Volume 8 / Expérimentations diverses en classe et dans le domaine de l’édition

Écouter, voir, apprécier et comprendre des fables sur le net : Le loup et l’agneau de LaFontaine en cycle 3

Nathalie Drouin
professeure des écoles Maître-formateur
Jean-François Massol
Université Grenoble-Alpes

Résumé

Texte ancien et anciennement présent au sein des lectures scolaires, les fables de La Fontaine bénéficient actuellement d’une nouvelle existence grâce au numérique qui redonne aux textes mêmes de nouvelles allures ou bien propose des dispositifs variés articulant images et sons. Ces nouvelles présentations permettent-elles aux jeunes lecteurs d’aujourd’hui de mieux entrer dans des textes dont la difficulté a été notée depuis longtemps, par exemple par Jean-Jacques Rousseau (1762) ? L’exemple d’une séquence construite à partir de la fable du Loup et l’agneau chantée dans des styles différents, prenant le jugement de goût comme entrée en matière et mise en œuvre par deux enseignantes du premier degré français en fonction des niveaux différents de leur classe, permet d’analyser la manière dont les élèves reçoivent le texte et se l’approprient.

Abstract

A classic text that is traditionally taught in school, La Fontaine’s Fables, is now enjoying a new life thanks to digital technology. This medium gives the texts a new look including the ability to feature images and sounds. Do these new modes allow today’s young readers to better appreciate texts whose difficulty have been noted for a long time, for example by Jean-Jacques Rousseau? Taking the judgment of taste as an introduction into the material, two French first-grade teachers used a sequence constructed from the fable of the “Wolf and the Lamb” sung in different styles.This made it possible to analyse the way in which the students understood the text and appropriated it for themselves.

Mots-clés
fable, vidéo, jugement de goût, compréhension, actualisation

Keywords
fable, video, taste judgement, understanding, updating

Introduction

Que le numérique bouleverse la donne en matière de littérature et de rapports à celle-ci, de nombreux travaux et réflexions en témoignent (Petitjean, 2015), ainsi que certaines orientations conseillées par le Ministère français de l’Éducation nationale1. Si, pour l’accès aux œuvres littéraires, le livre est encore loin de céder sa place (comme le rappellent Eco et Carrère en 2009), la numérisation des textes, l’« enrichissement » de certains (Lacombe et Pérez, 2011), la création littéraire numérique2 ainsi que, pour les textes brefs avant tout et la poésie en particulier, la mise en ligne de vidéos de divers types3, font du net une mémoire ou une réserve (mais en permanence ouverte, à la différence de celles des bibliothèques ou des musées) d’œuvres de diverses présentations et formes, lesquelles sont à la disposition des enseignants. Ces évolutions sont bien entendu en lien avec les pratiques des lecteurs d’aujourd’hui, dont les élèves pour ce qui nous concerne plus particulièrement ici.

Dans cet ensemble d’une très grande variété, nous nous attacherons à la mise en voix et en images des Fables de La Fontaine, à savoir un texte littéraire ancien, patrimonial, dont Rousseau (1762) avant Fabre (1989) a souligné la difficulté pour des enfants ; difficulté de compréhension, mais aussi dans la transmission de morales qui pourraient s’inscrire, écrivait le philosophe plébéien des Lumières, dans des écoles de vice plutôt que de vertu. Et pourtant les Fables de La Fontaine sont très largement devenues et surtout sont restées, depuis la fin du XVIIIe siècle, des textes à lire, apprendre, réciter, comprendre, illustrer et analyser, dès l’école primaire. Aujourd’hui, le développement du numérique change aussi la situation de ce texte patrimonial, car sont désormais à la portée de tous (de tous ceux qui ont un ordinateur et une communication Internet), des textes à la présentation transformée par le nouveau médium.

Quel est donc le statut de tous ces fichiers et ces vidéos consacrés aux fables ? En partie peut-être des « produits dérivés » au sens où ces fichiers peuvent pérenniser le premier contact des lecteurs avec les fables, mais aussi, et surtout des objets sémiotiques secondaires d’un texte initial original (Louichon, 2012). On ajoutera que, dans le cas des vidéos à disposition sur le net, la fable lafontainienne devient un objet littéraire multimodal, donné à entendre et à voir autant et souvent même plus qu’à lire.

Certes, le rapport traditionnel à la fable lue en classe, apprise par cœur, récitée, accompagnée parfois d’un dessin d’élève, et parfois, en prolongement, redécouverte lors d’un spectacle professionnel de plus ou moins grande qualité à destination du public plus ou moins captif des élèves, ne disparaît pas des pratiques : un certain nombre de fichiers vidéos sur Internet témoignent en ce sens, nous reviendrons là-dessus. Mais dans le cadre de certaines suggestions ministérielles destinées à faire une place à la culture numérique, la multiplicité des versions à disposition peut produire des approches renouvelées qui évitent le figement de pratiques routinières (comme peut le suggérer Bechetti-Bizot en 2012).

On ajoutera pourtant que, pour donner accès aux œuvres anciennes, passer par une mise en voix des textes, autre que celle que réalise traditionnellement le professeur aidé parfois de ses élèves, n’est pas une modalité nouvelle. Les enregistrements seulement audio sur des microsillons 33 tours avant les cassettes ou les CD, ont été un moyen utilisé par des enseignants divers pour proposer aux élèves une entrée plus aisée dans des textes au vocabulaire ancien et littéraire, à la syntaxe d’autrefois en partie contrainte par la versification, mais aussi aux codes comportementaux, moraux, idéologiques, etc., posant des problèmes de compréhension en raison de leur inactualité.

Mais que signifie vraiment faire entrer plus aisément les élèves dans un texte patrimonial ? S’agit-il seulement d’aider à son appréhension et sa compréhension par-delà la « résistance4 » qu’il oppose à un jeune lecteur et par-delà une certaine banalisation en raison d’une tradition scolaire dont les tenants et aboutissants sont parfois perdus, sans que soient vraiment pris en compte aussi bien ses difficultés spécifiques que ses intérêts que l’on peut avoir tendance à oublier ? Tous les documents à disposition sur les sites Vimeo, Dailymotion et surtout YouTube n’ouvrent-ils pas sur des questionnements supplémentaires et vers des pistes tout à fait intéressantes comme celle de l’interprétation à haute voix ou en musique et de son utilisation, celle de l’actualisation des textes anciens et des effets de celle-ci, ou encore celle de la qualité et donc des choix liés aux goûts, étant donné la variété des vidéos à disposition ? De tels questionnements n’ajoutent-ils pas alors des complexités nouvelles aux difficultés que porte le texte seul ?

Pour commencer à apporter des réponses à ces questions, nous avons proposé à des professeurs de CM1 et CM2 une expérience à mener dans leurs classes sur Le loup et l’agneau de La Fontaine. Pourquoi retenir cette fable qui est, certes, bien connue, mais souvent lue seulement dans les classes du collège ou du lycée en raison de ses particularités ? Il faut rappeler, en effet, que la « résistance » de ce texte ne se cantonne pas au caractère littéraire d’une partie du vocabulaire et aux problèmes de syntaxe déjà évoqués de manière générale. Viennent, en effet, s’ajouter trois difficultés spécifiques reliées l’une à l’autre : celle, d’abord, dans le cours de la lecture, du dialogue entre les protagonistes qui échangent une série d’arguments aussi rapidement mentionnés que de portées diverses ; celle, ensuite et sur un autre plan, de la formulation particulière d’une morale en forme, non de conseil, mais de constat atterrant et dérangeant ; celle, enfin, du questionnement même de cette morale par le récit exemplaire censé la prouver, puisque plusieurs indices dans la présentation des personnages, de la situation, du dialogue argumentatif et de la chute servent à contester discrètement cette loi du plus fort qui paraît s’imposer initialement. Faire entrer de jeunes élèves de cycle 3 dans cette fable en la prenant comme objet multimodal d’aujourd’hui amènera-t-il à lever cette série de difficultés ? Si oui, à quel prix ?

Après être revenus sur le statut des fables comme objets numériques multimodaux divers à différents niveaux, nous évoquerons une expérience scolaire centrée sur Le loup et l’agneau dans la complexité des gestes d’accueil et de travail de deux objets littéraires multimodaux. Nous analyserons plus particulièrement ensuite certaines réactions et certains avis des élèves, avant d’en venir à la place des images dans le traitement multimodal de la fable.

