on nommait Calamity Jane), et le découpage chronologique précis en fonction des grandes périodes de sa vie, permet de comprendre que la série va s’intéresser davantage à l’individu et à ses failles, plus qu’à la légende.
Figure 3 – Comparaison des couvertures
Premières et quatrièmes de couverture de Martha Jane Cannary de Blanchin et Perrissin (©Futuropolis, 2007, 2009, 2012), Calamity de Fontaine (© BFB éditions, 2004) et Calamity Jane de Morris et Goscinny (© Lucky Comics, 2015)
Un travail de décryptage de l’ensemble des couvertures nous semblerait également un élément pertinent à retenir en ce qu’elles forment une unité de sens. On pourrait choisir de montrer les premières de couverture puis les quatrièmes de couverture, puis successivement la première et la quatrième de couverture côte à côte. On analyserait la manière dont les illustrations présentent
Calamity Jane au lecteur (contexte narratif et graphique, avec le style de dessin, les couleurs, les décors…), son âge et son activité, la présence ou la mention d’autres personnages (notamment Janey, Wild Bill), l’ambiance qui s’en dégage, les liens entretenus entre le dessin, le titre et un éventuel texte complémentaire. Les questions de base seraient : « Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? » (Alamichel, 2010, p. 23). L’illustration a en effet la lourde tâche de devoir annoncer et nécessairement condenser le contenu de l’album, ou à tout le moins de l’évoquer, en jouant sur la présence ou l’absence de lien entre les éléments de couverture. Les titres et les illustrations des premières de couverture de Calamity et de Lucky Luke « disent » chacune à peu près la même chose, par l’écrit et par le graphisme, et sont conformes aux attentes sur le personnage. Dans les albums de Martha Jane Cannary, en revanche, la redondance de l’information entre la présence du nom de l’héroïne et de son dessin n’est que partielle car Calamity Jane n’est pas reconnaissable selon les critères que le grand public a d’elle dans l’imagerie traditionnelle : elle est loin et semble garder une part de mystère. De plus, la présence des illustrations de quatrième de couverture apporte un lien de complémentarité, en ce que seul un fragment de Martha Jane est visible dans la première (l’essentiel étant en hors-champ, elle nous échappe) et que les deuxième et troisième sont consacrées à Wild Bill et Janey. Signalons tout de même pour terminer que la quatrième de couverture des Lucky Luke ne présentant pas d’intérêt autre que celui de rattacher les deux albums à la série par la mention des autres titres parus, il serait inutile de l’analyser spécifiquement avec les élèves.
3.3.2. Les différentes versions de la vie de Calamity Jane
Toujours dans le cadre de pistes complémentaires possibles, il nous semblerait également judicieux de faire chercher aux élèves l’éventuelle mention des sources utilisées par les auteurs pour écrire et dessiner leurs bandes dessinées : pas de bibliographie pour les Lucky Luke (ce qui correspond au cas le plus fréquent), les Lettres à sa fille pour les deux autres titres et deux ouvrages documentaires supplémentaires pour Martha Jane Cannary, Sylvie Fontaine d’une part7 et, Matthieu Blanchin et Christian Perrissin d’autre part précisant leurs ressources avant le début de leur histoire. Ces derniers se mettent même en scène à leur table de travail dans la première case du premier album, la bulle du premier commençant par « [p]our imaginer ce qu’a pu être la vie de Martha Jane Cannary – en essayant d’inventer le moins possible – […] »
(Blanchin et Perrissin, 2007, p. 3) et la bulle du second donnant les références. Les Lettres sont aussi citées dans le récitatif qui précède la dernière image de cet incipit.
