Penser l’agir critique en activité de production informationnelle multimodale : une proposition de critères d’évaluation

Julia Bihl
Université catholique de Louvain

Résumé

Cet article vise à théoriser une approche de l’agir critique fondée sur une approche sociocognitive et dispositionnaliste de l’agir compétent et les littératies critiques dans le but de dépasser les limites des approches cognitivistes et positivistes de la pensée critique privilégiées par les institutions publiques, notamment dans le contexte français. L’article présente ensuite une démarche d’élaboration de critères d’évaluation de l’agir critique dans une situation de production médiatique multimodale à visée informative (pour un blogue journalistique scolaire), et détaille la grille d’évaluation conçue afin de discuter de son utilité pour les recherches futures.

Abstract

The aim of this article is to theorize an approach to “critical action” based on a sociocognitive and dispositionalist theory of competent action and critical literacies, with a view to overcoming the limitations of the cognitivist and positivist approaches to critical thinking favored by public institutions, particularly in the French context. The article then presents an approach to developing criteria for evaluating critical action in a situation of multimodal media production for informational purposes and details the evaluation grid designed to discuss its usefulness for future research.

Mots-clés
littératie médiatique; agir critique; production informationnelle; esprit critique; pensée critique.

Keywords
Media literacy; critical action; production of information; critical spirit; critical thinking.
Citer
Pour citer
Bihl, Julia (2024). Penser l’agir critique en activité de production informationnelle multimodale : une proposition de critères d’évaluation. Revue de recherches en littératie médiatique multimodale, 20.

Introduction

Dans les dernières années, les compétences médiatiques des jeunes, notamment en recherche d’information et production numérique, sont devenues une préoccupation majeure. Le rapport ICIL (International Computer and Information Literacy Study) 2018 met en lumière des disparités significatives dans la maîtrise de ces compétences, réparties en quatre niveaux de complexité. Au niveau 1, les élèves démontrent une capacité limitée à utiliser l’ordinateur pour des tâches simples, tandis qu’au niveau 4, ils parviennent à mener des recherches complexes, à évaluer et à créer des produits informationnels avec un contrôle et un jugement critique. Cependant, la majorité des élèves se situe entre les niveaux 1 et 3, ce qui révèle des lacunes importantes, en termes d’autonomie et de discernement face à l’information, en contexte de recherche et plus encore en contexte de production.

Face à ses préoccupations, la littératie médiatique et la littératie médiatique multimodale plus récente ont émergé en tant que domaines cruciaux de l’éducation au XXIe siècle (Lebrun, Lacelle et Boutin, 2013; Russbach, 2016). Un fil conducteur essentiel à ces deux courants de recherche est la dimension critique, qui se trouve au cœur de la littératie médiatique depuis les premières études. Elle figure d’ailleurs au cœur de la définition de P. Fastrez comme « ensemble des compétences caractérisant l’individu capable d’évoluer de façon critique et créative, autonome et socialisé dans l’environnement médiatique contemporain » (2010, p. 36). De manière similaire, les articles fondateurs de la littératie médiatique multimodale expriment leur partage de la visée critique de la littératie médiatique critique (cf. Lebrun et Lacelle, 2011; Lebrun, Lacelle et Boutin, 2012).

S’inscrivant dans la continuité de ces préoccupations, notre projet de recherche, intégré au programme international LM-ados1, rassemble des chercheur·ses spécialisé·es en littératie médiatique, cultures de l’information, littératie médiatique multimodale et didactique du français. Notre contribution se concentre sur une évaluation multiniveau des compétences des élèves en troisième secondaire face à des tâches de recherche d’information et de production multimodale en ligne dans différentes régions du monde. Notre approche méthodologique repose sur une grille de compétences combinant d’une part la matrice de compétences élaborée par Pierre Fastrez et Thierry De Smedt au sein du GReMS (Groupe de Recherche en Médiation des Savoirs), et d’autre part la grille d’évaluation de compétences en LMM élaborée par Nathalie Lacelle et l’équipe du GRLMM (Groupe de Recherches en Littératie Médiatique Multimodale).

Dans ce cadre, nous avons particulièrement axé notre attention sur la dimension critique des diverses compétences évaluées. Ce travail s’est arrimé sur un état de la littérature incluant des travaux scientifiques en littératie critique, ainsi que des documents institutionnels traitant de l’éducation aux médias et de la pensée critique. Il constitue une extension d’un chapitre rédigé dans la thèse de doctorat de l’autrice.

En alignant notre proposition sur des fondements scientifiques et en les contrastant avec des publications politiques récentes sur l’esprit critique, notre objectif est de proposer une perspective théorique pour concevoir et évaluer l’agir critique en contexte médiatique, dans les situations de recherche d’information et de production multimodale. Cela implique une exploration des diverses façons de concevoir la dimension critique aujourd’hui en éducation aux médias, introduisant une approche alternative basée sur le concept d’« agir critique » issu de deux approches théoriques distinctes, l’une en littératie critique, l’autre dans une approche sociocognitive et dispositionnaliste de l’agir compétent. À la différence d’articles scientifiques « classiques », cet article est de nature conceptuelle. Il ne présente pas de résultats empiriques de recherche, mais développe une construction théorique accompagnée de sa justification. L’objectif est d’évaluer la pertinence de la contribution théorique proposée et son utilité pour de futures recherches, tant en ce qui concerne l’évaluation d’activités d’éducation aux médias que la conceptualisation d’évaluations des multiples formes d’« agir critique » qui nécessitent encore d’être définies selon les contextes d’application.

Dans cet article, nous commencerons par démontrer les limites d’une conception positiviste et cognitiviste du rapport entre éducation aux médias et pensée critique qui sous-tend les discours politiques contemporains et défendrons une approche intégrée de la dimension critique dans l’éducation aux médias en montrant sa place centrale dans l’histoire de la littératie médiatique. Nous présenterons alors des éléments de cadrage conceptuel de l’agir critique en activité médiatique. Puis, nous explorerons un exemple d’élaboration de critères d’évaluation de l’agir critique dans une situation spécifique de recherche et production multimodale, à partir des théories en sciences de l’information et de la communication, mettant particulièrement l’accent sur l’évaluation de l’information et la pragmatique de la communication.

