Cet article interroge la place du jeu vidéo dans le cours de littérature en France à partir d’un corpus constitué de programmes officiels, de publications pédagogiques des réseaux Scérén et Canopé (sous la tutelle du ministère français de l’Éducation nationale [MEN]) et du portail national d’informations et de ressources du MEN. Il révèle la très faible présence du jeu vidéo et du jeu sérieux non seulement en littérature, mais plus généralement dans la discipline du français. Nous émettons l’hypothèse que cette faible présence s’explique, en partie, par l’histoire de la discipline et plus généralement par le rapport que l’institution scolaire entretient avec la culture de masse dont relève le jeu vidéo. Le processus de scolarisation des jeux vidéo est en effet similaire à celui de la littérature, du cinéma, de la télévision. Il génère des pratiques scolaires qui privilégient la mise à distance et non l’immersion dans la fiction. La radicale nouveauté du jeu vidéo n’est pas prise en compte, mais ramenée à du connu, à travers des pratiques mettant à distance la fiction, l’image, le jeu.
This article examines the place of video games in a literature course in France from a corpus of official programs, educational publications of the Scérén and Canopé networks (under the supervision of the French Ministry of NationalEducation, MEN) and the MEN national information and resources portal. It reveals the very low presence of video games and serious games not only in literature, but more generally in the French discipline. We hypothesize that this low presence is explained, in part, by the history of the discipline and more generally by the relationship that the school institution has with popular culture of which video games is a part of. The process of schooling video games is indeed similar to that of literature, cinema, and television. It generates school practices that favor distance and not immersion in fiction. The radical novelty of video games is not taken into account, but reduced to the known, through practices distancing fiction, the image, and the game.
Le lien entre le jeu vidéo et la littérature a été souligné par Shaeffer dès 1999, ces deux arts partageant la création d’un univers imaginaire dans lequel le récepteur s’immerge. C’est donc à travers la question de la fiction, dans sa dimension immersive, imaginaire, que le jeu vidéo et la littérature — mais aussi cinéma — se rejoignent. Huizinga (1951) et Caillois (1967) considèrent ainsi que la fiction est une des caractéristiques du jeu (Dauphragne, 2011). La fiction est donc entendue ici comme en opposition au réel, et le ludique en est une manifestation. Privilégier la dimension fictionnelle du jeu vidéo rappelle le débat qui existe dans le champ de recherches sur le jeu vidéo entre ludologie et narratologie. On peut en effet se demander si la conception du jeu vidéo en classe de littérature ne serait pas exclusivement narratologique. Les théories narratologiques considèrent « le jeu avant tout comme un objet assimilable à une œuvre fictionnelle, comme un texte, et cherche[nt] à l’approcher avec les outils de la sémiologie et de la narratologie » (Zabban, 2012, p. 146) ; les jeux vidéo comportant souvent un scénario, une introduction cinématique. Les théories ludologiques contestent cette analyse du jeu vidéo trop proche des études cinématographiques et littéraires et défendent « l’autonomie du jeu comme forme culturelle spécifique en s’appuyant sur la règle comme trait caractéristique, et le jeu vidéo comme média spécifique en s’appuyant sur son caractère interactif » (Zabban, 2012, p.147). Toutefois, ce débat est insuffisant pour penser le jeu vidéo en classe de littérature. Il ne faut pas oublier en effet que nous sommes dans le champ scolaire : il faut donc aussi s’intéresser au processus de scolarisation du jeu vidéo,processus entendu ici comme un phénomène de construction d’objets scolaires à partir d’objets extrascolaires déjà existants (Chervel, 2006 ; Denizot, 2010). Tous ces éléments amènent à s’interroger sur la place du jeu vidéo dansl’enseignement de la littérature, domaine disciplinaire qui a intégré le cinéma comme objet d’enseignement depuis une vingtaine d’années, mais aussi sur la place du jeu sérieux, du serious game, qui se légitiment progressivement à l’école. Nous avons tout d’abord recherché comment sont définis le jeu vidéo, le jeu sérieux, le serious game, dans les programmes du ministère français de l’Éducation nationale (MEN). Nous avons ensuite analysé les usages disciplinaires de ces jeux dans les publications pédagogiques du réseau Scérén (sous la tutelle du MEN), devenu Canopé en 2014 et d’Éduscol, portail national d’informations et de ressources du MEN. Ce corpus signale la prédominance du jeu sérieux dans de nombreuses disciplines. Le jeu sérieux est en revanche peu présent non seulement en littérature, mais plus généralement dans la discipline du français. Quant au jeu vidéo, il est presque absent. Dans une perspective historique, nous émettons l’hypothèse que cela s’explique par l’histoire de l’enseignement de la littérature, qui privilégie, en France, la mise à distance et non l’immersion dans la fiction, et plus généralement par la scolarisation de la culture de masse dans l’institution scolaire française.
Le jeu vidéo figure pour la première fois dans l’arrêté du 11 juillet 2008 du MEN qui l’intègre dans les programmes del’Histoire des arts, pour tous les niveaux, au sein d’une liste d’arts visuels :
« illustration, bande dessinée. Cinéma, audiovisuel, vidéo, montage photographique, dessins animés, et autres images, arts numériques, Pocket films. Jeux vidéo, etc. » (p. 3). Depuis 2013, il figure aussi dans « L’éducation à l’image, au cinéma et à l’audiovisuel » qui porte sur les objets suivants : « cinéma, photo, télévision, jeux vidéo, Internet, etc. ».