Ces trois auteurs explicitent leur démarche : pour Fontaine, même si les Lettres en sont la source revendiquée, son récit « ne prétend pas retracer la réalité. C’est une fiction » (Fontaine, 2004) ; pour Blanchin et Perrissin, leur œuvre mêle aussi vérité (lorsque l’on peut la connaître ou s’en approcher) et fiction (lorsqu’il faut combler les vides et donner une épaisseur psychologique aux personnages, donner vie au récit, créer des dialogues, etc.). Il conviendrait de souligner auprès des élèves la volonté de rigueur dans le travail de recherche et le tri des informations, en fonction de leur degré de véracité, mais aussi toutes les incertitudes qui en découlent. On pourrait ainsi leur demander au préalable de retrouver les formules qui le montrent, dès cette première planche (et ailleurs dans les trois tomes, dès qu’ils en auraient compris le principe) : « Ce qui est incontestable, c’est que… » / « On sait aussi que… » / « Mais il est aussi fort probable que… ». Citons, parmi d’autres, quatre scènes inventées, liées à la difficile « gestion » par Jane de sa féminité durant son périple dans un milieu d’hommes, afin de rendre le récit vivant avec plus de vraisemblance et ainsi s’approcher au mieux de ce qu’a pu être la vie du personnage réel : le viol par le trappeur irlandais (Blanchin et Perrissin, 2007, p. 52-53), l’humiliation et le harcèlement sexuel des autres conducteurs (Blanchin et Perrissin, 2007, p. 107-108), le sang menstruel à dissimuler (Blanchin et Perrissin, 2007, p. 89, 93, 98) et la détresse lorsqu’elle retrouve par hasard la tombe de sa mère (scène inventée, inimaginable dans tous les westerns traditionnels sur Calamity Jane, seule la série télévisée de HBO Deadwood (Milch, 2004-2006) comportant une mise en scène semblable de la détresse du personnage). Le but de Blanchin et Perrissin est de
« montrer comment s’est construite la femme de légende à partir des détails du quotidien dans la mesure où ce quotidien se situe dans des conditions à la fois banales et héroïques » (Cheilan, à paraître).
L’album de 1967 de Morris et Goscinny met à l’honneur Calamity Jane, après une apparition furtive dans Hors-la-loi (1954, sur un avis de recherche placardé), dans Lucky Luke contre Joss Jamon (1958, où elle est dessinée sur deux cases lors du procès du héros) et dans Les Dalton se rachètent (1965), avec la simple mention par le chien Rantanplan de sa capacité au tir. L’album
Calamity Jane n’est visiblement pas inspiré par les Lettres. Les planches 4 et 5 trouvent selon nous leur origine dans un court texte dont Goscinny aurait eu connaissance, Life and Adventures of Calamity Jane (Calamity Jane, 1896), l’autobiographie dictée à un journaliste, à laquelle il est fait allusion dans la lettre suivante (figure 4), que l’on pourrait soumettre au sens critique des élèves :
Figure 4 – Lettre de Calamity Jane à Janey datée de janvier 1901
Il serait ensuite judicieux de faire retrouver aux élèves les passages de l’album qui mettent en doute la véracité de ses récits, qu’elle semble modifier au gré de son auditoire, et procéder à une étude plus précise de pages 6 et 7 (figure 5), construite sur un récit-cadre (assuré par Calamity Jane) et un récit encadré, en les amenant à prêter attention au jeu concernant la forme des cadres des cases (ou l’absence de cadre), suivant les niveaux de narration et leur contenu. Ainsi, sur un plan graphique, la case 1 de la page 6 et les cases 1 et 5 de la page 7, dépourvues de bord qui en matérialiserait les limites, appartiennent-elles au récit-cadre mais leur contenu correspond à celui qui surmonte les cases du récit encadré (des cases 2 à 9 de la page 6 et des cases 2 à 4 de la page 7, à bords arrondis) et qui est un commentaire d’images de sa jeunesse, telle une voix off. Lorsque Calamity commente son propre récit pour Lucky Luke, on retrouve la forme normale des cases à angles droits (case 10 de la page 6 et cases 6 à 9 de la page 7). Sur un plan textuel, certaines répliques sont centrées sur ces « variations narratives » comiques dont Calamity Jane semble avoir le secret :
CALAMITY JANE : Je vais te raconter l’histoire de ma vie, Lucky Luke. C’est un passe- temps que j’affectionne. (p. 5, case 11)
LUCKY LUKE : C’est là une vie bien remplie…
CALAMITY JANE : Faut te dire que je suis assez menteuse. Mais attends, ce n’est pas fini. (p. 6, case 10)
UN COW-BOY AU SALOON (s’adressant à Lucky Luke) : Elle nous raconte sa vie. C’est une merveilleuse conteuse. Elle sait choisir les mots qu’il faut !
CALAMITY JANE (s’adressant à Lucky Luke) : Viens te joindre à nous ! C’est une nouvelle version ! (p. 11, case 4)
Figure 5 – Calamity Jane raconte sa vie à Lucky Luke
Lucky Luke 30 – Calamity Jane de Morris et René Goscinny © Lucky Comics, 2015 [Dupuis, 1967]
p. 6-7.
