Effeuiller la chanson: Un dispositif multimodal pour former à la lecture-écriture littéraire


Jean-Louis Dufays Université catholique de Louvain, CRIPEDIS

Résumé

Parce qu’elle allie texte, son et image, la chanson, genre multimodal par excellence, se prête idéalement à une étude intersémiotique en classe de français. Pour permettre aux enseignants d’aller dans ce sens, un dispositif intéressant consiste à envisager successivement les trois strates à propos d’une même chanson. Le texte d’abord : les élèves sontinvités à y repérer tour à tour

(a) la prosodie, le rythme, les refrains, (b) les sons, les rimes, (c) les registres de langue, (d) le ton, le mode d’énonciation, (e) les actes de langage, (f) la structure narrative interne, (g) la relation externe qui est établie avecl’auditeur virtuel. La bande son ensuite : il s’agit ici d’étudier (a) l’instrumentation, (b) la voix, et (c) la scansiondu texte. Le clip vidéo enfin, c’est-à-dire (a) la diégèse, l’histoire racontée par le clip, (b) les procédés de la narration visuelle, et (c) les rapports qui relient ces deux niveaux. Au départ d’un exemple utilisé comme fil rouge (une chanson de Maurane), cet article montre que cette démarche permet aux élèves de considérer chaque strate pour elle-même – tant en réception qu’en production –, sans être parasités par des éléments relevant des autres strates.

Cinq mots-clés

Chanson, multimodalité, texte, son, image.

1 Une version plus brève de cet article a été publiée dans le n°53 de La Lettre de l’AIRDF, sous le titre « De la chanson comme cheval de Troie didactique. Un dispositif pour l’accès multimodal à la lecture-écriture littéraire », 2013, pp. 19-26.

Qu’à l’heure de l’internet et du métissage sémiotique généralisé, la formation à la « littératie multimodale » (Jewitt & Kress, 2003 ; Lebrun Lacelle & Boutin, 2012) soit devenue un nouvel enjeu majeur pour l’enseignement de la langue première semble largement admis, mais la question se pose de l’articulation entre cet objectif et celui, tout aussi majeur,de la formation aux compétences de base de la discipline, parmi lesquelles la lecture littéraire (Dufays, Gemenne & Ledur, 2005). Est-il possible, à cet égard, d’exploiter avec les élèves des objets culturels mixtes relavant de « leur »culture tout en leur donnant accès aux objets et aux démarches de la culture

« patrimoniale » ? Cette question, qui préoccupe les enseignants au quotidien, interpelle frontalement les didacticiens, car elle touche à l’identité même de la discipline « français ».

Face à ce chantier, leur tâche, me semble-t-il, ne peut pas être seulement de décrire et d’analyser ce qui se fait déjà ou ce qui ne se fait pas : l’heure est aussi – à nouveau – à l’élaboration et à la mise en œuvre de modèles et de dispositifs susceptibles d’éclairer et d’inspirer l’action des enseignants. C’est à cette entreprise que je voudrais modestement contribuer ici en présentant une ingénierie didactique centrée sur la chanson, que j’ai élaborée voici un certain temps déjà avec deux collègues (Dufays, Grégoire & Maingain, 1994) et dont j’ai pu éprouver la validité tant sur avec des élèves de 4e et 5e années secondaire que dans le cadre de modules de formation initiale et continuée.

La chanson, un « cheval de Troie didactique »

À considérer la place qu’elle occupe tant dans les outils pédagogiques que dans la formation des enseignants et dans les recherches des didacticiens, la chanson apparait comme un parent pauvre de la classe de français. Les causes de l’«histoire d’amour contrariée » (Caré et Demari, 1988) qu’elle vit avec l’enseignement tient sans doute pour une large part à la méconnaissance – souvent par les médias eux-mêmes – de sa complexité et, partant, à son indignité institutionnelle : il s’agit, croit-on, d’un genre facile, abordable sans initiation par n’importe qui, et donc dénué de valeur formative pour l’école. On ne peut ignorer par ailleurs qu’immergés dans la culture anglo-saxonne, bon nombre d’adolescents francophones ne prisent guère la chanson française, qu’ils tendent à assimiler à la culture de leurs parents.