1. Les limites des approches positivistes et cognitivistes de l’esprit critique dans le contexte de l’éducation aux médias

Si l’éducation aux médias constitue une éducation critique au sens où Mahmoudi (2022) la définit, c’est-à-dire une démarche émancipatrice visant à « (se) transformer par la déconstruction des évidences et des habitus » (2022, p. 5), cette dimension émancipatrice apparaît peu présente dans les discours institutionnels, notamment dans le contexte français. Parallèlement aux évolutions de l’éducation aux médias, les recherches sur l’esprit critique se sont multipliées, adoptant souvent une perspective cognitiviste et positiviste2. Participant à un groupe de travail en sciences humaines et sociales qui plaide pour une redéfinition de la pensée critique dans le cadre de l’éducation aux médias3, nous nous positionnons en faveur de la conceptualisation d’un agir critique en éducation aux médias. Nous soulignons que, bien que les critiques adressées aux conceptions positivistes et cognitivistes de l’esprit critique soient partagées par le groupe de travail, la conceptualisation de l’agir critique présentée par la suite est de notre propre initiative et n’engage pas le collectif dans son ensemble.

L’approche récente de l’enseignement de l’esprit critique telle que présentée par Pasquinelli et Bronner (2022), dans un rapport au Conseil Scientifique de l’Éducation nationale en France, s’inscrit dans une perspective positiviste, définissant l’esprit critique comme « un ensemble de capacités qui permettent d’évaluer la qualité épistémique des informations disponibles en vue d’une prise de décision, et de calibrer correctement sa confiance en ces informations selon les résultats de l’évaluation » (Pasquinelli, Farina, Bedel, et Casati, 2020). Les approches positivistes de l’esprit critique, comme celles présentées par Pasquinelli et Bronner (2022), insistent sur l’évaluation de la « qualité épistémique » des informations. Toutefois, cette focalisation sur l’évaluation et la détection des « fausses informations » ne rend pas compte de la pluralité des discours et des interprétations qui traversent l’espace médiatique. À ce titre, le collectif critique cette approche réductrice qui, en cherchant à séparer strictement le « vrai » du « faux », néglige l’analyse des rapports de pouvoir et des influences politiques derrière la production et la diffusion de l’information. Pour le groupe de travail, l’accent mis sur les « biais cognitifs » dans les travaux de Bronner (2007) illustre cette tendance à individualiser et dépolitiser l’esprit critique, en négligeant les dimensions sociales et politiques de la construction des savoirs. Or, l’environnement numérique complexifie les attendus d’une pensée critique. Les algorithmes, par leur opacité et leur influence sur nos choix informationnels, illustrent les limites d’une approche uniquement centrée sur la détection des « fake news ». Il ne s’agit plus seulement d’évaluer la fiabilité d’une source, mais de comprendre comment l’information est produite, hiérarchisée et diffusée dans un écosystème numérique opaque (Bosler et al., 2024).

Par ailleurs, en s’appuyant sur des analyses de rapports institutionnels et de ressources pédagogiques, ce groupe démontre que l’esprit critique est souvent présenté comme une « disposition naturelle » inhérente à l’individu, négligeant ainsi les rapports de pouvoir et les inégalités sociales qui influencent l’accès aux savoirs et aux informations. La conception de l’esprit critique comme une disposition à valoriser crée le mythe d’une élite intellectuelle, les « têtes bien faites », capables d’évaluer systématiquement les informations. Cette vision, incluant des caractéristiques telles que l’humilité intellectuelle, le courage intellectuel, l’empathie intellectuelle, l’intégrité intellectuelle, la persévérance intellectuelle, la foi en la raison et le sens intellectuel de la justice (Boisvert, 2000), tend à essentialiser ces qualités, entraînant une discrimination potentielle. Une perspective alternative, basée sur la théorie dispositionnaliste de Lahire en « sociologie psychologique » (2005, 2013), envisage l’esprit critique comme une configuration dispositionnelle à un instant « t », résultant des expériences de vie sédimentées au fil du temps. Cette approche est développée ultérieurement dans cet article, à travers le concept d’agir compétent.

Enfin, cette approche positiviste de l’esprit critique, focalisée sur la réduction de l’incertitude et la recherche de certitudes, pose problème. En accord avec Tricot (2004) et Lehmans (2021), nous pensons qu’il ne s’agit pas tant de réduire l’incertitude que de gérer cette incertitude. L’apprentissage critique devrait encourager une posture réflexive, ouverte et curieuse, et non pas la simple méfiance ou une forme de scepticisme rigide, qui, comme le souligne Andersson (2021), peut paradoxalement renforcer des croyances conspirationnistes plutôt que de développer un jugement éclairé. Un enseignement de la pensée critique axé sur la méfiance et le doute peut paradoxalement aboutir à des résultats contraires à son objectif initial (boyd, 2018). Les étudiant·es formé·es à remettre en question l’autorité et à adopter une attitude sceptique peuvent être plus enclin·es à adhérer à des théories conspirationnistes, plutôt que de développer un esprit critique robuste et un jugement éclairé. En effet, Nygren et Guath (2019) ont démontré que plus les étudiant·es estiment avoir développé leur esprit critique, moins iels sont susceptibles de repérer les fausses informations.

Une dernière critique des approches cognitivistes réside dans leur tendance à négliger les situations et les contextes d’application, favorisant le mythe d’un processus critique universel applicable à toutes les situations (p. ex. Brookfield, 1987 cité par Visscher et Latinis, 2015), alors que la pensée critique dépend de l’information, des connaissances sur l’objet d’étude et de la dimension affective qui peut influencer sa mise en œuvre (ibid.). Nous préconisons donc une approche « infusionniste » (Swartz et al., 1998) intégrant l’enseignement de la pensée critique dans des pratiques basées sur la connaissance des contenus, reconnaissant l’importance de la dimension affective et des connaissances liées au sujet. Nous entendons ainsi déplacer la façon de penser la relation entre éducation aux médias et pensée critique pour nous demander dans quelle mesure l’éducation aux médias constitue une forme d’éducation critique, sur quels objets est-elle critique et comment ?