Cette catégorisation du jeu vidéo parmi les arts visuels amène trois remarques. Tout d’abord, les programmes officiels ignorent sa dimension ludique et interactive, qui sont les spécificités de ce loisir numérique. Leur approche n’est donc ni narratologique ni ludologique, ce qui signale bien les effets de la scolarisation des objets extrascolaires qui peuvent les rendre extrêmement différents de ce qu’ils sont hors de l’école (entendue ici comme institution). Ensuite, faire du jeu vidéo un art de l’image le légitime de façon paradoxale. En effet, l’image a longtemps été perçue avec inquiétude par l’institution scolaire (Bantigny, 2008). Peraya et Nyssen (1994), questionnant les usages pédagogiques de l’image, soulignent à la fois son pouvoir explicatif et persuasif — qui intéresse le pédagogue — et, paradoxalement, son pouvoir ludique et d’ouverture sur l’imaginaire — qui l’invite plutôt à la méfiance. Toutes les disciplines n’entretiennent pas le même rapport à l’image (Perret, 2018) ; certaines comme l’histoire l’intègre dès le XIXe siècle, alors que d’autres, les mathématiques, ou la grammaire (Coret, Gaume et Volteau, 2018) s’en méfient. Cela nous offre une première piste sur le lien qu’entretiendraient les disciplines avec le jeu vidéo : ce dernier serait plus facilement intégré dans celles qui considèrent l’image comme un moyen d’apprendre, et non comme un obstacle.
Enfin, faire du jeu vidéo un art visuel et l’intégrer dans « l’éducation à l’image » l’associe au cinéma, ce qui permet des comparaisons entre les deux processus de scolarisation, celui du cinéma étant connu (Bantigny, 2008 ; Denizot, 2009 ; Habi, 2009). En effet, le cinéma a été intégré dans la discipline du français, et plus spécifiquement en littérature (il n’y a pas de certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement secondaire [CAPES] cinéma).
La recherche a alors consisté à recenser l’ensemble des publications sur le jeu vidéo dans Éduscol et les réseaux Scérén et Canopé, afin de déterminer les usages disciplinaires du jeu vidéo et de voir la place qu’il occupe en classe de français au regard des autres disciplines.
La base de données Callimaque qui recense et dépouille les revues éditées par le réseau Canopé a permis d’aboutir à un corpus qui, s’il n’est pas exhaustif, est du moins représentatif. En effet, la transformation du réseau Scérén en réseau Canopé en 2014 a fortement modifié la politique éditoriale de l’établissement en centralisant et en rationalisant notamment les décisions de publication, auparavant dévolues non seulement au Centre national de documentation pédagogique (CNDP), mais aussi aux différents Centres Régionaux de Documentation Pédagogique (CRDP).
Si plusieurs périodiques du réseau Scérén consacrent depuis les années 1980 des dossiers au numérique dans l’enseignement, peu portent sur le jeu vidéo. C’est la recherche par mot-clé (en spécifiant comme éditeur le CNDP ou les CRDP) « jeu sérieux » qui offre le plus de réponses (quatorze), celle avec serious game en apporte huit, enfin « jeu vidéo » donne quatre résultats. La recherche a été élargie, grâce à la collaboration de Nadège Gohier1, chargée d’archives à Canopé, à la base de données Callimaque sous forme d’outil interne au réseau Canopé. Cinq périodiques sont apparus : deux sont disciplinaires : Technologie (CNDP2), Économie et management (CNDP), un est une revue de réflexion sur les publics en difficulté (Ville — École — Intégration qui devient VEI— Enjeux en 2000 avant de s’intituler Diversité en 2004).
Enfin, deux revues consacrées au numérique traitent de la question : Argos qui paraît de 1993 à 2012 et L’école numérique qui paraît de 2009 à 2013. Une autre revue transdisciplinaire consacrée au numérique a été retenue, elle ne figure pas sur Callimaque, car les numéros n’ont pas tous été dépouillés, la collecte patrimoniale amorcée par Canopé en étant à ses débuts : Les dossiers de l’ingénierie éducative (publiées de 1992 à 2009 par le CNDP).
L’institutionnalisation du jeu vidéo a aussi entraîné la mise en ligne en 2008 par le portail national du MEN, Éduscol, de Dossiers documentaires sur le numérique dont un intitulé Jeux sérieux et mondes virtuels (dernière mise en ligne : 4 janvier 2015). Ce dossier s’appuie sur une sélection d’études, d’articles et d’interviews portant sur les politiques, lesenjeux économiques, juridiques des jeux sérieux et des jeux vidéo, sur leur intérêt pédagogique et leur impact sur l’apprentissage. Il propose aussi des exemples de jeux sérieux dans plusieurs disciplines et rend compte d’expérimentations académiques. De nombreux liens étant rompus, nous avons conservé le blogue de l’académie de Créteil Jeux sérieux Créteil qui rend compte d’un projet mené de 2008 à 2009 et un compte rendu de l’académie d’Aix-Marseille sur un projet mené de 2010 à 2012.
Dans l’ensemble du corpus, la dimension disciplinaire apparaît surtout à travers l’usage du jeu sérieux et non du jeu vidéo. Ce dernier est rarement nommé, et défini dans un seul document du corpus : le dossier Jeux sérieux et mondes virtuels qui retient la définition de l’Office québécois de la langue française (OQLF)3 :
Œuvre audiovisuelle interactive et ludique dont le contenu est programmé et diffusé sur un support de stockage qui en permet l’affichage sur un écran, où le joueur contrôle l’action qui s’y déroule, à l’aide d’un périphérique de jeu, dans un but de divertissement ou de compétition.
