Volume 5 / Outils et supports didactiques pour la lecture et l’écriture littéraire

Tenir en classe un blogue de lecture littéraire: pratiques du texte, reconfigurations de la réception. Le cas d’i-voix au lycée de l’Iroise de Brest

Nathalie Brillant-Rannou
Université Rennes 2
Jean-Michel Le Baut
Lycée de l’Iroise, Brest

Résumé

Poésie et web peuvent-ils faire bon ménage quand on enseigne en lycée ? Comment se manifeste et se construit le sujet-lecteur lors de la tenue d’un blogue de classe ? Quelles sont les incidences de l’organisation énonciative spécifique du blogue pour l’enseignement de la littérature ? Quels gestes de lecture-écriture multimodale sont développés ? À quelle phénoménologie de la lecture donnent-ils manifestement lieu ? En analysant le blogue i-voix, en tenant compte du témoignage des élèves et du professeur, on constate que les gestes de lecture en jeu, s’ils ne sont pas tous redevables au numérique, sont démultipliés, intensifiés et surtout finalisés lors de la tenue du blogue. Finalement, c’est peut-être parce qu’il n’est pas encore un genre scolaire que le blogue de classe fait éclore des expériences littéraires mobilisatrices, créatives et fédératrices pour la communauté constituée des lecteurs.

Abstract

Can poetry and the internet go hand in hand when it comes to teaching poetry in high school? How do students position themselves as reading subjects, and how can keep blogs in class help them achieve that goal? What impact does a blog very specific system of enunciation have on teaching literature? What multimodal reading and writing practices are developed in the process? What range of phenomena do they clearly give rise to, as far as reading is concerned? We carefully analyzed the content of a blog called “i-voix” and put both students’ and teachers’ reports on their blogging experience under scrutiny. Bearing in mind that using the digital environment certainly doesn’t do it all, this study demonstrated that the reading practices involved in the process of blog keeping do indeed increase and intensify, as they are ultimately allowed to materialize via that medium. Finally, the very fact that keeping blogs is not yet common practice in schools may be the reason why it gives birth to stimulating and creative literary experiences that all students share in and that brings them together as part of the greater reading community.

Mots-clés
blogue, créativité, multimodal, réception, sujet-lecteur

Keywords
blog, creativity, multimodal, reception, reading subject
Citer
Pour citer
Rannou, Nathalie et Le Baut, Jean-Michel (2017). Tenir en classe un blogue de lecture littéraire: pratiques du texte, reconfigurations de la réception. Le cas d’i-voix au lycée de l’Iroise de Brest. Revue de recherches en littératie médiatique multimodale, 5. https://doi.org/10.7202/1046902ar

Introduction

Poésie et web peuvent-ils faire bon ménage quand on enseigne en lycée ? Les élèves en difficulté entrent-ils dans un cercle vertueux quand Internet s’invite en cours de français ? En réponse à ces deux défis, la tenue d’un blogue de classe pourrait presque faire espérer un nouvel eldorado pédagogique. Or, le regard impliqué que nous proposons ici ne se cantonne pas à une posture militante1. Au-delà de la présentation d’un dispositif d’enseignement véritablement porteur, nous voudrions observer les phénomènes de réception littéraire spécifiques sur et à travers un blogue2 tenu en cours de français. L’étude de cas proposée consiste à observer un blogue particulier issu d’une pratique en lycée, effective et pérenne. D’après les événements de lecture qui se manifestent de façon quasi spectaculaire sur le site d’i-voix, une didactique de la multimodalité doit parvenir à distinguer ce qui relève des compétences médiatiques (via l’expérience de lecture-écriture en ligne), des compétences professionnelles de l’enseignant (via la conduite d’un projet pédagogique numérique), de l’expérience littéraire elle-même, c’est-à-dire le vécu de lecture-écriture effectif convoqué par et pour la tenue du blogue. Or, même si la recherche s’empare actuellement de l’analyse des blogues d’écrivains (Chapelain, 2007, Bonnet, 2016), en dehors des apports de l’équipe LMM de l’Université du Québec, nous restons peu équipés théoriquement en didactique de la littérature pour interpréter les blogues d’apprentis lecteurs ; nous risquons aisément l’inflation techniciste, la fascination ou la confusion. Après une rapide présentation du cas retenu, nous nous interrogerons donc sur les phénomènes qui dépassent le simple exemple considéré : comment se manifeste et se construit le sujet-lecteur dans un tel dispositif ? Quelles sont les incidences de l’organisation énonciative du blogue pour l’enseignement de la lecture littéraire ? Quels gestes de lecture-écriture multimodale se développent dans ce cas précis ? À quelle phénoménologie de la lecture donnent-ils manifestement lieu ? Ces différentes questions poseront nécessairement celle des genres scolaires : l’exemple du blogue de classe de français i-voix nous rapproche-t-il d’une nouvelle catégorie didactique ou s’agit-il de pratiques reconfigurées existant également hors du numérique ?

On s’engage donc ici à repérer les gestes de lecture des blogueurs3 à travers l’observation directe, stylistique et didactique du blogue i-voix et l’interprétation de témoignages d’élèves livrés en amont. L’objectif est de cerner des enjeux spécifiques de la tenue d’un blogue de lecteurs en cours de français, en recourant aux notions et aux modèles théoriques attentifs au sujet-lecteur (Mazauric, Fourtanier, Langlade, 2011a ; 2011b) dans le cadre des réceptions multimodales de la poésie. La méthodologie empruntée répond aux besoins d’observation d’une expérience de classe effective : il s’agit d’analyser un type numérique d’écrits de la réception4. La démarche exploratoire entre dans le cadre d’une recherche qualitative beaucoup plus large consacrée à la phénoménologie de la lecture de poésie et à sa didactisation5.

1. Présentation d’i-voix : un blogue collectif de lecture poétique et littéraire

Le projet i-voix s’insère dans un partenariat eTwinning6 entre des élèves de première littéraire du lycée de l’Iroise à Brest et des lycéens italiens apprenant le français à Livourne. L’espace de travail principal est un blogue : un atelier permanent de lecture et d’écriture où les lycéens, tout au long de l’année scolaire, accompagnent la progression dans le programme, explorent des œuvres classiques et contemporaines et partagent leurs productions créatives. Chaque année, une nouvelle classe prend en charge le blogue qui se pérennise tout en évoluant techniquement. Au gré de ses huit années d’existence, le blogue s’est enrichi de pratiques collaboratives sur d’autres espaces de publication numérique : Twitter, Facebook, Pads, Cartographie (Le Baut, 2015b), livres numériques, chaîne YouTube. Une heure de cours hebdomadaire est spécifiquement consacrée au projet, mais les élèves y travaillent aussi hors du temps scolaire. Au fil des différents objets d’étude, autour des œuvres successivement abordées en lecture analytique ou cursive, des suggestions variées de formats d’articles pour le blogue sont livrées aux élèves : ils s’en emparent à leur guise pour rendre compte de leur parcours en littérature tout au long de l’année, de façon active et sensible.