2. L’éducation aux médias, une éducation résolument critique

Depuis les premières initiatives d’éducation aux médias, la visée critique a occupé une place centrale dans le champ de la recherche (Silverblatt & Eliceiri, 1997; Buckingham, 2003; Burn & Durran, 2007). Cependant, au fil du temps, diverses approches ont émergé, chacune apportant sa propre vision de ce qui mérite un examen critique et définissant les contours de cet examen. Cette richesse d’approches est retracée dans le récit historique de l’évolution de la littératie médiatique, tel que présenté par Marcus Leaning (2019), que nous synthétisons en corrélation avec le développement de l’éducation aux médias vers une posture de responsabilité, déviant progressivement vers la mobilisation d’une capacité critique individuelle.

À ses débuts, l’éducation aux médias était conçue comme un moyen de critiquer les effets directs des médias sur les « idées, attitudes, et modèles de comportements » individuels (Dayan, 1989, p. 93). Originaire des théories critiques marxistes, cette approche adoptait une posture « protectionniste », mettant l’accent sur la compétence à discriminer les médias. Son objectif était d’instruire les enfants et les classes ouvrières pour les préserver des influences perçues comme nocives.

Dans une seconde phase historique, le modèle de démystification a émergé, déplaçant l’attention critique des médias en tant que canaux vers les messages qu’ils véhiculaient. Cette approche visait à se concentrer sur la signification de ces messages et leur cadre interprétatif, considérant le contenu médiatique comme intrinsèquement idéologique. L’enseignement adoptait alors une fonction politique, cherchant à éveiller la conscience critique des étudiant·es sur la construction sociale et les dimensions idéologiques des médias ou de l’information, s’inscrivant dans la lignée de la pédagogie critique.

À partir des années 1990, une troisième approche, axée sur le modèle participatif ou créatif, a émergé en intégrant la théorie constructiviste. Cette évolution était marquée par la généralisation de la technologie numérique, la promotion de la production créative dans l’éducation aux médias, et une approche d’apprentissage par les médias. Cette troisième approche vise à concilier l’analyse critique des textes médiatiques et l’acquisition de compétences pertinentes pour la participation à l’industrie médiatique. Cette dernière approche a pu engendrer une forme de « dissonance cognitive », étant donné qu’elle implique la participation active à l’industrie médiatique tout en maintenant une posture critique à son égard.

Ainsi, la dimension critique de l’éducation aux médias a évolué progressivement des effets des médias en tant que technologies sur l’ensemble de la société de masse à la critique des messages idéologiques diffusés à l’échelle de groupes et de minorités socioculturelles, ainsi qu’à la capacité de s’approprier les nouvelles technologies pour faire du média un instrument d’une « émancipation » individuelle ou collective. Dans le schéma qui suit, nous présentons un regard synthétique des caractéristiques critiques des modèles successifs de la littératie médiatique, élaboré à partir des trois phases identifiées par Leaning (2019), offrant ainsi une vue d’ensemble de l’évolution critique au sein de l’éducation aux médias.

Tableau 1. Schéma des caractéristiques critiques des modèles successifs de la littératie médiatique, élaboré à partir des trois phases identifiées par Leaning (2019)

Après avoir changé de regard sur la place de la dimension critique au sein de l’éducation aux médias, nous souhaitons présenter notre conception de l’« agir critique » propre à une activité médiatique spécifique de production multimodale à visée informative.

3. Conceptualisation de l’agir critique à partir de deux ancrages théoriques : littératies critiques et agir compétent

En opposition à la conception cognitiviste et positiviste de l’esprit critique, notre construction théorique se fonde sur deux ancrages théoriques distincts : d’une part, les approches de la pédagogie critique soulignant la visée émancipatrice sans réduire la compétence critique à l’évaluation épistémique, d’autre part l’approche théorique de « l’agir compétent » (Le Boterf, 2017), présentée plus bas, qui envisage l’agir de façon située, en restituant la dimension émotionnelle liée à cet agir situé, au départ du triptyque du savoir-agir, vouloir-agir et pouvoir-agir.

3.1. Ancrage dans les études en littératie critique

Notre conception de la démarche d’enquête critique se démarque des approches institutionnelles de la pensée critique par son ancrage théorique dans la pédagogie critique de Paulo Freire (1974). La pédagogie critique vise à promouvoir une éducation libératrice qui encourage la conscientisation et la transformation sociale. En cela, la littératie critique se distingue de la littératie dite traditionnelle. Alors que la littératie traditionnelle vise l’intégration sociale à travers le langage, la littératie critique intègre l’apprentissage de la lecture et de l’écriture dans un processus de conscientisation que son expérience est construite historiquement dans des relations de pouvoir spécifiques (Anderson et Irvine, 1993 cités par Shor, 1999).

Dans la continuité de la littératie critique, et due à l’évolution technologique de notre environnement contemporain, la littératie médiatique critique s’est développée dans les années 2000. Celle-ci englobe la compréhension des textes médiatiques en tant que pratiques sociales et culturelles, la participation médiatique critique qui encourage les individus à s’engager dans la création de médias pour exprimer leurs propres voix, et la réflexion critique sur les messages médiatiques pour discerner les intentions, les perspectives et les influences culturelles (Kellner et Share, 2005, 2007). Les chercheur·ses en littératie médiatique soulignent notamment l’importance de la réflexion sur le rôle des médias dans la société, la construction de la réalité et la représentation culturelle. Ils encouragent les apprenant·es à s’interroger sur la manière dont les médias façonnent nos perceptions et nos croyances, ainsi qu’à reconnaitre leur propre positionnement en tant que consommateur·rices et producteur·rices de médias. Si nous revenons à l’historique de la place de la critique dans la littératie médiatique décrite en première partie de cet article, cela peut nous permettre de distinguer trois orientations possibles du questionnement critique selon qu’il porte sur : les effets des technologies médiatiques sur le public; le caractère idéologique, culturellement et socialement situé, des messages véhiculés par les médias; le caractère idéologique socialement et culturellement situé des usages médiatiques. Nous verrons plus bas que dans le contexte de notre recherche LM-ados, l’agir critique porte plutôt sur le second type de questionnement envers les messages médiatiques. Pour d’autres activités d’éducation aux médias, ce peut être le premier type de questionnement qui soit privilégié (cf. p. ex., les travaux de Wuyckens (2023) sur l’utilisation du design fiction en classe pour mettre les étudiant·es dans une démarche d’enquête critique), ou le troisième (cf. p. ex. les travaux de Claes et Philipette (2020) sur les usages critiques des algorithmes de recommandation).