Ce genre apparait pourtant comme un médium privilégié pour initier les élèves à la littératie multimodale en tant que «cheval de Troie didactique » de premier choix. Je désigne par ce terme tout objet d’enseignement qui permet de conquérir à peu de frais une part plus ou moins grande de l’attention des élèves parce qu’il leur apparait comme situé sur leur territoire, comme relevant de « leur » culture, alors qu’il recèle en même temps de nombreux enjeux formatifs. Tel est bien le cas de la chanson : d’un côté, même si c’est prioritairement à travers ses productions anglophones, elle constitue sans conteste le moyen d’expression et le lieu de projection préféré des jeunes ; de l’autre, elle se présente comme un genre mixte qui permet de croiser étude du texte, du son et de l’image (Calvet, 1980, 1981), comme une médiation vers la poésie (comme le sont aussi le slam et les poèmes mis en chanson), comme une part importante du patrimoine francophone, comme un genre pratique – en raison de ses dimensions brèves – à traiter en contexte scolaire, comme un corpus de choix pour l’étude de certains phénomènes formels et thématiques, et encore comme un support d’approches externes (historique, institutionnelle…) structurantes2.

Le dispositif que je présenterai ici vise à donner aux enseignants les moyens d’articuler avec leurs élèves d’une part les différentes dimensions du genre, à savoir le texte, le son et l’image, et d’autre part les activités de lecture et d’écriture, tout en les exerçant au va-et-vient (participation/distanciation) de la lecture et de l’écriture littéraires. Ce dispositif est constitué de deux temps, l’un qui privilégie la réception, en allant du texte vers le son et l’image, l’autre qui privilégie la production, en allant de l’image et du son vers le texte. Pour le présenter, par souci d’efficacité, je m’appuierai un exemple qui me servira de « fil rouge ».

« Lire » : du texte à l’image en passant par le son


S’agissant d’abord de la réception, comment rendre justice à la chanson ? Voilà un genre qui souffre d’être souvent peu ou mal exploité, soit parce qu’on se focalise prioritairement sur le son et l’image, soit parce qu’à l’inverse, on la limite à son texte, alors qu’elle se définit comme un genre à trois dimensions, qui méritent chacune d’être prises en compte avec la même attention.

2 Ces approches ont été développées notamment par Calvet (1981), Hennion (1981), Authelain (1987) et Maricourt (1996).

Pour permettre aux élèves de se les approprier toutes les trois dans leurs spécificités, je propose de les envisager tour à tour à propos d’une même chanson, mais en inversant l’ordre de la réception ordinaire, c’est-à-dire en commençant par le texte, en poursuivant par la bande son et en terminant par l’image du clip vidéo.

En ce qui concerne l’objet, par ailleurs, quelles chansons choisir ? Dans l’esprit du cheval de Troie, l’enseignant a tout intérêt à privilégier des chanteurs et des chansons qui soient à la fois familiers aux élèves et « porteurs » culturellement, c’est-à-dire qui signifient différentiellement sur les trois tableaux (texte, son, image) et exploitent chacun d’eux singulièrement.

Le texte d’abord

La chanson qui me servira à illustrer le dispositif correspond bien à ces critères, puisqu’il s’agit d’une des plus célèbres chansons de Maurane, chanteuse particulièrement présente aujourd’hui dans l’univers médiatique que fréquentent les adolescents, mais dont les chansons et les interprétations sont en même temps appréciées par les amateurs les plus raffinés du genre. Le texte retenu est « Sur un prélude de Bach », qui a été écrit en 1991 par le célèbre parolier Jean-Claude Vannier :

Lorsque j’entends ce prélude de Bach Par Glenn Gould, ma raison s’envole Vers le port du Havre et les baraques Et les cargos lourds que l’on rafistole Et les torchères, les grues patraques Les citernes de gasoil

Toi qui courais dans les flaques Moi et ma tête à claques

Moi qui te croyais ma chose, ma bestiole Moi je n’étais qu’un pot de colle

Lorsque j’entends ce prélude de Bach Par Glenn Gould, ma raison s’envole Et toutes ces amours qui sedétraquent

Et les chagrins lourds, les peines qu’on bricole Et toutes mes erreurs de zodiaque

Et mes sautes de boussole

Toi, les pieds dans les flaques Moi, et ma tête à claques

J’ai pris les remorqueurs pour des gondoles Et moi, moi je traine ma casserole

Dans cette décharge de rêves en pack Qu’on bazarde au prix du pétrole Pour des cols-blancs et des corbacs Qui se foutent de Mozart, de Bach

J´donnerais Ray Charles, Mozart en vrac La vie en rose, le rock’n’roll

Tous ces bémols et tous ces couacs

Pour Glenn Gould dans c’prélude de Bach.