Sur un plan quantitatif, depuis l’ouverture du blogue, on comptait en juin 2016 près de 22 000 articles publiés,plus d’un million de visiteurs, plus d’un million et demi de pages vues et 22 000 commentaires. La dynamique de lecture-écriture-publication franchit non seulement les murs de la classe, mais aussi les années, les frontières et les écarts de niveaux de maîtrise de la langue, puisque collaborent au projet des lycéens italiens en Français langue étrangère.

Sur un plan didactique, la conception du dispositif relève indéniablement du paradigme du sujet-lecteur. Le projet met en œuvre, à sa façon et à l’échelle collective, les principes du « carnet de bord » (Rouxel, 2005) ou du « cahier de lecture littéraire » (Ahr & Joole, 2013). Il prend le parti des lectures-écritures créatives dans la veine des ateliers d’écriture (Massol, 2008) articulés à la découverte d’œuvres littéraires. Le blogue offre bien entendu les opportunités de la multimodalité : combiner texte, image, son et vidéo permet à chacun d’exprimer sa réception des œuvres avec des outils variés, dans un espace connecté et interactif. Ainsi, chaque élève est invité à suivre et formuler son parcours personnel dans l’œuvre lue afin d’éprouver son pouvoir d’évocation : faire résonner le texte par les mots (par exemple, une lettre adressée à un auteur), faire résonner l’œuvre par la voix (par le biais d’enregistrements audio de lecture à voix haute, avec parfois un accompagnement musical et/ou une justification des choix), faire résonner l’œuvre par le corps (par exemple, un élève se mettant en scène dans une adaptation photographique d’un poème). Solliciter différentes formes de langage, portées par les mots, les images, les sons et le corps, permet de contourner la rhétorique scolaire du commentaire métatextuel tout en poursuivant une véritable ambition d’appropriation et d’interprétation des œuvres par les lecteurs (Shawky-Milcent, 2016). D’après le contrat didactique, l’objectif du blogue est donc moins la mise en valeur de métatextes finalisés et codifiés que le partage de réceptions singulières et ponctuelles, formellement hétérogènes laissant paraître leur processus. Ainsi, nous voulons savoir si l’introduction du numérique via la tenue du blogue suscite de nouveaux rapports aux textes littéraires de la part des apprenants, ou s’il est réductible à la présentation de résultats de lecture qui auraient de toute façon eu lieu, avec ou sans mise en ligne.

En posant le blogue au cœur de la pédagogie et en ouvrant les écrits de la réception aux formes les plusvariées, le but est de déjouer les représentations que les élèves peuvent se faire de l’attente institutionnelle qui souvent les inhibent ou leur font croire qu’ils ne sont pas au niveau. Le professeur, accompagnateur, colecteur, lui-même impliqué à titre de lecteur réel et subjectif, s’engage à prendre une place beaucoup plus proche de celle du « maître ignorant » de Jacques Rancière (1987) que de celle d’un expert surplombant. Étant donné l’organisation énonciative du blogue et la variété des expérimentations offertes, on cherche à transformer les conceptions de l’accès au savoir littéraire de la part des élèves. Puisque le blogue ne constitue pas ici la transposition technologique de pratiques de classe traditionnelles transmissives, mais qu’il ouvre un espace horizontal, collaboratif et créatif, l’enseignant gage que la lecture littéraire devient dynamique et valorisante, du point de vue individuel, mais aussi collectif (Le Baut, 2015a).

2. Observation de lecteurs réels actifs

Si l’on observe le blogue à l’échelle de l’individu, on constate aisément que ce dispositif didactique collectif mise sur la singularité des lectures. Mais individualité et collectivité n’entrent pas en opposition, bien au contraire ; le statut énonciatif de chaque lecteur varie constamment, le sujet circule à l’intérieur d’un tout auquel il contribue sans se fondre. Le blogue n’est pas une œuvre collective finale, mais le carnet de route d’un ensemble de sujets engagés dans l’aventure partagée de diverses réceptions authentiques d’œuvres communes, dans un temps donné. Le même blogue étant pérennisé d’année en année par la nouvelle classe de première littéraire, chaque lecteur prend place dans la synchronie de l’expérience, mais aussi dans la diachronie d’un groupe mouvant qui profite d’un jeune héritage et tisse une histoire. Le contexte et les objets de lecture sont communs, l’aventure de la lecture est individuelle, l’expérience du blogue est communautaire dans un collectif à plusieurs cercles. La variété et la pluralité des paroles font donc partie des caractéristiquesdu modèle didactique en jeu. La notion de sujet s’affirme à travers divers signes et différents gestes de lecture- écriture (Thapliyal, 2008). Les spécificités du sujet-lecteur-blogueur se déclinent selon quatre dimensions : son mode d’identification, la dimension multimodale de son activité, sa capacité à traverser les niveaux logiques, les modes, les genres, et enfin, sa façon d’occuper sa place dans les réseaux.

2.1. Un lecteur identifié

Contrairement à un travail collectif standard restitué ponctuellement sur un mode papier avec le nom des membres du groupe en haut de la copie unique, l’espace du blogue permet à chaque contributeur d’être nommé, reconnu dans l’auctorialité de sa stricte contribution à la production collective : soit l’élève signe sa publication, soit son nom apparaît à titre d’éditeur. Ainsi, au gré des mois qui s’écoulent, chaque article postéconserve la signature de son auteur. Nom, prénom, pseudonyme, plusieurs options sont possibles. Dans le cas d’i-voix, chaque élève est reconnu par son prénom, à la différence des écrivains mentionnés, dont le prénomest suivi naturellement de leur nom d’auteur. On note dès lors que l’identité numérique n’est pas exactement l’identité scolaire, l’identité artistique ou l’identité civile : dans l’espace déterminé du blogue, un prénom suffit pour être reconnu, dans différents sens du terme. Cette identité ne correspond pas non plus nécessairement aux pseudonymes que chaque élève peut employer indépendamment sur Internet, Facebook, Twitter ou d’autres réseaux à titre entièrement privé (Granjon, 2014, p. 57). L’identité du blogueur de classe correspond à un contexte et à un contrat. En se centrant sur le prénom, elle est plus proche du familier et de l’intime que le patronyme prénom-nom qui signe une copie papier. D’ailleurs, ce que le numérique fait perdre au niveau de la singularité de la graphie, la liberté du traitement de texte le réintroduit : couleurs, polices et mise en page permettent une importante personnalisation visuelle des textes produits. Si les façons de signer et de personnaliser une publication rappellent davantage les pratiques numériques non scolaires des élèves, elles ne s’y fondent pas totalement : le sujet publiant dans le blogue de classe assume sa participation dans un cadre institutionnel (d’où le soin apporté à l’orthographe, au niveau de langue) et passe par la validation du professeur-administrateur. Le ton général du site i-voix est également bienveillant, dépourvu d’ironie sarcastique, de dérision satirique à l’égard des autres contributeurs. Se constitue ainsi une identité numérique manifestement favorable au développement de la personne. Cette identité numérique est marquée et esthétisée, par exemple, en juin 2016, à travers la publication de nuages de mots personnels7 : le travail de l’année est ainsi consacré dans une galerie d’autoportraits numériques propre au cadre du blogue. Toutes ces observations nuancent fortement le postulat d’une « dissolution de la notion d’identité » lors de la tenue d’un blogue, selon Paldacci (2006).