On trouve très peu d’articles sur l’usage disciplinaire des jeux vidéo dans les classes françaises : Minecraft en classe detechnologie (Technologie, n° 211, 2018), Asassin’s creed en classe d’histoire (Jeux sérieux Créteil). Les autres exemples d’usages ont lieu pour l’essentiel dans les pays anglo- saxons, et/ou dans l’enseignement supérieur (Second Life dans Les dossiers de l’ingénierie éducative n° 65, Portal2, Skyrim, Myst, Nintendog, les Sim’s sur Jeux sérieux Créteil). Les autres articles consacrés au jeu vidéo ne portent pas sur son usage disciplinaire, mais sur les pratiques médiatiques des jeunes, relèvent des études de genre, ou posent la question de la motivation de façon générale et transdisciplinaire.
Ces éditions étant toutes un peu anciennes (nombre de revues ont disparu avec la restructuration de Canopé), nous avons consulté le portail Myriaé porté par le MEN, afin de voir les propositions en cours. Ce portail qui figure sur le site de Canopé est destiné aux éditeurs éducatifs pour valoriser leurs ressources auprès des enseignants. Là encore, le jeu sérieux et le serious game dominent : le mot-clé « jeu vidéo » donne trois réponses, les mots-clés « jeu sérieux » et «serious game », neuf (les réponses sont identiques).
Le jeu sérieux est préconisé depuis 2012 dans les documents d’accompagnement de l’enseignement d’exploration «principes fondamentaux de l’économie et de la gestion (PFEG) » et les programmes du baccalauréat en Sciences etTechnologies du Management et de la Gestion (STMG) », il est donc associé à une discipline ou des filières. Éduscol a aussi créé un portail Apprendre avec le jeu numérique en mars 2016. Le terme « jeu vidéo » disparaît, au profit de « jeu numérique », de « jeu sérieux » et de serious gaming dont le portail donne la définition suivante4 :
Le jeu numérique s’apparente à et inclut le jeu sérieux (jeu conçu autour d’une intention didactique) et le serious gaming (démarche où l’enseignant détourne un jeu classique à des fins d’enseignement). Toutefois, les vertus du jeu dans les apprentissages étant reconnues, le terme de jeu numérique sera ici privilégié.
C’est donc la dimension ludique qui est retenue, l’interactivité et l’image étant cette fois-ci passées sous silence : un jeu numérique et un jeu sérieux ne sont pas forcément vidéoludiques, c’est l’usage de l’outil numérique qui prime, quelle que soit la forme qu’il prend. Ainsi, utiliser le terme « jeu sérieux » comme équivalent de serious game « le coup[e] de son contexte d’émergence et du réseau sémiotique où il s’insère. En effet […] la traduction lui donne une dimension plus large (du fait de l’extension du terme “jeu” par rapport au terme “game” » (Brougère, 2012, p. 120). Dans le corpus, les termes « jeux sérieux » et serious game sont utilisés indifféremment et nombre des ressources retenues dans notre corpus mentionnent « jeu sérieux » dans leur titre. Nous utiliserons donc le terme serious game lorsque l’activité proposée est vidéoludique, c’est-à-dire audiovisuelle et interactive (quant au ludique, il est à interroger dans le cadre scolaire, comme nous le verrons), et le terme « jeu sérieux » lorsqu’elle est numérique, mais non vidéoludique.
Si le jeu vidéo est presque absent, c’est parce que l’institution scolaire privilégie ses formes scolarisées : le serious game et le serious gaming. Il faut dès lors examiner quelles disciplines les utilisent.
Déterminer l’usage disciplinaire du serious game et du serious gaming est complexe pour plusieurs raisons : l’utilisation indifférenciée des termes « jeu sérieux » et serious game, l’importance des publications qui s’attachent plus à des questions transversales que disciplinaires (comme la motivation, l’intérêt du jeu). Enfin, nombre de ressources se recoupent entre elles et circulent d’un support à l’autre (notamment entre les différents portails d’Éduscol).
Dans les publications les plus anciennes (2008 à 2013), les disciplines traditionnelles sont toutes présentes. Ainsi, le dossier Éduscol Jeux sérieux et mondes virtuels propose des exemples d’usages en mathématiques, géographie, histoire, langues vivantes, sciences de la vie et de la Terre (SVT). Ces deux dernières disciplines apparaissent aussi dans les deux derniers numéros (n° 49 et 50) d’Argos de 2012 qui comportent un dossier : Des jeux en classe, c’est sérieux ? L’école numérique a publié des dossiers disciplinaires, le jeu sérieux et le serious game apparaissent surtout pour l’histoire, les SVT, les sciences et la technologie. Les disciplines d’économie et de management, de technologie, et d’économie-gestion, sont aussi bien représentées dans le corpus en lien avec l’institutionnalisation du jeu sérieux en 2012. Dans l’académie d’Aix-Marseille, huit jeux ont été expérimentés, surtout dans les disciplines scientifiques et technologiques. Dans Jeux sérieux Créteil, 16 disciplines sont répertoriées, relevant de l’enseignement général (français, mathématiques, histoire-géographie, anglais, physique-chimie, SVT) ou technologique (sciences et techniques de gestion, sciences et techniques de la santé et du social). L’éducation aux médias, l’éducation au développement durable et l’enseignement moral et civique (EMC) sont aussi représentés.
Pour la période actuelle, ce sont ces « éducations à » qui sont très souvent convoquées. Elles sont révélatrices du « choix de changer les missions de l’école, conçue non plus seulement dans sa mission propre de transmission des savoirs, mais comme lieu de médiation entre l’élève et la société » (Cauterman et Daunay, 2010, p. 13). Sur le portail Myriaé, c’est ainsi le serious game ExMachina qui apparaît le plus souvent, en EMC et en éducation aux médias. Son objectif est d’amener les élèves de 12 à 17 ans à interroger leurs comportements face à Internet et aux jeux vidéo.