Comment envisager l’analyse d’un tel texte ? Les entrées possibles sont multiples, mais si l’objectif est de cibler les traits les plus typiques du genre, six paramètres paraissent pouvoir être privilégiés dans le questionnement proposé aux élèves.

  • La « forme », c’est-à-dire le jeu des strophes, des refrains, de la prosodie, du rythme, des rimes. Celle de la chanson de Maurane se signale par sa relative liberté, puisque le texte se découpe en six strophes, qu’il repose seulement sur deux rimes – /ac/ et /ol/ –, lesquelles sont presque toutes suffisantes, pour l’oreille plus que pour l’œil, et enfin croisées dans les strophes 1 et 3, mais plates ailleurs.
  • Le(s) registre(s) de langue : on remarque ici des emprunts à la langue orale (tête à claques, pot de colle, corbacs, se foutre), des métaphores (ma chose, ma bestiole, mes erreurs de zodiaque, mes sautes de boussole, je traine ma casserole), des redoublements de signifiants (bazarde, corbac, Bach ; Bazarde, Mozart ; cols blancs, corbacs ; J’donnerais Ray Charles, Mozart en vrac, La vie en rose, le rock’n roll ; Glenn Gould dans l’prélude de Bach), tous phénomènes qui donnent à ce texte une coloration bigarrée, ludique et manifestement poétique (au sens jakobsonien du terme).
  • L’histoire, la structure narrative interne : si l’on admet que toute chanson met en scène au moins un « personnage » mu par une « quête » minimale, il est possible d’analyser celle-ci comme le récit d’une histoire « grise » à deux personnages (« je » et « tu »), où la narratrice s’attache à convoquer le souvenir d’une idylle finie qui s’est déroulée dans un cadre lourd, à la fois urbain et marin, et où elle se reproche d’avoir été trop possessive.
  • La relation énonciative établie avec l’auditeur virtuel. Comme c’est souvent le cas dans le genre de la chanson, cette relation est ici complexe, ambivalente : d’un côté, la chanteuse s’identifie à l’amante nostalgique, de l’autre, le récepteur est appelé à jouer le rôle du confident, et il est supposé ouvert sur trois cultures différentes : la musique classique (Bach, Mozart, Glenn Gould), la chanson contemporaine (Ray Charles, le rock, « La vie en rose ») etla société

branchée (pack, corbac). Personnage complexe, donc, s’il en est, qui apparait comme un médiateur entre plusieurs générations.

  • Les actes de langage dégagés par le texte, quant à eux, se signalent par leur entrecroisement : dans cette chanson, Maurane à la fois se met en scène, dit « je t’aime », décrit une situation, raconte une histoire et joue avec le langage. On peut donc dire que son langage se fait tour à tour ou simultanément expressif, conatif, référentiel et poétique.
  • Le dernier paramètre retenu pour cette analyse concerne l’usage des stéréotypes et de leur mode d’énonciation. Dece point de vue, le texte apparait comme bâti sur deux stéréotypes : celui de la musique qui rappelle des souvenirs et celui de la nostalgie d’un amour perdu. Tous deux sont manifestement assumés par l’auteur, le texte étant écrit au premier degré, sur un ton qui relève à la fois de la nostalgie, de l’amertume et du lyrisme.

La bande son ensuite

Dans un deuxième temps, les élèves seraient invités à s’intéresser à la bande son, qu’ils pourraient étudier de trois points de vue :

  • L’instrumentation, d’abord, qui se signale ici par son caractère « intermédiatique », puisque les 50 premières secondes de la chanson nous amènent à écouter les premiers accords du premier mouvement du « Clavier bien tempéré» de Bach, dont le texte nous donne à croire qu’il s’agirait de l’interprétation de Glenn Gould. S’agit-il bien de Glenn Gould pourtant ? La confrontation avec l’enregistrement original de celui-ci montre que ce que la chanson nous donne à entendre est en réalité très éloigné de la frappe pianistique si particulière du pianiste canadien. On peut donc parler ici d’un étrange détournement de la référence, mais aussi d’une surenchère dans une tradition intertextuelle déjàsaturée, puisque le début de l’« Ave maria » de Gounod nous rappelle que Maurane n’est nullement la première à piller ce morceau de Bach.

