L’article interroge les déplacements réflexifs éventuellement provoqués chez des professeurs par des situations d’échanges en forums lors de stages de formation continue en France. Sont remises en question les évolutions des représentations ainsi que les attitudes. Il s’agit de comprendre si les mises en situation préparent à l’élaboration de gestes didactiques spécifiques aux enseignements littéraires hybrides. Le cadre théorique associe des travaux de didacticiens sur les usages du numérique dans l’enseignement de la littérature à la notion de tutorat hybride. Les analyses des billets échangés par les enseignants, des transcriptions de leurs échanges synchrones et des retours métaréflexifs sur les expérimentations informent sur des prises de conscience. L’étude montre également quelles interrogations et inquiétudes sont liées aux usages scolaires de forums de lecteurs.
The article examines the reflexive displacements caused by situations of exchanges in forums of teacher during training courses in France. The evolution of representations and attitudes are questioned. We want to understand whether context prepare the development of didactic gestures specific to hybrid literary teachings. The theoretical framework combines didactic research about digital technology in literature teaching with the notion of hybrid tutoring. Analyses of the notes exchanged by teachers, transcripts of their synchronous exchanges and metareflexive feedbacks on the experiments allow an understanding of some awareness. The study also shows which questions and concerns are related to the school usage of reader forums.
Depuis une décennie, plusieurs recherches en didactique littéraire interrogent les « nouvelles possibilités d’appropriation du texte et de l’écrit » (Becchetti-Bizot, 2012, p. 43) et examinent les conséquences d’une insertion du numérique « dans la pratique professionnelle des enseignants de français » (Brunel et Quet, 2017, p. 84). La mise en œuvre de séances hybrides1 de lecture, en particulier, pose des problèmes didactiques spécifiques (Moinard, 2018). Ces séances exigent que les professeurs prennent en compte des écrits asynchrones de lecteurs, témoignant parfois d’interprétations imprévues pour entretenir un effort de lecture littéraire2 (Dufays et al., 2015).
La recherche exploratoire dont cet article rend compte envisage la formation de professeurs du secondaire en France à la conduite d’échanges asynchrones entre lecteurs. Il s’agit de comprendre en quoi des mises en situation d’échanges en forums de lecteurs lors de stages de formation continue provoquent une réflexion sur les enjeux des pratiques hybrides de la lecture et sur les conditions de leur efficacité.
Le propos sera développé en trois parties. Nous décrirons d’abord les notions permettant de situer les visées et les modalités d’un « tutorat hybride » des activités de lecture de textes littéraires. Nous justifierons ensuite les choix méthodologiques pour l’étude des situations de formation. Nous décrirons et commenterons enfin les reculs réflexifs manifestés par les participants ainsi que les nouvelles questions et les craintes que les mises en situation ont suscitées.
Le cadre théorique de l’étude articule les descriptions des productions asynchrones sous- tendues par les théories didactiques de la lecture de littérature et la notion de tutorat hybride définie dans des recherches sur les enseignements à distance.
Plusieurs travaux récents en didactique s’intéressent spécifiquement aux manières de susciter en ligne les expressions de lectures subjectives et interprétatives de textes patrimoniaux (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017; Brunel, 2019; Moinard, 2018). Ces recherches relient la description des usages rationalisés de forums ou de blogues scolaires à la caractérisation des opérations discursives et cognitives appelées par l’écriture asynchrone des lectures. Les deux premières recherches s’appuient sur la notion d’activité fictionnalisante du sujet lecteur (Langlade, 2006) pour décrire des opérations de jugements esthétiques, axiologiques, de « concrétisations imageantes ». Brillant-Rannou et Le Baut (2017) ajoutent au modèle la « configuration énonciative » utile dans le cadre des lectures de poésie, qui permet de saisir comment « les paroles des auteurs sont reprises, recontextualisées, appropriées, offertes à la disponibilité des récepteurs du blogue qui les feront peut-être leurs, à leur tour. » (p. 16)
L’intégration des descriptions théoriques de la « lecture subjective » (Langlade, 2006) au paradigme dialectique de la lecture littéraire3 (Dufays et al., 2015) permet de distinguer plusieurs formes de réflexion sur les lectures et les textes littéraires dans des billets d’apprentis lecteurs. Ces écrits peuvent exprimer des prises de recul sur les expériences de lecture dans leurs dimensions affectives et imaginaires, axiologiques ou esthétiques. Ils peuvent aussi manifester une recherche de significations des textes lus. Trois principales opérations cognitives exprimées en ligne constituent donc les cibles des actions tutorales :
Les recherches en didactique littéraire mettent l’accent sur le rôle des consignes pour l’écriture en ligne et suggèrent l’intérêt des étayages professoraux en classe et en ligne. Dans leur introduction au numéro 5 de la Revue de recherches en littéracie médiatique multimodale (mars 2017), Brunel et Lacelle notent que « de nouveaux gestes, scénarios, étayages professionnels accompagnent l’introduction de matériel technologique ». Brillant-Rannou et Le Baut (2017) montrent que la réussite du blogue scolaire i-voix dépend du renouvellement des formes d’écriture littéraire(majoritairement de nature hypertextuelle) au service de projets (eTwinning, journaux de voyage et découvertes de recueils poétiques contemporains). Leur article indique également qu’« une heure de cours hebdomadaire […] spécifiquement consacrée au projet » (p. 4) favorise l’investissement réflexif des scripteurs-lecteurs, mais sans apporter de précisions sur ces moments.
Dans le dispositif inspiré des fanfictions4 qu’étudie Brunel (2019), les lectures d’œuvres intégrales par des collégiens donnent lieu à deux situations complémentaires d’échanges en forum. À côté d’un « forum informel » sur lequel l’enseignant n’intervient pas, différents « fils de discussion » sont induits par des questions du professeur visant à attirer l’attention sur des aspects considérés comme cruciaux. Ainsi l’effort de lecture intégrale de l’œuvre source de la fiction inventée par les élèves est entretenu à travers différents degrés de guidage.
Comme nous l’avons montré dans notre recherche doctorale (Moinard, 2018), les expérimentations de forums de lecteurs conduisent certains professeurs à interroger les modalités d’un accompagnement des écrits asynchrones. Dans la déclaration suivante, une professeure décrit un déplacement de ses attitudes lié aux utilisations réitérées de mursvirtuels Padlet en classe de 3e :
J’ai la sensation que le professeur se sent davantage le rôle d’accompagnant que de sanctionnant :encourager les élèves à produire davantage, à développer les « bonnes » idées facilement repérées devient une partie du travail pédagogique.