L’absence du nom propre est aussi une façon de protéger l’identité civile des contributeurs, souvent mineurs, dans l’immensité de la toile. En revanche, le patronyme du professeur- administrateur figure, signe et marque avec discrétion l’auctorialité générale et la responsabilité légale du projet. Mais dans la grande majorité des cas, ses interventions sont publiées sous le nom du blogue i-voix, il s’agit donc bien d’une identité numériquespécifique.

Les lecteurs du blogue, l’enseignant, un autre élève ou un consultant extérieur à la classe, peuvent suivre le fil des productions d’un contributeur particulier, repérer ses formes d’expression de prédilection, et ce, tout au long de l’année. Bien que collectif et filtré par une configuration identitaire spécifique, le dispositif du blogue permet une observation, voire un suivi des interventions individuelles dans le projet collectif. La place de l’identité singulière de chaque contributeur a des incidences sur la portée didactique du dispositif, son adéquation aux principes de la différenciation pédagogique qui se veut intégrative et de la prise en compte du sujet-lecteur.

2.2. Un lecteur multimodal

Une des caractéristiques du blogueur d’i-voix tient à son aptitude à varier les modalités d’expression de sa lecture. Avec Lacelle et Lebrun (2017), on s’accorde à distinguer quatre catégories médiatiques d’énoncés : textuel, sonore, visuel et cinétique. Le premier engagement du blogueur consiste à choisir le média qui coïncide le mieux à son intention ou à sa motivation expressive. On remarque sur ce blogue littéraire que les médias ne sont pas hiérarchisés : la prépondérance habituelle de l’écrit au lycée s’efface derrière l’oralité et les images (fixes ou mobiles). Cette réhabilitation des modalités d’expression non textuelles dans un cadre scolaire permet de dépasser le graphocentrisme traditionnel dénoncé par Zumthor (1983). La multimodalité touche au corpus des lectures dont certaines œuvres appartiennent au catalogue Publie.net, notamment, mais surtout à celui des textes des lecteurs. À travers l’expérience du blogue, les écrits de la réception deviennent tout naturellement des textes multimodaux. La lecture sécrète, on le sait (Rouxel & Brillant Rannou, 2012) des effets de réception multisensoriels qui engendrent des reconfigurations subjectives, aussi bien sonores, visuelles que textuelles ou cinétiques. Cependant, bien que multimodal, le texte du lecteur blogueur ne saurait couvrir la totalité des sensations intimes stimulées lors de la lecture : le corps du lecteur blogueur est sollicité dans plusieurs dimensions (la voix, l’image de soi, l’ouïe), mais la reconfiguration sur écran demeure évidemment circonscrite selon ses contraintes propres. Que faire du goût, des odeurs, des touchers dans un contexte numérique ? De plus, les catégories de productions, bien que très nombreuses, sont prédéfinies, suggérées par l’enseignant sur le blogue ou discutées avec lui en classe. Il semble donc évident que le cadre médiatique ouvert à l’expression du lecteur prédétermine les contours et la teneur du texte du lecteur tel qu’il est publié. La dimension multimodale des productions attendues sur le blogue est motivante et porteuse dans la mesure où cette multimodalité peut susciter de nouveaux habitus et générer des reconfigurations intimes variées lors de lectures littéraires dans d’autres contextes que le blogue lui-même. Elle ne saurait cependant coïncider avec l’expérience phénoménologique de la lecture la plus complexe et la plus intime.

2.3. Un (hyper)lecteur transmédiatique, transmodal, analogique et digital8

Le lecteur que nous découvrons à travers le blogue n’est pas seulement apte à recourir à différents médias pour donner voix et figure à sa reconfiguration de l’œuvre qu’il découvre. Sa compétence consiste surtout à passer d’un média à l’autre, à faire basculer un énoncé textuel vers un énoncé d’une autre nature et même à combiner plusieurs langages. Dans ce contexte de productions multiples et complexes, le lecteur écrit, dit, écoute, échange. Les frontières entre lecture/écriture/interprétation sont ouvertement poreuses. Dans le cadre d’i- voix, écrire à partir d’un texte ne revient pas à mettre en ligne le compte-rendu d’une expérience antérieure dont le blogue serait un réceptacle explicatif homogène, telle une liasse de copies numérisées. Les compétences développées par la tenue du blogue littéraire se logent indéniablement dans le processus transmédiatique et transmodal. Le recensement de ces passages est délicat, il repose les questions de l’activité phénoménologique du lecteur.

Quand le lecteur lit un livre papier non illustré et qu’il publie en ligne une image, une vidéo ou un enregistrement audio du texte, qui sont autant de modalités d’appropriation, d’interprétation et de restitution de la part du récepteur, la reconfiguration touche au support (le papier/l’écran), au mode (l’écrit/l’image ou le son), au genre (le poème/le récit de lecture, par exemple), au type de texte (la fiction narrative/la proseexplicative, par exemple). En dépit de la réalité transmédiatique, certaines publications maintiennent un minimum d’homogénéité à l’égard de l’œuvre lue, notamment générique (dans le cas des pastiches), mais dans la majorité des réalisations, les lecteurs empruntent un code littéraire, voire médiatique, différent de celui du texte lu. Cela n’a rien d’étonnant : la pratique scolaire encourage le commentaire, le métatexte, au détriment des écritures créatives qui ont encore du mal à s’imposer au lycée en France. D’autre part, les écrits d’invention eux-mêmes ne génèrent pas nécessairement des textes appartenant à la même catégorie littéraire que les œuvres lues.