Quant aux effets de sens dégagés par l’orchestration, on ne peut pas parler ici de mimologisme instrumental dans lamesure où la bande son, qui n’est que douceur et fluidité, n’évoque en rien

« les torchères » ou « les rues patraques » du port du Havre.

  • La voix ensuite. La personnalité vocale de Maurane est ici diffuse : elle se signale par des phrases mélodiques descendantes et une voix tour à tour tenue et chuchotée, qui convient plutôt bien pour une évocation de la nostalgie, du cafard, du vague à l’âme. On n’observe pas de mimologisme vocal par ailleurs, sinon lorsque la chanteuse s’appesantit sur l’adjectif « lourds » et accentue la prononciation anglaise de « rock’n’roll ».
  • La scansion du texte se signale enfin par une musique douce, fluide, une interprétation mélodieuse et un jeu de rimes caractérisé par la monotonie.

Le clip enfin

En dernier lieu, s’agissant du clip vidéo, qu’on pourra visionner aisément sur un site comme Youtube, les élèves seraient invités à s’interroger sur trois plans :

  • Le contenu référentiel évoqué. Dans l’exemple qui nous occupe, celui-ci se caractérise par un décor romantique (un salon « kitsch » installé sur une plage ensoleillée) jalonné d’objets hétéroclites, et peuplé par des personnages élégants : la chanteuse en robe d’apparat, et un orchestre de huit musiciens – un pianiste et sept violonistes – tous en smoking et en chemise blanche, mais au col ouvert. Les positionnements sont stables, les déplacements, lents, les mimiques et les gestes, tournés vers l’intériorité, mais la scène est énigmatique : que fait cet orchestre à un tel endroit ? S’agirait-il des rescapés d’un naufrage ?
  • La narration visuelle se distingue quant à elle par un tempo lent, de longs mouvements de caméra, des lumières léchées, des couleurs chaudes (rouge et or), un montage qui alterne gros plans et plans éloignés, et qui montre tour à tour le visage de la chanteuse, l’un ou l’autre musicien et les vagues, dans un mouvement général qui associe le corps de la chanteuse avec le piano et l’évocation visuelle de la musique avec celle de la mer.
  • Les rapports entre les images, le texte et le son. Entre image et texte, la rupture est radicale quant au décor évoqué (plage ensoleillée vs grisaille du Havre), même si les deux univers convergent – pour des raisons très différentes – dans l’évocation d’un climat « romantique » ; le même contraste caractérise les rapports entre l’image et le son, si l’on considère que la musique de Bach évoque davantage les salons classiques qu’une plage de sable, mais l’harmonie sonore du prélude de Bach est malgré tout « illustrée » par l’image des musiciens qui l’interprètent, comme par celle de la régularité des vagues.

Paradoxes et références à tous les étages

On peut le constater, la chanson qui nous sert d’exemple présente l’intérêt didactique non négligeable de présenter des paradoxes et des références à tous les niveaux. Le texte se signale en effet à la fois par un univers référentiel contrasté (grisaille prosaïque du Havre vs classicisme de la musique de Bach) et par le traitement singulier de la langue ; la bande son se distingue par l’hommage paradoxal qu’elle adresse à la fois à Bach et à Glenn Gould, mais aussi par le contraste qu’elle dégage par rapport à l’univers évoqué par le texte ; quant au clip, il se caractérise par une mise en scène « romantique » en décalage complet avec le texte, mais qui peut apparaitre comme un hommage au film de Jane Campion « Le Piano », célèbre entre autres pour ses scènes montrant un piano échoué sur plage.

Un autre exemple : « Nouveau western » de MC Solaar

Parmi les innombrables chansons susceptibles d’être exploitées avec profit dans la perspective d’analyse multimodalequi vient d’être esquissée, j’en évoquerai une autre à titre d’exemple,