Le texte Life and Adventures of Calamity Jane8, qui a sans doute servi de source à Goscinny pour ces deux pages, comporte des divergences avec le contenu des lettres mais comme, d’une part,
dans la lettre citée plus bas qui fait allusion à ce récit de vie, Calamity Jane revendique ses affabulations pour rendre le tout plus intéressant pour le journaliste, et que, d’autre part, les Lettres à sa fille sont peut-être fictives, Goscinny est pleinement dans le vrai en faisant constamment inventer des histoires, sous différentes versions, à sa Calamity ! À propos des événements évoqués dans cette courte autobiographie et après des années de recherches sur les traces de la vraie Calamity Jane, Monro (2010, p. 6) écrit : « Les dates sont souvent fantaisistes, les exploits enjolivés sans vergogne, les épisodes les moins glorieux pudiquement laissés dans l’ombre, mais qu’importe : le résultat ne manque pas de panache… ».
Plusieurs passages de Martha Jane Cannary (figure 6) vont dans le même sens que cette double planche de Lucky Luke, mettant en avant par le texte et l’image la conteuse extraordinaire qu’elle était avant même l’écriture des Lettres à sa fille, la montrant d’abord en train de raconter sa vie devant un auditoire improvisé (Blanchin et Perrissin, 2012, p. 9) puis, quelques années plus tard, sur scène, dans un show dont elle est la vedette et qui ravit le public :
Figure 6 – Martha raconte sa vie à un public conquis
Martha Jane Cannary 1. Les Années 1852-1869 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2007, p. 64 case 3.
Figure 6 (suite)
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin
© Futuropolis, 2012, p. 11 cases 5-7 et p. 12 cases 1-3.
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin
© Futuropolis, 2012, p. 67 cases 1-4 et p. 69 cases 1-3.
Finalement, comme l’écrit Christian Perrissin dans la case suivante (figure 7), sa capacité à déformer son histoire est telle que « rien n’est jamais sûr avec Martha Jane Cannary. Il existe souvent un tel fossé entre la réalité et la légende de sa vie que tous les scénarios sont possibles. »
Figure 7 – Calamity Jane, entre la réalité et la légende
Martha Jane Cannary 1. Les Années 1852-1869 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2007, p. 125, case 3
3.3.3. Le récit de vie, de la photographie à la case
Morris et Goscinny (1967) se sont inspirés de plusieurs photographies de Calamity Jane, habillée en femme ou en homme (qu’elle vendait pour avoir quelques sous), pour donner vie à « leur » Calamity, comme le montrent aisément les trois montages suivants (figure 8), qu’il serait pertinent de proposer aux élèves :
Figure 8 – Calamity Jane, habillée en homme ou en femme
Calamity Jane en habits d’homme (photographies d’époque)
Lucky Luke 30 – Calamity Jane de Morris et René Goscinny © Lucky Comics, 2015 [Dupuis, 1967]
couverture et p. 4
Calamity Jane en habits de femme (photographies d’époque)
Lucky Luke 30 – Calamity Jane de Morris et René Goscinny © Lucky Comics, 2015 [Dupuis, 1967]
p. 40, case 7
Calamity Jane à cheval (photographie d’époque)
Lucky Luke 30 – Calamity Jane de Morris et René Goscinny © Lucky Comics, 2015 [Dupuis, 1967]
p. 46, case 6
Pour l’album Chasse aux fantômes (1992), on pourrait s’intéresser à la reprise, à la page 47 également, du principe des « documents d’époque » (une autre photographie de Calamity Jane en homme et des illustrations tirées des dime novels).
Le traitement de la source photographique est très différent dans les albums de Fontaine (2004) et Blanchin-Perrissin (2007, 2009, 2012), car les plus célèbres représentations d’époque de Calamity Jane sont intégrées à la narration, soit que le lecteur « accompagne » Calamity Jane durant les séances de pose (chez le photographe ou ailleurs, dans Martha Jane Cannary), soit qu’il les observe avec Janey (figure 9), dans sa quête ultérieure pour découvrir qui était vraiment sa mère (dans Calamity). La photographie n’apparaît plus alors seulement comme un élément de documentation historique pour le dessinateur de bande dessinée mais comme un élément du lien social, familial et personnel réunissant les personnages entre eux, ainsi que les lecteurs et les personnages, et un élément narrativement fort.
Figure 9 – Janey en quête de Jane, à travers des photographies
Figure 9 (suite)
Calamity de Sylvie Fontaine (©), éd. BFB, 2004, planches 12-13, 14 et 62.