3.2. L’agir critique comme forme d’agir compétent : cadre théorique

Notre conception de « l’agir » critique provient d’un emprunt de la notion d’agir compétent que nous faisons à deux spécialistes, Y. Le Boterf et D. Masciotra (cf. Le Boterf, 2017; Masciotra et Medzo, 2009; Masciotra, 2017). Nous reprenons notamment le triptyque de l’agir compétent de Le Boterf (2005) qui étend l’idée d’agir compétent au-delà du seul savoir-agir (privilégié par l’approche par compétences4 (cf. Tardif, 2006)), intégrant le pouvoir-agir et le vouloir-agir. Ce triptyque permet de considérer l’influence de la situation, des relations de pouvoir, et des émotions simultanément. Le concept d’agir compétent met en lumière la volatilité et la fragilité de la manifestation d’une compétence, toujours située. Adossé à une approche énactiviste de la compétence, il se concentre sur le processus plutôt que sur le produit fini, s’interrogeant sur « Que ferait une personne pour agir avec compétence dans cette situation ? » (Jonnaert et al., 2006)

Notre intérêt se porte sur les facteurs expliquant le processus de l’agir critique en contexte d’activité. Pour cela, nous empruntons à P. Carré (2005, 2016) son approche combinant la sociologie dispositionnaliste de Lahire et l’approche sociocognitive de Bandura. Cette approche analyse l’agir critique comme un processus résultant d’un schéma intégratif du comportement humain, englobant des facteurs dispositionnels, comportementaux et sociaux. La dimension du pouvoir-agir est mise en évidence, explorant les effets de contrainte de l’environnement et du contexte dans la situation vécue par la personne en devenir. Cette approche diverge de l’approche cognitiviste de l’esprit critique essayant de définir une compétence générique et des traits de personnalité associés, en concevant l’agir critique comme un processus résultant d’un schéma intégratif du comportement humain englobant facteurs dispositionnels, comportementaux et sociaux5 (Carré, 2016).

Cette approche de l’agir compétent se situe ainsi entre les approches cognitivistes qui tendent à définir des compétences génériques et des traits de personnalité à développer, et les approches critiques-culturelles, refusant toute forme d’évaluation normative. Entre ces deux perspectives, l’agir compétent permet de reconnaitre que toute pratique ne se vaut pas, que c’est la qualité de la pratique qui produit l’expertise (Bailin, Case, Coombs & Daniel, 2010). Il s’agit d’élaborer des critères d’évaluation de ces pratiques situées pour définir le savoir-agir attendu, puis d’observer quand (si) l’agir situé des apprenant·es répond à ces attentes, l’objectif final de notre thèse étant de comprendre les conditions de pouvoir-agir et de vouloir-agir qui favorisent l’expression du savoir-agir en situation.

4. Exemple d’application d’une évaluation de l’agir critique en contexte de production informationnelle multimodale

Dans le cadre de notre enquête au sein du groupe LM-ados, nous avons conçu une activité médiatique visant à stimuler l’agir critique des adolescent·es. L’activité médiatique proposée, composée de 10 sessions de cours, consistait en effet à leur demander de produire un article multimodal explicatif à partir d’une recherche d’information sur un sujet de leur choix. Leur site WordPress se composait de deux pages distinctes : un document de collecte dans lequel on leur proposait de déposer les informations qu’iels recueillaient au cours de leur recherche, et la page de leur article dans laquelle iels devaient composer leur article multimodal final, contenant du texte (minimum 250 mots), au moins trois images, deux hyperliens et une vidéo. L’usage du document de collecte n’a pas été uniforme, rendant impossible l’évaluation de leur processus de sélection de documents. Notre évaluation s’est alors concentrée sur les traces de l’activité médiatique telles qu’elles apparaissaient dans leur production finale. Un exemple de production est fourni à la fin de l’article afin que le lectorat puisse s’y référer pour l’application des critères d’évaluation proposés.

Dans notre approche, les élèves avaient la liberté de choisir leur sujet. Certain·es ont opté pour des sujets de société exigeant une compréhension approfondie du contexte institutionnel et des enjeux sociaux, tandis que d’autres ont choisi des sujets d’intérêt personnel visant simplement à partager des informations « neutres ». Ces choix ont conduit à des démarches critiques différentes, particulièrement vis-à-vis de l’évaluation de la fiabilité et de la pertinence des documents recueillis par rapport au contexte institutionnel, ainsi qu’aux enjeux de représentation médiatique et culturelle sous-jacents. Toutefois, notre évaluation ne requiert pas des élèves une explicitation de leur posture réflexive concernant la manière dont leur représentation du sujet traité est influencée par le traitement médiatique prédominant, et elle ne permet d’ailleurs pas d’évaluer ce point. L’évaluation des productions des élèves se concentre sur la mesure de leur capacité à démontrer la fiabilité de ce qu’iels énoncent et la pertinence de leurs énoncés en tenant compte du contexte institutionnel et des enjeux liés aux représentations médiatiques et culturelles. En d’autres termes, notre évaluation ne vise pas directement à évaluer leurs connaissances sur les problèmes sociaux et le rôle des médias dans leur construction. Cependant, l’évaluation prend en compte cette connaissance comme une ressource pour l’action, ressource que les élèves emploient dans leur agir critique en situation. C’est grâce à cette conscience critique que les élèves sont attentif·ve·s à assurer la fiabilité et la pertinence des énoncés qu’iels utilisent et/ou produisent. Ainsi, nous nous penchons sur la manière dont les étudiant·es mettent en œuvre des critères d’un agir critique, critères que nous avons élaborés en tenant compte de la situation médiatique examinée. Ces critères sont détaillés et justifiés dans la présente section.