1. Les fables de La Fontaine à l’ère du numérique

Bien entendu, comme beaucoup de textes anciens et comme la plupart des textes patrimoniaux, les fables de La Fontaine se trouvent numérisées. Elles apparaissent ainsi sous la forme de textes nus, tantôt dans la forme même d’une publication ancienne reprise en ligne5, tantôt dans l’uniformisation que réserve à tous les textes qu’il présente un site particulier comme poesieweb.net6. Mais sur beaucoup de sites, les fables sont accompagnées d’une illustration, parfois d’une introduction, et/ou de commentaires scolaires, de la même manière que dans le monde de la librairie, on trouve des éditions classiques, des éditions illustrées, des éditions commentées (avec la différence, bien sûr, qu’il y a la gratuité dans le cas du numérique et pas dans le circuit traditionnel du livre, à l’exception des bibliothèques publiques et des centres documentaires et bibliothèques des établissements scolaires, bien entendu).

La synthèse qui suit sur la fable du Loup et l’agneau donne une idée de ces différentes modalités de présentation du texte ; elle a été réalisée à partir d’un nombre limité de pages générées par le moteur Google à la date du 25 juillet 2017 (les quatre premières pages seulement). Sur 44 adresses listées, nous avons laissé de côté un site présentant seulement des morales de fables diversement illustrées, trois sites de commentaires scolaires pour lesquels une inscription est nécessaire, ainsi que onze publicités7. Le tableau 1 recense les 29 sites restants.

Modalité de présentationNombre d’occurrences
Texte nu83
Texte avec illustration9 (dont un texte à illustrer par enfants)2
Texte dit avec illustration10 (dont un dessin animé11 repris sur deux sites)3
Texte avec traduction (et illustration)124
Texte avec commentaire (ou introduction, ou notes)135
Texte avec illustration et commentaire (et/ou notes de vocabulaire)148
Texte lu avec commentaire151
Questionnaire ou séquence ou commentaire sans le texte163
Total29
Tableau 1 : Recensement des sites

Au-delà de cette présentation diversifiée des textes mêmes, ce que le net introduit de spécifique, ce sont des vidéos de divers genres présentant la fable sous son aspect oralisé, soit lue, soit récitée, soit chantée, et, dans ces trois cas, soit par un amateur, soit par un ou des professionnels, la plupart du temps sur un fond d’images fixes, ou avec l’image même du récitant en action. Tantôt, en effet, la diction-récitation est accompagnée d’une seule image fixe, tantôt d’une suite d’images fixes en diaporama, tantôt la diction où le chant de la fable résulte de la captation d’un concert, d’une répétition, d’un enregistrement spécifique, etc. À cette diversité des modes, s’ajoute la variété des qualités, car les vidéos sont parfois professionnelles, mais très souvent bricolées « avec les moyens du bord » par un amateur qui veut conserver un souvenir, ou qui a pour objectif de partager la vidéo qu’il a réalisée, à savoir de donner très largement à entendre et voir ce qu’il est capable de faire. Ce qui ne veut pas dire que, dans l’absolu, les vidéos professionnelles sont plus intéressantes que les vidéos réalisées par des amateurs : ces dernières regorgent de qualités diverses, dont l’authenticité d’une prestation, parfois la brutalité de l’expression ou de la réalisation, ou encore l’excès de kitsch, etc., pour des effets divers.

À la date du 25 juillet 2017 encore, le tableau 2 donne une liste des versions en vidéo du Loup et l’agneau sur les seules cinq premières pages du site YouTube répondant à la requête : « Le loup et l’agneau par La Fontaine » (pour la même requête, on trouvera encore deux versions nouvelles à la dixième page fournie par le site, ce qui n’a pas été pris en compte ci-après, nos recherches sur ce point étant indicatives, car tributaires d’une documentation mouvante en permanence).

Modalité concernant le texteAutres précisionsNombre d’occurrences
Texte dit (avec ou sans musique d’accompagnement)Sur fond uni (3 avec déroulement du texte)176
Sur fond d’image(s) fixe(s)18 (dont 4 avec déroulement du texte écrit)24
Sur film d’animation19 (dont 1 avec variation sur texte) et dont 1 avec déroulement du texte écrit204 + 1
Texte chantéVoix lyrique21 (dont chœur 122)5
Chanson traditionnelle (123), musique latino- américaine (124), jazz (125), « folk » (226), rock (127), par enfant (128)7
Texte récitéCaptations d’enfants (829), d’adultes (530) dont récitation accompagnée de musique (231), avec commentaire d’enseignant (132)13
Texte « défilant »Sur fond uni (pour « Karaoké »33)3
Mise en scènePar ombres chinoises (2)34, par enfants et adolescents(1235)14
AdaptationsMimé par de Funés (film L’homme orchestre36), mise en scène théâtrale comique37, actualisation par collégiens ou élèves du primaire (338), par animation et actualisation39, réécriture par enfant (240), par adulte (141), adaptation en bruxellois (142),adaptation avec images en noir et blanc (143)11
CommentaireTexte non dit442
Tableau 2 : Liste des versions en vidéo de Le loup et l’agneau

On notera que, ce faisant, les utilisateurs du site YouTube mettent la fable de La Fontaine exactement sur le même plan que les autres poèmes patrimoniaux, en tout cas les plus célèbres d’entre eux comme Le pont Mirabeau d’Apollinaire. Eux aussi font l’objet de lectures, récitations, dictions, mises en chansons, dans des clips, des diaporamas accompagnés de musique, des captations de concerts, des enregistrements, etc.

Mais cette assimilation des fables aux poèmes lyriques n’est pas totale et il semble, — c’est une hypothèse à étudier de manière plus systématique, que les vidéos proposées sur le net mettent en lumière deux caractéristiques de la fable par rapport aux autres poèmes. Contrairement à ce que l’on pourrait attendre, ces deux caractéristiques ne concernent pas a priori la morale explicite ou implicite, qui est spécifique du genre, différenciant le poème fable de la plupart des poèmes lyriques, épiques, etc. Nombre de vidéos ne font pas, en effet, un sort particulier aux morales des fables récitées ou mises en musique. En revanche, les mises en scène des fables proposées par certaines vidéos valorisent la dimension théâtrale de ces récits le plus souvent agrémentés de dialogues. Mais ces fables ne constituent-elles pas, La Fontaine lui-même l’a mentionné pour le revendiquer, une « ample comédie aux cent actes divers »45 ? La deuxième caractéristique de ces fables en vidéo tient à leur statut : texte très ancien très répandu, texte abondamment scolarisé depuis trois siècles, récit moralisateur, ces fables donnent lieu à des adaptations de divers types, qui peuvent être de simples exercices scolaires de résumé, mais parfois aussi des recréations comiques comme lorsque Louis de Funès raconte et mime la fable du Loup et de l’agneau à un groupe de jeunes filles pimpantes et muettes dans une séquence drôle du film de Korber L’Homme orchestre46.

Dès leur publication par le libraire Barbin, les fables de La Fontaine ont été illustrées, par François Chauveau dans un premier temps. Le net reprend des gravures anciennes, du même Chauveau47, mais aussi des illustrateurs célèbres qui l’ont suivi, du Grand siècle jusqu’au X-e, Jean-Baptiste Oudry48, Jean-Jacques Grandville49, Gustave Doré50, ainsi que d’autres, plus récents et tout aussi célèbres, comme Benjamin Rabier51, etc. Le net manifeste ainsi sa dimension mémorielle et, pour les Fables, les différents sites qui les reprennent et les proposent témoignent ainsi des actualisations successives que l’on doit aux crayons, aux burins, onglettes et échoppes, ainsi qu’aux pinceaux des illustrateurs.

À travers les vidéos qu’il met à disposition, il faut relever que la Toile témoigne également de toute la tradition de mise en musique des fables depuis l’organiste et maître incontesté de la « cantate à la française » Nicolas Clérambault (1676-1749). Certes, toutes les mises en musique historiques ne donnent pas lieu à une vidéo à écouter et à voir sur le net : ainsi, pour l’instant en tout cas, nous n’avons trouvé aucune captation pour Le chêne et le roseau de la cantatrice et compositrice Pauline Viardot-Garcia, ou pour La cigale et la fourmi mise en musique par Camille Saint-Saëns. En outre, les reprises et interprétations assez récentes pour pouvoir figurer dans les plis de la Toile, des musiques de Clérambault, Offenbach, Lecoq, etc. ne sont sans doute pas toutes présentes : ici encore un certain hasard préside à cette mise en mémoire ou en réserve des interprétations. Par ailleurs, il faut ajouter que les interprétations dans des musiques anciennes se mêlent à celles qui sont faites dans des musiques plus récentes, quand, par exemple, Le loup et l’agneau se raconte sur un air de jazz de Van Parys dans l’interprétation des Frères Jacques52.

Le tableau 3 présente la série successive des compositeurs dont la mise en musique de certaines fables est présente sur YouTube à la date du 25 juillet 2017.