Cases et absence de case, cadre et absence de cadre des cases matérialisent pour le lecteur les différents niveaux de narration et ce serait un procédé à faire identifier aux élèves. Dès le début est intégrée à l’histoire de Janey, la plus célèbre photographie de Calamity Jane, en raison de l’imagerie importante du personnage, profondément associée au mythe. Même sa mort et son enterrement ont donné lieu à deux célèbres photographies, l’une du corps (figure 10), l’autre du cercueil entouré de nombreuses personnes.
Figure 10 – Une célébrité même dans la mort
Exposition du corps de Calamity Jane (photographie d’époque)
Calamity de Sylvie Fontaine (©), éd. BFB, 2004, planche 28, case 7.
Dans le dernier tome de Martha Jane Cannary, un journaliste, envers qui l’héroïne a une dette, lui demande de poser dans les nouveaux habits d’éclaireur qu’il lui a achetés, afin d’obtenir une belle photographie « folklorique » pour son article sur Deadwood et les Black Hills, et il lui offre ensuite de les garder (figure 11). La plus célèbre photographie de Calamity Jane est donc présentée comme une commande qui n’aurait rien de naturel et qui permettrait de discuter avec les élèves de la nécessaire distance à avoir face à la vérité aléatoire d’une image.
Figure 11 – Une photographie en habits de scout pour la postérité
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2012, p. 22, cases 1-4.
À la fin de l’album, une dernière photographie réelle de Martha Jane est intégrée à la narration (figure 12) : un marchand de vin, photographe amateur, lui propose de la photographier devant la tombe de Wild Bill Hickok.
Figure 12 – Calamity Jane âgée : une femme à photographier
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2012, p. 103, cases 3-6.
Une note de bas de page à propos de la photographie redessinée avec exactitude, que l’on voit ensuite posée sur la table de nuit de la chambre de Martha Jane (figure 13), précise qu’il s’agit du
« dernier cliché de M.J. vivante à ce jour… » (Blanchin et Perrissin, 2012, p. 106).
Figure 13 – Calamity Jane et Wild Bill, un « couple » pour la légende
Martha Cannary devant la tombe de Wild Bill Hickok (à gauche photographie d’époque, à droite bande dessinée)
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2012, p. 106, cases 1-2.
En complément de ce travail sur les liens entre bandes dessinées et photographies, sur le plan diégétique ou iconographique, on pourrait diffuser aux élèves la « Ballade de Calamity Jane » d’Anne Sylvestre9, dont le quatrième couplet et son refrain évoquent la célèbre photographie de Calamity Jane en habits d’éclaireur :
[…] Le jour des locomotives Je rencontre un Irlandais Faut vraiment que tout arrive Il me tire le portrait
La main sur ma carabine Et le chapeau de travers,
J’ai vraiment une drôle de mine
Il va la rater, j’espère. (4e couplet)
Martha Jane, Martha Jane, Martha Jane Cannary
N’a pas besoin qu’on la prenne En photo pour la galerie
C’est pas souvent qu’elle sourit, Calamity ! (refrain) […]
(Beugras, 1989)
3.3.4. Le récit de vie, de la lettre à la case
Les albums de Calamity et Martha Jane Cannary sont inspirés des Lettres à sa fille mais les choix concernant l’intégration de la composante épistolaire sont différents.
Dans le premier titre, le personnage principal est Janey, qui aurait finalement eu connaissance des Lettres et serait partie sur les traces de sa mère défunte, pour mieux la connaître et se connaître ; la lecture des lettres l’accompagne dans sa quête, comme pour créer un lien inexistant jusque-là avec sa mère ; textes et images mettent donc essentiellement en scène l’acte de lecture de Janey ou l’empreinte mémorielle des mots lus. Certaines planches s’inspirent tantôt d’une seule lettre, tantôt de la combinaison de plusieurs. On pourrait proposer aux élèves une activité autour de la comparaison du texte des lettres et de planches de la BD, en leur demandant d’identifier les passages retenus qui sont devenus des images (Calamity Jane qui conduit la diligence), ou du texte (et, en ce cas, des bulles de parole ou bien de pensée de Calamity, de Janey ou d’un autre personnage)10, ce qui est ajouté (les paroles de Jane aux chevaux, dans l’exemple ci-dessous [figure 14]), comment s’organise la planche (le temps de Janey ou celui de Calamity, les deux mêlés, etc.).
