Volume 5 / Pratiques effectives d’enseignement de la littérature avec le numérique

L’utilisation du iPad en classe de français au secondaire: quels usages par l’enseignant?

Marie-Christine Beaudry
Université du Québec à Montréal
Sylvain Brehm
Université du Québec à Montréal

Résumé

Ces dernières années, de nombreuses écoles secondaires au Québec, surtout des écoles privées, rendent l’achat du iPad obligatoire pour tous leurs élèves et tentent de systématiser son utilisation. Néanmoins, il semble que les résultats des recherches empiriques demeurent plutôt rares sur l’utilisation des tablettes numériques en classe. Dans le cadre de cet article, nous présentons quelques réflexions sur l’usage du iPad pour l’enseignement de la lecture et l’écriture, réflexions dégagées d’une étude de cas menée auprès d’une enseignante de français du secondaire qui vit présentement cette implantation dans son milieu.

Abstract

Recently, many high schools in Quebec, particularly private schools, have made purchasing an iPad compulsory for all students. By doing this, these institutions have been trying to systematize tablet technology in the classroom. Nevertheless, it seems that the results of empirical research remain rather rare on the use of digital tablets in the classroom. In this article, we present some reflections on the use of iPads for the teaching of reading and writing based on a case study in which a French teacher, currently uses this technology in her classroom.

Mots-clés
iPad, didactique de la lecture et de l’écriture, pratiques pédagogiques

Keywords
iPad, teaching reading, teaching writing, teaching practices

Contexte

En 2013, selon Karsenti et Fievez (2013), 10 000 élèves québécois du primaire et du secondaire auraient employé uniPad dans leur classe. Bien que la sortie du iPad par Apple sur le marché soit récente (janvier 2010), on assiste, dans plusieurs pays (Huber, 2012; Villemonteix et Khaneboubi 2013) — et le contexte scolaire québécois n’échappe pas à cette réalité — à une implantation croissante dans les écoles, notamment les écoles secondaires privées. Cet enthousiasme pour le iPad dans le contexte scolaire poursuit « une continuité d’implantation de machines de cette marque [Apple] depuis une trentaine d’années. L’enthousiasme important des élèves, des parents et des enseignants, dû probablement à l’image de l’industriel, constitue un facteur susceptible d’influencer les processus d’enseignements et d’apprentissages » (Villemonteix et Khaneboubi, 2013, p. 6). Utilisée à la fois comme outil pédagogique, didactique et pour augmenter le recrutement des élèves, la compétition étant vive entre les écoles secondaires privées, « la tablette tactile à l’école constitue une prise de risque nécessaire pour les établissements scolaires » (Karsenti et Fievez, 2013, p. 2).

Bien qu’il existe de nombreux sites Internet permettant les échanges entre enseignants de pratiques, d’applications utiles et de témoignages d’expériences intéressantes menées avec des tablettes numériques, les résultats de recherches empiriques sont peu nombreux sur leur utilisation en classe (Huber, 2012; Karsenti et Fievez, 2013; Devauchelle, 2014; Maich et Hall, 2016) et sur leurs impacts sur l’enseignement-apprentissage. Si, par exemple, les travaux du centre canadien HabiloMédias documentent le point de vue des enseignants sur l’influence ou non des technologies numériques sur la qualité de l’apprentissage (Steeves, 2012), on connait peu les usages pédagogiques et didactiques (Huber, 2012), et encore moins ceux qui influent réellement sur la réussite des élèves lors de l’usage du iPad en classe (Alluin, 2010). Les avantages prêtés aux technologies numériques — accroissement de la motivation des élèves, plus grande réussite scolaire, entre autres (Underwood et Dillon, 2011) — relèveraient davantage de bénéfices supposés que de résultats empiriques. Ce sont plutôt les usages des technologies en éducation qui auraient un impact sur les élèves, et non les technologies en soi, d’où l’importance d’étudier les conditions d’utilisation et les usages qui en sont faits par les enseignants et les élèves (Karsenti et Fievez, 2013). Enfin, leur usage en contexte d’enseignement-apprentissage constitue encore un défi pour les enseignants (Steeves, 2012 ; Underwood et Dillon, 2011) : quelles applications choisir, comment les intégrer dans l’enseignement ? Alors que certaines écoles intègrent les tablettes, et plus largement les technologies numériques, d’autres peinent à s’adapter. Pour la didactique du français, et plus particulièrement de la lecture et de la littérature, quels sont les usages que font les enseignants de la tablette, au niveau par exemple des textes donnés à lire, ou encore au niveau des pratiques didactiques pour les travailler ?