Si de nombreuses disciplines sont concernées par le jeu sérieux et le serious game, le jeu vidéo est peu présent dans le réseau institutionnel. Qu’en est-il de la discipline du français dans son ensemble, et plus spécifiquement de la littérature ?
La discipline est assez peu présente. On ne trouve ainsi aucun article sur le jeu vidéo, le jeu sérieux ou le serious game dans la revue pluridisciplinaire Textes et documents pour la classe (TDC) qui propose depuis 1967 une analyse d’un sujet à travers trois disciplines parmi l’histoire-géographie, les lettres, les arts, les sciences et les mathématiques alors que plusieurs numéros s’intéressent très tôt à l’informatique ou au numérique5. L’école numérique numéro 5 (2010) qui porte sur l’usage du numérique en classe de français ne consacre aucun article au jeu vidéo, au serious game ni au jeu sérieux.
Quelques réponses apparaissent toutefois :
– Dans les revues du Scérén CNDP
Dans le numéro 65 des Dossiers de l’ingénierie éducative, Les mondes virtuels et l’école, les quatorze articles sontregroupés en quatre rubriques. C’est dans la dernière : Applications
pédagogiques que figurent deux articles sur l’enseignement de la littérature (les deux autres portent sur celui de l’allemand en lycée technologique et sur la remotivation par le jeu vidéo).
Dans le numéro 50 d’Argos (2012b) figure un article qui recense des jeux numériques pour maîtriser la langue française (Constant, 2012).
– Sur le portail Éduscol
Jeux sérieux et mondes virtuels recense six exemples de jeux sérieux en français, dont deux traités dans Argos n° 50 et le numéro 65 des Dossiers de l’ingénierie éducative.
Jeux sérieux Créteil propose une page : « Quelles utilisations des jeux sérieux pour l’apprentissage de la langue française ? » comportant quatre articles, mais ces jeux sérieux sont en anglais, ce qui est paradoxal pour l’apprentissage de la langue française. Les jeux en français ne concernent pas la discipline du français, mais le Français langue étrangère (FLE).
Éduscol comporte aussi des dossiers disciplinaires. Celui consacré aux lettres propose des ressources pour enseigner avec le numérique, dont des Jeux sérieux en lettres avec trois activités.
La présence du jeu sérieux et du jeu vidéo diffère selon les domaines de l’enseignement du français concernés. Jeux sérieux Créteil et Argos no 50 proposent de distinguer trois « axes » d’usages en français : des QCM, la tenue d’un journal de bord de son expérience vidéo ludique et l’écriture de fictions interactives. Or, ces axes interrogent plusieurs dimensions du jeu vidéo : la question du jeu, la question de l’interactivité, la question de la mise à distance de la dimension fictionnelle.
C’est l’étude de la langue qui est la plus représentée dans le corpus, à travers le QCM Free rice (Jeux sérieux Créteil, Argos n° 50) et le logiciel hotpotatoes qui permet de créer des QCM, des quizz, des textes à trous, des mots croisés(Jeux sérieux en lettres). À lire ces publications, il semble qu’il suffise qu’il y ait un support numérique et une interactivité même limitée (les réponses justes ou fausses à un QCM) pour qu’il y ait jeu sérieux. Le domaine disciplinaire « étude de la langue » rend bien compte de l’ambiguïté qui existe dans l’institution entre ce qu’est un jeu numérique, un jeu sérieux et un serious game. Les activités proposées sont en réalité un habillage numérique d’une pédagogie classique comme si le simple fait de changer de support (l’ordinateur au lieu du papier) devait rendre l’activité ludique et motivante. Le numérique est ici un appât pédagogique pour faire entrer les élèves dans l’étude de la langue, activité réputée complexe, voire rébarbative. L’activité elle-même est à interroger puisqu’on connaît depuis longtemps les limites de cette approche de la langue par questionnaire fermé. La grammaire a longtemps été conçue comme un discours strictement théorique, qui demande à l’élève d’« apprendre par cœur, à la maison ou à l’étude, le texte de son manuel » (Chervel, 2006, p. 241) sans explication préalable. Si les objectifs et les modalités de l’enseignement de la langue ont considérablement évolué, les jeux sérieux en langue en désignent la part la plus traditionnelle. Il s’agit donc bien ici de jeux numériques, non de serious games.
Le corpus catégorise aussi comme des jeux sérieux les logiciels d’écriture de fiction interactive, qui seraient la version vidéoludique de l’écriture littéraire (dans Argos, n° 50, dans Jeux sérieux en lettres qui propose la réécriture de passages de l’œuvre de Lydie Salvayre, La compagnie des spectres, dans Jeux sérieux et mondes virtuels et dans les Dossiers de l’ingénierie éducative qui présentent tous deux le site Dialogus permettant de correspondre avec des personnages historiques ou littéraires). Ranger sous la catégorie des jeux sérieux les fictions interactives interroge là encore, quoique de façon différente, la question du jeu dans sa dimension vidéoludique. La fiction interactive diffère en effet du jeu vidéo, puisqu’elle fait intervenir un narrateur, contrairement, le plus souvent, au jeu vidéo où c’est le joueur qui participe directement à l’histoire, sans qu’il y ait de narration (Bouchardon, 2009). Dans l’écriture littéraire interactive, c’est la narration qui prime, ce qui tendrait à conforter la thèse d’une approche plus narratologique que ludologique dujeu vidéo en classe de littérature : il y a jeu, s’il y a interactivité narrative.
Dans notre corpus, seul le FLE utilise des serious games très proches des jeux vidéo (les Eonautes et Thélème, dansJeux sérieux et mondes virtuels et Jeux sérieux Créteil). Si le FLE s’approprie plus facilement le serious game, c’est sans doute parce qu’il a intégré depuis les années 1975 le jeu de rôle, les simulations, etc. comme modalités d’apprentissage de la langue (Germain, 1993)6.