CompositeursGenreNbre de fichiers
Louis-Nicolas Clérambault (1676-1749)Chant lyrique6
Charles Gounod (1818-1893)Chant lyrique2
Jacques Offenbach (1819-1880) : fables (et sans les airs des opérettes Le savetier et le financier et La chatte métamorphosée en femme)Chant lyrique13
Alexandre-Charles Lecocq (1832-1918)Chant lyrique5
André Caplet (1879-1925)Chant lyrique6
Georges Van Parys (1902-1971) chanté par Les Frères JacquesJazz1
Isabelle Aboulker (1938-)Chant lyrique+ de 20
Vladimir Cosma (1940-)Musique avec récitant4
Pascal Proust (1959-)Musique avec récitant4
Tableau 3 : Compositeurs ayant mis en musique certaines fables

De ce fait, et de manière différente des fables illustrées par des graveurs anciens, les vidéos de mises en musique de Clérambault, Lecoq, Offenbach, etc. faites sur des scènes ou dans des studios d’enregistrement modernes, installent les fables dans une temporalité particulière : dans leur ensemble, elles témoignent de la série des actualisations musicales des fables depuis le XVIIe siècle, mais, au cas par cas, elles présentent ces actualisations historiques sous un jour nettement contemporain. Ainsi, la fable du Loup et l’agneau adaptée dans la musique Grand siècle de Nicolas Clérambault sur YouTube est-elle une interprétation réalisée sur la scène de l’amphithéâtre de Pont-de-Claix le 4 octobre 201153 : si la musique, le chant et, visuellement, le clavecin renvoient au siècle de Louis-le-Grand, la scène large, débarrassée de tout spectateur, le fond uni noir et le costume pantalon-chemise-veste noir du baryton sont tout à fait contemporains, ainsi sans doute que la gestuelle de l’interprète, dans la mesure où ce spectacle-là ne se voulait visiblement pas une reconstitution archéologique.

Texte plaisant d’une comédie animalière qui va puiser dans les traditions gréco-latine, populaire et médiévale, indienne, etc., les fables présentées en vidéos portent souvent la trace de la très forte scolarisation dont elles ont fait l’objet. Cette dimension apparaît sous la forme de la captation d’une récitation par une jolie enfant en plan fixe54 ou par trois élèves qui, devant un tableau vert, se partagent les rôles du narrateur, de l’animal 1 et de l’animal 2 du titre55, ou encore par une chorale enfantine reprenant les airs d’Isabelle Aboulker56. Elle est également présente quand la vidéo est celle d’une leçon sur une fable d’un professeur genevois entouré de ses élèves57, mais encore et toujours lorsque les visionneurs, que l’on peut alors supposer enfants, ajoutent aux vidéos des commentaires de cet ordre : « Merci tu ma aide pour ma poésie !!!! », écrit l’un58 ; « Très bien sa ma bien aider à apprendre ma poésie », confirme tel autre59.

Dans la perspective d’une utilisation scolaire, cette très large présence des fables en vidéo et cette variété des propositions posent bien entendu une question importante, celle du choix : choix entre la qualité de certains enregistrements ou montages et les surprises d’un tout-venant plus ou moins réussi, plus ou moins kitsch, mais d’une très grande authenticité parfois ; choix pour le type à retenir, fables en dessins animés, ou récitées, ou mises en musique et chantées, qui pourrait être aussi le choix de faire découvrir la variété des types de mise en œuvre et d’adaptations. Mais il faut également envisager la question de l’opérateur des choix lui-même : le professeur doit-ilabsolument être celui qui fait le tri pour ses élèves ? Si l’on veut par exemple travailler à la formation du goût, n’y a-t-il pas aussi intérêt à demander aux élèves d’aller sur la Toile faire leur choix personnel pour telle fable dite, chantée, animée par des amateurs et professionnels ? On se trouve ainsi, de ce fait, à la fois devant la permanente et essentielle question des objectifs d’enseignement, mais aussi devant celle des goûts individuels et dans la perspective didactique qu’est la nôtre, devant celle de la formation de ce goût. Car il est bien évident que le cheminement dans l’ample réserve des fables en vidéo dépend des visées que l’on peut avoir : de la simple facilitation de l’accès à des textes que l’on va étudier ensuite à la découverte du monde de la culture classique, ensuite fortement scolarisée, et à la réflexion sur ce monde dont est aujourd’hui porteuse, à sa manière, fragmentée, lacunaire et hasardeuse, la Toile.

Dans l’exemple que nous allons développer, précisons que les choix ont été faits par nous.

2. Entrer dans la fable à travers ses présentations en vidéo : un dispositif didactique complexe

Ce dispositif est une séquence qui a été mise en œuvre dans deux classes de CM1 et CM2 de la ville de Valence60 ; de la part des élèves, il sollicite une série de compétences : l’écoute, la lecture, l’écriture (de travail), le dessin, le partage oral, la réflexion. Il est déterminé a priori par deux choix généraux. Nous voulions d’abord faire entrer les élèves dans la fable en interrogeant a priori leur jugement de goût : nous nous situons ainsi dans le cadre du paradigme de la lecture subjective en privilégiant l’activité fictionnalisante de la réaction esthétique (telle qu’elle a été initialement élaborée par Lacelle et Langlade en 2007). En outre, nous avons ancré le travail demandé dans la multimodalité : présente dans les deux supports utilisés initialement, celle-ci revient à travers les activités proposées. Au cours de la séquence, en effet, les élèves se sont saisis de la fable en l’écoutant, interprétée par deux chanteurs dans deux musiques différentes, en écrivant et dessinant à son sujet, en en discutant, en la mettant en voix et en scène, et dans l’une des deux classes ayant participé à cette expérience, en construisant un PowerPoint qui prend appui sur les dessins faits auparavant. Dans toutes les activités de dessins, une autre activité fictionnalisante, celle de la concrétisation imageante, est présente ; s’y mêle parfois une troisième activité appartenant au même modèle, celle de l’activation fantasmatique. Enfin, au cours des discussions, une dernière activité fictionnalisante est présente, celle de la réaction axiologique, lorsque les enfants s’interrogent sur les significations de la morale. On voit par là que le cadre de la lecture subjective est omniprésent.

Les vidéos à disposition étant nombreuses, quel choix avons-nous fait ? Comme cette expérience était la première du genre dans les deux classes, il fallait éviter de désorienter les élèves par un nombre trop élevé de propositions. Nous en avons donc retenu deux seulement. Le privilège accordé à une certaine qualité des vidéos a été retenu après discussion : une différence de qualité aurait été un critère supplémentaire de différenciation que nous n’avons pas voulu ajouter, car cette séquence de littérature pouvait aussi être reliée à l’enseignement de musique. Au final, les deux versions retenues sont issues de deux univers musicaux différents, pour faciliter l’expression d’un goût chez lesjeunes sujets lecteurs au début et à la fin de la séquence : séances 1 et 7 (on le verra ci-après, ce choix pose un problème). La première version est de style pop-rock, composée et interprétée par Jean-Paul Prat61 (voir illustration1). Dans cette vidéo, le constat terrible de la morale est minimisé voire dilué par une musique plutôt guillerette et l’image d’un chanteur vu en gros plan, qui s’accompagne très sympathiquement de la guitare sèche : s’il y a fidélité au texte lafontainien, on note un décalage avec certains aspects très sombres de la fable. La deuxième vidéo (voir illustration 2) présente une œuvre lyrique62 composée à la fin du XIXe siècle par le prix de Rome André Caplet et interprétée par un chanteur actuel ; cette version est plus proche du drame pathétique que raconte la fable, ainsi que de sa terrible sentence initiale. Le compositeur met musicalement en valeur la noirceur du constat premier et l’image des deux interprètes « classiques », pianiste et chanteur, donne sans doute une dimension plus sérieuse au propos. Le choix induisait ainsi la prise en compte de deux univers musicaux différents et la nécessité de réfléchir à la relation du texte avec sa mise en musique et en images.

llustration 1 : Jean-Paul Prat en train de chanter Le loup et l’agneau, image extraite de la vidéo YouTube
Illustration 2 : La version d’André Caplet du Loup et l’agneau, interprétée par Simon Wallfisch et Edward Rushton.

Un scénario de séquence a été proposé à deux enseignantes63. On notera que celles-ci ne possédaient pas la même expérience professionnelle, l’enseignante des CM1 est professeur des écoles depuis une dizaine d’années, alors que celle qui a travaillé avec les CM2 est maître-formateur et directrice de l’école.

À la première séance où l’écoute des deux versions a été réalisée, les enseignantes ont demandé aux enfants leur version préférée et les raisons de leur choix.