C’est dans ce contexte d’implantation du iPad dans les écoles que se mène, depuis quelques années, une collaboration entre une enseignante de français au secondaire et deux chercheurs en didactique de la littérature (Brehm, Beaudry et Daoust, 2015; Brehm et Beaudry, 2016). Ne portant pas spécifiquement sur l’usage du iPad en classe de français, nos travaux nous ont néanmoins amenés à nous interroger sur cet usage, en particulier sur la manière dont il influence les pratiques d’enseignement-apprentissage de la lecture et de la littérature. Cet article, qui poursuit des réflexions amorcées par plusieurs — mentionnons à titre d’exemple le numéro thématique de la revue Le français d’aujourd’hui (2012) sur l’enseignement des lettres à l’ère du numérique —, se propose d’étudier quelques pratiques privilégiées par cette enseignante et d’en dégager quelques réflexions sur les usages du iPad dans l’enseignement de la lecture et de la littérature, mais également dans l’enseignement de l’écriture et, plus largement, dans la pédagogie.

Portrait de l’utilisation du iPad en classe

La recherche de Karsenti et Fievez (2013), menée sur les usages, les avantages et les défis du iPad en classe auprès de 6057 élèves, 302 enseignants et impliquant 18 écoles primaires et secondaires du Québec, constitue la première et seule vaste recherche menée sur le iPad en contexte scolaire au Québec, à notre connaissance. La possession du iPad serait relativement généralisée chez les élèves sondés ; 87 % d’entre eux possèdent un iPad à l’école et à la maison. Lorsqu’ils interrogent les élèves sur leurs usages du iPad en classe, toutes matières confondues, les chercheurs relèvent la consultation et l’annotation des manuels scolaires, l’utilisation d’applications pour prendre des notes sur des documents PDF, l’emploi de l’application de traitement de texte Pages, la consultation de dictionnaires, l’utilisation de l’application Keynote afin de réaliser des présentations et, plus faiblement, la consultation du portail de l’école et de l’agenda. Les élèves affirment faire un faible usage du courriel pour communiquer avec leurs pairs et leurs enseignants. Enfin, réaliser des projets avec le iPad semble peu fréquent chez les élèves de l’échantillon. Les résultats de la recherche de Larose, Grenon, Bolduc, Vincent et Beaudry (2016), menée sur 690 élèves québécois du secondaire et interrogeant leur utilisation des technologies numériques dans la classe de français (et non spécifiquement le iPad), relèvent également une utilisation relativement traditionnelle de ces technologies numériques. Écrire des textes avec un logiciel de traitement de texte, rechercher des informations sur Internet et préparer des présentations à projeter par un logiciel tel que PowerPoint ou Keynote semblent être les activités les plus courantes dans les cours de français. Ces emplois semblent plus fréquents pour les élèves de leur échantillon qui sont inscrits dans une école privée.

Quant à l’usage du iPad pour lire, sur les 6057 élèves sondés dans la recherche de Karsenti et Fievez (2013), seulement 362 disent avoir consacré du temps en classe pour lire des livres électroniques sur leur iPad. Comme le soulignent les deux chercheurs, « cela montre notamment que le potentiel de l’iPad, qui permettrait réellement d’améliorer l’expérience en lecture […] est réellement sous-utilisé à l’école » (Karsenti et Fievez, 2013, p. 17). Comment s’explique cette faible utilisation de la tablette pour lire, alors que sont publiés, justement pour la tablette, des manuels scolaires et des récits numérisés, transmédiatiques ou encore augmentés ? Est-ce lié à une méconnaissance des livres disponibles ? L’inégale adéquation de certains textes avec la tablette offre-t-elle une explication ? À ce sujet, Sloan(2012) relève, dans sa recherche menée sur l’utilisation des manuels scolaires destinés aux étudiants universitaires sur tablettes numériques, une grande disparité dans leur format et leur adaptation. Il semble en effet que les manuels disponibles sur tablette varient grandement : certains constituent une simple numérisation de la version papier du manuel, sans aucune interaction possible, tandis que d’autres sont adaptés à la tablette numérique et comportent des ajouts spécifiques, tels que des vidéos, des images et des liens Internet pour compléter les informations disponibles. Crinon établit un constat similaire à propos des textes numériques en général :