En classe de littérature, la scolarisation du jeu vidéo montre que les réticences de l’école de la IIIe République face à la fiction, « assimilée à la feinte, au mensonge » (Jey, 2006, p. 28), perdurent en prenant de nouvelles formes.
Le jeu vidéo a ainsi généré une seule activité de lecture littéraire dans le corpus qui est aussi l’unique exemple de serious gaming. Dans un article des Dossiers de l’ingénierie éducative n° 65 (répertorié aussi dans Jeux sérieux et mondes virtuels, Éduscol), des élèves de collège doivent trouver sur Internet trois images destinées à construire un diaporama pour accompagner la diction polyphonique du poème de Victor Hugo Djinns.
Ceux qui le souhaitent sont invités à puiser dans l’iconographie des jeux vidéo des images susceptibles de s’accorder à la dimension fantastique du texte et d’évoquer au mieux la vision personnelle qu’ils peuvent avoir des djinns.
(Schneider, 2009, p. 58)
Cet usage scolaire d’un jeu vidéo à finalité de loisir a pour objectif de « réconcilier culture ado et culture classique »(Schneider, 2009). Les images du jeu vidéo sont scannées, donc fixes, décontextualisées de leur trame narrative, évacuant les caractéristiques propres au jeu vidéo. L’image possède ici son habituelle fonction illustrative et perd sa dimension fictionnelle et immersive.
L’enseignement de la littérature en France repose en effet sur une tradition de la mise à distance de l’immersion fictionnelle. Dès lors, lorsque la fiction entre à l’école, l’institution la scolarise. Cette scolarisation prend la forme d’une fiction atténuée, peu immersive, afin de la débarrasser de tout risque de confusion entre réel et imaginaire, afin de la transformer en savoir scolaire, afin de la formaliser.
Au XIXe siècle, cette mise à distance passe par la lecture de fictions peu immersives. La lecture privée, sans guide, est alors proscrite, car la fiction littéraire (conte merveilleux, roman) échauffe trop l’imagination (Nieres-Chevrel, 2009). L’école privilégiait une fiction qui ne stimule pas l’imagination, sous la IIIe République « loin d’être une occasion de favoriser une véritable créativité, la fiction se révèle un moyen de contrôler l’imagination, de la maîtriser » (Jey,2006, p. 31). Les fictions écrites autorisées doivent être familières, tels les robinsonnades, les contes moraux (Marcoin, 2006). Au lycée, la pratique des morceaux choisis détache les extraits de leur contexte — c’est-à-dire de leur trame fictionnelle — empêchant cette dernière de se construire (Chervel, 2006) et la pratique du groupement de texte qui prend le relais dans les années 1980 a le même effet.
Plus généralement, l’atténuation de la fiction peut être illustrée par la pratique des serious games. Ces derniers se voient ainsi souvent reprocher d’être bien plus pauvres du point de vue de leur graphisme et de leur jouabilité que les jeux vidéo. Selon Amato (2007), cette faiblesse a des causes économiques :
Les jeux vidéo utilitaires intéressent au premier chef l’ensemble des petits studios de développement qui ont eu à souffrir d’une violente concentration de l’industrie après 2001. Ils peuvent ainsi assurer des productions moins coûteuses que les « vrais » jeux vidéo traditionnels, par exemple, pour satisfaire les entreprises au niveau des besoins de formation interne.
Tremel (2012) apporte une explication similaire :
Ce secteur servirait en quelque sorte de refuge à des sociétés marginalisées par l’évolution des exigences en matière de jouabilité et de graphismes du marché des jeux vidéo, pour recycler des technologies informatiques dépassées auprès de commanditaires institutionnels visiblement moins exigeants que les consommateurs habituels.
Un autre moyen de brider la fiction consiste à privilégier des pratiques d’écriture qui la mettent à distance.
Dans le corpus, les trois uniques exemples qui intègrent le jeu vidéo et le serious game privilégient la mise à distance de ces activités : il s’agit de les commenter, non de s’y immerger. Outre le poème d’Hugo, deux exemples concernent des activités d’écriture : tenir un journal de bord de son expérience vidéoludique (l’Ingénierie éducative no 65, Jeuxsérieux Créteil, Argos, no 50) ou rédiger un texte argumentatif sur les dangers du Web et du jeu vidéo (Jeux sérieux en lettres) après avoir joué de façon très encadrée au serious game Ex Machina. Ce jeu portant sur les dangers du Web, il s’agit non seulement d’éviter toute immersion, mais aussi d’en signaler les dangers.
C’est donc bien une mise à distance de l’imagination (entendue comme ce que l’on peut faire à partir de cette faculté qu’est l’imaginaire) que révèlent ces pratiques. En effet, l’imagination n’est pas considérée comme une qualité dansl’institution scolaire française jusqu’au milieu du XXe siècle, mais bien au contraire, comme une « exaltation de cerveau proche de la folie » (Gestin, 1998, p. 171). Roger Cousinet, dans l’article « Imagination » du dictionnaire Ferdinand Buisson (1911) distingue ainsi une mauvaise imagination, purement imitative, ou source de confusion et une « bonne et féconde imagination » que doit développer l’école. Sous la IIIe République, les programmes de l’école primaire privilégient des rédactions sur des sujets du quotidien dans le but de canaliser l’imagination (Bishop, 2007 ; Jey, 2006).