L’exemple d’i-voix a le mérite de nous montrer les bénéfices d’une lecture restituée au même niveau logiqueque le texte lu. C’est ce que les didacticiens et les pédagogues nomment le « lire avec » ou « lire tout contre » (Gonzales, 2009). Le lecteur subjectif se déplace à l’intérieur ou entre les textes, pratique l’interlecture, l’intratextualité, l’intertextualité et l’hypertextualité plutôt que la métatextualité. Par une prise en main vivante de la langue et de la littérature, par « innutrition », comme le disait Rabelais, le lecteur-scripteur s’approprie un phrasé et un regard, un style et une sensibilité, ce qui l’amène à découvrir en lui des ressources d’écriture insoupçonnées. D’ailleurs, ces gammes débouchent souvent sur de la composition : le blogue montre qu’habitant les livres et habités par eux, les lycéens écrivent régulièrement des textes « à la manière de », osent le pastiche, mais aussi des productions aux liens plus lâches avec les œuvres lues. Le passage du statut de lecteur à celui d’auteur se trouve ainsi facilité. Le postulat ambitieux du sujet d’invention au baccalauréat de français était, dans ses débuts, de cet ordre : écrire en empruntant les modalités du créateur et en se les appropriant marque une expérience et une forme de connaissance intime de la littérature (Massol, 2008). Force est de constater que les sujets d’invention proposés aux lycéens en France ont le plus souvent migré vers des argumentations et des commentaires habillés de fiction. I-voix offre de nouveau un espace propice aux textes de lecteurs génériquement homogènes vis-à-vis du texte lu ou encore hétérogènes sur le plan générique, mais de même niveau logique (Watzlawick & Helmick, 1979) : un textelittéraire de lecteur répond à un texte littéraire d’écrivain par contiguïté ou parenté, sans intermédiaire critique explicite. On pourra reprocher à ce parti-pris de dispenser les lecteurs de l’apprentissage des appareils analytiques et des métadiscours. Mais cette crainte est de peu de poids : en réalité, la démarche que l’on pourrait qualifier ici d’homologique n’est pas exclusive des pratiques explicatives, descriptives, surplombantes, dans d’autres publications sur le même blogue et en dehors. Si la reproduction d’un procédé par un lecteur-scripteur signale tout autant la perception qui en a été faite que la capacité à le nommer, emprunter tour à tour les deux niveaux logiques ne peut que renforcer l’appropriation littéraire et la maîtrise des savoirs.

2.4. Un lecteur en réseaux, interactif, impliqué dans des relations horizontales

La compétence développée par la pratique du blogue la plus évidente est sans doute celle qui consiste à opérer des liens. Parce qu’il relie le lecteur à la profusion de la toile, le blogue forme des hyperlecteurs, dans le sens où ils savent pratiquer des hyperliens (Gervais, 2004). C’est un geste visible qui nécessite, il est vrai, un apprentissage. La reconfiguration du texte par le blogueur revient souvent à relier l’œuvre lue à une image ou une citation glanée sur Internet. Dans ce cas, lire consiste à produire non pas un texte, mais un lien. Dès lors, les moteurs de recherche ont un pouvoir surpuissant qui canalise l’offre des hyperliens : aller au-delà en sachant critiquer les liens proposés pour choisir et construire les siens, plus intimes, plus singuliers, devient une véritable compétence de lecteur.

En réalité, le geste de lecture qui consiste à relier le texte que l’on découvre à des éléments choisis ou apparus, soit méthodiquement soit intuitivement, à partir de nos connaissances et de tout notre système sémiotique, éthique, esthétique personnel (sous l’influence ou non d’un moteur de recherche), n’est pas propre à la lecture numérique, mais le contexte du blogue l’active de façon visible et accentuée. Rappelons que c’est Bellemin-Noël (2001) qui a théorisé et qualifié d’interlecture le mouvement d’associations libres et non programmées vécu intimement par le lecteur. L’opération n’appartient donc pas exclusivement à la lecture numérique, mais la pratique du blogue en exhibe une partie et la provoque explicitement. Cette fois encore, on peut estimer que la didactisation du blogue développe des gestes de lecture bénéfiques et transposables à d’autres contextes de lecture littéraire.

En revanche, l’hyperlecteur jouit d’une posture spécifiquement numérique quand il devient l’auteur de la source à laquelle il se réfère. Par exemple, alimenter soi-même YouTube ou Wikipédia pour générer un hyperlien satisfaisant sur le blogue participe d’un haut niveau de formation du lecteur : apprendre (et enseigner) ce n’est plus simplement construire du savoir pour soi, mais créer des données, du savoir pour autrui en le médiatisant et en le finalisant dans un statut d’hyperlien potentiel. Devenir hyperlecteur, c’est prendre place dans l’espace de la toile et des connaissances en générant de la valeur à partager. Dès lors, la conception humaniste du numérique de Doueihi (2011) prend sens magistralement.

Toute cette richesse se réalise parce que le numérique autorise la multiplication des interactions : l’interaction entre le lecteur, le texte et les savoirs, mais aussi, et surtout peut- être, l’interaction entre les individus reliés dans le projet et les récepteurs du blogue. Le propre du blogue de classe est que chaque élève y endosse alternativement les postures de lecteur littéraire, d’éditeur de son propre texte de lecteur et de récepteur des autres traces de lectures. Peut s’ajouter à ces postures celle d’évaluateur, quand le premier jet d’une publication est soumis à la relecture avant la validation par l’enseignant-administrateur. Même si le blogue engage beaucoup moins visiblement des échanges de l’ordre de la conversation directe que d’autres cadres deconvivialité numérique, il n’en demeure pas moins marqué par la communication et une logique de réactivité.

Sur i-voix, les publications sont reliées entre elles et se répondent notamment via la pratique du mot-clic (hashtag #). Cet usage repris à la culture numérique de Twitter ou Instagram crée un effet de rubriques, facilite l’exploration non linéaire du blogue et suscite des parcours d’intralecture dans le blogue comme autant d’occasions d’interlectures offertes aux visiteurs. De ce fait, les productions se font échos, se complètent, s’interpellent. Publier son texte de lecteur, c’est entrer en interaction avec les autres publications, c’est-à-dire les autres lecteurs, soit en s’y affiliant soit en y réagissant. Les élèves font ainsi l’apprentissage d’une représentation de la littérature rhizomique, pétrie d’intertextualité et de liens, dans une histoire contemporainedes écrits de la réception qui s’élabore avec eux, par eux et sous leurs yeux. Ils éprouvent également leur appartenance à une communauté de lecteurs ; l’acte même de lire s’inscrit dès lors dans une dimension sociale qui échappe au cadre limité de l’école.

L’expérience de lecture du blogueur donne ainsi lieu à une production singulière que la mise en ligne sur le blogue de classe réactive jusqu’à sa réception par d’autres lecteurs. C’est au moment de la réception du texte du lecteur que celui-ci se parachève, quand un autre lecteur s’empare de cette production de lecture en la traitant comme un texte en soi. La construction énonciative du blogue est donc essentielle, elle a des effets sur le statut même du texte du lecteur.

Si l’on prend à témoin les pratiques-papier ou manuelles du « carnet de bord » (Rouxel, 2005, Ahr & Joole, 2013), on note immédiatement les particularités énonciatives du blogue scolaire. En effet, dès que l’élève le décide et qu’il voit son propos validé par le modérateur, les traces de sa lecture se trouvent immédiatement publiées en ligne. La temporalité et la pluralité de cette réception sont des caractéristiques énonciatives du blogue. Cette réalité est complexe : l’élève expose son texte de lecteur à son professeur, certes, mais aussi à ses pairs, et enfin au public extensible, fantasmé et illimité de la toile, incluant même l’écrivain, l’éditeur et les autres spécialistes institutionnels ou non, selon une temporalité qui frôle l’instantanéité.