Introduisant le texte de la fable, les séances 2 à 6 devaient porter sur la compréhension à travers des activités diverses: sur la structure du texte, la chronologie des événements, l’identification de la morale (séances 2 et 3) ; sur l’étude du dialogue permettant d’établir les rapports entre les personnages et d’expliciter l’argumentation du loup et la défense de l’agneau (séance 4) ; sur la contextualisation à travers des lectures documentaires de notices biographiques sur le fabuliste (séance 5) ; sur la morale et son actualisation par les élèves, en lien avec l’Éducation morale et civique (séance 6).

À la 7e séance, après une deuxième écoute des deux versions mises en musique et chantées, les élèves ont à nouveau exprimé leur jugement de goût.

Sept séances pour une seule fable, on voit que le projet initial prenait un certain temps. On peut ajouter que le travail propre sur les vidéos en ligne constituait a priori deux séances sur les sept, soit quasiment 30 % de la séquence. Bien entendu, les deux enseignantes ont adapté ce scénario à leur classe, ainsi qu’à leurs représentations et compétences personnelles. Dans la classe de CM1, la professeure a ajouté un moment pour faire écrire et dessiner à ses élèves une fin différente, qui s’est trouvée le plus souvent être une fin heureuse : de différentes manières, l’agneau est sorti ou se sort d’affaire. Dans la classe de CM2, l’enseignante a apporté deux adaptations à cette proposition de séquence au cours de sa mise en œuvre. La première adaptation est liée aux réactions initiales des élèves à l’écoute de la version lyrique. Estimant qu’ils « n’étaient pas entrés dans la situation », la comparaison entre les deux œuvres entraînant un désintérêt général pour la version musicale d’A. Caplet, l’enseignante a proposé une deuxième séance, avec un approfondissement de l’expression de la subjectivité (intitulée S 1 bis). Il s’agissait d’amener les élèves à entrer personnellement dans un univers sonore inhabituel, éloigné de leur univers de référence, à travers une activité reposant sur la concrétisation imageante : les élèves devaient utiliser différentes couleurs pour évoquer les émotions ressenties. Cette première adaptation témoigne du problème posé par le choix des versions. La deuxième adaptation est liée à la qualité des dessins réalisés par les élèves, que l’enseignante a voulu valoriser, ainsi qu’à une volonté d’approfondir deux des axes de la séquence (multimodalité et formation esthétique) : la classe a ainsi créé un diaporama pour illustrer la version nettement préférée, ce qui a rajouté un certain nombre de moments de débat, de travail technique et de visionnement. Dans le cas des CM2, on voit ainsi que la volonté de réaliser un nouvel objet multimodal amène à développer encore une séquence initialement longue.

Il n’est bien sûr pas question de présenter ci-après en détail l’ensemble des activités menées dans les deux classes de CM1 et CM2. À travers des réactions d’élèves écrites, orales et dessinées, nous évoquerons les problèmes et les réussites concernant le jugement de goût et la compréhension et nous observerons la prise en compte de la dimension multimodale du traitement de la fable dans la séquence.

3. Accueillir, comprendre, actualiser, interpréter un texte patrimonial : paroles d’élèves

Les travaux menés par Tauveron (2002) et ceux de l’équipe de Beltrami, Quet, Rémond et Ruffier (2004) ont montré la complexité des relations entre compréhension et interprétation, au niveau même du premier degré. La réflexion plus générale de Citton (2007) sur l’interprétation des œuvres littéraires64 a ajouté dans le débat sur l’interprétation et la dimension de l’actualisation. Reprenant pour leurs élèves une approche de la fable du Loup et l’agneau dans le cadre de la lecture subjective, les enseignantes ont rencontré avec eux les questions de compréhension-interprétation et d’actualisation. Nous évoquons ici ces phénomènes au niveau même des écrits et oraux des élèves.

3.1. Réaction esthétique des élèves et compréhension de la fable

Dès la première séance et les premières réactions, à travers les justifications données, on peut distinguer l’intérêt des élèves pour les formes mêmes de la mise en voix, de leur appréciation du degré de compréhension du texte.

Le tableau 4 présente une synthèse des jugements de goûts émis par les élèves de CM2 lors de la première audition des deux versions pop-rock et lyrique du Loup et l’agneau. Comme nous l’avons dit, ces élèves ont unanimement préféré la version chantée avec accompagnement de guitare par J.-P. Prat. Ajoutons que, dans ces exemples tirés des écrits des élèves, nous avons conservé l’orthographe de ceux-ci. Il en sera de même ensuite. Bien entendu, il ne s’agit pas de stigmatiser des défaillances, mais de donner à voir la manière dont ces jeunes élèves s’emparent de l’écrit de travail qui leur est demandé pour exprimer leur point de vue.

Critères concernant la mise en musique et en voix : à propos de la version de J.-P. Prat (25)
Effet13« Elle est plus joyeuse » (Maëla) ; « C’est drôle » (Maïssa) « Excitant » (Manel) + 10 autres
Accent mis sur le rythme7« Ça va vite » (Maïssa) + 5 autres
Accent mis sur l’instrument4« il y a vei la gitar » Alina + 3 autres
Accent mis sur la voix1« mieux chanté » (Dénis)
Critères concernant la compréhension (12)
Compréhension directe6« j’ai compri que le loup diser c’est moi le plus fort et qui vouler manger l’agno. » (Elissa) + 5 autres élèves
Par comparaison6Mariatou ne comprend pas la 2e version + 5 autres élèves
Tableau 4 : Synthèse des jugements de goûts émis par les élèves de CM2

Si on fait une comparaison avec le jugement exprimé à la fin de la séquence après la deuxième écoute des deux versions, on observe une certaine stabilité des avis (la version pop-rock l’emporte toujours nettement), mais on observe la complexification des réactions : loin de répondre finalement par les mêmes formules brèves énoncées à la première séance, les élèves ont enrichi leur point de vue en écoutant leurs camarades ; leur discours appréciatif est ainsi plus développé.

Les deux écrits d’Ozan illustrent très bien cet enrichissement produit par la séquence. Après la première écoute, cet élève écrit simplement qu’il a « préféré la version de Jean-Paul Prat car elle était rigolote ». Et à la deuxième question qui portait précisément sur la compréhension, il répond seulement : « J’ai compris que le loup a mangé l’agneau ». Lors de la séance 7, il choisit à nouveau la même version de J.-P. Prat, mais sa justification se dit en un paragraphe qui esquisse une analyse, où se fait entendre soudainement un coup de cœur exprimé de manière familière, ainsi qu’une mention de la compréhension :

Je l’ai choisi parce qu’il y avait du rytme, des rimes et que la voix du loup était grave, celle de l’agneau était aigue et celle du narrateur était entre les deux. C’était drôle le coup des voix. Je préfère celle-là parce qu’elle est plus compenhensible que l’autre.

En outre, malgré la persistance du choix majoritaire pour la version pop-rock, celui-ci est désormais perçu comme problématique par plusieurs élèves. C’est ainsi que quelques-uns peuvent évoquer le problème de la tonalité joyeuse de l’interprétation de J.-P. Prat qui leur paraît en contradiction avec la « tristesse » du sort réservé à l’agneau, comme le remarque Sascha. D’autres vont juger quand même préférable la mise en musique euphorique d’une histoire tragique, ainsi que l’exprime Lina. Ils peuvent aussi affirmer leur personnalité comme Manel qui note, pour la deuxième interprétation : « ce n’est pas mon style ». On le voit, les jugements de goût ainsi affirmés finalement le sont d’une manière plus consciente (voir tableau 5).

SaschaJ’ai choisi la première verssion parce-que je trouve que ça va bien avec la phable le rythme. C’est un peut triste parce-que à la fin le loup mange l’agneau donc la chanson pour moi elle est plus drole elle devient triste. Cette chanson est drole mais l’auteur il la laisse drole quand le loup mange l’agneau alor que moi je ne trouve ça pas drole.
LinaJe trouvais que raconter une histoire qui est suposé être tragique plutôt de manière euphorique c’est plutôt mieu. La deuxieme ne me plaisais pas car elle était raconter de manière tragique et stressante…
ManelJais joisi la premiere chansom parce-que elle etait drôle puis la deuxième chanson était lante, se n’etait pas mon style. Quand jais entendu la première chanson jais vu qui y’avait de la joie du suspense on avait envi de la néquoter. Puis lautre chansons on resenter de la tristesse.
Tableau 5 : Jugements de goût de trois élèves

3.2. Actualiser pour comprendre en CM2 : la perspective de l’interdisciplinarité avec l’éducation morale et civique (EMC)

Nous avons noté plus haut la double dimension des différentes actualisations musicales des fables, réactualisées à travers les interprétations mises en ligne. Le phénomène de l’actualisation se retrouve, bien entendu différemment, dans le dernier débat réalisé en CM2. Celui-ci constitue une ouverture interdisciplinaire vers l’Éducation orale et civique65 et prend la forme d’une longue séance orale que la professeure débute par un retour sur le parcours qui a été suivi : « La poésie sur le loup et l’agneau vous la connaissez maintenant. Est-ce que quelqu’un peut me rappeler globalement ce qui s’est passé ? pourquoi ? comment ? » Au cours de la séance, tantôt l’enseignante conduit la discussion de manière vague, par des « hmm ; hmm » peu explicites, afin d’amener ses élèves à approfondir d’eux-mêmes leur réflexion, tantôt elle fait rebondir la discussion plus nettement, comme lorsqu’elle prend plus longuement la parole pour poser la question de la morale- constat de la fable et demander une actualisation :

Alors moi maintenant comme vous êtes revenus à la morale, heu… la raison du plus fort est toujours la meilleure j’voudrais savoir est-ce que, là à notre époque actuelle maintenant… Est-ce que pour vous vous pensez que ça vous rappelle certains faits que vous avez vécus ? Est-ce que vous pensez qu’on pourrait toujours l’dire… ? À quoi heu.. qu’est-ce que ça vous évoque si vous êtes maintenant dans la vie de maintenant pas en dehors de cette fable là… ?