Figure 14 – Janey lit et revit la lettre sur l’orage de grêle
Calamity de Sylvie Fontaine (©), éd. BFB, 2004, planches 20-21.
Figure 15 – Calamity Jane raconte un orage de grêle
La fin de cette lettre (figure 15) étant un peu abrupte, Sylvie Fontaine (2004) choisit d’ajouter comme formule la dernière phrase de la lettre précédente (p. 80), pour construire une scène
« complète ». On observe aussi ce « mélange » de plusieurs lettres dans la tête de Janey (figures 16 et 17), lorsqu’elle y repense en s’endormant ou en marchant, et la présence de Calamity Jane se fait par le biais de sa « voix off » qui s’inscrit dans un cadre ou sur le décor, comme pour entourer tendrement Janey11.
Figure 16 – Les mots de Calamity Jane accompagnent le sommeil de Janey
Calamity de Sylvie Fontaine (©), éd. BFB, 2004, planche 74.
Figure 17 – Lettres de la fin de vie de Calamity Jane
Deadwood Avril 1902* Chère Janey,
je pense que mon journal est près de s’achever. Je deviens aveugle : je peux encore assez voir pour écrire ceci, mais je ne peux continuer à vivre une vieillesse avaricieuse. Tout espoir est mort pour toujours, Janey. Qu’ai-je jamais fait, sinon commettre bévue après bévue ? Tout ce qui me reste, ce sont ces petites photos de toi et de ton père. Je ne peux pas continuer en étant aveugle, et le docteur m’a dit hier que dans 2 mois je serai absolument aveugle. Oh, comme je voudrais avoir à revivre ma vie.
Je hais la pauvreté et la saleté, et ici je devrai y vivre mes derniers jours. Ne me plains pas, Janey. Pardonne toutes mes fautes et le mal que je t’ai fait.
Calamity Jane, Lettres à sa fille (p. 114-115)
Figure 17 (suite)
Calamity de Sylvie Fontaine (©), éd. BFB, 2004, planche 61, cases 5-6.
Dans Martha Jane Cannary, certains passages des lettres sont utilisés pour devenir des répliques des personnages. Afin de s’assurer du sérieux de la lecture des élèves, on pourrait ainsi leur demander de retrouver dans les lettres la source du passage (ou inversement). Voici un exemple de rapprochement à faire, entre les propos de Martha, dans le premier tome de la BD (« Papa disait qu’il combattait les Indiens avec sa Bible… » (Blanchin et Perrissin, 2007, p. 49, case 3) et le passage original de la lettre :
[Ton grand-père] était comme le preacher Smith, il pensait qu’il pouvait combattre la nation indienne tout entière avec une bible. Je ne crains pas de les affronter tant que j’ai 2 pistolets dans la ceinture, mais, aussi sûr que l’Enfer existe, je détesterais les affronter avec une bible sous le bras. » (Calamity Jane, 2007, p. 30).
Cette présence textuelle précise est indéniable, mais c’est surtout l’écriture en action qui est montrée dans l’adaptation, comme réponse à la douleur de l’abandon de sa fille. Plusieurs planches seraient à cet égard facilement exploitables pour une lecture de l’image très riche (figure 18). On privilégierait ce principe d’extraits de l’ouvrage au collège car la lecture intégrale des trois tomes n’est pas adaptée pour des élèves de cet âge ; elle ne serait envisageable qu’à partir du lycée. Le triptyque contient non seulement des « lettres graphiques » (c’est-à-dire intégrées au dessin) qui sont inspirées des Lettres à sa fille, mais aussi des lettres totalement
fictives, notamment celle adressée par Martha à ses frères et sœurs, pour expliquer leur abandon12.
Figure 18 – Les premières lettres de Martha à Janey
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2012, p. 34-35.
Comme on peut le voir dans la précédente lettre, le texte comporte parfois (figure 18), sciemment, des fautes d’orthographe et de syntaxe en français, afin de rendre compte du faible niveau d’instruction de Martha, ce qui n’est pas le cas dans le texte publié par Payot & Rivages (1997 et 2007), dont la traduction française est correcte, mais parfois d’un niveau de langue familier. Ce sont les planches retenues par notre stagiaire pour la séance de lecture de l’image menée avec sa classe de 4e. Certaines lettres sont en revanche tout à faire correctes sur le plan de la langue (figure 19).