Dans certains cas d’ailleurs, l’ergonomie des applications informatiques essaie tant bien que mal de mimer les fonctionnalités du livre ou des magazines, le geste du lecteur qui tourne la page, voire le bruit du papier… à la déception de ceux qui attendaient surtout des nouvelles technologies qu’elles facilitent la lecture savante grâce à des dispositifs nouveaux que ne permet pas l’objet livre (annotation, indexation, recherche d’occurrences, statistiques lexicales…).

(Crinon, 2012, p. 107)

Considérations méthodologiques

La recherche exploratoire que nous avons menée prend la forme d’une étude de cas. La collecte de données s’est effectuée à l’hiver 2016 au moyen d’une entrevue semi-dirigée qui visait à recueillir le discours de l’enseignante quant à son emploi du iPad pour soutenir l’enseignement- apprentissage du français en général, et plus spécifiquement celui de la lecture et de la littérature. Villemonteix et Khaneboubi (2013) soulignent que le discours des enseignants contribue à expliciter les dynamiques de l’intégration en classe d’outils tels que le iPad ou, au contraire, les résistances que son implantation suscite. Les propos de l’enseignante ont fait l’objet d’une analyse de contenu afin de décrire ses pratiques déclarées quant à son usage du iPad dans sa pratique. Cette analyse a porté, dans un premier temps, sur les pratiques didactiques en lecture et en littérature. Dans un second temps, une analyse en fonction des pratiques pédagogiques et des pratiques didactiques en écriture s’est imposée.

L’enseignante de français avec laquelle nous collaborons dans l’une de nos recherches sur la réception d’un récit transmédiatique (Brehm, Beaudry et Daoust, 2015; Brehm et Beaudry, 2016) a connu, à la rentrée scolaire 2014-2015, l’implantation du iPad dans son école privée, l’achat étant rendu obligatoire pour les élèves. N’ayant bénéficié que de deux semaines pour se préparer à employer la tablette dans son enseignement, cette enseignante, qui compte plus de 23ans d’expérience, s’est elle-même engagée dans une démarche exploratoire et réflexive quant à l’usage du iPad pour soutenir son enseignement et l’apprentissage de ses élèves en lecture et en écriture. Elle s’est notamment inscrite dans plusieurs formations professionnelles offertes sur l’emploi du iPad et a assisté à quelques conférences scientifiques portant sur les technologies numériques dans l’enseignement. Depuis la rentrée 2014, elle expérimente seule différentes applications ainsi que différents usages du iPad pour développer les compétences en lecture et en écriture de ses élèves.

Le iPad : un « cartable numérique » utile pour soutenir la pédagogie

Tout comme l’indiquait la recherche de Karsenti et Fievez (2013) — ces chercheurs ayant relevé que les principaux usages du iPad sont de consulter et d’annoter les manuels scolaires et les notes de cours —, il se dégage des propos de l’enseignante que le iPad est, de manière générale, surtout un outil de consultation et de travail sur les notes de cours, notamment en grammaire et dans le manuel de français. Les élèves se servent du iPad, « cartable numérique », pour lire les notes de cours ou des passages du manuel, pour ajouter des informations, des précisions. Ces notes de cours sont organisées pour les élèves dans ce but et rendent facile, selon l’enseignante, l’annotation; Churchill, Fox et King (2012) relèvent d’ailleurs que les notes de cours disponibles sur tablette seraient mieux organisées en général. Selon l’enseignante, ses élèves disent consulter davantage les notes lorsque celles-ci sont disponibles sur leur tablette, ce que soulignent également Karsenti et Fievez (2013) : disponibles en tout temps et en tout lieu, les notes de cours seraient plus consultées avec le iPad.