(Professeure H, courriel du 27 janvier 2016)
Pour que les échanges asynchrones accompagnent la lecture autonome du roman pour la jeunesse Le Quatrième soupirail de Roger (2005), la professeure souhaite favoriser l’écriture de tous (« produire davantage »), ce qui la conduit à caractériser quelques gestes tutoraux. Détecter des « bonnes idées » pour en « encourager » le développement lui semble caractériser « le rôle d’accompagnant ». L’enseignante précise en faisant allusion à une posture d’étayage définie par Bucheton (2013) : « le professeur lui-même adopte une autre posture : lire les commentaires des élèves sur écran me paraît éveiller plus de bienveillance chez lui. » Une autre enseignante fait remarquer que sans interventionsprofessorales en ligne, les élèves « finissent par tourner en rond » (Entretien du 11 avril 2016 avec la professeure F). Les travaux sur les enseignements à distance aident à préciser les modalités et les enjeux des interventions tutorales.
La notion de tutorat couramment utilisée dans les travaux sur les enseignements à distance trouve son origine dans le modèle de community of inquiry de Garrison et Anderson (2003) qui dépasse l’assimilation entre présence et présentiel. Cette théorisation décrit en effet des formes de présence non physique expliquant le maintien d’une relation didactique en dépit de l’éloignement géographique des acteurs. Selon ce modèle, les apprentissages à distance dépendent entre autres facteurs d’effets de présence cognitive et psychoaffective liés aux interventions en ligne. Les forums dédiés aux enseignements sont envisagés comme des milieux dans lesquels les enseignants projettent une « présence pédagogique » à distance renvoyant au « rôle joué par les formateurs dans […] la facilitation et la direction des processus cognitifs et sociaux pour atteindre des résultats d’apprentissage personnellement significatifs et intéressants d’un point de vue éducatif » (Garrison, 2003; Jézégou, 2010).
La notion de tutorat à distance ou hybride, quant à elle, désigne une articulation concertée de régulations enseignantes différentes afin de maintenir un lien entre des apprenants, tout en soutenant l’acquisition des savoirs. Sur son blogue, lechercheur Marcel Lebrun, professeur en technologies de l’éducation à l’université catholique de Louvain, définit même l’hybridation des enseignements par la capacité des enseignants à endosser un rôle tutoral en articulation avec une posture transmissive :
En ce qui concerne l’hybridation, nous la considérons comme un mélange fertile et en proportions variables de différentes modalités de formation, en présentiel et à distance (Charlier et al., 2006) mais aussi entre des postures d’enseignement transmissif (l’enseignement au sens strict n’exige plus la présence physique en un temps et un lieu donnés, mais peut sortir de l’ex-cathedra pour atteindre l’étudiant où il se trouve) et des postures davantage liées à l’accompagnement de l’apprentissage .
(Lebrun, 2011)
Cette conception conduit le chercheur à conseiller de « réfléchir aux différentes formes de tutorat (technique, cognitif, affectif, métacognitif…) » pour faire « interagir » au cours des enseignements hybrides. La distinction des « formes » de tutorat fait écho à de nombreux travaux sur les enseignements (en général universitaires) à distance.
Nissen (2011) a opéré une synthèse de six recherches5 montrant que l’équilibre des fonctions est une condition de l’efficacité d’un tutorat à distance. Dans le cadre d’une étude de formations linguistiques hybrides pour étudiants non spécialistes, cette chercheuse catégorise neuf fonctions tutorales renvoyant à trois pôles :
Les spécialistes des enseignements à distance décrivent donc des interventions visant à entretenir en ligne l’engagement, la motivation et la réflexion des apprenants, quel que soit l’objet enseigné. Les recherches en didactique littéraire que nous avons mentionnées aident à caractériser plus spécifiquement un éventail d’interventions professorales lors des travaux de lecture-écriture en contexte hybride.
Le Tableau 1 résulte de l’association des cadres notionnels que nous avons rappelés. Il propose une description raisonnée des interventions professorales pour enrichir des échanges en forums de lecteurs. Les « pôles pédagogiques et socioaffectifs » décrits par Nissen (2011) sont associés avec des « stratégies d’intervention » spécifiques à l’effortcollaboratif d’écriture des lectures et d’écriture à partir des lectures. Ces stratégies sont caractérisées à partir de notre travail doctoral et des articles déjà cités qui étudient des usages scolaires de blogues et de forums6 littéraires.
PÔLES (Nissen, 2011) | STRATÉGIES D’INTERVENTION TUTORALE DANS DES FORUMS DE LECTEURS | ||
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PÔLE PÉDAGOGIQUE 1. STIMULATION DES EFFORTS COGNITIFS | SOUTIEN À L’EXPRESSION DIRECTE DES LECTURES | ENTRETIEN D’UNE RECHERCHE STYLISTIQUE (à condition que les professeurs n’imposent pas d’emblée des normes d’écriture) | STIMULATION DES ÉCHANGES ENTRE LECTEURS |
L’expression de la subjectivité du lecteur La réflexion sur la tâche de lecture participative de textes patrimoniaux L’interrogation des significations | Questions et/ou consignes visant à la verbalisation de la réception et les retours sur les textes. « Fils de discussion » induits par des questions professorales qui « constituent des parcours de lecture des élèves dans l’œuvre » (Brunel, 2019, p. 12). « Apprentissage des compétences métatextuelles » par l’écriture des commentaires des productions inventives des élèves (Brunel, 2019, p. 10 et 15). Invitations à se déplacer « à l’intérieur ou entre les textes », à pratiquer « l’intratextualité, l’intertextualité et l’hypertextualité plutôt que la métatextualité » (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017, p. 8). En articulation avec des « pratiques explicatives […] dans […] le blogue et en dehors » (Brillant- Rannou et Le Baut, 2017, p. 8). Demandes de repérages des désaccords à travers un fil de billets7 Incitations à s’interroger sur les textes lus ou la littérature. | Diversification des consignes d’écriture créative. Demandes de productions d’effets par l’écriture fictionnelle ou poétique. « Suggestions variées de formats d’articles pour le blogue » lors de séances hebdomadaires pour amener le lecteur-scripteur « à découvrir en lui des ressources d’écriture insoupçonnées » (Brillant- Rannou et Le Baut, 2017, p. 8). Sur les « espaces d’écriture fictionnelle », le professeur donne une « orientation générale » sans « imposer un sujet précis » (Brunel, 2019, p. 13). Le professeur assume un rôle d’éditeur : la « validation du professeur- administrateur » précède la publication des textes d’élèves (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017, p. 6). Demandes d’une expression plus évocatrice ou plus imagée d’expériences de lectures et/ou des interprétations. | S’adresser en lecteur aux élèves lecteurs. « Le professeur, accompagnateur, colecteur, lui-même impliqué à titre de lecteur réel et subjectif » évite d’adopter la posture d’« un expert surplombant » (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017, p. 5). Accueil des retours libres sur l’effort de lecture de l’œuvre intégrale sur un « forum informel ». La mise en retrait du professeur doit favoriser « l’expression spontanée d’un goût ou d’un rejet » (Brunel, 2019, p. 10). Entretien des expressions de désaccords argumentés. |