De plus, si l’expression est très personnelle, un blogue de classe comme i-voix est foncièrement collectif : tous les élèves publient sur le même espace. Chacun prend alors le risque et trouve simultanément le plaisir de partager sa production personnelle de lecteur avec les autres. Le sujet-lecteur ne s’adresse pas à un métalecteur-évaluateur comme le serait un professeur dans son rôle conventionnel, il participe d’une parole collective plurielle. Le web est pour les élèves une caisse de résonance particulièrement incitative, comme en témoigne l’importance qu’ils accordent au nombre de visiteurs du blogue, aux échos reçus par leurs articles sur les réseaux sociaux, aux commentaires laissés par les autres élèves, par des internautes anonymes, voire par les écrivains eux-mêmes. Ainsi, ils se soucient de « bien écrire » en adoptant une posture qu’ils jugent digne d’un cadre littéraire plutôt que scolaire. Pour les lycéens d’aujourd’hui, l’écran est un miroir où se construit et se fortifie, devant les autres, une image de soi (Granjon, 2014). Le blogue de classe offre l’occasion de passer de cette image à la parole, à travers une entreprise collective valorisante. Les relations équilibrées, non hiérarchisées, contribuent à cette valorisation. Un écrivain, un spécialiste empruntent le même canal que le lecteur le plus novice : cette horizontalité énonciative favorise les élèves et les convainc de la pertinence de leur travail bien au-delà d’une évaluation scolaire. Apprendre à produire un texte de lecteur littéraire pour le publier ramène dès lors le cours de français vers ses enjeux profonds : former des lecteurs, développer une conscience critique et favoriser l’expression de soi.

Pour que la dynamique du blogue perdure, le projet favorise la multiplication des canaux énonciatifs et les interactions diverses, sur la toile et en dehors : lectures analytiques croisées en visioconférence avec les lycéens italiens partenaires, live tweet d’une rencontre avec un écrivain dont les propos sont immédiatementpartagés sur la toile et ultérieurement rassemblés et diffusés dans un Storify, publicité faite aux articles sur les réseaux Facebook ou Twitter (où se nouent aussi des relations et des dialogues avec les auteurs), commentaires régulièrement laissés sur les articles des élèves par d’autres élèves, par des internautes, voire par les écrivains, voyages chez les correspondants du jumelage eTwinning, participation à des projets qui élargissent le cercle des échanges9. Ainsi, c’est par la multiplication de liens significatifs, la densité et la reconfiguration perpétuelle du cercle des lecteurs qui ne se limite pas à la réalité numérique, que se développe un apprentissage à la fois multimodal et littéraire.

3. Expérience multimodale et lecture subjective

Le projet i-voix développe aussi des façons d’écrire sa lecture stimulées par le passage du stylo au clavier, du papier à l’écran, de l’espace de la classe à celui de la Toile. En dépit de l’importanceaccordée ouvertement aux mises en voix, aux écritures créatives, aux pédagogies de projet et à l’expression du sujet-lecteur dans les textes officiels français (Vibert, 2011), le commentaire métatextuel, à l’écrit ou à l’oral, reste la démarche dominante en cours de littérature : le graphocentrisme scolaire occidental encourage indéniablement la glose consubstantielle à la civilisation du Livre. Pourtant, à l’heure du numérique, se pratiquent ouvertement, et comme naturellement, de nouvelles modalités de lecture et d’écriture qu’il revient à l’École de considérer, de prendre en compte et de didactiser, non seulement parce qu’elles constituent des ressources médiatiques riches pour l’apprentissage, mais aussi parce que tous les élèves ne sont pas égaux face à la multimodalité et au numérique (Médard-Ghimire, 2016). Sur le plan de l’histoire du livre, on peuts’interroger sur la mutation effective de la lecture à l’ère numérique : après la lecture contemplative médiévale et la lecture d’exégèse de la Renaissance (Bélisle, 2011) assisterons-nous à la domination d’une nouvelle modalité de réception, horizontale, créative et homologique ?

3.1. Les gestes du lecteur blogueur

Les publications au gré du blogue i-voix rendent tangibles les gestes du lecteur-scripteur que les didacticiens de la lecture-écriture (Reuter, 1996) et les chercheurs sur la multimodalité ont modélisés (Lacelle & Lebrun, 2017) : sélectionner, couper, copier, coller, insérer, déplacer, confronter, remplacer, supprimer, transformer, renommer, relier constituent autant de gestes de réception créative particulièrement encouragés par le numérique. Dans ce cadre, les élèves abordent volontiers les œuvres par des pratiques transformatives des textes : fulguration, contraction, centon, dilatation, substitution, déplacement, transfert de genres ou sous-genres (du roman au magazine de presse, du théâtre à la poésie, du sonnet au haïku), colorisation, transmodalisation (association d’images ou de vidéos à des poèmes, création de BD à partir d’un roman). On admet que pour l’essentiel, ces gestes de lecture se réalisent également hors du web, c’est le principe même de la littérature illustrée, du cut-up, des mises en voix, des réécritures multiséculaires en littérature, des adaptations motivées par les nouvelles technologies de chaque génération10, autant de gestes encouragés en didactique des écritures créatives, comme les promeut Houdart-Mérot11 par exemple. Mais la pratique du blogue les intègre dans un contexte énonciatif signifiant, les stimule, les facilite techniquement, les rend visibles et accessibles tout en multipliant les possibles : incruster un enregistrement audio à la présentation d’un texte, ou une vidéo en écho à un poème, par exemple, est encouragé par la perspective d’une mise en ligne. Orienté par le blogue ainsi conçu, le lecteur épouse dès lors une stylistique médiatique propre à cet espace numérique : ses caractéristiques sont la variété, l’hétérogénéité, la variation, l’expressivité, l’effetvisuel et dans une certaine mesure la brièveté12. Sur le blogue, un élève peut poster un vers unique, une image commentée, un avis personnel engagé, ce que l’écrit scolaire et la perspective du baccalauréat ne le laissent pas s’autoriser. Dès lors, l’orientation du blogueur ne dépend pas d’un modèle formel standard, elle suit une très large palette de possibles et intègre comme valeur la subjectivité créative.