Au-delà de la consultation du manuel de français, qui constitue une version numérisée de la version papier, le iPad permet à l’enseignante d’ajouter à ses notes de cours des vidéos qu’elle réalise elle-même ou que les élèves réalisent sur un élément précis. Alors que le manuel ne permet pas d’interaction et n’offre aucun complément, par exemple avec un lien vers un autre texte ou un site Internet, l’enseignante a adapté peu à peu ses notes de cours aux possibilités numériques offertes par le iPad. Les élèves peuvent les recevoir, les consulter à la maison; la classe devient alors le lieu pour apporter des explications supplémentaires, pour réaliser plus d’activités d’apprentissage et de projets. Il se dégage des propos de l’enseignante que le iPad constitue ainsi un outil soutenant sa pédagogie, voire l’incitant à modifier celle-ci. Elle indique donner beaucoup moins de cours magistraux qu’avant l’arrivée du iPad dans son école et précise que ses élèves seraient plus actifs en classe qu’auparavant. Ces avantages offerts par la tablette ne lui sont d’ailleurs pas exclusifs; l’ajout de vidéos, de sons, d’images et la possibilité d’apprendre en mode asynchrone sont quelques-uns des bénéfices supposés des technologies numériques (Huber, 2012), mais qui ne sont pas toujours exploités en contexte scolaire.

Par ailleurs, l’outil lui permettrait de pratiquer davantage une différenciation pédagogique : les élèves plus faiblespeuvent recevoir plus d’explications grâce à des vidéos ou à des notes de cours en extra ou grâce à des recherches qu’ils peuvent faire sur Internet, tandis que les élèves plus forts peuvent faire autre chose ou encore recevoir des explications différentes. Ceci est souligné aussi par quelques élèves de l’échantillon de Karsenti et Fievez (2013), qui précisent aimer aller à leur rythme et avoir le contrôle de faire leurs recherches. D’autres élèves sondés, notamment en grande difficulté d’apprentissage, précisent apprécier aller chercher eux-mêmes des éléments pour mieux comprendre des explications des enseignants (Fernández-López, Rodríguez-Fórtiz, Rodríguez-Almendros et Martínez-Segura, 2013). Cet apprentissage mobile ou nomade (mobile learning) (Dillenbourg, 1999), permis par les technologies numériques, favoriserait l’autonomie des apprenants et faciliterait les interactions entre eux (Henderson et Yeow, 2012). En outre, la tablette permettrait davantage un mode collaboratif d’enseignement-apprentissage qu’un mode transmissif du savoir (Becchetti-Bizot et Butlen, 2012). Mais encore faut-il que les élèves s’impliquent, identifient leurs besoins et fassent réellement les recherches complémentaires; cette démarche n’a rien d’automatique. S’ils semblent plus autonomes etactifs dans leur apprentissage, leur autonomie doit d’abord être développée, tout comme une utilisation efficace des outils disponibles doit leur être montrée. Plusieurs recherches soulèvent d’ailleurs que si les élèves adoptent et utilisent avec facilité les technologies numériques, tous ne savent pas pour autant comment les employer de manière efficace pour apprendre (Steeves, 2012).

Enfin, si les élèves de notre enseignante semblent plus motivés dans leur cours de français, ce qui rejoint les avantages présupposés par plusieurs, dont Underwood et Dillon (2011), qu’en est-il de cette motivation à moyen et long termes ? Celle-ci, liée à la nouveauté de l’objet dans la classe de français, durera-t-elle quand les élèves constateront que les efforts à fournir pour réaliser une tâche demeurent ? Comme le note Cuban, « iPads are marvelous tools to engage kids, but then the novelty wears off and you get into hardcore issues of teaching and learning » (Cuban, 2006, p. 29). Cette motivation ne pourrait-elle pas être plutôt liée au changement de pratiques pédagogiques de l’enseignante et donc être plus durable dans le temps ? Ce sont autant de questions soulevées par notre étude, pour lesquelles de plus amples recherches doivent être menées.