2. AIDES MÉTACOGNITIVES Pour une dévolution de l’effort de lecture littéraire. Pour une dévolution des échanges entre lecteurs. | Invitation aux retours sur l’effort de lecture participative, sur la gestion de la compréhension. | Pointage des stratégies permettant des productions – intégrant des remarques d’autrui – plus créatives. Accompagnement de l’émergence de critères de jugements. Identification de « certains aspects susceptibles d’être classés en fonction de leur pertinence et intérêt » (Brunel, 2019, p. 15). Aide au développement de « compétences métascripturales telles que la capacité des élèves à analyser un texte produit, à identifier des éléments à améliorer, et à prendre appui sur des ressources mises à disposition pour le faire » (Brunel, 2019, p. 17). | Explicitation des enjeux de la communication asynchrone entre lecteurs et du rôle des retours sur les expériences de lecture. « Sur le blogue, le professeur explicite les objectifs de l’entreprise et exhibe quelques pensées sources » (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017, p. 13). |
3. ÉVALUATION | Aide à l’élaboration de billets de synthèse après relecture du fil des billets. Séances spécifiquement dédiées à l’apprentissage de la lecture-écriture des commentaires en ligne (Brunel, 2019, p. 15). | Évaluation positive de ce qui cherche à se dire pour favoriser des épaississements. | Aide permettant aux élèves lecteurs de se situer dans la communauté interprétative des pairs et au regard des attentes professorales. « L’élève endosse une posture d’évaluateur, quand le premier jet d’une publication est soumis à la relecture. » (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017, p. 9) |
PÔLE SOCIOAFFECTIF | Soutien à l’expression des lectures | Entretien d’une recherche stylistique | Accompagnement des échanges |
Encouragements à intervenir, en particulier à destination des élèves qui s’autocensurent. Encouragement à l’expression des difficultés de lecture et des vécus subjectifs peu clarifiés. Acceptation des citations peu ou pas commentées. | Maintien d’un contexte énonciatif favorable aux échanges amenés entre lecteurs : « Le ton général du site i-voix est également bienveillant, dépourvu d’ironie sarcastique […] à l’égard des autres contributeurs » (Brillant- Rannou et Le Baut, 2017, p. 6). Encouragements aux rebonds sur les billets d’autrui. |
Les gestes didactiques caractérisés dans le Tableau 1 exigent donc que le professeur-tuteur sache aborder des fils de billets dans leur ensemble et se rende sensible à leur évolution pour rechercher les résonances et les divergences entre les lectures exprimées par les élèves. L’élaboration de ces gestes dépend en particulier de la prise en compte des «expressions spontanées d’un goût ou d’un rejet » (Brunel, 2019, p. 10) des élèves lecteurs et de l’attention que l’enseignant « colecteur, lui-même impliqué » (Brillant-Rannou et Le Baut, 2017, p. 5) porte à sa propre lecture subjective pour favoriser des interactions.
Les considérations théoriques permettent de préciser le questionnement à propos des actions de formation que nous avons menées. Celles-ci, bien entendu, ne peuvent informer directement sur les élaborations de gestes didactiques. Pour autant, elles peuvent montrer des prises de conscience utiles à l’exercice d’un tutorat ciblé parce qu’elles aident à concevoir l’enjeu même de tutorat. Nous nous demandons si des évolutions professionnelles peuvent être accélérées par l’effort consenti des professeurs pour tenir une place dans les échanges asynchrones entre pairs. Nous cherchons à savoir si cet effort induit l’adoption d’une posture de colecteur coscripteur (ré)interrogeant sa lecture esthétique et interprétative. Nous interrogeons également les modifications des représentations de l’enseignement de la lecture et des enjeux de l’écriture interactive que peuvent provoquer les situations hybrides investies en formation. Nous faisons l’hypothèse que les temps de travail en ligne orientés par des consignes visant l’expression des lectures subjectives favorisent la compréhension du « rôle d’accompagnant » des activités de lecture de textes ou d’œuvres littéraires.
Avant d’exposer et de discuter quelques résultats, nous précisons les terrains et les choix méthodologiques de l’étude.
Lors de trois stages de formation, en 2017-2018 et 2018-2019, des professeurs du secondaire ont été invités à échanger en forum des retours sur leurs lectures personnelles d’un même extrait. Dans le système scolaire français, l’enseignement du second degré accueille les élèves de 11 à 18 ans environ dans des collèges (pour quatre années de la scolarité obligatoire, de la sixième à la troisième) et dans les lycées généraux technologiques ou professionnels (en classes de seconde, première et terminale). Les cours de français sont assurés par des professeurs spécialisés dans les enseignements de la langue et de la littérature.
Ces formations associent des apports en didactique de la littérature, des temps d’expérimentations et des échanges réflexifs. Les mises en situation d’échanges asynchrones entre professeurs lecteurs ont pour but de déplacer les représentations sans modéliser prématurément des pratiques et de faire concevoir la notion de tutorat en faisant vivre des processus cognitifs exigés par la collaboration à distance. L’explicitation de ce but au cours des stages justifie les situations d’échanges en forums de professeurs lecteurs.
Les temps de travail suivants sont articulés :
Le Tableau 2 résume les données recueillies au cours des trois expérimentations. Les textes proposés aux professeurs ont été choisis parce qu’ils permettent des expériences esthétiques fortes et une diversité d’interprétations contextualisantes et actualisantes.
Professeurs de lycées et de collèges d’un même secteur (Mantes-La-Jolie) | Professeurs de collèges et de lycées de l’académie de Versailles | ||
Jean-Michel Maulpoix, « Convalescence du bleu après l’averse », Une histoire de bleu (1992) | Aloysius Bertrand, « Un rêve », Gaspard de la Nuit (1842) | Pierre Michon, extrait de « La vie du père Foucault », Vies minuscules (1984) | |
Échanges en ligne sur un mur virtuel Padlet configuré en forum : 13 billets du 21 décembre 2017 au 3 février 2018. Enregistrement audio de la séance en présentiel du 14 mars 2018. Enregistrement audio des échanges métaréflexifs à propos des mises en situation le même jour. | Échanges à distance sur une plateforme pédagogique de l’université de Cergy-Pontoise : 5 billets du 18 mai au 6 juin 2018. Enregistrement audio des travaux en présentiel du 7 juin 2018. | Échanges à distance sur un blogue de classe configuré en forum (9 billets) et enregistrement audio des travaux en présentiel le 18 mars 2019. | |
Enregistrement audio des échanges métaréflexifs à propos des mises en situation. |
Afin de tenir une place dans des échanges en particulier pour projeter en ligne une présence de lecteur attentif à son expérience esthétique comme aux verbalisations d’autrui, les participants produisent des actes de langage traduisant différentes attitudes sociocognitives. Pour reconstituer les évolutions des lectures exprimées à travers les interactions en ligne et en présentiel, les analyses qualitatives ont employé les catégories que nous avons déjà utilisées pour examiner des échanges entre élèves lecteurs (Moinard, 2018).