Ainsi nettement mis sur la piste, les élèves en viennent à proposer une série d’actualisations de différents ordres.

Dans un premier temps, la notion de « force » mentionnée par La Fontaine, se trouve référée à l’univers des élèves : être « fort » pour un élève de CM2 de 2017 comme Sascha consiste à posséder des compétences en mathématiques, ce qui lui sert à contester la loi posée par la morale :

Alors heu moi j’suis pas vraiment d’accord avec la raison du plus fort est toujours la meilleure parc’que on peut être bon en mathématiques et y’en a un autre qu’est pas bon en mathématiques mais celui qu’est pas bon en mathématiques aussi peut avoir raison dans un problème enfin.

Mais plusieurs élèves actualisent la question de la force de manière plus politique : certains vont ainsi réfléchir à la question contemporaine du terrorisme :

Sascha : Moi j’suis quand même un peu d’accord avec Lomane parce que heu… Par exemple et ben les terroristes et ben comparé à la police et ben les terroristes ils ont pas peur des policiers, ils savent que « fin ils vont ils vont à un moment donné ils vont ils vont quand même heu.. se faire prendre mais ils ont pas peur et alors que dans, par exemple, dans la fable et ben l’agneau il a peur alors que par exemple les terroristes ils ont ils ont pas peur ils s’cachent quand même

Enseignante : – Alors qui est le loup, qui est l’agneau entre les terroristes et la police ? […]

Lomane : – bah moi j’pense que ce s’raient heu les l’agneau les… Les habitants ce s’raient l’agneau puisque ben ils ont peur heu des terroristes

Un élève : – en gros la police c’est le chien

Mariatou : – bah les terroristes et les policiers ça peut être bah dans le loup parc’que ils vont faire un peu comme le loup ils vont les chercher…

[…]

Pedro : – moi j’dis bah non parc’que heu j’te rappelle que le loup heu c’est le plus fort ça ça ça. Il essaye de s’opposer heu… Il mange les agneaux et la police et bah elle défend… Moi j’dirais que la police c’est plutôt le chien… […]

Kenny : – heu j’reviens sur heu ce que a dit Pedro de des policiers et des terroristes alors en fait non les policiers c’est un p’tit peu l’agneau vu que l’agneau il essaye de s’défendre le loup il attaque et les terroristes ils attaquent.

La réflexion donnera également lieu à un échange sur les institutions républicaines :

Louise : heu moi j’pense que si.. heu par exemple « fin c’est pas très vrai mais « fin le président de la République « fin la raison du plus fort est toujours la meilleure en gros c’est pas l’plus fort mais c’est lui qui domine « fin la France c’est lui qui il a plein de gens qui l’aident et qu’il est entouré de ça mais c’est lui qui prend des décisions enfin pas que lui mais c’est surtout lui qui prend les grandes qui prend les décisions et que bah nous on est obligé de l’écouter parc’que la majo enfin du coup la majorité des français ont voté pour lui et du coup heu c’est lui qui qui a été choisi pour heu pour pour prendre ces décisions et heu et du coup j’pense que heu la raison du plus fort aussi ça peut dès fois être aussi nous qui avons choisi que lui il soit plus fort ou plus fort mais dans les droits « fin pas dans les droits il fait il a l’droit comme tout l’monde mais il a l’droit de dire de « fin de nous faire des nouvelles lois ou voilà

Pedro : heu moi j’veux redire un truc heu […] disons avec le ton prise de la République bidule bah heu le président, il est dev’nu loup il est devenu loup grâce à ça que nous les agneaux c’est ça ?

Cette réflexion amène enfin les élèves à discuter aussi de manière très générale du système des dictatures comparées à celui de la démocratie.

Pedro : – Attends moi j’voudrais dire un exemple heu c’est comme les dictateurs par exemple, les dictateurs ils dictent les autres, ils imposent les lois heu et voilà quoi.

[…]

Enseignante : – Mais quand tu dis les dictateurs, tu veux dire que la raison, c’est-à-dire les choix du dictateur, la raison du plus fort donc du dictateur est toujours la meilleure ? Ou tu veux dire que ça s’passe comme ça mais que c’est pas toujours la meilleure ? Qu’est-ce que tu voulais dire ?

Pedro : – Ben heu quelque fois ça peut être heu quelque fois il peut y avoir des idées qui sont pas mal mais quelquefois non.

Sacha : – Bah heu c’est pas c’est pas obligé que le dictateur il ait toujours raison hein Hi.. Hitler il a pas eu toujours raison : les gens ils devaient être blonds et costauds, mais c’est là c’est pas ça hein ?

Gevorg : – Ben j’suis d’accord parc’que Donald Trump y construit, il veut construire un truc entre le Mexique et les États-Unis bah il a pas raison.

On observera que, dans le feu de ces échanges, certains développements se rapprochent nettement des « lectures actualisantes » définies par Citton (2007), d’autant mieux que, dans une des séances précédant cette discussion, un travail de contextualisation a été mené. L’actualisation de la fable permet, en effet, aux élèves de s’interroger sur différentes dimensions du présent à partir de cette « loi du plus fort » que la mise à mort de l’innocent agneau rend très contestable. Venons-en maintenant à la dimension multimodale.

4. Du traitement scolaire multimodal de la fable : des illustrations à l’élaboration d’un PowerPoint

Les deux vidéos utilisées étant seulement des captations de concerts, aucune mise en image des personnages ou de la situation n’était proposée. On pouvait ainsi demander aux élèves de solliciter leur imagination personnelle sur les scènes de la rencontre, du dialogue des deux animaux, et de la mort de l’agneau dévoré par le loup66. Rappelons que, dans les deux classes, un dessin a été demandé expressément aux enfants après la première écoute ; ils pouvaient ensuite dessiner quand ils le voulaient.

De manière globale, à part un élève de CM2 qui a effacé son dessin d’un arbre réalisé après la première écoute, tous les élèves des deux classes ont accompagné leurs écrits de dessins et l’ont fait avec leurs compétences propres et leurs manières personnelles de visualiser les scènes. Ces dessins méritent de nombreuses analyses. Nous ne mettrons en évidence que trois aspects.

4.1. Le développement des dessins

En CM2, les dessins des élèves subissent, au cours de la séquence, une évolution parallèle au développement des critères du jugement de goût (voir illustrations 3 à 6). On observe généralement, en effet, un investissement plus grand dans le dessin demandé en septième séance, comme si l’ajout de la deuxième écoute à la première à la suite de tout le travail de lecture, d’écriture et de discussions entre les deux moments permettait aux enfants une plus grande appropriation de la fable dont ils transposent finalement les scènes dans des espaces et décors plus aboutis et précis.

Illustration 3 : Exemple d’un dessin réalisé lors de la première séance (Ozan-Axel)
Illustration 4 : Dernier dessin fait par le même élève lors de la septième séance
Illustration 5 : Dessin réalisé par Lomane lors de la première séance
Illustration 6 : Dessin réalisé par la même élève lors de la dernière séance

Une synthèse mettant en valeur l’évolution des dessins permet d’obtenir le tableau 6.