Le iPad : un outil peu utilisé pour la didactique du français

Contrairement aux enseignants de la recherche de Karsenti et Fievez (2013), qui ne semblaient pas utiliser le iPad pour réaliser des tâches en lecture de textes littéraires, l’outil est ici utilisé pour soutenir la compréhension en lecture. Cela dit, la tablette est peu utilisée pour lire des textes littéraires; comme le déplorent Karsenti et Fievez (2013, p.18), « il semble qu’une des fonctionnalités (lire) de la tablette tactile ne soit pas pleinement utilisée en contexte scolaire ». Tout comme pour les élèves de l’échantillon de Karsenti et Fievez (2013) et ceux de la récente recherche de Ouellet (2016), l’enseignante met peu les élèves en situation de lecture de récits de fiction sur leur iPad. Selon elle, peu d’œuvres destinées aux adolescents sont offertes en français, qu’elles soient libres de droits ou non. En outre, quand l’enseignante offre la possibilité aux élèves de lire la version papier ou la version numérique (une version numérisée) d’une œuvre, ils choisissent tous la version papier.

Le choix des élèves soulève des questions : procède-t-il de la nouveauté de la lecture de textes littéraires sur écran ou encore d’un attachement au format papier? Selon Ahr, Butlen et Elalouf (2012, p. 69), la lecture d’œuvres de fiction sur écran serait « peu prisée » par les adolescents qui ont fait l’objet de leur recherche, surtout les lecteurs assidus. Pour ces derniers, (…) l’objet livre se révèle indispensable : le fait de tenir le livre dans les mains, de le feuilleter, de tourner les pages semble essentiel au plaisir de lire. Pour quelques-uns, c’est comme si l’écran de l’ordinateur faisait «écran » à leur lecture, les empêchait d’entrer dans l’univers fictionnel, démarche à l’origine de leur plaisir. (ibid)

Cela tient peut-être aux caractéristiques des supports numériques, qui n’offrent pas encore un confort de lecture équivalent à celui des livres. Toutefois, compte tenu des progrès technologiques importants accomplis au cours des dernières années, ce facteur ne peut sûrement pas constituer la seule explication du phénomène. Sans doute faut-il également prendre en considération la place symbolique du livre et des représentations qui y sont associées (notamment le rituel de la page tournée) dans l’imaginaire collectif. De plus, ce qu’affirmaient van Cuyck et Bélisle au début des années 2000 demeure d’actualité : « [n]on seulement la lecture de livres représente l’expérience prototypique de la lecture, mais le livre constitue, pour la majorité des lecteurs, la forme la plus élaborée qu’ils connaissent du texte écrit » (van Cuyck et Bélisle, 2004, p. 142).

Au contraire des résultats obtenus par Ahr, Butlen et Elalouf (2012), ceux de Karsenti et Bruchesi (2015), certes obtenus auprès d’élèves du primaire, soulignent que la lecture numérique présenterait une douzaine d’avantages par rapport à la lecture papier. Selon les élèves sondés, les bénéfices de la lecture numérique sont au moins de trois ordres : par rapport à la lecture papier, elle est « plus intéressante », « plus agréable » et « plus motivante », en particulier parce qu’elle présente un contenu multimédia ; elle amène les jeunes à lire « plus souvent », « plus longtemps » et « une plus grande variété de textes » ; « elle accroit et facilite les possibilités de partager ce qui est lu avec d’autres » et « favorise la collaboration en temps réel, avec d’autres camarades de classe, pendant la réalisation de la tâche de lecture » (Karsenti et Bruchesi, 2015, p. 23)