4.1. Processus d’identification des critères d’évaluation de l’agir critique dans l’activité médiatique proposée

Dans le cadre de notre démarche méthodologique, nous avons combiné une approche hypothético-déductive et une approche empirique. Dans un premier temps, avant même l’enquête de terrain, nous avons minutieusement décomposé le processus d’activité médiatique en étapes (p. ex. formuler une requête concernant les informations relatives au sujet défini, puis examiner la liste des résultats de recherche, puis sélectionner un ou plusieurs documents ou sites pertinents parmi les résultats de recherche). À partir de ces étapes, nous avons décomposé des actions constitutives de chaque étape de recherche ou production, puis nous nous sommes servi des grilles d’évaluation respectives du GReMS et du GRLMM et de ressources bibliographiques complémentaires sur l’évaluation de l’information (p. ex., Serres (2012), Boubée (2018), Sperber et Wilson (1989)), sur la production d’hypermédia (p. ex., Lacelle et al., 2016; Cailleau, et al., 2010; Edwards-Grove, 2010), et sur la rédaction de texte explicatif (p. ex., Garcia-Debanc, 1988; Dolz-Mestre, Rosat & Schneuwly, 1991), pour identifier l’ensemble des compétences qui nous paraissaient de première importance pour réussir l’activité (opération de sélection).

L’évaluation de l’activité ne pouvait porter sur l’entièreté des étapes de l’activité étant donné que nous n’avions pas accès à toutes les traces de l’activité des apprenant·es. Nous avons donc décidé de concevoir une évaluation au départ des productions, comme principales traces de l’activité. La seconde partie de la conception de l’évaluation s’est donc faite empiriquement, au départ des productions des élèves. C’est dans l’observation même des productions que nous avons été amenée à resserrer notre questionnement sur des critères d’évaluation de l’agir critique en production.

La matrice d’évaluation élaborée dans le cadre de notre thèse propose une entrée par l’intention de communication et une autre par les moyens de communication utilisés de façon complémentaire pour exprimer cette intention. 

 Intentions / MoyensTexteMultimodalitéDesign
RECHERCHEUtiliser des contenus fiables   
Choisir des contenus pertinents   
PRODUCTIONDémontrer la fiabilité de son contenu   
Exprimer du contenu pertinent   
Adapter son contenu au destinataire   
Tableau 2. Vue succincte des critères d’évaluation de l’agir critique en situation d’activité de recherche et production d’un texte multimodal à visée informative

Dans cette matrice, le moyen « Texte » correspond aux contenus textuels et à leur structure d’ensemble, la « Multimodalité » renvoie aux contenus et agencements multimodaux, c’est-à-dire non seulement aux médias combinant plus d’un mode utilisé dans l’article (p. ex. les vidéos, images, mais aussi les hyperliens), ains que leur articulation avec le texte proche (cohésion) et la structure d’ensemble (cohérence). Enfin, le terme « Design » renvoie à l’architecture spatiale et graphique de l’article (mise en page, polices, tailles d’écriture, couleurs, etc.).

À partir des cinq intentions (visibles dans la matrice) identifiées comme répondant au critère d’un agir critique en situation, nous avons proposé une conceptualisation de ces critères que nous détaillons ci-dessous.

4.2. Les critères d’évaluation de l’agir critique en recherche

Les critères d’évaluation de l’agir critique, dans le contexte de recherche d’information proposé aux élèves par notre dispositif d’enquête, ont été élaborés à partir d’une revue de la littérature des travaux en sciences de l’information et de la communication consacrés à l’évaluation de l’information. À partir des différentes notions étudiées dans ces travaux, telles la crédibilité, l’autorité, la qualité de l’information et les différents types de pertinence mis en avant, nous avons finalement décidé de retenir deux critères principaux d’évaluation6 : l’évaluation de la fiabilité et l’évaluation de la pertinence, ce deuxième critère se distinguant en deux sous-critères, l’évaluation de la pertinence-sujet et l’évaluation de la pertinence-besoin.

4.2.1. L’évaluation de la fiabilité de l’information

Il peut paraître étonnant au premier abord de préférer le critère de fiabilité à celui de crédibilité qui est l’une des notions les plus usitées dans la littérature scientifique (Serres, 2012; Boubée, 2018). La crédibilité se définit comme « qualité de ce qui est croyable, possible ou vraisemblable » dans le Dictionnaire de la langue française (Serres, 2012, p. 115). La notion de crédibilité est semblable à celle de fiabilité, fiable signifiant « digne de confiance ». Cependant, la notion de crédibilité inclut la racine du terme « croyance », ce qui crée une « ambiguïté entre la confiance et la croyance, car ces deux notions forment finalement la base de la crédibilité : à la fois ce qui est “digne de confiance” et ce qui est “digne d’être cru” » (Serres, 2012, p. 116). Il n’existe pas de définition précise, claire et univoque de la crédibilité des sources ou de l’information. Hilligoss et Rieh (2008) ont recensé la variété de significations que pouvait prendre le jugement de crédibilité des individus selon qu’iels mettent l’accent sur : la véracité (truthfulness, en termes d’exactitude, de validité, de précision et de légitimité dans quelques cas); la « croyabilité » (believability), c’est-à-dire le caractère croyable (ou incroyable) des faits rapportés; la fiabilité (trusthworthiness, de la source d’information le plus souvent); l’objectivité (objectivity), soit la représentation des différents aspects d’un problème; et enfin la fiabilité (reliability) en relation avec la vérifiabilité de l’information. Parmi ces perspectives, nous écartons la véracité et l’objectivité qui renvoient au paradigme positiviste, et lui opposons la notion d’intersubjectivité. La notion de « croyabilité » quant à elle nous semble risquée, car le caractère plausible d’un fait n’a pas toujours de relation avec sa véracité. De plus, ce qui est croyable peut varier d’une personne à l’autre. Ainsi, une information peut sembler plausible pour certain·es, tandis qu’elle parait peu crédible pour d’autres.