Cette réticence perdure à tous les niveaux d’enseignement. Dans le premier degré, la maîtrise de la langue et des processus rédactionnels prime (Bishop, 2007) et le mot « imagination » ne figure dans les programmes de français que depuis 2015, dans le cadre d’une nouvelle activité, l’écriture créative. Au lycée, l’explication de texte et ses avatars (lecture méthodique – 1987, lecture analytique – 2006), la dissertation, le commentaire composé mettent l’imagination à distance et ne permettent pas au sujet lecteur de se saisir des textes. Quant à l’écriture d’invention, elle est un commentaire déguisé puisqu’elle relève en fait d’une sédimentation des genres scolaires — notamment de la dissertation — plus que de leur renouvellement (Daunay, 2015).
L’enseignement du cinéma relève lui aussi du commentaire plus que de la création, excepté dans les classes à option qui ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt puisqu’elles sont peu nombreuses (une par académie en moyenne), et très sélectives (Habi, 2009). Habi (2009) rappelle ainsi que dans les études sur le cinéma en classe de français, le commentaire sur l’image l’inféode à l’analyse du discours ; le langage graphique et le langage verbal y étant considérés comme identiques.
Les élèves sont donc rarement amenés à créer des images cinématographiques, mais plutôt à les commenter. La situation est identique pour le jeu vidéo : dans notre corpus, on ne trouve aucune création de jeu vidéo (à finalitépurement ludique) et une seule activité de création de serious game : un jeu sur l’Odyssée, pour lequel des élèves de collège ont écrit le scénario, les dialogues, et fait les animations (Jeux sérieux Créteil, repris dans Jeux sérieux et mondes virtuels).
Les élèves ne sont donc pas considérés comme des acteurs, mais comme des consommateurs de média qu’il faut protéger et informer sur les risques de l’immersion fictionnelle des pratiques vidéoludiques.
C’est ce qui explique l’importance de la discipline de l’éducation aux médias, prise en charge par les enseignants de français et d’histoire-géographie, et répondant donc aux logiques de ces disciplines qui les accueillent (Audigier, 2006). Elle a pour fonction d’éveiller l’esprit critique des élèves pour contrer la manipulation idéologique inhérente aux médias de masse et leur permettre d’accéder à la culture légitime (Lebrun, 2012) en développant des outils d’analyse pour apprendre leur langage spécifique. La légitimation du numérique passe par la scolarisation de ses modalités de lecture à travers des objectifs de compréhension (« lire et comprendre des textes et documents composites » ; « saisir les caractéristiques de l’environnement médiatique et numérique ») (programmes cycle 3, MEN, 2015).
Ces éducations à de nouvelles formes de lecture et d’écriture soulignent la sédimentation constante des pratiques, des modalités de lecture : quel que soit le support (textes littéraires, documentaires, composites, numériques), les modalités de lecture relèvent de la mise à distance. Anne-Marie Chartier (2002) note ainsi que lorsqu’un nouveau modèle de lecture, plus proche de la lecture loisir,
s’installe dans l’école, il est aussitôt scolarisé, c’est-à-dire repris dans des dispositifs techniques qui deviennent autant d’instruments d’apprentissage. Apprendre à lire de façon fonctionnelle, rapide, apprendre à consulter un document, apprendre à lire des œuvres intégrales et non plus des morceaux choisis, tout cela exige des apprentissages longs, précoces, persévérants, qui ne se substituent pas, mais s’ajoutent aux lectures traditionnelles.
(p. 377)
En se scolarisant, le jeu vidéo devient une activité scolaire parmi d’autres, et il en adopte les caractéristiques disciplinaires. Fourtanier (2012) qui s’intéresse à une autre dimension des prescriptions officielles sur le numérique, le B2i, note elle aussi que son application est toujours en lien avec les activités scolaires traditionnelles.
L’institution scolaire se caractérise donc par une vision méfiante à l’égard des jeux vidéo, désocialisant, manipulant des récepteurs forcément passifs, elle les scolarise pour en signaler les dangers, et pour les ramener à du connu, à travers des pratiques de serious game, et bien plus de jeux numériques, mettant à distance la fiction, l’image, le jeu, formalisant les apprentissages.
On trouve alors une autre explication à la réticence à user du jeu vidéo en classe : les connaissances et compétencesvidéoludiques sont toujours acquises de façon informelle et sans que le joueur en ait véritablement conscience (Berry, 2007 ; Poix et Genvo 2003). Or, les pratiques scolaires se caractérisent par la mise à distance des savoirs (Daunay, 2007), le développement du métalangage, les apprentissages formels. La part d’apprentissage informelle des jeux vidéo semble donc incompatible avec la conception éducative de l’institution française, ce qui expliquerait en partie leur faible usage. En effet, l’institution scolaire est réticente aux aspects les plus informels des activités adolescentes et enfantines, et les accepte « tant qu’elles restent sous son contrôle (intellectuel et organisationnel) » (Barrère, 2011, p.55). Or, les jeux vidéo, contrairement à d’autres activités extrascolaires très encadrées (musicales, sportives notamment)qui participent à l’extension de la forme scolaire (Vincent, 1994), ont élargi l’autonomie adolescente et enfantine, car elles sont plus difficiles à contrôler, ne serait-ce que parce qu’elles ont lieu sur des supports variés, mobiles, et qu’elles peuvent se pratiquer loin de la surveillance des adultes (Barrère, 2011).
On trouve ainsi peu d’articles sur les compétences de haut niveau (maîtrise de systèmes complexes, recherche par induction, collaboration) et des connaissances que permet la pratique des jeux vidéo. L’institution ne semble retenir du jeu vidéo scolarisé que sa part d’appât pédagogique, soit pour entrer dans des apprentissages considérés comme complexes, rébarbatifs, soit pour motiver des publics considérés comme peu sensibles aux apprentissages traditionnels : publics scolaires dans les réseaux d’éducation prioritaire, publics des filières technologiques (dans lesquelles le jeusérieux est institutionnalisé). Les jeux vidéo sont alors utilisés comme les autres outils pédagogiques, sans prise en compte de leur spécificité.