Les résultats contrastés des diverses recherches menées au cours des dernières années nous invitent à préciser ce qu’on entend par « livres numériques ». L’enseignante que nous avons interrogée a mentionné avoir proposé à ses élèves de lire une pièce de Molière en version papier ou en version numérique. Or, lorsqu’on parcourt l’offre éditoriale disponible sur iTunes, on constate que la plupart, sinon la totalité, des versions numériques des œuvres classiques sont, en fait, de simples numérisations des versions sur papier. Ainsi, Hachette et Larousse proposent plusieurs pièces de Molière pour iPad, mais le contenu de ces livres numériques et leur mise en page sont exactement les mêmes que ceux de la version papier. Dans ces conditions, non seulement la lecture sur iPad n’apporte-t-elle aucune plus-value, mais elle fait même ressortir l’inadéquation entre certains éléments de contenu (des photographies en noir et blanc de comédiens du siècle dernier, par exemple) et les attentes des élèves, habitués à un design graphique plus contemporain, comme le soulignent Karsenti et Bruchesi (2015). En ce sens, il convient d’être prudent et de ne pas préjuger de l’intérêt des élèves pour des livres numériques qui, pour leur part, offrent un véritable contenu « augmenté » (par des extensions sonores ou imagées) ou interactif, à l’instar de la version du Horla proposée par l’éditeur L’Apprimerie (2014), qui mêle étroitement narration, animations et musique. Toutefois, interrogée à ce sujet, l’enseignante nous a confié que de tels textes poseraient sûrement des problèmes à bien des élèves en raison, notamment, des animations qui bouleversent les habitudes de lecture. Cette réserve apparait fondée et met au jour le manque d’études approfondies sur la lecture effective d’œuvres littéraires « enrichies » ou « augmentées » par des adolescents.

Quant aux activités autour de la lecture, des applications telles que Inspiration, AnswerGarden ou ExplainEverything sont employées pour prendre des notes sur les personnages, pour poser des questions de compréhension, pour réaliser des résumés de chapitre pendant et après la lecture. Ainsi, Inspiration est destinée à faciliter l’apprentissage grâce à des représentations visuelles en permettant, entre autres, la création de diagrammes ou de cartes conceptuelles. AnswerGarden est un service en ligne qui offre à l’enseignante la possibilité de soumettre des questions à ses élèves et de créer un nuage de mots avec les réponses obtenues. Quant à ExplainEverything, il s’agit, comme son nom l’indique, d’une sorte de tableau blanc interactif servant à annoter, animer et narrer des explications et des présentations. Si ces applications permettent de renouveler la manière d’aborder les textes et d’en discuter en classe, en particulier en favorisant les interactions entre l’enseignante et les élèves, mais aussi entre les élèves eux-mêmes, tout comme le soulève Ouellet (2016), elles donnent lieu, fondamentalement, à des activités assez conformes à celles que l’on peut mener sans le recours au iPad. Ce constat est semblable à celui de Murray et Olcese (2011), pour qui le iPad ne va sûrement pas provoquer une révolution dans les écoles.

Le iPad est également utilisé, par les élèves de l’enseignante collaboratrice, pour écrire un blogue de discussion en lien aux œuvres lues en classe. L’examen des finalités de ce blogue laisse penser qu’il est principalement utilisé comme un lieu de partage des savoirs. Selon Le Baut (2010), l’usage de blogues à vocation pédagogique est désormais « entré dans les mœurs enseignantes, notamment des professeurs de français, tant il est utile pour exposer et partager les travaux des élèves, tant il démontre aussi au quotidien sa capacité à susciter chez eux le désir d’écrire et d’améliorer leur pratique de la langue, le bonheur même de lire, de découvrir et de s’approprier les œuvres littéraires ». En effet, le blogue est un outil privilégié pour consigner, mais aussi pour partager ses réactions au fil de la lecture d’une œuvre littéraire. Ainsi, la lecture revêt un sens nouveau pour les élèves parce qu’elle devient une activité socialisée : « C’est bien dans l’échange, même minimal, même proche de l’invisible et non revendiqué, que prend sens la lecture. On lit seul. Mais on sait qu’on partage avec d’autres du sens, des émotions, des refus, des plaisirs »