Après avoir écarté ces notions, le critère le plus objectivable nous semble être celui de la fiabilité, englobant à la fois le jugement de fiabilité de la source (trusthworthiness) et l’évaluation de la vérifiabilité de l’information (reliability), notamment en la comparant avec d’autres sources. Si la vérifiabilité de l’information implique de croiser les informations recueillies avec les informations issues d’autres sources jugées fiables, la façon d’opérer le jugement de fiabilité d’une source d’information reste à définir. Pour ce dernier point, jusqu’à présent, la définition de l’autorité énonciative de Broudoux (2007) permettait d’apporter des éléments de réponse à partir de l’autorité des auteur·rices jugée selon leur réputation, par les pairs, les autorités informelles ou institutionnelles, le nombre de produits publiés, leur qualité, leur notoriété actuelle. Dans notre modèle d’évaluation, nous avons intégré également le critère de l’identification de l’intention de communication de l’énonciateur·rice.

Pour évaluer adéquatement la fiabilité de documents, l’élève doit alors savoir :

  • Évaluer la fiabilité de la source en examinant l’intention de communication du·de la producteur·rice de l’information ainsi que l’autorité des auteur·rices/producteur·rices selon leur réputation, par les pairs, les autorités informelles ou institutionnelles, le nombre de produits publiés, leur qualité, leur notoriété actuelle.
  • Vérifier l’information en la croisant avec des informations issues de sources jugées elles-mêmes fiables (sur le même processus que ci-dessus).

4.2.2. L’évaluation de la pertinence (sujet et besoin)

Cette définition de la pertinence nous permet de mieux cerner le jugement de pertinence que nous souhaitons évaluer en nous référant à la typologie de Dalbin (2002, cité par Serres, 2012). Dalbin a regroupé les différents types de pertinence en trois ensembles, selon leur objet : la pertinence orientée système (des mesures de classement, d’indexation), utilisateur·rice (de la formulation de la requête, de la présentation des résultats, du document par rapport au besoin) ou thème (du document par rapport au sujet ou du choix de l’outil par l’utilisateur·rice). Étant donné que notre évaluation part des productions finies des élèves, nous avons vérifié deux types de pertinence : au sein de la pertinence-thème, la pertinence-sujet, et au sein de la pertinence utilisateur·rice, la pertinence-besoin.

La pertinence-sujet renvoie à la valeur d’un document ou d’une information par rapport au thème traité, autrement dit la pertinence du contenu lui-même. Ce critère renvoie à la définition située en théorie pragmatique de la pertinence :

Un document trouvé lors d’une recherche s’avérera pertinent sous ces deux conditions : dans la mesure où il aura des « effets cognitifs positifs » dans le contexte donné, c’est-à-dire s’il apporte des éléments nouveaux adaptés au monde cognitif de l’individu et au contexte précis ; et dans la mesure où « l’effort cognitif » pour le comprendre, l’interpréter et l’intégrer ne sera pas trop élevé. C’est bien ce rapport entre l’effort de traitement et l’effet cognitif qui détermine le jugement de la pertinence : une information ne demandant aucun effort de traitement (car déjà connue par exemple) ne sera pas pertinente, car elle n’aura aucun effet cognitif. À l’inverse, une information présentant un caractère de nouveauté radicale, contraire à tout le système cognitif d’un individu, inassimilable ou demandant un effort cognitif trop important, ne sera pas non plus pertinente. (Sperber et Wilson, 1989, cités par Serres, 2012, p. 157)

La pertinence-besoin quant à elle renvoie à la pertinence du document par rapport au besoin d’information de l’utilisateur·rice, la question sous-jacente est « les documents trouvés répondent-ils vraiment aux besoins de l’usager·ère ? », sachant qu’un document pertinent, par rapport à sa représentation dans le système, la requête, le thème, le plus crédible et répondant à tous les critères de qualité (pertinence-sujet), peut s’avérer non pertinent par rapport au besoin d’information de l’utilisateur·rice, au contexte et à la tâche.

Pour résumer, afin d’évaluer la pertinence d’un document, d’un outil, un·e adolescent·e doit alors savoir :

  • caractériser son besoin d’information et le formuler;
  • identifier la correspondance entre les informations d’un document, un outil et le besoin d’information décrit a priori (au stade de l’examen des résultats);
  • évaluer en quoi les informations contenues dans le document permettent de réduire l’incertitude relative au problème posé par l’élève, de remplir l’objectif fixé ou l’aider dans sa prise de décision;
  • évaluer en quoi les informations du document permettent de répondre à ses intentions, ses buts et motivations.

4.3. Les critères d’évaluation de l’agir critique en production

Dans le cadre de l’évaluation des productions des élèves, nous n’avons pas pu évaluer directement les critères d’évaluation de l’agir critique en recherche. Cependant, la formulation de ces critères nous a permis de réfléchir à leurs équivalents en production médiatique multimodale à visée informative.

Pour rappel, l’élaboration des critères d’évaluation des productions résulte d’un travail conceptuel collectif au sein de LM-ados. Il convient de souligner que la pragmatique de la communication relève de l’expertise de Pierre Fastrez au sein de notre consortium. Grâce à sa contribution, nous avons pu conceptualiser trois critères d’évaluation des productions, en nous appuyant sur la pragmatique. La pragmatique de la communication se consacre à l’étude de la compréhension des actes de communication en contexte et à la production d’actes de communication poursuivant des objectifs (purposes) déterminés. Du point de vue du·de la locuteur·rice comme de celui de l’allocutaire, la question pragmatique porte sur la compréhension des intentions motivant les actes de communication, des effets produits par ces actes sur leurs destinataires, des connaissances supposées mutuellement partagées par les communicant·es, nécessaires à la compréhension des actes de communication, de la pertinence de ces actes de communication dans le contexte dans lequel ils sont produits, des interprétations alternatives dont peuvent faire l’objet ces actes, et de la relation entre les communicant·es telle qu’elle est posée au travers des marques d’énonciation. À partir de ces « composantes » de la pragmatique de la communication, nous avons distingué deux principaux macro-critères d’évaluation, l’évidentialité (en miroir de l’évaluation de la fiabilité) et la pertinence énonciative (en miroir de l’évaluation de la fiabilité en recherche), leurs critères d’évaluation, lisibles dans le tableau ci-dessous, et leurs descripteurs, précisés plus bas.