Ces unités d’analyse de billets de lecteurs distinguent :
En outre, les examens des enregistrements des retours collaboratifs sur les situations asynchrones font l’objet d’analyses de contenus pour identifier :
Ces différentes analyses peuvent donc aboutir à saisir d’éventuels déplacements des représentations et à détecter des attitudes préparant à l’élaboration de gestes didactiques d’accompagnement des efforts de lecture-écriture. Il convient de préciser que les analyses ne permettent pas de rapporter les éventuelles manifestations de réflexion des professeurslecteurs au seul outil de forum. Nous envisageons les forums de professeurs lecteurs en tant que situations sociodiscursives dépendant d’un contexte didactique et permettant de révéler des synergies entre les apports du formateur, les consignes d’écriture en ligne et les articulations des différentes situations d’échange.
Ces situations constituent donc de potentiels catalyseurs d’une réflexion des professeurs sur leurs lectures des textes et sur les enseignements littéraires. Nous rendons compte d’abord des manifestations d’une réflexion amenant à renouveler « l’agir professionnel9 » (Jorro, 2006).
Les analyses montrent que dans les trois expérimentations les professeurs ont en général bien accepté le contrat didactique posé par le formateur. Ils ont cherché à prendre part aux échanges asynchrones et synchrones en rendant compte de leurs lectures subjectives. Pour tenir une place dans les échanges à distance, ils ont dû exprimer de manière suggestive les associations d’idées, les concrétisations et les jugements de goût. Ainsi, à propos du poème d’Aloysius Bertrand, une professeure associe des souvenirs personnels et littéraires :
J’ai repensé à un séjour dans un manoir d’Irlande lorsque j’étais étudiante Erasmus. Le brouillard et lesilence de la nuit rendaient l’atmosphère mystérieuse. Je me suis souvenue de promenades hivernales en forêt
(Bertrand, Anne Gaelle, 110)
Une autre contributrice reprend l’isotopie de la marche : « “Un rêve” m’a évoqué des randonnées de jeunesse, les bottes de sept lieues, des visites dont on se souvient vaguement parce qu’on était trop jeune ou las » (Bertrand, Hortense, 4). Ces deux professeures répondent à la demande posée par le formateur d’une reconstitution « des associations avec des expériences littéraires, esthétiques ou vécues, des images mentales ou des rêveries éveillées par le poème ». La situation d’échanges en ligne les conduit à rechercher une écriture évocatrice des vécus subjectifs qui permet d’intéresser à distance les autres lecteurs. Les deux participantes témoignent d’une imagination kinésique marquée en rendant compte sur le mode du Je me souviens d’enchaînements d’expériences personnelles et littéraires. À l’instar des forums d’élèves lecteurs, les billets s’inspirent les uns des autres pour trouver des manières efficaces de rendre compte des expériences de lecture. Le billet suivant enrichit le stock des verbalisations partagé en développant une série de concrétisations construisant une scène imaginée :
Je vois l’abbaye de Jumièges.
J’entends Baudelaire enécho.
J’imagine un rite « satanique ».
(Bertrand, Cécile, 5)
Les échanges asynchrones permettent aussi les confrontations de jugements de goût et de valeur révisables. À propos du poème en prose de Jean-Michel Maulpoix, une lectrice poste d’emblée quatre billets critiques à quelques minutes d’intervalle :
Que de platitude ! Un poème sur la pluie et le beau temps, inspiré de derrière une fenêtre. Des mots sans résonance : ce bleu qui déclenche des envolées lyriques, je ne parviens pas à le voir « éclaboussé de croyance » n’éveille rien. […] Ce texte m’énerve. Il cultive le cliché. Ah ! Le Ciel… Ah ! Les paysans de nos chères campagnes… Ah ! Un soupir et un bouquet de fleurs… Un peu de douceur dans ce monde de brutes… L’amour tout ça tout ça… La dernière phrase me laisse perplexe.
(Maulpoix, Julie, 1)
La contributrice souligne une irritation dont elle commentera l’intensité lors des échanges en présentiel. Elle recherche les formules assassines bien rythmées (« ce bleu… je ne parviens pas à le voir », « “éclaboussé de croyance” n’éveille rien »); elle recourt à l’ironie (« Ah ! les paysans de nos chères campagnes ») pour donner une force à ses jugements. Le raisonnement est clair : si le poème ne produit aucune émotion esthétique et « n’éveille rien », c’est qu’il est dépourvu d’originalité. Le deuxième billet interroge encore plus directement la valeur poétique : « Poème sérieux ou amateur […] Ce monsieur désœuvré se fait plaisir à s’imaginer en Verlaine. Sans doute un amateur qui “essaie des phrases” » (Maulpoix, Julie, 2). Mais par la suite, la lectrice revient sur sa première réaction (sans doute grâce à une recherche d’informations) et développe une sorte de discussion avec elle-même. Elle intitule son quatrième billet « Hypothèses » : « Je suis passée complètement à côté du texte […] Replacé dans son contexte ce poème prend un tout autre sens » (Maulpoix, Julie, 4). La professeure modifie son sentiment esthétique en dépit de l’irritation initiale. Au-delà, le fil « Maulpoix » garde trace de confrontations des jugements pluriels et divergents qui serviront d’appui au débat en présentiel. Dans un billet intitulé « Un paysage promesse », Virginie reconstitue minutieusement son entrée dans un poème dont elle s’est d’abord méfiée (tout comme Julie) :
Sur mes gardes quand je commence à lire la première strophe, avec les métaphores « faciles » […] Le terme « croyance » m’effraie au premier abord. (Peur d’un mysticisme de pacotille ? D’une grandiloquence affirmée dès la 3ème ligne.) […] Touchée en revanche par la troisième strophe, par l’emploi du conditionnel « on voudrait », qui exprime la « tension vers » quelque chose. Pour moi, un poème sur la contemplation, sur/contre le « volontarisme inutile ». Des strophes qui enflent à l’image du souffle poétique.
(Maulpoix, Virginie, 6)
Aurélie, quant à elle, délivre un jugement d’adhésion sans reprendre à son compte la crainte d’admirer un poème éventuellement trop convenu : « J’aime le calme qui se dégage au fil des lignes, et tant pis si certaines images sont un peu dépassées, déjà trop vues. D’autres me réveillent, m’intriguent et me donnent envie de m’y attarder, de lire et de relire… » (Maulpoix, Aurélie, 14).