Dispositifs iconiquesDessin 1 (26 dessins pour 28 élèves)Dessin 2 (28 dessins)
Pas de dessin1 (arbre effacé)0
Décor sans personnage01
Personnage seul5 (loup 3, agneau 2)6 (loup)
Dessin schématisé avec deux personnages140
Deux personnages dans décor rural spatialisé621
Total26 dessins en 4 dispositifs28 dessins en 3 dispositifs
Tableau 6 : Évolution des dessins, de la première écoute à la septième séance

On observe, ici, une plus grande concentration de l’ensemble des dessins de la septième séance. On est, en effet, passé de quatre dispositifs choisis à trois, et, parmi ces derniers, l’un est retenu par une large majorité d’enfants (75% présentent les deux personnages dans un décor), alors que pour un autre qui est retenu par un peu plus de 21 % des dessinateurs, un seul personnage de la fable est repris, le loup, soit pour sa place dominante dans la fable, soit pour sa présence plus grande dans la littérature enfantine, soit encore pour son pouvoir de fascination plus global.

4.2. Inventer une autre fin : appropriation de la fable et maîtrise narrative

Dans le cas des CM1, l’enseignante a émis une consigne particulière pour la septième séance : quelle autre fin aimeriez-vous ? Les élèves pouvaient répondre à l’écrit et en dessinant. Implicitement, il s’agissait de permettre aux élèves d’aller au-delà de la contestation implicite de la morale-constat que propose la fable, pour exprimer en toute liberté leur ressenti face à la situation et aux protagonistes. Pour répondre, une partie des enfants ont réalisé deux dessins. Ils ont, en effet, proposé la scène finale de dévoration qui est dans la fable et une deuxième scène qu’ils ont imaginée.

Dans l’exemple du dessin de Sarah (voir illustration 7), la partie gauche représente la fin de la fable sans que la dévoration de l’agneau soit représentée, d’ailleurs. Dans la partie droite apparaît un chasseur avec une plume rouge au chapeau, qui tue le loup d’un coup de pistolet (comme dans la version des Grimm du Petit Chaperon rouge ?), pendant que l’agneau émet un cri représenté dans une bulle comme dans les vignettes de BD.

Illustration 7 : Autre fin imaginée par Sarah

Juliette quant à elle, n’a dessiné qu’une seule version, qui est de son cru : un chasseur qui progresse en zigzag en se cachant derrière des arbres vient sauver l’agneau en tuant le loup d’un coup de pistolet (voir illustration 8). On remarquera plusieurs sortes de signes au sens percien du terme67 dans le dessin de cette élève (Joly, 2001). Elle ne se cantonne pas, en effet, à une représentation analogique des animaux, du chasseur et du décor (signes iconiques), mais ajoute des signes symboliques : le trajet du chasseur est marqué par des flèches bleues ; quant au coup de feu, il fait intervenir des signes linguistiques puisqu’il est représenté à travers une onomatopée que l’élève peut avoir reprise au genre de la bande dessinée.

Illustration 8 : Autre fin imaginée par Juliette

De manière générale, on le voit, ces nouvelles versions de la fin tournent à l’avantage de l’agneau ainsi que le permettait la consigne relativement ouverte. Pour inverser une situation que la fable et sa morale avaient instituée dans une double cohérence narrative et discursive, les solutions des élèves sont diverses. Un manque évident de logique narrative apparaît lorsque le loup laisse partir l’agneau (SJ), sans qu’aucune explication soit avancée (elle est peut-être restée dans la tête d’un jeune dessinateur qui n’avait pas les moyens de la mettre en image ou en mots). La nouvelle fin la plus idyllique repose sur la naissance d’une amitié entre les deux protagonistes (Hugo) et ne tient pas compte, non plus, du récit premier, mais l’élève subit peut-être l’influence de certains contes détournés comme l’album Ami-ami de Rascal et Girel. Les exemples de la mort du loup qui se cogne contre un arbre (SP1), finit dans une marre de sang (Lamarana) ou se noie (Leïla) sont de l’ordre de l’accident et ne s’embarrassent pas non plus de la logique narrative. Il en est de même lorsque Lucie G. propose une transformation de l’agneau (enfermé par le loup, il se libère), mais l’ajout d’un témoin (le berger qui s’écrie « Taratata, il c’est enfui ») ajoute un commentaire plaisant à cette solution.

Une meilleure maîtrise de la cohérence narrative conduit à l’ajout d’un adjuvant, mais ici encore, les logiques sont diverses. En proposant de distraire le loup par l’arrivée d’une fille, Diego ajoute une dimension sentimentale ou galante qui témoigne peut-être d’une certaine maturité personnelle, mais se situe toujours hors de la logique de la fable. L’aide apportée à l’agneau par un chien du berger (Noa), ou le berger lui-même muni d’une pelle (Louise), ou encore un chasseur (Sarah) a plus de cohérence puisqu’on reste dans le monde supposé par le récit. C’est Lucie P. qui propose la version la plus réussie puisque, pour elle, le loup ne trouve plus d’arguments, ce qui permet à l’agneau de s’en aller sur la pointe des pieds. C’est une solution que rejoint sans doute Alexandre sans le dire expressément puisque, pour lui, le loup s’en va, reconnaissant seulement : « Il est trop fort ». À travers ces propositions des élèves, s’observe la diversité de compréhension du texte lafontainien, médiatisée par la maîtrise plus ou moins grande de la logique narrative et celle de la dimension technique de la réalisation d’un écrit ou d’un dessin.

4.3. Réaliser un PowerPoint : de la recherche technique à l’appropriation formelle du récit exemplaire

Découvrant l’investissement de ses élèves à la fois dans la discussion actualisante et dans leurs derniers dessins, la professeure des CM2 a proposé à ses élèves de réaliser un PowerPoint pour illustrer la version chantée qu’ils ont préférée. Ce travail est mené en commun en fin d’année et repose sur des discussions entre les élèves. Au cours de ces discussions, différents éléments du dispositif textuel de la fable sont pris en compte et la réflexion s’enrichit encore, mais en se développant sur le genre même cette fois.

Pour envisager la succession des images dans leur PowerPoint, les élèves font référence au medium qu’ils connaissent le plus, à savoir le cinéma.

Nathan : bah si y a les deux personnages si tu prends la caméra tu vas plus regarder celui qui parle que celui qui écoute

Kenny : incompréhensible

Sarah : Kenny j’suis désolée, mais j’suis pas d’accord avec toi hein car le changement d’images c’est pas l’changement d’scène le changement d’scène c’est donc heu c’est dans la classe et le changement de scène on peut se retrouver dans la cour xxxxxxx

Dénis : j’veux dire en fait par exemple il y a l’loup et derrière y’a heu y’a la rivière après on voit l’agneau en fait par derrière par exemple la verdure et derrière y’a la forêt par exemple enfin

À la demande de la professeure, la discussion s’oriente ensuite sur la mise en évidence de la morale ; cette discussion est animée par Louise.

Louise : donc les deux premières lignes bon ben voilà heu… Gevorg

Gevorg : la raison du plus fort est toujours la meilleure nous l’allons montrer tout à l’heure

Louise : tu voulais dire quoi heu Lina

Lina : on va les mettre d’une autre couleur parc’que c’est la morale de heu la fable

Élève anonyme 1 : moi j’pense qu’il faut laisser comme ça c’est comme si y’avait encore personne…. c’est après que le loup et l’agneau ils viennent

Élève anonyme 2 : en fait ça donne une information quoi.

Élève anonyme 3 : en gros ça veut dire que là heu on laisse comme ça […]

Alexandre : moi j’ai dit en fait ça donne une information pour heu c’qui va s’passer plus tard… par exemple

Louise : bah un peu… Tabatha

Tabatha : c’est que en fait Dénis j’suis pas trop d’accord avec toi faudrait plutôt les mettre d’une autre couleur parc’que comme elle disait Lina c’est une information c’est pas heu c’est pas des dialogues et puis c’est la morale de l’histoire.

La discussion sur le statut de la morale amène à poser la question du narrateur différencié de l’auteur :

Élève anonyme 1 : c’est une morale

Élève anonyme 2 : pour retenir c’qui est important dans l’histoire

Enseignante : et qui est-ce qu’il le dit ça ? 

Élève anonyme 1 : c’est heu l’auteur 

Élève anonyme 2 : celui qui écrit 

Enseignante : l’auteur ou le narrateur ?

Élève anonyme 1 : l’auteur

Enseignante : c’est quoi la différence

Maïane : bah en fait le narrateur c’est celui qui dit cette bête cruelle, repris l’agneau et heu voilà alors que l’auteur c’est celui qui a écrit la poésie.