Or, la créativité du blogueur, pensée dans ce cadre comme expression d’une subjectivité singulière, inventrice pour une part de sa propre forme, n’est pas forcée mais nécessaire, finalisée et valorisée dans un espace réel de médiation. Le blogue n’a pas simplement la vertu de susciter des gestes créatifs, il permet aussi de montrer et de rassembler les résultats de ces actes de lecture dans l’immense carnet ouvert d’une communauté de lecteurs. La temporalité de ces traces de lecture s’en trouve aussi reconfigurée : livrées au web, les productions restent visibles tout le temps de la publication assumée par son auteur, contrairement à une copie que l’on récupère après notation et qui est vite oubliée. La lecture présentée en ligne devient à son tour objet de lecture dans une interaction non bornée dans le temps, qui fait sens pour les élèves.

3.2. La lecture actualisante

La finalité du texte de lecture publié sur le blogue i-voix encourage également des modalités de la réception typiques de l’actualisation telle que la promeut Citton (2007). Le témoignage écrit de Morgane, élève de la classe impliquée dans le projet en 2015, en rend compte :

Cette nouvelle façon d’écrire que nous expérimentons sur i-voix est, pour moi, source de nombreux intérêts comme de nombreux plaisirs. Tout d’abord, cette nouvelle forme de pédagogie nous permet non plus seulement d’étudier la littérature, mais de la vivre. Nous avons eu l’occasion de créer la page Facebook d’un personnage du Père Goriot de Balzac, ou même de lui inventer une conversation SMS avec un autre personnage, et en les modernisant ainsi, en rapprochant le roman de notre époque, nous le « dépoussiérons » d’une certaine façon. Cela permet d’envisager l’œuvre non comme un simple objet d’étude scolaire mais comme un objeu, (comme dirait Francis Ponge) qui débouche sur l’objoie, la joie de l’objet. On s’amuse énormément en s’appropriant ainsi des œuvres, et cela faisant, non seulement on fixe mieux lesdites œuvres dans notre mémoire, mais cela nous permet en plus d’apprendre à les apprécier ! (Le Baut, 2015a)

Un tel témoignage ne permet pas de mesurer les connaissances acquises sur les œuvres, mais il révèle en revanche l’indéniable dimension événementielle de leur rencontre. On peut considérer dans l’adoption dumotif pongien de « l’objeu » et le vocabulaire de l’élève acquise au projet, la marque d’un plaisir et la conviction d’une appropriation littéraire (Shawky- Milcent, 2016). Pour Morgane, la qualité de l’expérience se mesure à l’aune de la mémorisation des œuvres et du caractère ludique des activités. Le mouvement évoqué est celui d’un rapprochement du texte vers les lecteurs via des reconfigurations selon des formes médiatiques contemporaines : les réseaux sociaux, les SMS. L’anachronisme provoqué et organisé du texte du lecteur a pour vocation de permettre une appropriation généralisée et plaisante. Il exerce le lecteur à se libérer des réflexes formalistes scolaires et lui rend la part vitale de sa liberté face à une œuvre, même si celle-ci est patrimoniale.

Cet extrait du bilan écrit de Morgane adressé à son enseignant, laisse également paraître l’appropriation du niveau métaprocédural du projet. Les élèves qui témoignent comprennent pourquoi le professeur les fait «jouer » ainsi, ils ont intégré l’enjeu et les finalités de ces activités de lecture créative. La dimension explicative de la pédagogie est directement perceptible sur le blogue : le professeur y explicite les objectifs de l’entreprise et exhibe quelques pensées sources, comme celle de Michel Tournier13, par exemple, cité en exergue. Or, depuis la reconnaissance institutionnelle bienvenue des pédagogies nouvelles dans les années 80, on ne compte pas les assertionshostiles en réaction aux lectures actualisantes, dans la presse généraliste et en ligne. Il va de soi que c’est en intégrant l’explicitation du projet que les lectures volontairement anachroniques prennent sens et permettent aux élèves d’accéder à la seconde étape d’une actualisation pleinement didactisée : celle de la recontextualisation. Il s’agit alors de préfacer, d’annoter un texte, par exemple, ou encore de le relier à des sources documentaires fiables via l’activation d’hyperliens pertinents sur le plan des savoirs.

3.3. Les activités fictionnalisantes du lecteur blogueur

Les activités fictionnalisantes du lecteur composent un modèle phénoménologique de référence au sein du paradigme du sujet-lecteur. Conçu pour décrire des expériences de lecture et de spectature narratives, ce modèle14 devrait rendre compte pour une bonne part des ressentis supposés des blogueurs. Repérer quelles activités fictionnalisantes convoque et développe la tenue du blogue littéraire doit permettre de mieux en comprendre les enjeux et surtout de viser des remédiations plus précises quand des élèves peinent à s’investir dans la lecture. Laquelle des cinq activités modélisées par Langlade et Lacelle (Lacelle & Langlade, 2007) semble la plus manifestement activée lors de la tenue du blogue ? Le modèle permet-il de décrire la globalitéde l’expérience ? L’examen d’i-voix nous laisse poser des hypothèses et interroge en même temps les contours de ce cadre théorique.

Les écrits de la réception livrés aux lecteurs du blogue, que nous découvrons regroupés sur l’écran, comportent une indéniable dimension visuelle. Qu’il s’agisse d’une réalisation iconographique, vidéo ou textuelle, le texte du lecteur est vu avant d’être véritablement lu et cela guide certainement les stratégies de publication. La typographie des textes, les couleurs, le cadrage et l’habillage des images — tous les paramètres de présentation offerts par le blogue — sont pris en main et expérimentés par les élèves. L’abondance iconographique du blogue n’est cependant pas la garantie qu’une configuration imageante a réellement eu lieu au moment de la lecture, mais elle marque un intérêt réel des lecteurs pour le monde des images et leur conviction qu’elles permettent de donner sens au texte lu. En revanche, la configuration imageante est l’expérience première offerte au récepteur du blogue, et comme les élèves sont les principaux lecteurs du blogue, il est raisonnable de penser que bloguer dans ces conditions développe des capacités à configurer ce qu’on lit en images.

Les images réalisées ou choisies par les élèves, combinées à une citation d’auteur, répondant au genre de la «fulguration », semblent particulièrement activer la configuration imageante des blogueurs. On constate par exemple, dans la publication de Valentine du 17 juin 2016 (voir illustration 1), une association texte/image collaborative non figurative.

Illustration 1 : Extrait de page du blogue i-voix (http://i-voix.net)

Par son cadrage, la photographie, qui place la citation et son auteure à l’honneur, invite à suivre, au ras du sol, des traces de pas vers un monde flou, inconnu, dans l’atemporalité expressive du noir et blanc. La citation et l’image révèlent ensemble, de façon sensible et sensuelle, la combinaison possible entre réel et imaginaire. Le vécu intime de la lectrice découvrant le roman de Sylvie Germain reste inaccessible, mais sa productiontémoigne d’une indéniable appropriation, d’un engagement lectoral, sur un mode imagé. Dès lors, le blogueur lecteur de cette publication est invité à suivre ou à emprunter ces pas, métaphore visuelle de l’aventure littéraire.