La scolarisation du jeu vidéo est donc à la fois une scolarisation de sa dimension ludique et interactive d’une part, le plus souvent appauvrie, et de sa dimension fictionnelle et immersive d’autre part, mise à distance. S’il existe bien une scolarisation spécifique à cet objet, sous forme de serious games pour l’essentiel, et à moindre degré de serious gaming, cette scolarisation relève d’un processus plus général : la scolarisation de la culture de masse juvénile.
La scolarisation du jeu vidéo est en effet incluse dans un processus plus général qui caractérise la manière dont l’institution scolaire réagit face à la culture de masse. Cette dernière se définit par une massification de tous les maillons de la chaîne culturelle : production, vecteurs, réception (Rioux et Sirinelli, 2002), et par l’apparition d’une industrie culturelle (Kalifa, 2007), la culture devant une marchandise. Le processus de scolarisation du jeu vidéo s’inscrit dans une histoire, les pratiques actuelles du jeu vidéo se sédimentant avec d’autres, plus anciennes, qui relèvent de la scolarisation de la littérature, du cinéma, de la télévision.
La première confrontation de l’école à la culture de masse a lieu à la fin du XIXe siècle et concerne dans un premier temps l’imprimé. L’alphabétisation permise par les différentes réformes de Guizot (1833) à Ferry (1880) conjuguée à l’industrialisation et aux progrès techniques, ont entraîné une meilleure circulation de l’information, un abaissement des coûts de l’imprimé, et la diffusion de la culture de masse (Rioux et Sirinelli, 2002).
On assiste alors à une première phase de réaction de l’institution scolaire qui se caractérise par un discours de rejet déplorant d’une part la piètre qualité de cette « sous » culture et le temps passé à ces activités, et d’autre part exprimant des craintes sur le mauvais impact de ces activités sur le travail scolaire, voire sur la socialisation des jeunes. C’est tout d’abord l’offre de lecture qui inquiète. Mise à la portée d’un jeune public nouvellement alphabétisé, elle devient trop importante pour être contrôlée (Chartier, 2002). Le rejet porte à la fois sur la quantité de lecture (« ils lisent trop ») et sa qualité (« ils lisent n’importe quoi ») (Chartier, 2002, p. 364).
La dimension identificatoire de la fiction nuirait en effet à l’intégration des comportements sociaux que l’école veut transmettre et fait craindre une contamination des comportements répréhensibles et des mauvais modèles qu’elle pourrait véhiculer.
Ce discours de déploration qualitatif et quantitatif va être identique à chaque arrivée d’un nouveau vecteur de culture de masse (Kalifa, 2007). Le cinéma est ainsi accusé de favoriser la délinquance dès l’année 1914. Édouard Poulain publieen 1918 un manifeste contre le cinéma, dont le chapitre IV : Cinéma, école du vice et du crime recense des dizaines de faits divers de délinquance juvénile attribués à l’influence nocive du cinéma, notamment policier. C’est ensuite la télévision qui est stigmatisée, cette fois-ci parce qu’elle conduirait à la passivité (Bantigny, 2008). Le discours se déporte enfin sur les jeux vidéo, refuge virtuel qui isolerait l’enfant et l’empêcherait d’affronter le monde réel en le désocialisant et ledéscolarisant (Gellereau, 2001 ; Gerber, 2010). Pour gloser A.-
M. Chartier, de même que les enfants, les jeunes lisaient trop, n’importe quoi, ils regardent désormais trop, n’importe quoi, ils jouent trop, à n’importe quoi.
Ces réactions de rejet s’expliquent, tout d’abord, parce que la culture de masse, quelle que soit la forme qu’elle prend, heurte une conception française de la culture — ce que l’on appelle actuellement l’exception culturelle française — où la république est pourvoyeuse d’une culture légitime et de qualité, car non soumise aux lois du marché (Rioux et Sirinelli, 2002). Ensuite, là où la culture scolaire (Chervel, 1998) privilégie la raison et l’effort, la culture de masse s’apparente aux loisirs et s’adresse aux affects. De plus, ses codes sont parfois mieux connus des élèves que des maîtres, ce qui peut être perçu comme une remise en question de l’autorité de ces derniers (Bantigny, 2008).
Ce discours de rejet évolue pourtant dans les années 1970, lorsque la culture de masse développe une branche spécifiquement juvénile, avec l’arrivée de la génération du baby-boom (Rioux et Sirinelli, 2002). L’allongement de la scolarité fait alors entrer à l’école des publics scolaires de plus en plus diversifiés, porteurs d’une culture très différente de celle que véhicule l’école (Bantigny, 2008).
Là encore, successivement, littérature, cinéma, télévision et jeux vidéo vont être scolarisés selon un processus identique. La culture de masse juvénile est prise en compte et s’accompagne d’une politique d’équipement et/ou d’usage. Par politique d’équipement, nous entendons l’achat de supports (téléviseurs, ordinateurs, tablettes, etc.) et par politique d’usage, les prescriptions officielles et les publications pédagogiques portant sur les activités scolaires que permettent ces équipements.