Nous considérons donc que les échanges entre pairs gardent des traces d’une posture de lecteur impliqué. Parce qu’ilsacceptent la demande d’expression des lectures subjective posée par le formateur et parce qu’ils ne sont pas en mesure d’affirmer facilement et consensuellement des effets et de s’appuyer sur un savoir critique, les professeurs investissent la situation asynchrone pour donner forme à leurs vécus subjectifs. Ils s’efforcent d’exprimer l’expérience participative dans ses différents aspects et reviennent particulièrement sur des sentiments de (dé)plaisir. Leurs billets proposent des commentaires subjectifs et esthétiques reliant les descriptions de formes poétiques aux affects éveillés par lalecture. Un seul professeur témoigne directement d’une difficulté à se positionner en lecteur subjectif en choisissant de suspendre son jugement de goût : « En ce qui me concerne, je ne suis ni sensible, ni réfractaire à ce texte. En fait, c’est sans doute dû à ma posture d’enseignant, j’ai abordé le texte sans m’interroger pour savoir s’il me plaisait ou non » (Maulpoix, Max, 8).
La lecture participative dont témoignent ces billets de professeurs présente une différence essentielle avec les manières dont s’impliquent la majorité des élèves lecteurs dans les fils analysés dans notre travail doctoral11. Alors que ces derniers recherchent en général du familier au sein d’une perception d’altérité ou tentent de s’habituer à des « vecteurs d’immersion » inédits (David, 2011) afin de maintenir une participation satisfaisante, les lecteurs lettrés du poème de Jean-Michel Maulpoix se méfient d’une adhésion aux stéréotypes. Les professeurs (en communauté de lecteurs experts) recherchent l’originalité au sein de la participation. Ils adoptent majoritairement une position esthétique fondée sur la recherche de la « méta-valeur » « moderne » de subversion et de nouveauté (Dufays et al., 2015, p. 124). Les études des fils contribuent à montrer comment les conduites de lecture participative sont socialement construites et de manières différenciées par les acteurs. Elles contribuent ainsi à comprendre la nature des déplacements nécessaires pour que des professeurs accueillent les sujets lecteurs-élèves. En effet, ces derniers risquent de rechercher des vecteurs d’immersion déjà bien reconnus dans les textes pour maintenir une lecture participative, par conséquent de valoriser des stéréotypes12. Il peut être difficile pour les professeurs de reconnaître une valeur et un rôle à des manifestations de lecture esthétique qu’ils ont appris à dépasser.
Les examens des échanges en ligne des trois actions de formation révèlent aussi l’attention des contributeurs aux zones d’incertitude des textes. Une professeure, par exemple, revient sur un vers qui lui semble mystérieux dans le poème d’Aloysius Bertrand (« la barre du bourreau s’était, au premier coup, brisée comme un verre »). Elle écrit : « J’ai vu des images de caricatures de bourreaux (Franquin Idées noires), une guillotine et j’ai cherché la part de verre qu’il y aurait dedans […] autre résistance du texte en première lecture !) » (Bertrand, Hortense, 3). La (re)lecture du poème de Jean-Michel Maulpoix conduit même une contributrice à interroger la possibilité d’une explication :
Puisque l’amour précisément est notre tâche, notre devoir, c’est l’adverbe « précisément » qui m’interroge :quel sens lui donner ? […] Et puis le mot « devoir » avec sa connotation morale, que vient-il faire au milieudu « on dirait » enfantin qui éclabousse tout le poème ? La phrase très longue de cette quatrième strophe reste difficile à expliquer. Pour moi, ce poème n’est pas si limpide, au contraire. Plus je le lis, plus il est obscur.
(Maulpoix, Julie, 6)
Des retours asynchrones sur l’extrait des Vies minuscules manifestent une interrogation analogue des significations de la dernière phrase, comme dans ce billet : « “Je suis illettré.” Cette réplique m’interroge car contrairement à ce que le texte affirme, elle ne me semble pas “éclairante” bien au contraire : quel est le rapport entre le monde médical et l’illettrisme du malade ? » (Michon, Catherine, 7).
Les remarques citées ici seront prolongées lors des échanges en présentiel et serviront de points d’entrée efficaces dans les débats. Il est intéressant que les intervenants reviennent sur des énoncés étranges pour souligner leur polysémie et préciser que leur force empêche de mobiliser trop vite les routines d’analyse. La suspension (temporaire) des possibilités explicatives invite à une lecture plus attentive à ce que l’expérience conserve d’irréductible à l’explication13. Ces aveux constituent également des actes de langage invitant les membres de la communauté à l’effort interprétatif. De tels retours sur les lectures expriment des attitudes qu’il s’agirait de reconnaître chez des élèves pour accompagner la tâche de lecture participative scolaire et l’interrogation des significations.
L’analyse de retours métaréflexifs sur les situations d’échanges en ligne indique aussi que les enseignants prennent conscience de l’intérêt des billets des autres lecteurs pour enrichir leur réflexion, ainsi :
(47:4514) Max : […] moi j’ai bien aimé lire les commentaires des collègues voir les réactions /15 voir comment on envisageait directement / changer de posture et voir comment nous profs on confronte nos lectures / nos visions.
(Stage Mantes, le 4 avril 2018)
Le travail en ligne semble aider ce professeur à déplacer ses manières d’aborder le texte en donnant accès à un ensemble de « visions » du poème. Bien que différentes situations d’échanges puissent contribuer à un tel déplacement, la déclaration suggère un effet propre au travail en forum. Pour ce professeur, « lire les commentaires des collègues » permet de « voir les réactions ». Il note que le passage par l’écrit apporte une visibilité spécifique et inspirante des lectures singulières et que l’asynchronicité des échanges laisse le temps de « confronter » des lectures avant d’intervenir.
Une autre professeure, dans un autre contexte, insiste également sur la visibilité des lectures exprimées en ligne :
(05:30) X : je voulais dire […] cet exercice du blog où on poste des billets c’est ça permet d’avoir un support visuel des réactions des autres / c’est-à-dire que dans un échange en classe en fait bah / les paroles s’envolent alors que les écrits restent / et on a du coup comme ça un tableau de tout ce qui a été dit sur le texte / et on peut les relire et on visualise.
(Stage académique, le 18 mars 2019)
Cette visibilité apportée par des écrits « qui restent » (et qui de fait montrent ou révèlent) apparaît comme une reconnaissance des efforts des contributeurs pour rédiger de manière suggestive. Dans l’exemple suivant, deux contributrices reviennent sur la capacité à évoquer par écrit l’expérience esthétique de lecture :
(07:01) Hortense : alors / quand j’ai découvert ces billets / ce qui a beaucoup fait écho en moi / c’est l’évocation des romans gothiques […] c’est quelque chose que j’avais ressenti en lisant le texte sans vouloir le formuler.
(07:40) Julie : moi / dans le deuxième billet [de Charlène] / je me reconnais assez dans la manière de penserles choses / je trouve que les évocations c’est assez fidèle à la manière dont les choses viennent quand on litle poème parce que justement le fait que ce soit fait sous forme de notes / c’est comme ça que ça surgit en fait / pas tellement sous forme de phrases rédigées.