« Nouveau western » de MC Solaar. Côté paroles, on a affaire ici à un texte à double entente, à la fois « branché » et truffé de jeux sonores et de références (à l’âge d’or d’Hollywood, à Brassens…). Côté son, l’introduction musicale fonctionne simultanément comme un parfait marqueur d’ambiance – le martèlement lancinant des cuivres évoque efficacement l’univers de violence qui caractérise la diégèse – et comme une référence « intermusicale » au « Bonnie and Clyde » de Gainsbourg. Côté image, enfin, le clip n’illustre guère les faits relatés par le texte, mais il montre le rappeur se mouvant face à l’écran à côté de personnages hagards dans deux décors contrastés, l’un urbain, nocturne et pluvieux, qui rappelle Paris, l’autre aride et ensoleillé, qui évoque l’Ouest américain. Cependant, dans ce clip, l’imageest surtout l’objet d’un traitement rhétorique particulièrement original, où l’illusion thématisée par le texte est commedénoncée par une succession étourdissante de mises en abyme – chaque nouvelle image du chanteur étant l’objet d’un zoom qui l’ouvre sur une nouvelle image, qui semble contenue dans la précédente – et par le tournoiement final desdernières images, qui métaphorise le caractère à la fois ludique et insaisissable de la réalité décrite.

« Écrire » : du son et du clip vers le texte

Si la première partie du dispositif reposait tout entière sur l’analyse de la chanson, la deuxième privilégie à l’inverse les activités de production. Dans une perspective multimodale, il faut souligner ici l’intérêt des activités qui invitent les élèves à partir d’une dimension du genre pour en créer une autre. On peut ainsi distinguer trois types d’activités :(a) de la musique vers le texte : composer un texte au départ d’une bande son, (b) de l’image vers le texte : composer un texte au départ d’un clip muet, (c) du texte vers l’image : à partir d’un texte, composer le scénario d’un clip, une pochette ou une affiche.

J’ajouterais que, pour permettre aux élèves de s’investir au maximum dans cette phase de production, il est utile de les y préparer par la lecture de témoignages émanant d’auteurs de chansons et exprimant les diverses manières dont ils ont composé les paroles : ceux que rassemble le livre de Marcel Amont Une chanson, qu’y a-t-il à l’intérieur d’une chanson ? (1994) sont à cet égard particulièrement intéressants à exploiter.

Bilan

Mon propos était ici de montrer que, si la formation à la multimodalité constitue un enjeu clé pour la reconfiguration curriculaire du cours de français, un outil privilégié pour la développer réside dans ces objets intermédiaires situés à l’intersection de la culture des élèves et celle de l’école que j’appelle les « chevaux de Troie didactiques ». L’exemple de la chanson a montré que le dispositif consistant à effeuiller ce genre par dimensions successives (texte, puis son, puis image) permettait de donner à chacune de ses productions son épaisseur sémiotique maximale. On observera enoutre que cette analyse par dévoilement progressif favorise le va-et-vient de la

lecture littéraire (Dufays et al., 2005) dans la mesure où, si la chanson fait généralement l’objet d’une participation à priori de la plupart des élèves, le découpage en strates favorise à l’inverse leur distanciation à son égard.

Si la pertinence du dispositif est ainsi démontrée, il ne reste plus aux didacticiens du français qu’à passer à l’acte en analysant sa mise en œuvre et ses effets.

Références

Amont, M. (1994). Une chanson, qu’y a-t-il à l’intérieur d’une chanson ? Paris : Seuil. Authelain, G. (1987). La chanson dans tous ses états. Fondettes : Van De Velde.

Calvet, L.-J. (1980). La chanson dans la classe de français. Paris : Nathan, Clé International. Calvet, L.-J. (1981). Chanson et société. Paris : Payot.

Caré, J.-M. & Demari, J.-C. (1988). Chanson et profs : une histoire d’amour contrariée, Le français dans le monde, 216, 48-50.

Dufays, J.-L., Gemenne, L. & Ledur, D. (2005). Pour une lecture littéraire, 2e édition.

Bruxelles : De Boeck.

Dufays, J.-L., Grégoire, F. & Maingain, A. (1994). La chanson. Vadémécum du professeur de français. Bruxelles : Didier Hatier.

Hennion, A. (1981). Les professionnels du disque. Une sociologie des variétés. Paris : Métaillé. Jewitt, C. & Kress, G. (2003). Multimodal literacy. New York : Peter Lang.

Lebrun, M., Lacelle, N. & Boutin, J.-F. (dir.). (2012). La littératie médiatique multimodale. De nouvelles approches en lecture-écriture à l’école et hors de l’école. Québec : Presses de l’Université du Québec.

Maricourt, T. (1996). La parole en chantant. Show-business et idéologie. Bruxelles : EPO.

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