 TEXTEMULTIMODALITÉDESIGN
EvidentialitéMettre en évidence la source des énoncésRendre manifeste la fiabilité de ces énoncés
Pertinence énonciativePertinence-intention :Rendre l’énonciation pertinente au regard du thème – contexte d’énonciationRendre l’énonciation pertinente au regard de l’intention de communication
Pertinence-destinataire :Créer un rapport effet/effort cognitif positif pour le·a destinataireCapter l’attention du·de la destinataire
Tableau 3. Vue synthétique des critères d’évaluation de l’agir critique en production informationnelle multimodale

4.3.1. Le critère de l’évidentialité

L’expression « évidentialité » est principalement utilisée dans le domaine de la linguistique. Elle fait référence à la manière dont une langue indique la source de l’information ou la base sur laquelle une déclaration est faite (Dendale et Tasmowski, 1994). En d’autres termes, l’évidentialité concerne la manière dont une langue exprime si l’information est connue directement par le·a locuteur·rice, si elle est inférée, rapportée par quelqu’un d’autre, ou si elle est basée sur une déduction logique. Cela peut être réalisé à travers différents moyens linguistiques, tels que des marqueurs grammaticaux spécifiques, des verbes de perception, ou d’autres éléments de la langue qui indiquent la provenance de l’information. L’évidentialité est un concept important dans la typologie linguistique et la pragmatique, car il peut varier considérablement d’une langue à une autre, reflétant les différentes façons dont les langues organisent et expriment l’information et la source de la connaissance. Le terme est employé ici hors de son acception disciplinaire originale pour offrir un pendant en production au concept de fiabilité en réception. Il s’agit d’un premier travail de théorisation qui doit être poursuivi. Pour l’heure, nous définissons la pragmatique de l’évidentialité comme critère permettant d’évaluer la compétence à rendre manifeste la fiabilité de ce que l’on énonce par les différents moyens suivants :

  • établir son degré d’expertise sur le sujet;
    • renvoyer le·a lecteur·rice aux énoncés-sources;
    • gérer la polyphonie : transparence sur ce qui est copié-collé vs ce qui est reformulé vs ce qui est original;
    • rendre manifeste ses citations;
    • identifier les auteur·rices de ses sources;
    • rendre manifeste la fiabilité de ses sources;
    • rendre manifeste sa propre neutralité, ou sa subjectivité (p. ex. opinions), et celle de ses sources.

À partir de cette liste de sous-critères d’évaluation et au regard des productions des élèves, nous avons décliné un certain nombre de descripteurs au regard du texte, de la multimodalité et de l’architecture spatiale et graphique de l’article.

 TEXTEMULTIMODALITÉDESIGN
Évidentialité 1 : Mettre en évidence la source des énoncés– Établit son degré d’expertise sur le sujet
– Renvoie le·a lecteur·rice aux énoncés-sources
– Gère la polyphonie : transparence sur ce qui est copié-collé vs ce qui est reformulé vs ce qui est original
– Rend manifeste ses citations
– Identifie les auteurs·rice de ses sources
– Permet d’identifier les auteur·rices de ses sources
– Permet de renvoyer le·a lecteur·rice aux énoncés-sources
– Renvoie le·a lecteur·rice aux énoncés-sources
– Contribue à gérer la polyphonie : transparence sur ce qui est copié-collé vs ce qui est reformulé vs ce qui est original
– Contribue à rendre manifeste les citations
Évidentialité 2 : Manifester la fiabilité de ces énoncés– Rend manifeste la fiabilité de ses sources
– Rend manifeste sa propre neutralité, ou sa subjectivité (p. ex. opinions), et celle de ses sources
Contribue à rendre manifeste la fiabilité de ses sources (preuve par l’image ou par renvoi à une source fiable)Contribue à lier les énoncés à leur source (par un marqueur visuel, la proximité spatiale, un système de classement ou un hyperlien)
Tableau 4. Critères et descripteurs de l’évidentialité par prisme d’observation (texte, multimodalité, design)

4.3.2. Le critère de la pertinence énonciative

Le terme de « pertinence énonciative » n’est pas encore conceptualisé, nous cherchons à le définir en tant que critère de pertinence en situation d’énonciation. En linguistique, l’énonciation est l’acte individuel de production d’un énoncé par un·e énonciateur·rice, adressé à un·e destinataire (l’énonciataire), dans certaines circonstances. En dehors de la linguistique, le concept de situation d’énonciation peut également être utilisé dans des contextes plus larges liés à la communication et à la compréhension du langage, par exemple, dans des analyses de discours, des études de communication interculturelle. En ce sens, nous concevons la pertinence énonciative comme la compétence à énoncer des choses pertinentes en regard de l’intention sociale.

Dans le critère d’évaluation de la pertinence expliqué plus haut, nous avons distingué deux types de pertinence : la pertinence-sujet et la pertinence-besoin. Dans le cadre de la pertinence énonciative, la pertinence-sujet se voit affecter en miroir la pertinence-intention. Concernant la pertinence-besoin, en recherche, nous conceptualisons la pertinence-destinataire en miroir en production. Pour conceptualiser ces deux types de pertinence, nous nous appuyons sur les travaux de Charaudeau (2011). Lorsque Charaudeau s’est penché sur le métier du journalisme, il a fait état de la dualité entre deux objectifs : premièrement, celui de « faire savoir », c’est-à-dire la visée de l’information proprement dite, visant à produire un objet de connaissance, en suivant une logique civique qui consiste à informer les citoyen·nes; et deuxièmement, celui de « faire ressentir », soit la visée de captation, visant à produire un objet de consommation commerciale, selon une logique marchande visant à attirer un public plus large pour survivre à la concurrence (2011, p. 70). Dans la lignée de sa réflexion, nous avons décliné deux types de pertinence énonciative : la pertinence-intention qui garantit que l’énonciation est en cohérence avec le thème et l’intention de communication, et la pertinence-destinataire qui assure la compréhensibilité et l’accessibilité de la communication pour le destinataire, ainsi que la captation de son attention.