Dans l’exemple du poème de Michel Brosseau, lu par Morgane en janvier 2015, on imagine que ce sont les mots « guirlande », « étincelle », « vitre », « bleu » et « boule » qui ont pu guider le choix des images.

Illustration 1 : Extrait de page du blogue i-voix (http://i-voix.net)

Dans ce cas, le texte et l’image ne sont pas imbriqués ni superposés, mais apposés ; le lien texte/image n’est pas collaboratif, mais redondant ; il illustre les mots concrets du poème sans prêter figure à une interprétation singulière et subjective du texte. L’activité fictionnalisante manifeste ici correspond plutôt à la construction d’une cohérence mimétique. La lectrice trouve dans le lien texte-image le moyen de relier les mots au monde réel connu, d’accorder au texte des équivalents visuels stables et référentiels.

Illustration 2 : Extrait de page du blogue i-voix (http://i-voix.net)

Outre la configuration imageante et la cohérence mimétique, les cinq activités fictionnalisantes du lecteur incluent l’activation fantasmatique. On doit reconnaître que les caractères collectif, modéré et malgré tout scolaire du blogue tempèrent certainement la mise en avant de cette part naturelle de la lecture. La thèse de Fish (2007) se vérifie ici : la communauté interprétative canalise visiblement les subjectivités et gère, comme par un contrat implicite, les échappées éventuelles en strict terrain pulsionnel. La valorisation des trouvailles créatives laisse cependant la possibilité aux lecteurs de s’exprimer de façon très originale sans avoir la sensation de céder au consensus interprétatif et esthétique.

L’impact esthétique vécu par le lecteur, en revanche, est tangible à travers le blogue. L’intérêt porté à l’écriture et au travail des auteurs est constant. Le souci de produire un texte de lecteur esthétique aussi. Il n’est bien entendu pas vraiment question de « faire joli », mais de construire des formes significatives, qui densifient lalecture, incitent au partage et accordent à l’écrit de la réception la possibilité d’offrir une seconde vie au plaisir du texte.

La dimension axiologique de la lecture, enfin, est un levier puissant du blogue. Non seulement les élèvent évaluent, accordent des qualités aux œuvres qu’ils ont lues, assument leurs préférences, apprennent à argumenter leurs goûts, mais ils entrent également dans des discussions sur les valeurs portées par les textes, les auteurs, les phénomènes de société.

Illustration 3 : Extrait de page du blogue i-voix (http://i-voix.net)

La publication de Garance, en mai 2016, associe une image d’actualité, dans laquelle elle se reconnaît aisément, à une citation du recueil qu’elle vient de lire. C’est le levier axiologique de la lecture qui est activé : il permet de donner sens à la parole poétique, de l’intégrer aux débats de société du moment, dans un mouvement d’actualisation et d’identification.

Ainsi, le blogue de classe i-voix rend compte de diverses formes d’engagements et met lui- même en pratique un ensemble de valeurs qu’on pourrait rapidement qualifier d’humanistes, voire de personnalistes (Mounier, 1949). Elles couvrent les principes de l’ouverture à l’autre, la dimension sacrée de la personne, l’importance de la parole, l’élan vers un vivre ensemble positif et motivant pour l’avenir, valeurs auxquelles l’enseignant souscrit et qui donnent sens à son entreprise.

Le modèle théorique des activités fictionnalisantes du lecteur permet donc d’aborder l’expérience du blogue de façon significative. Outre l’intérêt d’approcher l’objet de manière plus fine avec les outils de la réception, cette analyse permet aussi de baliser les principes du projet qui font sa réussite, aussi bien pédagogique que didactique et littéraire. Cependant, la prise en compte de la configuration énonciative par le lecteur manque aumodèle. Cette lacune pointée dans le cadre des lectures de poésie (Brillant Rannou, 2010) est ravivée lors de l’analyse du blogue. Car en réalité, ne s’agit-il pas de la principale activité fictionnalisante ? De fait, les paroles des auteurs sont reprises, recontextualisées, appropriées, offertes à la disponibilité des récepteurs du blogue qui les feront peut-être leurs, à leur tour.

4. Textualité numérique et pratique scolaire

4.1. L’offre numérique

Dans la mesure où le numérique autorise des activités de lecture riches et profitables, nous l’avons vu, il est légitime de questionner le devenir, voire la généralisation de ce type de pratique. À quoi tient l’indéniable productivité d’i-voix ? À cette question, l’enseignant répond en soulignant la textualité toute particulière de l’écriture numérique : elle inclut non seulement des mots, mais aussi des images, des sons, de la vidéo, des hyperliens. Cette offre permet une vaste typologie de productions : nuages de mots, clips et bandes annonces de livres, photomontages, banderoles, parodies de sites (la Pension Vauquer façon Trip Advisor, Le Jeu de l’Amour et du Hasard version Meetic, Lorenzaccio version VDM), « piratage » de SMS échangés par des personnages fictifs, réécriture de L’étranger via Twitter ou desLiaisons dangereuses via Facebook, jeux interactifs créés avec des logiciels en ligne. Ces modalités d’écriture ouvrent à de nouvelles expériences : par exemple, la cartographie numérique qui permet aux élèves de partir à la conquête poétique du monde en s’inspirant du célèbre « Anywhere out of the world » de Baudelaire (Le Baut, 2015b). La variété n’est bien sûr pas le seul atout de cette textualité numérique. Elle sollicite chez chaque élève des intérêts variés, des gestes complexes mais sensés, et une mise en projet à entrées multiples.Davantage qu’un genre scolaire (Denizot, 2010), le blogue de classe est un processus.

La familiarité gagnée à l’égard de l’écriture numérique rejaillit dès lors sur la sélection des objets à lire : des œuvres nativement numériques prennent naturellement leur place dans la bibliothèque intérieure des lecteurs, celles de Vissac ou de Jeanney, par exemple. Les sites d’écriture web de Nb, de Roux, les créations multimodales de Saemmer et de Bouchardon ont intégré le corpus de la classe avec profit grâce aux compétences acquises en écriture numérique.

4.2. Textualité numérique et compétences du blogueur

La confection d’écrits de la réception littéraire numériques et la lecture d’œuvres numériques en cours de français trouveront sans doute leur totale reconnaissance quand des opérations cognitives précises, voire spécifiques, auront été révélées. La tentation est forte de mettre en avant le bouquet des compétences activées lors de la tenue du blogue de classe. Or, Serge Bouchardon a raison d’expliquer que le numérique repose sur la discrétisation (le découpage, la classification) et la manipulation (Bachimont, 2007) en ajoutant qu’« à partirdu moment où l’homme manipule, il discrétise » (Bouchardon, 2014, p. 12). L’hypertexte et l’hypermédia ne sont pas un autre élément du texte et du média, mais une modalité particulière de la textualisation et de la médiatisation (Bouchardon, 2014, p. 19). Si la littérature numérique inclut des matériaux textuels non séquentiels, décentralisés, fragmentaires et interactifs, la matérialité de l’assemblage des textes de lecteurs sur le blogue recouvre ces mêmes caractéristiques. Il est fort risqué de faire passer chacun de ces traits isolément pour une caractéristique de la textualité numérique. En revanche, la combinaison de ces traits associée à la structure d’énonciation et à la temporalité propre à l’usage du web signent leur spécificité numérique. Les travaux à venir en didactique doivent considérer l’hypothèse à laquelle nous mène l’analyse d’i-voix : la tenue du blogue sollicite des opérations cognitives et stimule des compétences transposables hors du web. Ces compétences, nous l’avons vu, permettent notamment la discrétisation, la manipulation, la transposition, la configuration imageante, l’interlecture et l’attribution de valeurs.