Figure 19 – L’écriture des lettres au jour le jour
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2012, p. 38, cases 1-4.
Les deux dernières planches et la dernière page (figure 20) reviennent sur la question de la transmission des Lettres à Jim et à Janey. On peut alors proposer aux élèves d’imaginer à leur tour une lettre fictive s’intégrant à la narration.
Figure 20 – Jim O’Neil ou Le choix du secret
Martha Jane Cannary 3. Les Années 1877-1903 de Blanchin et Perrissin © Futuropolis, 2012, p. 109-110.
Dans cette étude, nous avons évoqué deux mises en pratique sur un même niveau de collège, qui s’appuyaient sur une lecture analytique du recueil des Lettres à sa fille (Calamity Jane, 1997 et 2007) confrontée à diverses œuvres de littératie illustrée sur Calamity Jane : une mise en pratique ancienne, que nous avions personnellement menée sur un album classique de BD franco-belge, et une récente, élaborée par une stagiaire sur un roman graphique créé dans un contexte éditorial différent (remettant en cause l’authenticité du manuscrit).
À ces quelques activités effectivement réalisées et pédagogiquement fructueuses, nous avons également adjoint des pistes théoriques supplémentaires, pour tout enseignant désireux de développer l’étude de la bande dessinée dans ses cours, en choisissant comme problématique la réception en images d’un mythe moderne.
Références
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Blanchin, M. (dessin), et Perrissin, Chr. (scénario). (2007). Martha Jane Cannary 1. Les Années 1852-1869. Paris, France : Futuropolis.
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Morris (dessin) et Goscinny, R. (scénario). (1965). Lucky Luke 26. Les Dalton se rachètent. Marcinelle-Charleroi, Belgique : Dupuis.
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1 Nous tenons avant tout à remercier Sylvie Fontaine, Matthieu Blanchin et Christian Perrissin et, les maisons d’édition Dupuis et Futuropolis, pour nous avoir permis de reproduire gracieusement des extraits de leurs ouvrages. Si Calamity est malheureusement désormais épuisé, il est encore possible de se procurer les deux Lucky Luke cités dans notre étude (Gallego, 2014) et les trois tomes de Martha Jane Cannary. Nous remercions également Liliane Cheilan, pour nous avoir communiqué son article avant publication.
2 Voir Gallego J. (2014), pour un résumé de la vie de la « vraie » Calamity Jane, se reporter plus particulièrement à la partie 1.2. « Calamity Jane, entre légende et vérités ».
3 Sur les différentes éditions de l’œuvre, voir notre article de 2014 cité en note 2 et la partie 1.1. « De l’édition féministe à l’édition scolaire : le parcours étonnant d’une œuvre ».
4 Gregory Monro est un jeune réalisateur devenu un spécialiste du personnage après la lecture, dans son enfance, de l’album de Morris et Goscinny.
5 Voir l’article cité en note 2 et plus précisément la partie 1.3 « Le mystère du manuscrit retrouvé »).
6 Le projet de Blanchin et Perrissin s’étend de novembre 2001 à janvier 2012, donc après la 2e édition Payot & Rivages et la diffusion de la série Deadwood (2004-2006 sur HBO/USA ; 2006 sur Canal+/FR). On pourra faire un parallèle entre l’ampleur narrative de la série et celle du roman graphique, permettant dans les deux cas de s’attarder sur la psychologie des personnages.
7 Avant la planche 1 (les pages ne sont pas numérotées, seules les planches le sont).
8 Le texte autobiographique est facilement accessible en ligne, par exemple sur le site Word Wild School : worldwideschool.org/library/books/hst/biography/LifeAdventuresCalamityJane/Chap1.html (récupéré le 26 novembre 2014).
9 Le spectacle d’Anne Sylvestre au Bataclan compte quatorze chansons, qui s’appuient sur une très bonne connaissance des Lettres à sa fille, comme l’attestent de nombreux détails.
10 Le texte commun à la lettre et à la BD est en gras dans l’exemple suivant (« juillet 1893 »).
11 Par exemple, dans les Lettres (Calamity Jane, 2007), on peut lire : « sans vous deux, les années à venir m’apparaissent comme une piste solitaire (p. 18, 25 sept. 1877), « T’abandonner m’a presque tuée, Janey. » (p. 29, juillet 1880), « Je me traînerais sur les genoux seulement pour être près de toi. » (p. 98, 1893).
12 Blanchin et Perrissin (2007, p. 81, case 7).
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