(08:06) Le formateur (relit le billet) : « paysage sombre et lunaire / roman gothique / cette juxtaposition de touches ».
(08:13) Julie : c’est ça.
(Stage académique, le 18 mars 2019)
La force de suggestion de certains billets joue un rôle dans le maintien d’un lien à distance (« fait écho en moi », «je me reconnais assez ») et aide à reconfigurer l’expérience de réception (« quelque chose que j’avais ressenti sans vouloir le formuler »; « c’est assez fidèle à la manière dont les choses viennent »).
Dans un billet de synthèse cherchant à préparer la métaréflexion, une participante met en relation la temporalité de l’expérience esthétique de lecture et celle des échanges en forum :
Après lecture des commentaires
Entre conditionnel et indicatif, entre désir et réalité. D’une réalité donnée à voir par les couleurs (le bleu et le vert), les formes, la lumière-brillance, le mouvement; à sentir (les bouquets et les parfums); à entendre par les rires, la rêverie enfin se révèle.
(Maulpoix, Béatrice, 11)
Ce billet reconstitue l’émergence en différé d’une lecture subjective riche qui associe des simulations de sensations visuelles kinésiques, olfactives, auditives et sonores. La contributrice suggère que la durée des échanges en ligne permet de méditer la lecture esthétique (« après lecture des commentaires […] la rêverie enfin se révèle »).
Certaines interventions lors des séances postérieures aux travaux en ligne montrent que la relecture d’un fil de discussion conduit à concevoir de nouvelles interprétations. Un professeur décrit de la manière suivante l’enrichissement de sa réflexion :
(07:18) Sébastien : en lisant le poème je ne savais pas trop quoi en penser à l’origine […] j’ai suivi les échanges sur le Padlet / certains faisaient écho à ce que je pensais / d’autres moins mais / j’avais du mal quand même à répondre ou faire une synthèse / et je sais pas pourquoi / mais c’est aujourd’hui que ça se passe (rire) / en relisant ce matin / peut-être l’esprit un peu plus frais / tout le Padlet / je peux enfin me faire une idée / du poème.
(Stage Mantes, le 4 avril 2018)
Sébastien distingue deux moments dans sa relation au poème de Jean-Michel Maulpoix, lors des échanges en ligne et un mois après quand il s’agit de faire un retour sur « tout le Padlet ». Cette relecture a posteriori des billets rend possibles à la fois une « synthèse » des propositions d’autrui et l’élaboration d’une lecture personnelle (« je peux enfin me faire une idée / du poème). Le déclarant insiste sur une maturation (« je ne sais pas pourquoi / mais c’est aujourd’hui que ça se passe ») en lien avec le retour sur le fil des commentaires. La confrontation des billets lui permet d’avancer une proposition interprétative qu’il n’avait pu formuler en ligne :
(07:53) Sébastien : je comprends les ambiguïtés / les deux lectures qu’il y avait du poème / à la fois cette lecture un peu plate qu’on peut faire du poème / les images déjà faites / et en même temps […] il y a cette fragilité dans le poème / je trouve / en fait il ne croit pas à la paix / il se saisit de ce bref instant où elle existe sans vraiment y croire.
(Stage Mantes, le 4 avril 2018)
Le professeur établit un lien entre le partage des billets et l’entrée dans un débat interprétatif (« je comprends les ambiguïtés »). Au cours de cette formation, d’autres professeurs ont précisé en quoi le travail asynchrone prépare une discussion des interprètes :
(29:15) Le formateur : j’aimerais bien savoir la lecture du mur virtuel a modifié votre lecture.
(30:27) Sandy : pour moi ça a approfondi ma lecture […] le fait de voir tout un tas d’irritations / une forme d’obstacle / m’a obligée à vraiment mettre en mots ma propre interprétation du texte pour pouvoir d’une certaine manière comprendre / notamment la tienne [celle de Julie].
(32 : 02) Patricia : dans un premier temps le poème ne m’avait pas trop plu / mais le fait que Julie réagisse avec autant de vigueur m’a poussée à le relire autrement et finalement à revenir sur ma propre première lecture / du coup à la lecture des autres posts j’ai trouvé beaucoup plus d’intérêt à ce texte et aussi des richesses.
(Stage Mantes, le 4 avril 2018)
À partir de la lecture du billet de Julie, porteur de jugements très tranchés (Maulpoix, Julie, 6, déjà cité), et pour pouvoir y répondre, les lectrices réévaluent leurs jugements initiaux opposés (Sandy apprécie le poème, Patricia est réservée). Elles se montrent conscientes d’une interactivité de l’écriture asynchrone des lectures qui consiste à tenir compte des positions d’autrui dans l’acte de rédaction (« mettre en mot ma propre interprétation pour pouvoir […] comprendre la tienne »).
Dans une autre situation, des participants décrivent directement une forme singulière de dialogisme propre aux échanges asynchrones : « (04:17) Hélène : ça permet de faire rebondir sa propre pensée aussi / comme dans un dialogue / même s’il n’y a pas de dialogue / c’est un dialogue à l’intérieur » (Stage académique, le 4 avril 2018).
Les professeurs prennent donc conscience d’un tissage de compétences interprétatives, communicationnelles et sociales nécessaire pour tenir une place dans les échanges asynchrones orientés par les demandes de retours sur les réceptions.
En somme, les déplacements dont nous avons rendu compte jusqu’ici renvoient à la prise de conscience que l’investissement dans les échanges asynchrones (puis synchrones) repose sur deux attitudes sociocognitives complémentaires, d’une part la concentration sur sa propre lecture esthétique, d’autre part (mais quasi simultanément)une méditation sur les propositions des autres lecteurs qu’il s’agit de prendre au sérieux même quand elles traduisent des réactions non éprouvées. Le double accueil de l’altérité en soi (au sein de sa propre lecture) et de l’altérité des autres lecteurs est nécessaire aux échanges en ligne.
De surcroît, les temps métaréflexifs qui concluent les formations font émerger des remarques variées sur la progression des enseignements littéraires et sur des processus d’apprentissage de la lecture participative distanciée.
Des professeurs interrogent les conditions et les enjeux d’un accompagnement des échanges en ligne. Ils imaginent la possibilité de mieux traiter les propositions asynchrones que les paroles des élèves lecteurs, comme dans l’intervention suivante :
(09:23) Florence : dans un cours quand on fait les choses à l’oral effectivement certains / on ne sait pas du coup ce qu’ils comprennent ou pas d’un texte / on n’arrive pas à cerner non plus finalement leurs difficultés / alors que peut-être de cette manière c’est plus simple.