4.3. Blogue de lecture de poésie et blogueurs poètes

L’analyse d’i-voix, enfin, nous mène à réinterroger l’expérience de lecture littéraire et, plus spécifiquement encore, la réception poétique. La textualité numérique éprouvée dans le cadre du blogue semble entrer singulièrement en écho avec les caractéristiques de ce genre : l’esthétique du fragment, la non-linéarité, l’importance accordée au signifiant, la sollicitation multisensorielle, la logique analogique, le rôle de la contiguïté — y compris dans ses apparences les plus arbitraires — appartiennent aussi bien au monde du blogue qu’à celui de l’écriture poétique. Que les élèves les moins scolaires s’investissent et se révèlent davantage en écriture poétique et dans le projet i-voix est également un trait commun. Il est donc évident que le blogue de classe stimule la lecture bien au-delà de la simple socialisation. Il convoque des gestes, despostures, des phénomènes qui relèvent de l’expérience littéraire. De lecteurs de poésie et de littérature, il fait des blogueurs poètes.

Conclusion et questionnement

La tenue d’un blogue de classe en cours de français comprend une indéniable portée didactique, à condition qu’il offre un espace d’auctorialité, voire d’émancipation pour les sujets-lecteurs et que le numérique soit appréhendé dans toute sa textualité ; il stimule des gestes de lecture-écriture précieux pour la formation d’élèves impliqués en littérature. Cependant, plusieurs questions restent à ce jour en suspens : le blogue, vécu comme processus, a-t-il vocation à devenir un genre scolaire ? Sa modélisation et sa généralisation sont-elles souhaitables et prometteuses ? L’analyse d’autres blogues de classe avec les mêmes outils permettra de répondre à cette interrogation.

D’autre part, l’investissement de chacun dans le blogue semble acquis pour i-voix. Or, les capacités intégratives de cette pratique didactique n’ont pas encore été vraiment mesurées. Et que fait-on dela résistance du texte ? de l’hermétisme ? de la non-lecture ? La lecture « bohème » valorisée par Rouxel (2004) peut-elle trouver sa place dans un tel dispositif ? Il va de soi que ces questions ne remettent pas en cause la fertilité du projet. Elles interrogent le numérique dans les tensions et d’éventuels mirages que suscite inévitablement sa scolarisation.

Notes
  1. Impliqué, parce que Jean-Michel Le Baut, initiateur du dispositif au lycée de l’Iroise, est corédacteur de l’article ; au-delà de la posture militante, du fait que Nathalie Brillant Rannou, enseignante-chercheure en didactique de la littérature, pratique assidûment l’analyse de productions de lecteurs en situation d’apprentissage. ↩︎
  2. Le blogue i-voix : http://i-voix.net. ↩︎
  3. Le terme « blogueur » est avéré, notamment à travers le titre Blogueur professionnel : une activité rémunératrice à plein temps pour changer de vie, par Julien Barthet, L’Harmattan, 2013. ↩︎
  4. Les actes des Rencontres internationales des chercheurs en didactique de la littérature consacrées aux écrits de la réception à Toulouse en 2015 sont à paraître en deux tomes aux éditions Diptyque des Presses Universitaires de Namur, 2017. ↩︎
  5. Depuis la thèse soutenue de Brillant Rannou en 2010, « Le Lecteur et son poème », jusqu’au colloque de Grenoble qu’elle dirigea en collaboration avec Christine Boutevin en 2016, À l’écoute des poèmes, enseigner des lectures créatives (actes à paraître en 2017) sonobjectif est de développer une connaissance intime des processus de réception poétique sur divers supports, dans le but de mettre au jour les principes théoriques permettant de renouveler une didactique de la poésie favorable au sujet-lecteur. ↩︎
  6. En Europe, la communauté numérique eTwinning référencie près de 60 000 projets de collaboration pédagogique entre classes via Internet et concerne environ 175 000 établissements scolaires : http://www.etwinning.fr. ↩︎
  7. http://i-voix.net/2016/07/florilege-nuages-de-mots-2015-2016-2.html. ↩︎
  8. Nous reprenons la distinction des niveaux logiques du langage opérée par les sémiologues comme Watzlavick. ↩︎
  9. Une édition enrichie de Petite poucette de Michel Serres en collaboration avec des lycéens québécois et belges, des expériences dans le cadre des Savanturiers du numérique, sous le regard de Milad Doueihi, par exemple. ↩︎
  10. Il serait possible de développer la profusion transmodale et transmédiatique d’exemples littéraires patrimoniaux : combien d’adaptations, d’illustrations, de mises en scène, en voix, en musique, en bande dessinée, en films, en jeux de société, en jeux vidéo, en figurines, etc. faudrait-il décompter à partir des romans de Jules Verne par exemple, ou du Petit Prince de Saint-Exupéry ? ↩︎
  11. Responsable du Master en création de Cergy-Pontoise, V. Houdart-Mérot promeut les écritures créatives et, tout particulièrement, les pratiques intertextuelles. ↩︎
  12. Une enquête à venir permettra de comparer comment une même consigne livrée dans la perspective d’une mise en ligne ou en vue de la remise d’une copie papier peut générer des variations stylistiques dans les productions des élèves. L’hypothèse initiale est qu’un grand nombre de ces gestes de lecture sont communs, mais plus nombreux et plus intriqués pour le web. Il reste à démontrer que lestextes de lecteurs prévus pour un blogue de classe sont plus variés, hétérogènes, expressifs et brefs que les travaux rendus sur copies papier. ↩︎
  13. « Un livre a toujours deux auteurs, celui qui l’écrit et celui qui le lit », J.-J. Brochier, Qu’est-ce que la littérature : un entretien avec Michel Tournier, Le Magazine Littéraire n°179, 1982, p. 81. ↩︎
  14. On peut rappeler pour mémoire les cinq activités fictionnalisantes du lecteur selon le modèle théorique proposé par N. Lacelle et G. Langlade : la configuration imageante, la construction mimétique, l’activité fantasmatique, l’effet esthétique et l’axiologie de la lecture. ↩︎
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