Ce que ces trois fragments permettent d’observer, c’est d’abord la place des savoirs formels. On peut noter qu’ils apparaissent seulement au cours de la construction de l’objet multimodal, selon les besoins de la transposition intermodale. On relèvera aussi que ces savoirs sont d’ordre différent. Renvoyant au cinéma, la différence entre changement d’image (sans doute de plan) et changement de scène relève plutôt des arts plastiques, mais se trouve peut-être une connaissance expériencielle des élèves. La distinction entre personnage, narrateur et auteur relève de la narratologie et fait nettement partie de la discipline du français (depuis son introduction dans les références des enseignants et dans les programmes, elle a subi des accentuations différentes). C’est ce que montre le dernier fragment du dialogue où l’enseignante intervient trois fois pour aboutir à une synthèse structurante du savoir en jeu. Complétant une séquence jusque là très riche où le jugement de goût, la lecture subjective, les écrits et dessins de travail ont permis de construire la compréhension d’un texte dont une séance orale a permis l’actualisation, la réalisation d’un nouvel objet multimodal introduit cette fois la dimension formelle, non comme moyen d’entrée dans le texte, mais comme nécessitée pour une réalisation collective.

Conclusion

Les fables en vidéo qui sont en libre accès sur le net constituent une mémoire particulière et renouvelée de la fable classique dans des perspectives différentes de sa seule illustration. Ce genre que Rousseau dénonçait comme problématique pour les enfants, mais qui a été largement scolarisé depuis, apparaît ainsi dans la théâtralité que la formule d’« ample comédie aux cent actes divers » a promise non seulement à un lecteur imaginatif et acceptant de se laisser charmer, mais aux hommes de théâtre, aux compositeurs, aux amateurs qui ont ajouté aux fables leurs interprétations et actualisations diverses. Cette large réserve de fables dites, récitées, mises en musique, chantées, ou encore animées, que la Toile constitue, change objectivement la donne pour ce genre comme, sans doute, pour tous les poèmes brefs : le recours au texte sur le papier seul pourrait être vu désormais comme un choix parmi d’autres, marqué par la tradition, mais non obligé : ainsi, il vaudrait mieux que ce choix soit assumé comme tel, en fonction d’objectifs précis d’enseignement.

En effet, l’ample réserve des fables sur le net permet de nouvelles entrées dans ce texte ancien porteur de difficultés à différents niveaux : souvent rendu plus attrayant, il peut être utilisé dans des perspectives renouvelées, comme on l’a vu dans l’exemple proposé. Mais l’ajout de la dimension multimodale nécessite un développement supplémentaire des travaux demandés aux élèves. Ces ajouts ont-ils une utilité ?

L’une des hypothèses initiales de l’expérience menée dans deux classes était que l’affirmation et la justification d’un jugement de goût devaient permettre d’entrer dans la compréhension sans abandonner le questionnement initial.

Les élèves des classes de CM1 et CM2 qui ont été soumis à cette expérience ont bien joué le jeu à travers les dispositifs proposés, mais bien entendu, avec les particularités dues aux profils et aux niveaux des classes et à l’effet-maître, même si nous n’avons pas pu développer précisément ces dernières dimensions.

On soulignera surtout :

  • l’affirmation par les élèves d’avis a priori (comme le refus du genre lyrique) en lien avec une affirmation identitaire : on peut noter que l’approfondissement des points de vue initiaux et une complexification de la réflexion ont bien été menés par les enseignantes, sans obligatoirement aboutir à un changement d’avis, mais ce travail a fait perdre aux choix initiaux la dimension évidente qui était la leur pour les élèves ;
  • la facilité avec laquelle les élèves ont réfléchi à l’oral à l’actualisation de la morale, ce qui a sans doute contribué à un développement de leur réflexion sur ses significations possibles ;
  • les effets positifs du dispositif global sur certains élèves en difficulté : c’est ce que l’on voit avec Pedro,habituellement faible lecteur et faible scripteur selon son enseignante, très présent dans le débat alors même que ses propos à l’oral ne sont pas d’une grande fluidité. On pourrait faire des remarques semblables pour d’autres enfants ;
  • en CM2, l’affirmation de la dimension multimodale avec le projet de création d’un PowerPoint nécessite l’ajout de séances supplémentaires, mais ouvre sur une compréhension des composantes formelles de la fable, entre savoirs expérienciels des élèves et connaissances disciplinaires.

Puisque l’expérience évoquée repose sur le choix initial et a priori que nous avons fait entre différentes vidéos à disposition, d’autres choix sont à tester bien entendu : quels effets sur les élèves pourrait produire l’utilisation de dessins animés à comparer ? Quel intérêt y aurait-il à leur proposer une comparaison de modalités différentes, par exemple entre une version chantée et une version dite en contrepoint d’un film d’animation ou d’un diaporama d’images fixes ? À partir de quel niveau, de quelle maturité, peut-on laisser les élèves cheminer dans les propositions vidéo sur une fable pour en extraire les versions qui leur paraissent les plus significatives (mais à quels égards ?), ou les plus réussies (mais selon quels critères) ?

Bien entendu, ces autres essais pourraient être faits en lien avec un travail plus général sur la poésie patrimoniale, également à disposition et renouvelée dans ses modalités dans les mêmes conditions.

ANNEXE 1

Synthèse à la date du 26/07/17 de la présence de Le loup et l’agneau de La Fontaine sur les 4 premières pages du moteur de recherche Google

Modalité de présentationAdresseNbre
Texte nuhttp://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/jean_de_la_fontaine/le_loup_et_l_agneau.html
http://www.youscribe.com/catalogue/documents/litterature/poesie/le-loup-et-l-agneau-2471891
http://www.franceloups.fr/loupotheque/loup-agneau.htm
3
Texte avec illustrationhttps://fr.wikisource.org/wiki/Le_Loup_et_l%E2%80%99Agneau
+ texte avec modalité pour faire faire une illustration par enfants :
http://www.teteamodeler.com/fable/lafontaine/livre1/leloupetlagneau.asp
1 + 1
Texte avec traduction(et illustration)http://www.musee-jean-de-la-fontaine.fr/jean-de-la-fontaine-fable-fr-12.html
http://www.lieder.net/lieder/get_text.html?TextId=5710
http://lafontaine.mmlc.northwestern.edu/fables/loup_agneau_vv.html
http://dornac.eklablog.com/esope-et-la-fontaine-le-loup-et-l-agneau-a118660530
4
Texte dit avec illustrationshttp://www.dailymotion.com/video/xgm00n_le-loup-et-l-agneau-fable-de-jean-de-la-fontaine_creation
Dessin animé : https://www.youtube.com/watch?v=WmZKb5WlR8g
mm dessin animé en http://www.stephyprod.com/video-enfant/videos-dessin-anime-enfant/videos-dessins-animes-fables-enfants/fable-de-la- fontaine-le-loup-et-l-agneau.html
3
Texte avec commentaire (ou introduction, ou notes)http://www.unjourunpoeme.fr/poeme/le-loup-et-l-agneau
https://www.etudes-litteraires.com/forum/topic3685-la-fontaine-le-loup-et-lagneau.html
http://bac-de-francais2011.over-blog.com/article-texte-8-le-loup-et-l-agneau-par-jean-de-la-fontaine-102655894.html
https://www.annabac.com/annales-bac/la-fontaine-le-loup-et-l-agneau
http://lescoursjulien.com/le-loup-et-lagneau
5
Texte avec illustration et commentaire (et/ou notes de vocabulaire et/ou questions)http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/louagneau.htm
https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Loup_et_l%27Agneau
http://commentairecompose.fr/le-loup-et-lagneau-analyse/
http://lechatsurmonepaule.over-blog.fr/article-jean-de-la-fontaine-le-loup-et-l-agneau-121016218.html
https://www.atramenta.net/lire/le-loup-et-lagneau/73/1#oeuvre_page
http://bmirgain.skyrock.com/521726737-EXPLICATION-LITTERAIRE-LE-LOUP-ET-L-AGNEAU-de-Jean-de-La-Fontaine.html
http://www.cm1-jfm.fr/assets/questionnaire-loup-et-agneau-s1.pdf
http://cavesdumajestic.canalblog.com/archives/2012/05/09/24221522.html
8
Texte avec lecture à haute voix, commentairehttp://www.bacdefrancais.net/le-loup-et-agneau-fontaine.php1
Questionnaire ou séquence ou commentaire sans le textehttps://www.quizz.biz/quizz-920784.html
https://espacelettres.wordpress.com/2015/04/22/corrige-commentaire-le- loup-et-lagneau-jean-de-la-fontaine/
http://ekladata.com/7qJ_dNJ9WN8eeedrhEXL3FRyU9U.pdf
3

+ texte sans doute lu mais nécessité de s’inscrire ! https://play.spotify.com/user/12180017403/playlist/0KgI3II4MDA5k4kJWDFuur?play=true&utm_source=open.spotify.com&utm_medium=open