(Stage académique, le 18 mars 2019)
Cette déclaration suggère une possibilité de saisir les logiques des élèves exprimées dans les billets qui pourraient orienter l’effort pour accompagner les échanges en ligne. D’autres remarques décrivent encore plus directement des découvertes d’une manière nouvelle de conduire le travail des élèves lecteurs, ainsi :
(48:39) P1 : le fait que sur le Padlet on puisse lire ce que les autres ont écrit avant d’écrire soi-même / pour moi ça a été vraiment un pas de côté par rapport à la pratique habituelle / parce qu’on s’appuie sur la pensée des autres pour penser soi- même / alors que / bon en classe bien sûr / dans un cours dialogué ça peut arriver / mais c’est plus anecdotique alors que là ça fait partie du processus et pour moi ça / ça a été uneVRAIE découverte / et je l’ai testée en classe et c’est / c’était super. (49:31) ça m’a ouvert les yeux sur le fait que la parole / enfin la pensée n’était pas assez partagée dans la classe.
(Stage Mantes, le 4 avril 2018)
En revenant sur le partage en ligne de retours sur le poème de Jean-Michel Maulpoix, la déclarante distingue deux niveaux de collaboration. À ses yeux, la situation du « cours dialogué » admet une collaboration « anecdotique ». En revanche, la démarche hybride rend nécessaire la prise en compte des avis d’autrui (« on s’appuie sur la pensée des autres pour penser soi-même »). La professeure clarifie ainsi un enjeu de la démarche hybride : favoriser la dévolution d’un effort interprétatif par les échanges (« ça m’a ouvert les yeux sur le fait que la pensée n’était pas assez partagée en classe »).
L’intervention qui suit revient avec une force particulière sur l’explication de textes à laquelle l’enseignante a été formée pour souligner la possibilité de s’en émanciper :
(00:45) Hortense : moi / je vous le dis très sincèrement ça me libère […] pour moi l’exercice d’explication de textes tel qu’on me l’a proposé quand j’étais au lycée / j’ai souvent été / déçue / parce que j’avais l’impression que le professeur me disait ce que je devais penser du texte / et j’ai jamais réussi à être vraiment active / et ça a même créé des blocages chez moi / et la façon dont cet exercice propose d’aborder le texte / avec des images / des ressentis / je trouve ça assez libérateur / et la façon dont vous l’avez mené avec « Un rêve » d’Aloysius Bertrand.
(Stage académique, le 7 juin 2018)
Hortense met en mots un déplacement qu’elle décrit comme une découverte émotionnellement chargée (« je vous ledis très sincèrement »; « je trouve ça assez libérateur »). Ce n’est pas l’outil forum en tant que tel qui constitue une découverte, mais l’expérience d’une voie subjective de l’interprétation impliquant des prises de recul sur « des ressentis » grâce à une écriture imagée. L’allusion à la conduite des travaux collaboratifs par le formateur (« cet exercice […] et la façon dont vous l’avez mené ») suggère aussi qu’elle perçoit le rôle des étayages. Ces remarques indiquent que les mises en situation ont pu favoriser la conception de démarches plus ascendantes (Dufays, 2017) et entretenant la pluralisation des lectures parce qu’elles laissent aux élèves le temps de construire leurs retours sur les expériences de lecture.
Dans les quelques cas que nous considérons, les mises en situation hybrides ont entraîné une réflexion des professeurs sur l’effort de lecture esthétique et interprétative et sur les relances du travail de lecture-écriture. Reposant sur un faible nombre de données, ce résultat est difficile à généraliser. Nous ne savons pas non plus si les déplacements déclarés de conceptions conduiraient à élaborer des gestes didactiques en classe et en ligne. Pour autant, les analyses étayent cette hypothèse et aident à comprendre les différentes prises de recul nécessaires pour concevoir un tutorat hybride de la lecture-écriture.
Mais si les enseignants décrivent de possibles déplacements vers une démarche de lecture moins descendante, ils reviennent aussi sur des inquiétudes liées aux usages de forums.
Les mises en situation ont eu pour effet de faire émerger des résistances argumentées de manière éclairante. Des professeurs s’interrogent sur les possibilités d’expression de lectures esthétiques sur les forums scolaires ou reviennent sur un risque de perte de contrôle.
Certains participants aux formations interrogent une possible perte de spontanéité qui serait liée au passage à l’écrit interactif, comme le montrent les interventions suivantes :
(03:38) Charlène : par exemple sur le poème «□Élévation□» qui est très étudié / ils vont trouver beaucoupde commentaires en ligne / quelle va être la part réelle d’interprétation de l’élève et / finalement quelque chose qui a été copié-collé d’un autre site / est-ce qu’on va réussir à faire transcrire quelque chose depersonnel ? (04:05) Le formateur : vous posez la question de l’authenticité des lectures subjectives ?
(04:10) Charlène : voilà / est-ce qu’ils vont accepter de jouer le jeu à distance ? (Stage académique, le 7 juin 2018)
(01:47) Charlotte : je me demande / malgré tout dans le cadre du / par exemple de l’étude d’un texte / si en direct le passage par l’écrit / qui demande un esprit de synthèse / ne risque […] pour des élèves en difficultéde demander trop de temps et de retirer la spontanéité d’une réaction.
(14:06) P1 : et en plus bah il y a quand même les parents / qui peuvent être là et donc ce ne sera pas forcément une réaction d’élève / alors qu’en classe on sait que c’est eux.
(Stage académique, le 18 mars 2019)
Les expressions de « réactions » et les « interprétations » devraient conserver une « authenticité » (le terme est accepté par Charlène) et une « spontanéité » que l’accès à des ressources en ligne empêcherait. Les représentations qui s’expriment dans ces déclarations relèvent d’une vision particulière de la subjectivité des lecteurs. Elles renvoient à une position (que Genette qualifie « d’hyper kantienne », 1997, p. 144) qui présuppose une pureté du sentiment esthétique que des informations venues de lecteurs informés ou que l’effort d’écriture ne feraient qu’altérer. En appui aux théorisations des didacticiens que nous avons mentionnées au début de l’article, nous avançons que l’intersubjectivité permet de construire la lecture subjective et que l’écriture reconfigure constamment les expériences de réception. Pour autant, les stages de formation dont nous rendons compte n’ont pas permis de déplacer les représentations d’une subjectivité radicalement idiosyncrasique. L’analyse des déclarations permet cependant de situer les résistances à l’exercice de certains gestes didactiques, ce qui constitue un résultat.
Dans l’exemple suivant, la discussion des risques et des difficultés liés aux pratiques hybrides amène à caractériser des formes de dévolution16 impliquées dans l’écriture en ligne des lectures :
(04:20) Hortense : là on se met en situation avec des adultes dont c’est la matière / première / la littérature[…] et je me pose quand même la question d’une mise en pratique avec des élèves / et puis alors effectivement sur le fait que l’on peut repartir de ce que l’un a écrit […] l’élève qui a écrit ça va peut-être se sentir impliqué mais est-ce que les autres vont pour autant ?