En ce qui concerne la lecture, l’offre jusque-là limitée aux classiques s’élargit. Il s’agit désormais non plus de sélectionner les œuvres à lire pour former le goût, mais d’élargir l’offre de lecture, pour que les élèves lisent (Chartier, 2002). En termes d’équipements, afin de guider les élèves dans ces nouvelles lectures, se développent les Bibliothèques Centres de Documentation (1978), les Centres de documentation et d’information (1989). Enfin, le CAPES de documentation est créé en 1989, afin de former des professionnels des bibliothèques scolaires. Le cinéma se légitime aussi dans l’institution scolaire. Le Front populaire de 1936 crée une commission spéciale pour le cinéma au ministèrede l’Éducation. La légitimation se poursuit avec la création d’une chaire de filmologie en
Sorbonne en 1945 (Rioux et Sirinelli, 2002). En 1963, une première circulaire encourage l’enseignement du cinéma, relayée par des textes en 1973 et 1977 (Bantigny, 2008). En 1972 apparaissent les premières expérimentations d’option « cinéma » au bac (Bantigny, 2008). L’option se généralise en 1987. L’ensemble des niveaux scolaires est progressivement concerné : en 1989 est lancée l’opération « collège au cinéma » (Denizot, 2009). Depuis 1993, une œuvre cinématographique figure au programme des terminales littéraires. En 1994 naît « école au cinéma » pour le premier degré.
La télévision fait aussi l’objet d’une politique d’équipement massif dans les années 1960, alors même que les ménages sont encore peu équipés (un sur huit en 1960, un sur deux en 1967). On passe ainsi de 1000 établissements à 9000 équipés de 1962 à 1967 (Bantigny, 2008). Les usages passent par une politique de programmation : la radiodiffusion-télévision française propose une heure de programme pédagogique par semaine dès 1945 (sur les 2500 heures par an diffusées jusqu’en 1964). L’expérience se poursuit et passe sous la tutelle de l’Éducation nationale en 1951. Le temps de diffusion s’étend et atteint 15 heures hebdomadaires soit 25 % du temps de programmation de l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF) (Bantigny, 2008). Les programmes, essentiellement constitués de documentaires ou d’informations (Bantigny, 2008), soulignent la méfiance à l’égard de la fiction. La télévision est aussi un des premiers supports de l’éducation aux médias, avec la « formation du jeune téléspectateur actif », nom d’un programme interministériel de 1979 qui vise à développer le regard critique des élèves de neuf à quatorze ans (Bantigny, 2008).
Les politiques d’équipements numériques sont elles aussi rapidement massives. En 2015 est mis en place le « plan numérique à l’école » avec un budget global d’un milliard d’euros pour la transformation numérique de l’éducation sur trois ans. Le programme d’investissement d’avenir (Pia) est chargé d’équiper l’ensemble des collèges français en outils numériques d’ici à 2020, sur le fondement de projets pédagogiques.
En revanche, la télévision est en grande partie sortie du champ institutionnel. La réduction des programmes s’accélère durant les années 1970. En 1980, seuls l’enseignement primaire et la formation continue sont désormais concernés, pour trois heures trente hebdomadaires (Bantigny, 2008). Les supports numériques auraient donc remplacé la télévision comme média de masse à l’école.
Si l’école modifie sa façon d’imposer ses normes et tient désormais compte de la culture de masse juvénile, les politiques d’usages scolaires montrent que la scolarisation de toutes les formes de fictions, écrites, cinématographiques, télévisuelles, vidéoludiques, privilégient non seulement l’immersion dans la fiction, mais bien plus sa mise à distance.Rioux et Sirinelli soulignent la très
forte résistance de l’école de la IIIe et IVe République vis-à-vis de la culture de masse, introduite à dose homéopathique, tel un « échantillon prélevé sur l’ennemi » (2002, p. 288). On peut ajouter que le processus de scolarisation transforme radicalement l’échantillon. Comme tout vecteur de culture de masse juvénile, fictionnel, immersif, comme tout art de l’image, la scolarisation du jeu vidéo génère des pratiques scolaires très différentes des pratiques extrascolaires. Il faut donc
garder une certaine distance avec la rhétorique du progrès que produit encore une fois le développement de l’informatique. Régulièrement des gourous annoncent la fin du monde ancien et l’émergence d’une nouvelle façon d’apprendre révolutionnaire à même de résoudre tous les problèmes.
(Brougère, 2012, p. 120)
L’école est un lieu de scolarisation, non de révolution.
Ce n’est donc pas uniquement le rapport scolaire à la fiction qui explique la faible place du jeu vidéo en classe de littérature, mais plus généralement la méfiance que l’institution scolaire conserve à l’égard de la culture de masse etdes apprentissages informels du jeu. Reuter signalait en 2001 le « paradoxe à vouloir scolariser l’extrascolaire » qui peut conduire à une « aseptisation […] faisant perdre tout intérêt à cette scolarisation » (p. 16). Il existe pourtant d’autres approches scolaires, plus participatives, qui prônent l’exploration et l’appropriation de ces médias, et qui considèrent les élèves non plus comme des consommateurs, mais comme des acteurs. Les jeux vidéo permettent en effet de développer ce que Gee et Schaffer (2010) appellent des « compétences du 21e siècle » : l’innovation, la pensée critique et systémique, le travail en équipe. Ils sont donc particulièrement aptes à faire des élèves des producteurs plutôt que des consommateurs de savoirs. À travers la question du jeu vidéo serenouvelle alors le débat entre la nécessité de fonder l’approche des œuvres sur la subjectivité, l’immersion fictionnelle et celle du risque du spontanéisme et de la connivence culturelle que cela implique (Daunay, 2007). Une intégration du jeu vidéo dans une véritable pratique immersive, vidéoludique, impliquerait de totalement repenser ce qu’est un apprenant, en interrogeant la part des apprentissages informels (Brougère, 2007) de la même façon que perdure l’interrogation des pratiques scolaires permettant une approche subjective des œuvres. La question que posait Daunay en 2007 : « Comment didactiser la question de la subjectivité, autrement dit comment faire avec la subjectivité de l’apprenant » (p. 48) reste ouverte.
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