 TEXTEMULTIMODALITÉDESIGN
Pertinence-intention– Structure (introduction, plan, conclusion) adaptée à l’intention de communication
– Correspondance contenus textuels à la thématique de l’article
– Réponse des contenus textuels à l’intention de communication
– Procédés textuels adaptés à l’intention de communication
– Ton adapté tout au long de l’articleAnnonce explicite de l’intention
– Ressources multimodales en lien avec la thématique
– Les contenus multimodaux et leur agencement contribuent à répondre à l’intention de communication
– L’architecture spatiale et graphique met en valeur la thématique de l’article
– L’architecture spatiale et graphique met en valeur les contenus les plus importants au regard de l’intention de communication
Pertinence-destinataire– Extraits textuels et vocabulaire compréhensible (pas d’explications inutiles ou d’ellipses gênant la compréhension)
– Captation du destinataire (adresse directe ou stratégies énonciatives)
– Ressources adaptées au niveau du·de la destinataire et agréables à consulter (confort de lecture)
– Ressources captant l’attention du·de la destinataire par divers procédés contribuant à montrer l’intérêt du sujet
– Architecture spatiale, mise en forme ergonomique, harmonieuse visuellement, guidant le parcours de lecture
– Architecture spatiale et mise en forme captant l’attention par esthétisme, originalité (interpellant)
Tableau 5. Critères et descripteurs de la pertinence énonciative par prisme d’observation (texte, multimodalité, design)

Conclusion

Cet article propose une conceptualisation théorique de l’agir critique en littératie médiatique, adoptant une approche divergente vis-à-vis des paradigmes cognitivistes et positivistes de l’esprit critique et de la pensée critique. La visée de cette proposition transcende la quête de vérité traditionnelle pour promouvoir la gestion de l’incertitude, opérant un changement de paradigme dans l’enseignement de l’esprit critique à travers l’approche de l’agir compétent et des littératies critiques.

La matrice d’évaluation proposée décompose l’agir critique selon trois axes fondamentaux : texte, multimodalité, et design. Les macrocritères d’évaluation clés englobent l’évaluation de la fiabilité et de la pertinence pour la partie recherche de l’activité, et l’évidentialité et la pertinence énonciative pour la partie production, offrant une structure pour évaluer l’agir critique démontré en situation. Des critères d’évaluation spécifiques sont proposés pour chacun de ces macrocritères, accompagnés de descripteurs reposant sur la littérature scientifique en sciences de l’information et de la communication, en pragmatique de la communication, et en linguistique. Ces éléments sont proposés comme premiers jalons conceptuels pour discussion et approfondissement auprès de la communauté scientifique et pourraient servir d’inspiration pour l’évaluation d’autres formes d’agir critique dans des contextes différents.

Cependant, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour consolider les concepts empruntés à la linguistique et ainsi les intégrer pleinement dans la pragmatique de la communication. D’autres travaux mériteraient également d’être entrepris pour mieux positionner nos critères d’évaluation par rapport aux conceptualisations récentes de la crédibilité (Geay, 2023).

Malgré cela, l’aspect le plus significatif de cette proposition réside dans l’exploration des critères d’un agir critique, non pas en phase de recherche, comme cela est traditionnellement pratiqué dans les études sur la pensée critique, mais en contexte de production. À cet égard, l’article entend contribuer à la didactique de la littératie médiatique multimodale en proposant une façon concrète d’intégrer la visée émancipatrice liée à la littératie médiatique critique dans nos dispositifs de recherche.

Notes
  1. Littératie médiatique des adolescents (LM-ados) est un projet de recherche collaboratif international mené par Pierre Fastrez, Julia Bihl et Thibault Philippette de l’Université catholique de Louvain, Nathalie Lacelle et Eve Gladu de l’Université du Québec à Montréal, Eric Delamotte et Catherine Delarue-Breton de l’Université de Rouen-Normandie, Christophe Ronveaux et Denise Sutter Widmer de l’Université de Genève. Ce projet s’attache à élaborer et à valider des outils d’évaluation des niveaux de littératie médiatique des adolescent·es dans les domaines de la recherche d’information et de la création médiatique afin d’évaluer ces niveaux dans des établissements scolaires des quatre régions participantes : Belgique francophone, Québec, Normandie en France et Suisse romande. Il a pour objectifs de proposer un modèle de la littératie médiatique articulant ses niveaux élémentaires (savoirs, savoir-faire et savoir-être) et ses niveaux plus avancés (compétences), de contribuer à élucider la relation entre les niveaux de littératie médiatique mesurés, les niveaux auto-déclarés par les participant·es, les pratiques médiatiques de ceux·lles-ci, et différentes variables sociodémographiques. ↩︎
  2. Cf. Céline Schöpfer et Florian Cova, (2024). « Histoire du concept d’esprit critique (Philosophie et Esprit Critique) », Empeiria, Université de Genève, disponible en ligne. ↩︎
  3. Le groupe de travail « Critique de l’esprit critique » est un collectif interinstitutionnel et interdisciplinaire fondé en 2021, réunissant 19 enseignant·es-chercheur·ses et doctorant·es d’universités françaises et belges. Issu·es de disciplines variées telles que les sciences de l’information et de la communication, les sciences de l’éducation, les sciences du langage, la science politique et la didactique des sciences, les membres de ce groupe se sont donné pour objectif d’analyser de manière critique les rapports institutionnels et pédagogiques relatifs à l’éducation à l’esprit critique. Leurs travaux incluent l’organisation de plusieurs journées d’étude ainsi que la publication d’un rapport grand public en 2024, en collaboration avec l’Observatoire des Pratiques Socio-Numériques. Les détails du travail de recherche effectué sont fournis dans Bosler et al. (2024). ↩︎
  4. Dans l’approche par compétences, Tardif définit la compétence comme « un savoir-agir complexe qui prend appui sur la mobilisation de la combinaison efficace d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations » (2006, p. 15). ↩︎
  5. Cette conceptualisation correspond d’ailleurs bien avec la définition originelle de la pensée critique fournie par Glaser (1941) qui distinguait une composante dispositionnelle (attitude), une composante épistémique (des connaissances de méthode de recherche et de raisonnement logique) et une habileté à appliquer ces méthodes (compétences). ↩︎
  6. Certains critères d’évaluation, tels que la qualité de l’information, ont été exclus car ils sont souvent liés à des attentes journalistiques, qui ne sont pas nécessairement pertinentes pour évaluer l’information dans le cadre d’une recherche scolaire. À titre  d’exemple, un·e élève pourrait trouver un document utile pour sa recherche même si ce document ne respecte pas tous les critères de qualité journalistique. ↩︎
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