(Stage académique, le 7 juin 2018)
L’intervenante identifie deux conditions nécessaires à un travail en ligne productif « avec les élèves ». D’une part, il s’agit d’amener des apprentis lecteurs à interroger et à clarifier leurs réactions, ce qui sera moins facile qu’avec des «adultes dont la littérature est la matière première ». D’autre part, l’engagement des élèves dans les échanges à distance doit être construit; il s’agit d’apprendre à « repartir de ce que l’un a écrit ». La réflexion sur la mise en situation conduit ici à situer deux enjeux fondamentaux des étayages professoraux en ligne et en classe.
Nous explicitons pour finir les craintes de perte de contrôle que certains enseignants ont exprimées. Ainsi :
(08:37) X : alors moi j’aimerais vraiment pouvoir le faire / avec toujours les mêmes limites c’est-à-dire le nombre d’élèves qu’on a en classe / et le contrôle dès qu’ils ont un écran entre les mains / parce qu’en fait dès qu’ils ont un écran entre les mains il faut toujours qu’on vérifie ce qu’ils sont en train de faire / et nous ça nous donne / c’est plus facile de contrôler un livre ouvert et un stylo qu’un écran.
(Stage académique, le 18 mars 2019)
L’écran ouvrant sur les forums est donc ambivalent : des professeurs apprécient « la visualisation des réflexions des autres / par l’écran » (Stage académique, le 18 mars 2019), mais d’autres associent le travail sur écran à une liberté incontrôlable qui empêcherait le professeur de poser des limites. Dans les deux cas, nous reconnaissons le fantasme d’un forum panoptique (permettant de voir toutes les lectures subjectives et / ou de maîtriser les comportements). Cette représentation peut empêcher ou limiter l’élaboration de gestes didactiques utiles à la conduite hybride des lectures de littérature. Sans montrer la construction de régulations professorales ajustées, les analyses dont cet article rend compte situent des cheminements réflexifs préalables à de telles régulations.
Cette contribution se limite à l’exploration de quelques expérimentations. Pourtant, l’étude met en lumière des prises de conscience significatives chez les professeurs. Leurs efforts pour prendre part aux interactions asynchrones provoquent quelques prises de conscience nécessaires aux élaborations de gestes didactiques spécifiques. L’acceptation d’une sorte de modestie dans la communication entre lecteurs (experts), en particulier, constitue un effet intéressant. Les enseignants construisent des hypothèses d’explication plus qu’ils ne cherchent à délivrer des leçons définitives en investissant l’écriture de billets propositionnels visant à rendre visibles des lectures subjectives. Même les jugements les plus tranchés restent révisables. Cet effet résulte d’une installation progressive de l’écriture en ligne des lectures subjectives au cours des stages (« Il s’agit, à la manière de ce que nous avons déjà vécu en présentiel, de poster dans les prochains jours au moins un billet verbalisant des réactions de lecteur »). Les enjeux des échanges ont été explicités et les contributeurs ont choisi d’investir les situations proposées pour s’approprier les textes et interroger leurs potentialités signifiantes. Ainsi ils contribuent à créer des espaces d’intersubjectivité sur lesquels les expériences esthétiques sont reconfigurées et dont la didactisation peut être interrogée. Les analyses des échanges en formation informent sur les manières dont des lecteurs experts régulent leurs lectures participatives et saisissent l’effort exigé par la clarification pour autrui des lectures subjectives. Les mises en situation que nous avons tentées révèlent aussi des tensions ou des dilemmes perçus par les professeurs à propos des enseignements hybrides de la lecture de la littérature. Pour les dépasser, il apparaît utile de proposer des formations suffisamment longues et articulées pour expérimenter un éventail d’interventions tutorales en ligne et en classe.
Pour cela, le travail dont cet article rend compte nourrira une recherche collaborative de plus grande ampleur orientée par la production de ressources pour les enseignements littéraires hybrides. Celle-ci interrogera le développement de styles tutoraux dans des contextes sociologiques et didactiques divers.
Les enjeux de formations inspirées par des recherches en didactique littéraire sur les usages de forums et de blogues de lecteurs ne sont pas minces. Il s’agit d’entretenir le mieux possible l’effort pour entrer dans les textes littéraires et la réflexion des élèves éloignés des attentes scolaires.
Aloysius Bertrand, « Un rêve », Gaspard de la Nuit, 1842
J’ai rêvé tant et plus, mais je n’y entends note. Pantagruel, livre III.
Il était nuit. Ce furent d’abord, – ainsi j’ai vu, ainsi je raconte, – une abbaye aux murailles lézardées par la lune, – une forêt percée de sentiers tortueux, – et le Morimont grouillant de capes et de chapeaux. C’est à Dijon, de temps immémorial, la place aux exécutions.
Ce furent ensuite, – ainsi j’ai entendu, ainsi je raconte, – le glas funèbre d’une cloche auquel répondaient les sanglots funèbres d’une cellule, – des cris plaintifs et des rires féroces dont frissonnait chaque fleur le long d’une ramée, – et les prières bourdonnantes des pénitents noirs qui accompagnent un criminel au supplice.
Ce furent enfin, – ainsi s’acheva le rêve, ainsi je raconte, – un moine qui expirait couché dans la cendre des agonisants, – une jeune fille qui se débattait pendue aux branches d’un chêne, – et moi que le bourreau liait échevelé sur les rayons de la roue.
Dom Augustin, le prieur défunt, aura, en habit de cordelier, les honneurs de la chapelle ardente; et Marguerite, que sonamant a tuée, sera ensevelie dans sa blanche robe d’innocence, entre quatre cierges de cire.
Mais moi, la barre du bourreau s’était, au premier coup, brisée comme un verre, les torches des pénitents noirs s’étaientéteintes sous des torrents de pluie, la foule s’était écoulée avec les ruisseaux débordés et rapides, – et je poursuivais d’autres songes vers le réveil.
Jean-Michel Maulpoix, Une histoire de bleu, 1992
Convalescence du bleu après l’averse…
Le ciel se recolore. Les arbres s’égouttent et le pavé boit. La ville aussi essaie des phrases. Rires mouillés et pluie de pieds nus. On dirait que le paysage est tout éclaboussé de croyance.
On voudrait jardiner ce bleu, puis le recueillir avec des gestes lents dans un tablier de toile ou une corbeille d’osier. Disposer le ciel en bouquets, égrener ses parfums, tenir quelques heures la beauté contre soi et se réconcilier.
On voudrait, on regarde, on sait qu’on ne peut en faire plus et qu’il suffit de rester là, debout dans la lumière, dépourvu de gestes et de mots, avec ce désir d’amour un peu bête dont le paysage n’a que faire, mais dont on croit savoir qu’il ne s’enfièvre pas pour rien, puisque l’amour précisément est notre tâche, notre devoir, quand bien même serait-il aussi frêle que ces gouttes d’eau d’après l’averse tombant dans l’herbe du jardin.
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