(Poulain, 1991, p. 134). Dans la classe de l’enseignante collaboratrice, le blogue permet surtout de poser des questions, d’approfondir des éléments précis du texte littéraire, de mettre en commun des réactions et des anticipations. Les élèves ont également la possibilité de mettre des images, pour illustrer un personnage par exemple, ou pour mieux comprendre un contexte. Les illustrations ont donc une valeur référentielle et n’ont pas pour vocation de rendre compte des résonances intimes du texte chez les lecteurs. De plus, ces derniers ne sont pas tenus de fournir des explications en complément de ces informations. À ce titre, le blogue favorise essentiellement la mise en commun des connaissances durant la lecture, plus que des interprétations et des appropriations subjectives de l’œuvre. Il n’a pas pour visée de susciter la discussion et le débat. Il n’est pas non plus mobilisé pour favoriser l’entrée dans le texte ou pour en prolonger la lecture, que ce soit par des activités d’écriture créative ou l’insertion de liens hypertextuels (mettant en relation le texte et une image, une vidéo ou une chanson).

Un constat semblable s’impose lorsqu’on considère, justement, l’usage du iPad dans le cadre d’activités d’écriture. L’enseignante qui a collaboré à notre recherche nous a confié que cet usage est plutôt restreint dans sa classe, ce qui n’a rien d’étonnant puisque, selon l’enquête de Karsenti et Fievez (2013), 85 % des élèves interrogés déclarent utiliser peu ou pas du tout le iPad en classe pour réaliser des productions écrites. Pourtant, selon Murray et Olcese (2011), l’apprentissage de l’écriture serait facilité avec une tablette numérique. De même, Sullivan (2013) affirme que grâce aux iPads, les élèves ont accès à un système de gestion de l’apprentissage, à des ressources électroniques d’information et à un éditeur de textes sur lesquels ils peuvent s’appuyer dans leur processus d’écriture. Ils sont aussi en mesured’échanger des idées et de travailler en collaboration dans un environnement propice. D’ailleurs, selon Sullivan (2013), l’intérêt principal du iPad est précisément de favoriser le travail collaboratif. L’usage de Google Docs, en particulier, lui apparait comme un moyen très efficace pour les élèves de commenter en ligne les productions de leurs pairs et de conserver un historique des différentes interventions sur le texte. Comme les documents sont partagés, les enseignants peuvent, grâce à leur propre iPad, afficher rapidement à l’écran les textes des élèves afin de générer des discussions. De plus, le iPad offre plus facilement la possibilité aux élèves de se déplacer dans la classe, d’interagir avec leurs pairs, en somme, de s’investir dans des tâches et des activités qui les invitent vraiment à collaborer. Les conclusions de Sullivan (2013), à propos des activités d’écriture, font écho à celles de Karsenti et Bruchesi (2015) sur les activités de lecture. En ce sens, faire du iPad un outil utilisé tout au long de séquences visant à faire interagir la lecture et l’écriture permettrait sûrement de concilier intérêts pédagogique et didactique.

Dès lors, on peut se demander si le faible usage du iPad, dans la majorité des classes, est lié à l’outil, à la difficulté de réaliser efficacement une production écrite en employant tous les outils à sa disposition comme le permet l’ordinateur, ou aux enseignants qui n’ont pas réalisé le plein potentiel de l’outil. Dans leur recherche menée auprès d’enseignants français du primaire, du collège et du lycée, Villemonteix et Khaneboubi (2013) notent que le système d’exploitation des iPad apparait contraignant à de nombreux enseignants parce que, contrairement à un système libre et ouvert («open source »), il restreint les applications utilisables à celles disponibles sur le site marchand d’Apple. De plus, le très grand nombre d’applications disponibles requiert des enseignants qu’ils consacrent beaucoup de temps à découvrir, essayer et hiérarchiser les ressources qui semblent adaptées à leurs objectifs pédagogiques. Pour sa part, l’enseignante collaboratrice a invoqué les limites de la capacité de la mémoire de travail du iPad ainsi que l’absence d’un véritable logiciel de traitement de texte. Elle a également souligné les difficultés d’écrire de longs textes sur le clavier virtuel et tactile (bien qu’il soit possible de raccorder un clavier à la tablette). À cet égard, selon les déclarations de l’enseignante, l’usage restreint du iPad dans le cadre d’activités scripturales procède des contraintes liées aux caractéristiques de cet appareil comparativement aux ordinateurs traditionnels (de bureau ou portatifs) qui permettent aux élèves d’avoir à leur disposition un traitement de texte, un logiciel de correction (par exemple Antidote) et des ouvrages de référence (tels que des dictionnaires). Il est à noter, cependant, que jusqu’à présent, l’usage du iPad en production écrite semble plutôt rare (Karsenti et Fievez, 2013) et réservé à la production d’écrits « classiques », monomodaux, et que l’enseignant ne tire pas pleinement profit des potentialités liées à l’outil (notamment ajouter du son, des images fixes ou mobiles, etc.). L’une des pistes à privilégier pour développer de nouvelles activités d’écriture pourrait être celle des productions médiatiques multimodales, par exemple, grâce à des applications telles que iBooks destinées à la création de livres interactifs.