+ publicité pour album ; http://www.laprocure.com/loup-agneau-jean-fontaine/9782035907059.html (+ pub. Price minister pour fables : http://www.priceminister.com/mfp/2216/les-fables-de-la-fontaine-jean-de-la-fontaine?pid=49111250 + pub pour album : http://www.cultura.com/le-loup-et-l-agneau-9782081220140.html + pub pour album : http://livre.fnac.com/a1790911/Jean-de-La-Fontaine-Le-loup-et-l-agneau-et-3-autres-fables-de-La-Fontaine) + pub pour album https://www.amazon.fr/loup-lagneau-autres-fables-Fontaine/dp/2081631946 + pub pour album https://www.librairiesaintpierre.fr/livre/1308223-le-loup-et-l-agneau-et-onze-autres-fables-jean-de-la-fontaine-l-ecole-des-loisirs + pub pour patères en forme d’animaux : http://www.enostudio.fr/shop/la-fontaine-hooks-white-blue + pub pour marionnette https://www.idealo.fr/prix/3923812/trudi-marionnette-loup-agneau.html?gclid=CjwKCAjw2NvLBRAjEiwAF98GMV5O5HlwDErG7QvTkTDIvMfKu27Uc8Y4n3UttoPPmTt6RMvsGmg7SBoCXacQAvD_BwE + pub pour livre des fables : https://www.editionsatlas.fr + autre pub pour fables : https://www.amazon.fr

Morales illustrées : http://www.polkadot.fr/blog/citations-illustrations-fables-jean-de-la- fontaine.html + pub pour livre enregistré http://www.audible.fr/?source_code=ADW30DFT1BkSH073115902N&bp_ua

Notes
  1. Voir par exemple la page : le français avec les TICE du site Éducscol : http://eduscol.education.fr/numerique/dossier/archives/francais-tice, page consultée le 25 juillet 2017. ↩︎
  2. Voir par exemple les propositions d’écriture générative automatique de J.-P. Balpe : http://poetiques.blogg.org/, page consultée le 25 juillet 2017. ↩︎
  3. On trouve de nombreuses vidéos de poésie contemporaine sur le site de la revue Tapin2 (http://tapin2.org/). L’application YouTube recèle de vidéos de poèmes anciens et contemporains de toutes sortes (Massol, s. d.). ↩︎
  4. Bien entendu, le terme renvoie aux travaux de Tauveron (2002). ↩︎
  5. Le site Wikisource reprend l’édition Barbin de 1668-1694 : https://fr.wikisource.org/wiki/Fables_de_La_Fontaine_ (Édition originale), page consultée le 25 07 2017. ↩︎
  6. http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  7. Cinq pour des albums portant le titre de la fable, trois pour des recueils de fables, une pour la fable lue, une pour des patères en forme d’animaux et une pour des marionnettes. ↩︎
  8. Le loup et l’agneau sur le site Poésie.net : http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/jean_de_la_fontaine/ le_loup_et_l_agneau.html, page consultée le 25 07 2017. ↩︎
  9. https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Loup_et_l%E2%80%99Agneau, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  10. http://www.dailymotion.com/video/xgm00n_le-loup-et-l-agneau-fable-de-jean-de-la-fontaine_creation, page consultée le 25 07 2017. ↩︎
  11. https://www.youtube.com/watch?v=WmZKb5WlR8g, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  12. Par exemple : http://www.musee-jean-de-la-fontaine.fr/jean-de-la-fontaine-fable-fr-12.html, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  13. Par exemple : http://lescoursjulien.com/le-loup-et-lagneau, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  14. Par exemple : http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/louagneau.htm, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  15. Par exemple : http://lewebpedagogique.com/hberkane/fables-lecture-analytique-de-la-fable-le-loup-et-lagneau/, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  16. Par exemple : http://ekladata.com/7qJ_dNJ9WN8eeedrhEXL3FRyU9U.pdf, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  17. https://www.youtube.com/watch?v=qMaQDu7Sv4Y&t=5s ↩︎
  18. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=9mn6ashAkH4, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  19. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=WmZKb5WlR8g&t=1s, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  20. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=WmZKb5WlR8g&t=1s, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  21. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=PU5WlR2bOkE ↩︎
  22. https://www.youtube.com/watch?v=VfGei3YnE5o ↩︎
  23. https://www.youtube.com/watch?v=kA4PRjxpJxo ↩︎
  24. https://www.youtube.com/watch?v=Sm4CB36SvLk ↩︎
  25. https://www.youtube.com/watch?v=CcKNsDHtpSE ↩︎
  26. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=1g7IFwXYb7M ↩︎
  27. https://www.youtube.com/watch?v=L7GpaGG9OqI ↩︎
  28. https://www.youtube.com/watch?v=J91jixcWSJw ↩︎
  29. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=NndDpHDJEMk ↩︎
  30. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=tPSSceDr87k ↩︎
  31. https://www.youtube.com/watch?v=JKTPPJ5zvs8 ↩︎
  32. https://www.youtube.com/watch?v=7SgVzXeh3hs ↩︎
  33. https://www.youtube.com/watch?v=dXsMtofBUkA ↩︎
  34. https://www.youtube.com/watch?v=d0zqyrePZZ0 ↩︎
  35. Par exemple : https://www.youtube.com/watch?v=BtInWQI_oMs ↩︎
  36. https://www.youtube.com/watch?v=WNsI_mAVQN0 ↩︎
  37. https://www.youtube.com/watch?v=twijhstf4MY ↩︎
  38. https://www.youtube.com/watch?v=jkvNSmqWX9o ↩︎
  39. https://www.youtube.com/watch?v=ddxj3j97ws8&t=76s ↩︎
  40. https://www.youtube.com/watch?v=B98kxc_J4nQ ↩︎
  41. https://www.youtube.com/watch?v=7eJoMpGsLbM&t=139s ↩︎
  42. https://www.youtube.com/watch?v=G9ZrIUuecBE ↩︎
  43. https://www.youtube.com/watch?v=5syLxo2RkdU ↩︎
  44. https://www.youtube.com/watch?v=EPnue1SHJvo ↩︎
  45. Le Bucheron et Mercure, fable 1 du livre V. ↩︎
  46. Film sorti en 1970. ↩︎
  47. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b22000789/f10.item ↩︎
  48. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5440698v/f47.image.r=La+Fontaine,+Jean+de.langFR ↩︎
  49. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54823084/f29.image ↩︎
  50. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k720466/f36.image ↩︎
  51. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65140109/f9.image ↩︎
  52. https://www.youtube.com/watch?v=CcKNsDHtpSE ↩︎
  53. https://www.youtube.com/watch?v=WisvId7JKKM ↩︎
  54. https://www.youtube.com/watch?v=S-lEBReCmDY ↩︎
  55. https://www.youtube.com/watch?v=tAPa29LWXZk ↩︎
  56. https://www.youtube.com/watch?v=P0jjrj7nKLk ↩︎
  57. https://www.youtube.com/watch?v=7SgVzXeh3hs ↩︎
  58. https://www.youtube.com/watch?v=az-v6OEs4Ow ↩︎
  59. Ibid. ↩︎
  60. École élémentaire d’application Sophie Condorcet. ↩︎
  61. Texte de Jean de La Fontaine, adaptation musicale et arrangement, Jean-Paul Prat, chant et guitare, Jean-Paul Prat. Version mise en ligne le 30 mars 2010 : https://www.youtube.com/watch?v=1g7IFwXYb7M ↩︎
  62. Œuvre d’André Caplet, Les Trois Fables, Le Loup et l’Agneau, 1919 (composition) interprétée par Simon Wallfish (voix) et Edward Rushton (piano). Version mise en ligne le 9 juin 2016 https://www.youtube.com/watch?v=mJ3a-bX8HHk ↩︎
  63. Nous remercions Geneviève Verdier-Chaulieu qui a adapté et mis en œuvre la séquence dans sa classe de CM2 et Mylène Pichetto qui a fait de même avec sa classe de CM1. ↩︎
  64. La réflexion didactique sur la notion d’actualisation a fait l’objet d’un numéro de la revue Recherches et travaux par Massol, Plissonneau et Bloch (2017). ↩︎
  65. « L’enseignement moral et civique à l’école et au collège met en œuvre quatre principes : penser et agir par soi-même et avec les autres et pouvoir argumenter ses positions et ses choix ; comprendre le bien-fondé des normes et des règles régissant les comportements individuels et collectifs, les respecter et agir conformément à elles ; reconnaître le pluralisme des opinions, des convictions, des croyances et des modes de vie ; construire du lien social et politique », programmes de 2016 pour les cycles 2, 3, 4 : http://eduscol.education.fr/cid92405/l-emc-dans-la-classe-dans-l-ecole-et-dans-l-etablissement.html, page consultée le 25/07/2017. ↩︎
  66. Sur l’illustration comme réalisation effective de la concrétisation imageante (Massol, 2017). ↩︎
  67. Joly reprend les distinctions de Peirce entre différents signes visuels. ↩︎
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