Conclusion

Les résultats et réflexions que nous dégageons modestement de cette étude de cas sont limités : nous sommes dans l’impossibilité de généraliser ou d’élaborer une quelconque théorie à partir du discours analysé. En outre, il n’y a pas eu d’observation des pratiques effectives; notre analyse est menée sur le discours et les pratiques déclarées de l’enseignante. Néanmoins, les constats rejoignent ceux des quelques recherches recensées sur le iPad en contexte scolaire; la tablette constitue un outil pédagogique, mais est moins utilisée dans un but didactique.

Des contraintes organisationnelles (peu de temps pour se préparer à l’utilisation du iPad en classe, pour en connaitre et en explorer toutes les potentialités) ou encore l’identité disciplinaire de chaque enseignant, plus ou moins influencée par les traditions de sa discipline (entrainant ou non une certaine résistance à l’utilisation des tablettes, par exemple), peuvent en partie aider à comprendre ce faible usage de la tablette dans le domaine de la conception didactique. Ainsi, selon Villemonteix et Khaneboubi, les « potentialités présumées des tablettes et leurs particularités ergonomiques suscitent un enthousiasme important en tension avec des réalités pédagogiques complexifiant leur exploitation » (2013, p. 3). De surcroit, la présentation du contenu d’apprentissage est souvent liée à des contraintes techniques, imposées par les applications, plutôt qu’à des choix didactiques (Huber, 2012). Des initiatives telles que la création de la tablette TED (Tablette pour une Éducation Digitale), développée en étroite collaboration avec des enseignants, des élèves, des équipes informatiques, des éditeurs et des chercheurs, pourraient permettre de proposer des tablettes tactiles conçues spécialement pour le contexte scolaire (Devauchelle, 2014).

Il demeure donc nécessaire de nuancer le discours sur les impacts de l’emploi du iPad, et plus largement des technologies numériques. Comme le souligne Crinon, « pour aller encore plus loin dans la généralisation de telle ou telle manière de faire, nous aurions besoin de recherches plus nombreuses sur ces usages et leurs effets » (2012, p. 111), ceux des technologies numériques en général, et des ceux des tablettes — dont le iPad — en particulier. En ce sens, des recherches restent à produire en didactique de la lecture et de la littérature, et plus globalement en didactique du français, afin de mieux comprendre les emplois, les usages et les effets de l’utilisation des tablettes et d’ainsi mieux outiller les enseignants et les élèves dans ce virage technologique que l’école ne peut désormais plus ignorer.

Bibliographie

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Ahr, S., Butlen, M. et Elalouf, M.-L. (2012). Lectures sur écran, lectures sur papier. Le Français aujourd’hui, 178(3), 65–76.

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Brehm, S. et Beaudry, M.-C. (2016). La réception d’un roman augmenté pour adolescents. Revue de recherches en littératie médiatique multimodale, 3(novembre). Repéré à http://www.litmedmod.ca/la-reception-dun-roman-augmente-pour-adolescents

Becchetti-Bizot, C. et Butlen, M. (2012). L’enseignement des lettres et le numérique. Le français aujourd’hui. 178(3), 3–8.

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